Le candidat du SEP prend la parole à la réunion sur la grève des étudiants au Québec

meetingJerry White lors de la réunion à Montréal

Le candidat du Socialist Equality Party (Parti de l’Egalité socialiste, SEP) pour la présidence américaine, Jerry White, s’est exprimé jeudi soir lors d’une réunion publique à Montréal sur l’importance internationale de la grève de quatre mois des étudiants du Québec. La réunion, organisée par le SEP (Canada), fut tenue pour élaborer une stratégie en vue de la mobilisation de la classe ouvrière contre les attaques perpétrées contre l’éducation publique et contre la répression du gouvernement Charest.

La réunion a attiré plusieurs étudiants venus de différents campus et des travailleurs venus de diverses régions métropolitaines. Le rassemblement a eu lieu la veille de manifestations de masse à Montréal et à Québec. Vendredi, lors d’une manifestation à Montréal qui avait rassemblé quelque 100.000 manifestants, White et des partisans du SEP ont distribué une déclaration sur « La voie à suivre pour les étudiants ».

Avant la réunion, le candidat du SEP fut interviewé par la télévision communautaire de l’université Concordia (CUTV), un réseau géré par les étudiants, et dont les journalistes ont été arrêtés et persécutés par la police pour avoir fait connaître la grève. Le journaliste de CUTV a dit qu’il voulait expressément interviewer un candidat socialiste des États-Unis parce qu’il croyait que la lutte des étudiants devait être guidée par une perspective mondiale plus large.

White a dit au journaliste que sa présence à Montréal n’était pas une distraction de la campagne électorale américaine, mais « exprime l’essentiel de notre lutte pour l’unité internationale de la classe ouvrière et le socialisme ».

Keith Jones, le secrétaire national du SEP (Canada) a présidé la réunion et un autre membre du SEP, Richard Dufour, a présenté le rapport d’ouverture. La réunion s’est tenue en français et en anglais.

interviewWhite interviewé par CUTV

Dufour a commencé en se concentrant sur le caractère international des attaques perpétrées contre les niveaux de vie de la classe ouvrière. La Grèce a-t-il dit, était le « laboratoire de la contrerévolution sociale pour la classe dirigeante de l’Europe, où les marchés financiers imposent une réduction des conditions de vie sans précédent en période de paix ». L’assaut mondialement coordonné contre la classe ouvrière, a-t-il dit, doit recevoir comme réponse le développement d’une contre-offensive internationale de la classe ouvrière basée sur un programme socialiste.

Dufour a expliqué que les syndicats et Québec solidaire (QS) tentaient de détourner la grève étudiante en une campagne pour l’élection du Parti québécois. Le PQ, a-t-il dit, était le deuxième parti de la classe capitaliste québécoise et, lorsqu’il avait été au pouvoir, il avait appliqué des coupes brutales et joué le rôle de briseur de grève à l’encontre des luttes des travailleurs. La CLASSE (Coalition large de l’Association pour une Solidarité syndicale), dont la perspective selon laquelle les protestations forceraient Charest à céder mène elle aussi à un cul-de-sac, s’est elle aussi tournée vers les syndicats et en fin de compte vers le PQ comme solution.

« Seul le SEP a depuis le début une perspective révolutionnaire et explique que les étudiants doivent se tourner vers la classe ouvrière et transformer la lutte pour la défense des droits sociaux et démocratiques en une lutte politique de la classe ouvrière pour le pouvoir et la réorganisation socialiste de la vie économique et politique, dans le but que l’éducation et tous les droits sociaux soient garantis pour tous. »

White a élaboré sur ces différents sujets. « Dans cette lutte, les étudiants du Québec donnent une voix à l’opposition sociale grandissante contre les exigences des banques mondiales et des grandes sociétés. Dans chaque pays, du Canada aux États-Unis, de la Grèce à l’Espagne, les classes dirigeantes sont déterminées à faire payer la classe ouvrière et les jeunes pour l’effondrement du système capitaliste mondial. »

White a poursuivi en disant, « La revendication des étudiants comme quoi l’éducation est un droit social les place dans une situation de conflit avec l’ensemble de l’ordre économique et politique. La réalisation de tel ou tel droit social essentiel, y compris le droit à un emploi sûr et bien rémunéré, des soins de santé, un logement et un avenir exempt de guerre, est avant tout une question de classe, quelle classe détient le pouvoir. »

L’année dernière, l’on a assisté à une multiplication des luttes de classe, de la Tunisie et de l’Égypte, aux grèves générales en Grèce et en Espagne ainsi que des protestations de masse dans l’État du Wisconsin aux États-Unis et contre Wall Street. Ces éruptions ont mis à nu toutes les affirmations quant à la fin de l’histoire et de la lutte de classe après l’effondrement de l’URSS. Mais elles ont aussi révélé au grand jour la crise immense de la direction et de la perspective politique de la classe ouvrière. »

« L’absence en Égypte d’un parti politique de la classe ouvrière qui soit prêt et déterminé à s’emparer du pouvoir a permis à la junte militaire soutenue par les États-Unis à consolider sa dictature. Les soulèvements sociaux du Printemps arabe ont été manipulés par l’impérialisme pour lancer des guerres et mettre en place un régime fantoche en Libye et à attiser une guerre civile sectaire en Syrie. »

« Ici, au Québec, les organisations politiques dans le périmètre de la CLASSE ont rejeté toute lutte pour transformer la grève des étudiants en un mouvement de classe de l’ensemble de la classe ouvrière contre les mesures d’austérité qui sont exigées par Charest, Harper et tous les partis patronaux. Au lieu de cela, elles nourrissent des illusions dans le PQ, qui a appliqué les coupes les plus radicales de l’histoire du Québec, et dans les syndicats qui opèrent comme les policiers du monde du travail pour le compte de la bourgeoisie. »

« Le Parti de l’égalité socialiste aux États-Unis et au Canada s’emploie à résoudre la crise de la direction de la classe ouvrière. Nous intervenons dans les élections américaines pour fournir une alternative politique aux deux partis patronaux, et nous nous opposons à tous ceux qui colportent le mensonge que le Parti démocrate est un moindre mal. »

Après la présentation du rapport principal, il y eut une séance animée de questions et de réponses.

Un membre de l’auditoire a demandé à White d’expliquer la position du SEP concernant le mouvement Occupy Wall Street. White a dit que le mouvement avait initialement attiré du soutien parce qu’il avait réussi à rejoindre la profonde colère contre l’inégalité sociale croissante. Toutefois, la politique majoritairement anarchiste de ses dirigeants et leur interdiction de tout débat programmatique et politique l’ont rendu vulnérable à une prise de contrôle par les syndicats et finalement à sa transformation en guère plus qu’un appareil pour la réélection du président Obama.

Plutôt qu’une lutte pour mettre un terme au capitalisme, a-t-il dit, le programme du mouvement est guidé par les intérêts d’éléments de la classe moyenne aisée qui sont contrariés par l’actuelle distribution de la richesse et déterminés à obtenir pour eux-mêmes une part plus grande.

Un travailleur qui avait séjourné à El Salvador dans les années 1980 lorsque les escadrons de la mort soutenus par les États-Unis avaient mené une contre-révolution sanglante contre des adversaires politiques a demandé si le SEP envisageait de se joindre à d’autres organisations « progressistes ».

« Le SEP et le Comité international de la Quatrième Internationale, a dit White, luttent pour tirer les enseignements les plus cruciaux des luttes de la classe ouvrière et du mouvement socialiste au cours de ces 150 dernières années. Nous défendons une stratégie internationaliste et socialiste contre toutes ces forces qui ont rejeté le marxisme en recherchant divers substituts pour la construction d’un parti révolutionnaire de la classe ouvrière, que ce soit par la glorification de la guérilla paysanne et du castrisme, l’adaptation au stalinisme et à la social-démocratie ou à diverses formes de la politique identitaire et de la « nouvelle gauche » aux États-Unis et en Europe.

Ces forces ont été transformées en piliers de « gauche » de l’establishment politique bourgeois, a dit White. « En ce qui concerne notre parti, notre lutte longue de plusieurs décennies pour les principes de l’internationalisme et pour la politique de l’indépendance de la classe ouvrière nous a préparés à conférer une expression consciente et à donner une direction aux soulèvements de masse des travailleurs et des jeunes de nos jours. Nous ne sommes pas en quête de “progressistes” pour les rejoindre, mais pour construire un parti politique de la classe ouvrière au Canada, aux États-Unis et internationalement prêt à prendre le pouvoir politique. »

FelixFélix

Un jeune étudiant, Félix, a posé une question sur la position du SEP pour réclamer l’indépendance du Québec et sur l’insistance du parti pour que la lutte des étudiants dépasse les frontières du Québec.

Dans sa réponse, Keith Jones a souligné que les travailleurs partout dans le monde étaient confrontés à des problèmes communs, découlant de la crise du capitalisme mondial et que l’unique perspective viable était celle basée sur l’unification des luttes internationales de la classe ouvrière.

Il a expliqué comment le regain de combativité dans la classe ouvrière au Québec à la fin des années 1960 et au début des années 1970 avait été détourné et politiquement réprimé grâce aux syndicats qui l’ont harnaché au Parti québécois propatronal. 

Après la fin de la discussion officielle, la réunion s’est répartie en plusieurs petits groupes qui ont continué à avoir des discussions animées pendant encore une heure avant la fin officielle de la réunion.

Le lendemain, une étudiante qui avait assisté à la réunion a rejoint l’équipe de campagne pour distribuer la déclaration du SEP à la manifestation.

(Article original paru le 23 juin 2012)

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