Un attentat suicide à la bombe tue des responsables syriens de haut rang

L’attentat suicide à la bombe qui a frappé une réunion du cabinet ministériel et des hauts officiers de sécurité a coûté mercredi la vie à au moins trois membres influents du gouvernement syrien du président Bachar al-Assad.

Les médias d’État syriens ont confirmé mercredi que le ministre de la Défense, Dawould Rajha, son adjoint, Assef Chouqat, le beau-frère du président, et Hasan Turkmani, le conseiller à la sécurité d’Assad, ont été tués dans l’attentat qui eut lieu tôt le matin lors d’une réunion de responsables au plus haut niveau de la hiérarchie et qui s’était tenue dans le bâtiment ultra-protégé de la Sécurité nationale situé dans le district de Rawda en plein centre de Damas.

Le ministre de l’Intérieur, Mohammad Ibrahim al-Sharr, que l’on avait initialement signalé comme comptant parmi les personnes grièvement blessées dans l’attentat suicide, serait également décédé, selon une chaîne de télévision du Hezbollah et d’autres sources.

Un groupe islamiste, Liwa al-Isla, a tout d’abord revendiqué la responsabilité de l’attentat à la bombe qui, selon des responsables syriens, a été commis par un garde du corps. Plus tard, l’Armée syrienne libre (ASL) a publié un communiqué disant que l’explosion faisait partie de son offensive à Damas.

Le recours à des attentats suicide à la bombe, y compris les attentats précédents comme le double attentat suicide à la voiture piégée du 10 mai qui avait tué 55 personnes devant le bâtiment des services de sécurité, souligne le rôle grandissant d’activistes liés à al-Qaïda et qui ont afflué vers la Syrie de tous les coins du Moyen-Orient.

L’attaque terroriste qui a frappé en plein coeur le régime Assad s’est produite alors que des combats faisaient rage pour la quatrième journée consécutive dans la capitale syrienne. Depuis dimanche, Damas, qui antérieurement avait été épargnée par le conflit armé qui avait touché d’autres parties du pays, a connu un échange de tirs nourris impliquant des chars, l’artillerie et des roquettes.

Le Comité international de la Croix-Rouge a déclaré dimanche que le conflit syrien était une guerre civile. « Nous parlons d’un conflit armé intérieur dans le pays », a déclaré le bureau du CICR à Genève.

Le chef du bureau chargé des affaires humanitaires de l’ONU a fait suite à la déclaration de la Croix-Rouge en publiant lundi un communiqué mettant en garde à la fois le gouvernement et les « rebelles » que le fait de « diriger les attaques contre les civils constituait un crime de guerre ». Valerie Amo, la sous-secrétaire générale de l’ONU pour les affaires humanitaires et l’aide d’urgence a déclaré : « L’escalade du conflit en Syrie a un effet physique et psychologique dévastateur sur des centaines de milliers de gens. Vu que le Comité international de la Croix-Rouge a désormais qualifié la situation de conflit armé, le droit international humanitaire s’applique dans toutes les régions de la Syrie où il y a des combats. » 

Les communiqués soulignent le caractère de propagande des articles de la presse dominante, qui sont repris internationalement par des éléments pseudo-gauches, en dépeignant le conflit syrien comme un massacre unilatéral perpétré par le régime à l’encontre de son propre peuple. En réalité, une campagne coordonnée par Washington, ses alliés européens ainsi que les monarchies saoudiennes et les États du Golfe soutenus par les États-Unis a attisé une forte recrudescence de la violence de la part de milices à base sectaire qui sont armées, financées, entraînées et « conseillées » par ces puissances extérieures.

Selon debka.com, un site Internet qui entretient d’étroits liens avec les services du renseignement israélien, l’élargissement du champ d’action des opérations militaires des soi-disant « rebelles » a été possible parce que la « Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar ont considérablement accru le flux de munitions à destination des rebelles ». Debka.com a ajouté, « Elles atteignent les combattants à l’intérieur de la Syrie tout comme les recrues se trouvant dans les installations militaires en Turquie. »

Une formation identique a aussi lieu en Jordanie.

L’Armée syrienne libre a été « équipée d’une technologie de communications reliant les provinces entre elles tout en étant en liaison avec le haut commandement de l’ASL en Turquie », a rapporté debka. Il a de plus remarqué : « Un “conseiller militaire” est affecté à chaque centre de commandement dans les provinces. Il s’agit généralement d’experts issus des forces spéciales, principalement des armées britannique, française, turque, saoudienne et qatarie. »

Dans une manifestation d’impudence et d’hypocrisie, les grandes puissances impérialistes ont invoqué la violence qu’elles ont elles-mêmes promue comme prétexte à davantage d’intervention étrangère directe en Syrie. Le ministre des Affaires étrangères britanniques, William Hague, a publié mercredi une condamnation officielle de l’attentat suicide à la bombe à Damas, pour ensuite soutenir que l’attentat « confirme le besoin urgent d’une résolution sous le chapitre 7 du Conseil de sécurité des Nations unies sur la Syrie ».

Le secrétaire américain à la Défense, Leon Panetta, a dit lors d’une conférence de presse au Pentagone que l’attentat à la bombe montrait que la situation « dérapait hors de tout contrôle » tout en soulignant le besoin pour que la « communauté internationale exerce un maximum de pression » pour forcer l’éviction d’Assad.

À Berlin, la chancelière allemande, Angela Merkel, a renchéri en déclarant que l’attentat à la bombe « nous a montré qu’il était grand temps de ratifier la prochaine résolution des Nations unies ».

Une telle résolution soutenue par l’Occident devait être soumise mercredi après-midi au Conseil de sécurité, avant que l’envoyé spécial de l’ONU et l’ancien secrétaire général Kofi Annan ne demandent un report du vote à jeudi. Le conseil doit autoriser d’ici vendredi l’extension de la mission d’observation de l’ONU en Syrie et qui a été mise en place dans le cadre du plan de paix d’Annan.

Annan cherche à faire accepter un compromis entre les puissances occidentales d’un côté et la Russie et la Chine de l’autre.

La Russie, qui a historiquement été alliée à la Syrie, a présenté sa propre proposition d’une extension de 90 jours de la mission d’observation, mais s’est engagée à opposer son véto à la résolution parrainée par les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne qui invoque le chapitre 7.

Le chapitre 7 de la Charte de l’ONU permet au Conseil de sécurité qui se compose de 15 membres de prendre des mesures allant de sanctions économiques à une intervention militaire. La même section avait été invoquée pour servir de base à une résolution sur la Libye et qui fut ensuite utilisée pour justifier la guerre des États-Unis et de l’OTAN et renverser le régime Kadhafi. En renonçant à exercer leur droit de veto, la Russie et la Chine avaient permis l’adoption de la résolution libyenne, pour voir ensuite leurs propres intérêts sacrifiés en Libye lors de la guerre qui s’ensuivit.

En Syrie, les enjeux sont bien plus vastes alors que l’impérialisme américain et ses alliés sont en train de fomenter une guerre en faveur d’un changement de régime dans le but de modifier en leur faveur l’équilibre géostratégique dans l’ensemble du Moyen-Orient et de planifier une guerre encore plus grande contre l’Iran qui est considéré comme étant le principal rival de Washington dans la lutte pour l’hégémonie régionale.

Comme preuve qu’une intervention plus directe est planifiée, le quotidien britannique The Telegraph a cité des sources « rebelles » selon lesquelles le gouvernement Obama leur aurait dit que Washington ne pourrait intervenir militairement en Syrie qu’après les élections présidentielles de novembre.

« Au fond, le message est très clair, rien ne se passera avant la tenue des élections, seulement après », a dit au journal un membre d’un groupe de pression syrien (SSG) à Washington, l’aile politique des milices de l’Armée syrienne libre.

Une autre « guerre par décision » est planifiée à l’insu de la population américaine, alors que le gouvernement démocrate au pouvoir vise délibérément à garder loin des urnes toute expression d’hostilité à la guerre.

Le Telegraph a rapporté que le SSG avait soumis dernièrement à Washington une demande d’aide, comprenant « 1000 lance-roquettes antichar RPG, 500 lance-roquettes SAM-7 anti-aviation, 750 mitrailleuses 23 mm ainsi que des gilets pare-balles et des téléphones satellite sécurisés ». Une demande a également été faite pour 6 millions de dollars en monnaie américaine pour payer les salaires des combattants « rebelles ».

(Article original paru le 19 juillet 2012)

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