Le Parlement grec approuve un plan d'austérité drastique en pleine vague de grèves

Peu après minuit jeudi matin, le Parlement grec a voté en faveur du cinquième plan d'austérité du pays en trois ans. 153 députés ont voté pour les larges coupes, 128 ont voté contre et 19 se sont abstenus.

Plus tôt dans l'après-midi, plus de 100 000 travailleurs en colère avaient bravé la pluie pour défiler devant le Parlement. Ils ont clairement dit qu'ils ne pouvaient plus accepter la pauvreté et la misère liées aux coupes supplémentaires. La police a dispersé les manifestants par la force, usant de lacrymogènes et de grenades incapacitantes contres les manifestants.

Cette puissante manifestation de masse, liée à une grève nationale de 2 jours, sont l'expression de la force de la classe ouvrière grecque. Les mairies, les bureaux et les banques étaient fermés depuis mardi, et les transports publics étaient pratiquement tous à l'arrêt. De nombreuses compagnies privées, par exemple dans le ramassage des ordures, ont également été frappées par l'action de grève, des écoles et des universités sont restées fermées aussi.

Les travailleurs des hôpitaux et des centrales électriques ainsi que les chauffeurs de taxis avaient déjà engagé des actions de grève lundi, prolongeant leur grève pour trois jours. D'après les reportages, la participation à la grève était écrasante, et des manifestations ont également eu lieu dans d'autres villes de Grèce.

Les deux principales confédérations syndicales, le Syndicat des services publics, GSEE, et la Confédération des fonctionnaires, ADEDY, n'avaient aucune perspective à proposer. Elles refusent de faire tomber la coalition branlante au pouvoir et de rompre avec l'Union européenne, laquelle dicte les mesures d'austérité. Les syndicats collaborent étroitement avec le PASOK socio-démocrate et d'autres partis, lesquels ont imposé l'austérité au cours des deux dernières années. Le PASOK est également un partenaire du gouvernement actuel.

Les syndicats ont ainsi cherché à limiter les manifestations au minimum. Ils n'ont appelé qu'à une grève de 48 heures en premier lieu pour contrôler la propagation des actions ouvrières à tout le pays et s'assurer que ni l'adoption des coupes ni le gouvernement lui-même ne seraient mis en difficulté. Afin de garantir que les grèves infligent le moins de dommages possible, ils les ont annoncées longtemps à l'avance et dans les secteurs sensibles comme le trafic aérien, où elles auraient le potentiel d'avoir d'énormes effets, elles ont été limitées à quelques heures.

Le gouvernement a démontré sa détermination à user de mesures autoritaires pour imposer l'austérité lorsque, peu après 19heures, la police a commencé à utiliser des gaz lacrymogènes, des cannons à eau et des grenades incapacitantes pour évacuer les manifestants de la place centrale d'Athènes. En quelques minutes, toute la place était noyée dans les gaz rendant la respiration impossible sans masque. Il ne devait y avoir aucune interruption durant le vote de la nouvelle enveloppe de coupes par les députés.

Après que la police a vidé la zone de ses manifestants et empêché que de nouvelles manifestations se forment, le Parlement a voté ce nouveau plan d'austérité à minuit et demi. Le document de 300 pages n'avait été soumis aux députés que le lundi soir.

La troïka constituée de l'Union européenne, du Fonds monétaire international et de la Banque centrale européenne, avait menacé de ne pas procéder au prochain versement de l'aide internationale, déjà fortement retardé, si ce plan était rejeté. Sans ce paiement de la troïka, le gouvernement serait insolvable à la mi-novembre.

Tous les partis d'opposition ont voté contre le projet. A cet égard, le rôle de la Coalition de la gauche alternative (SYRIZA) est particulièrement ironique. Elle veut que la Grèce reste dans l'UE, et n'a aucun intérêt à faire tomber le gouvernement.

En tant que principal groupe de l'opposition, SYRIZA aurait pu empêcher les coupes en demandant à ses députés de démissionner en masse. L'organisation a cependant rejeté cette option, et assuré son soutien au gouvernement de cette manière. Elle n'est opposée aux coupes que parce que son vote contre ne change rien à la situation présente. En d'autres nombreuses occasions, SYRIZA a affirmé qu'elle garantirait la dette internationale envers les banques et ne cherchait qu'à renégocier leurs termes.

Les dernières mesures d'austérité représentent une augmentation substantielle des attaques qui ont lieu contre tous les travailleurs européens et serviront de modèle à de nouvelles coupes en Espagne, au Portugal et sur tout le continent.

Les mesures d'austérité les plus récentes ont déjà entraîné une augmentation du chômage jusqu'à 25 pour cent, réduit les salaires jusqu'à 60 pour cent et fait fermer 70 000 entreprises, surtout des PME. La pauvreté de masse et la faim sont courantes aujourd'hui dans les rues d'Athènes.

Maintenant, conformément aux derniers plans, 13,5 milliards d'euros supplémentaires devront être supprimés du budget. Le plan consiste à détruire 150 000 emplois, réduire les salaires de 30 pour cent et réduire les retraites de 5 à 15 pour cent. Des coupes supplémentaires dans la santé, qui est déjà complètement sous-financée, se montent à 1,5 milliard d'euros. Des coupes similaires sont prévues dans l'éducation. Des universités vont être fermées avec une réduction massive des effectifs enseignants. L'âge de la retraite sera relevé et passera de 65 à 67 ans.

Des changements législatifs supplémentaires visent le droit du travail. Les statuts protecteurs vont être réduits en diminuant les indemnités de licenciement et en repoussant la date à laquelle le salaire doit être versé. Les licenciements seront facilités, ce qui va encore augmenter le chômage. De plus, la fusion controversée des systèmes de sécurité sociale, rejetée par la majorité des parlementaires la semaine dernière, a été incluse dans ce paquet législatif et est maintenant adoptée sans discussion.

L'effet cumulé de cette succession de mesures d'austérité sera de continuer à pousser la Grèce dans l'abîme. Les coupes précédentes ont déjà entraîné une énorme augmentation de la dette du pays, qui va atteindre 189 pour cent du PIB cette année. L'économie du pays s'est contractée de 21,5 pour cent depuis 2007, et une autre année de profonde récession est prédite pour 2013.

(Article original paru le 8 novembre 2012)

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