« C’est comme s’ils voulaient nous ramener à l’époque de l’esclavage »

Les travailleurs parlent des coupes budgétaires et de la crise sociale à Détroit

Samedi, les membres de l’équipe de campagne du Parti de l’égalité socialiste (Socialist Equality Party, SEP) ont discuté de la campagne électorale 2012 du parti avec des clients qui faisaient leurs courses à l’Eastern Market à Détroit. Ils ont distribué divers documents, dont la déclaration électorale du candidat présidentiel, Jerry White, (« voir : Votez Égalité socialiste en 2012! Déclaration de Jerry White, candidat du PES à la présidence américaine ») et un récent article paru sur le WSWS concernant les coupes budgétaires à Detroit (voir : « Detroit financial advisory board approves huge cuts in worker pay » en anglais seulement). Un grand nombre de personnes ont exprimé leur dégoût à l’égard des deux principaux partis politiques et leur intérêt pour une alternative de la classe ouvrière.

campaignUn membre de l’équipe de campagne en discussion sur le programme du SEP avec un jeune à l’Eastern Market de Détroit

Un ouvrier agricole de 64 ans à l’Eastern Market, Paul Williams, a dit aux reporters du SEP quel était jusque-là son avis sur les campagnes électorales. « C’est comme si mon avis ne comptait pas, » a-t-il dit. « Les riches ont l’argent, et la politique n’est qu’une question d’argent. C’est le cas depuis 30 ans. Ils achètent les élections – les deux partis pareillement. C’est l’argent contre les droits fondamentaux des êtres humains. L’argent dirige le monde. »

« C’est pourquoi l’on voit ces luttes et ces protestations partout en Europe », a-t-il ajouté. « Les gens en ont marre de la dictature, et de voir les riches leur dire quoi faire. Les jeunes, les jeunes gens éduqués, ne trouvent pas de travail. »

« Je suis de près ce qui se passe partout, comme par exemple les protestations en Égypte ou au Bahreïn. Il va y avoir une guerre civile, et elle arrivera bientôt ici, avec les attaques qu’ils sont en train de perpétrer contre les gens ici. La semaine passée, ils ont réduit de 10 pour cent le salaire des employés municipaux – des sapeurs-pompiers, des enseignants, de tous les travailleurs. Même des salariés ne gagnant qu’entre 20 et 30 dollars l’heure ; ils le font ici, ils réduisent les salaires et brisent les syndicats. C’est comme s’ils voulaient nous ramener à l’époque de l’esclavage. »

À la question de savoir quelles étaient ses propres conditions de vie en tant que citoyen de Détroit, Williams a dit, « C’est dur. Il y a trop de gens au chômage. Il y a des maisons abandonnées, les mauvaises herbes poussent à travers les maisons. La ville ne les coupe pas. Ils réduisent l’effectif du service d’incendie et donc il n’y a personne pour éteindre les feux. Vous ne pouvez pas aller à la station essence la nuit parce que c’est dangereux. »

Il a ajouté, « Je n’ai jamais voté dans ma vie. Je ne crois pas dans ce système. Les gens disent que votre vote compte, mais ce n’est pas le cas. » Williams a toutefois ajouté, « Si je devais choisir un parti, je choisirais les démocrates. Je préférerais Obama. »

Les membres de l’équipe de campagne du SEP ont expliqué que la question n’était pas quel parti de l’élite dirigeante il fallait soutenir, mais plutôt la nécessité de construire un nouveau parti politique qui se fonde sur les intérêts indépendants de la classe ouvrière. Telle est la base de la campagne du SEP de Jerry White et de Phyllis Scherrer.

Les plaintes de Williams concernant la détérioration de Detroit furent un thème récurrent chez les travailleurs. Kelvin, un ouvrier du bâtiment à Détroit qui travaille principalement dans l’aménagement et la rénovation de maisons privées, a parlé avec les membres de l’équipe de campagne du SEP des effets des coupes budgétaires.

« Mon principal problème ce sont les réductions dans la fréquence des services d’autobus », a-t-il dit. « Beaucoup de gens en ont besoin pour aller travailler, donc beaucoup de gens ont perdu leur emploi parce qu’ils n’ont pu aller au travail quand les coupes ont été faites. Cela a un effet domino : ils n’ont pas d’emploi, pas de revenu, et ils perdent leurs maisons. Il y a une quantité de gens qui sont pris dans cette situation.

« Il y a eu des changements dans un grand nombre de lignes différentes. Il s’agissait peut-être d’un service de bus de 24 heures, mais maintenant il ne fonctionne plus que jusqu’à 22 heures. Ceci signifie que les travailleurs en poste de nuit n’ont aucune possibilité d’aller au travail. Ils avaient l’habitude d’être indépendants – ils pouvaient aller tout seuls au travail sans avoir besoin de demander de l’aide pour y aller. »

Kelvin a ajouté: « Pour ma part, j’ai de la chance parce que les changements ont été introduits après l’arrêt où je descends. Je n’aurais pas l’argent pour me procurer une voiture et donc j’aurais perdu mon emploi. »

A Détroit, comme partout dans le pays et internationalement, les réductions des salaires et des services sociaux ont été coordonnées avec les syndicats. Un menuisier, et membre du syndicat, qui a préféré garder l’anonymat a parlé de l’énorme réduction de salaire qu’il a endurée à cause de la duplicité du syndicat.

« Il y a trois ans, ils m’ont pris 10 pour cent de mon salaire et encore 6 pour cent l’année dernière », a-t-il dit. « Puis, dans le même temps, les syndicats ont augmenté nos cotisations syndicales. Les dirigeants syndicaux veulent conduire ces belles grosses voitures. Le syndicat représente les gros sous. Regardez comme la ville est actuellement en train de collaborer avec le syndicat pour obtenir des concessions. »

En réponse à la question de savoir s’il y avait eu une lutte pour défendre les conditions des travailleurs, il a dit : « Ils auraient pu lutter plus énergiquement, mais ils ont eu leur part de gâteau. La direction syndicale va de pair avec des avantages non officiels. Prenez par exemple les cotisations syndicales, où va cet argent ? Ils n’organisent pas de cadeaux collectifs ou de barbecues. Au contraire, je dois prendre ma vieille voiture et la faire réparer, et je vois arriver les dirigeants tous les ans dans des voitures neuves ! »

Les membres de la campagne du SEP ont expliqué que c’était un processus universel, sur le plan international et à travers les États-Unis. Ils ont souligné le fait qu’après les accords de faillite passés avec les entreprises de l’automobile, le syndicat des travailleurs de l’automobile (United Auto Workers, UAW) a à présent un intérêt direct à encourager les profits de l’entreprise, vu qu’il y possède sa propre grosse participation. « Oui, cela me paraît être un conflit d’intérêts », a-t-il dit. « Si vous siégez à la direction alors vous travaillez main dans la main avec la direction. Et la direction ne perd jamais – ils prennent toujours aux travailleurs. »

À la question de savoir ce qu’il pensait des élections, le menuisier a dit : « Je pense qu’Obama tente de réparer l’économie que Bush a laissée. Je pense que la chose la plus proche du socialisme ce sont les démocrates. Ce ne sont certainement pas les républicains. Je suis désolé de voir que les indépendants ne peuvent rien faire. »

L’équipe de campagne du SEP a expliqué qu’Obama avait été le candidat préféré de l’élite financière en 2008 en recevant davantage de dons de Wall Street que son adversaire républicain, et que la classe ouvrière requérait un nouveau parti politique à elle. Bob a ajouté : « Obama sera le premier président à avoir jamais récolté plus d’un milliard de dollars de dons pour sa campagne électorale. »

Pour plus d’informations sur la campagne du SEP, visitez socialequality.com.

(Article original paru le 16 juillet 2012)

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