Les protestations contre les ambassades américaines

Les manifestations contre les ambassades américaines pour protester contre une vidéo anti-islam sont un verdict populaire dévastateur contre la politique du gouvernement américain au Moyen-Orient. 

Les protestations se sont répandues à au moins onze pays dont l’Égypte, le Yémen, la Libye, l’Irak, la Tunisie, l’Algérie, la Jordanie, l’Iran, le Maroc, le Soudan et le Bangladesh.

La colère populaire face à la vidéo, une provocation politique de la part de cercles de droite aux États-Unis, a fait remonter à la surface la profonde colère populaire contre la politique pratiquée par Washington au Moyen-Orient. Depuis l’éruption des soulèvements de masse survenus l’année dernière et qui ont renversé les dictatures soutenue par les États-Unis en Tunisie et en Égypte, le gouvernement Obama n’a cessé d’appuyer des régimes droitiers à l’encontre de l’opposition populaire en intensifiant de sanglantes guerres par procuration en Libye et en Syrie.

A l’ambassade américaine en Égypte, l’ouvrier journalier, Yassin Maher, a dit au journal Al Ahram qu’il protestait contre le régime soutenu par les États-Unis du président islamiste Mohamed Morsi pour revendiquer de meilleures conditions de vie. Il a dénoncé la politique de répression menée contre les protestations : « Comme vous pouvez le voir, les forces de sécurité sous Morsi sont les mêmes que durant l’époque de Moubarak – toutes deux défendent l’Amérique. »

Les travailleurs et les jeunes ont envahi l’ambassade américaine à Sana’a, la capitale du Yémen, un pays appauvri et dont Washington soutient le gouvernement corrompu à l’encontre des protestations populaires alors que celui-ci mène une guerre civile sanglante. Les forces américaines organisent systématiquement des attaques des forces spéciales et lancent des frappes de drones contre le pays où un drone a assassiné l’année dernière Anwar el-Awlaki, un citoyen américain.

Le président yéménite Rabbo Mansour Hadi a dénoncé les protestations comme étant un complot destiné à enrayer les relations avec Washington.

En Irak, un pays envahi par les États-Unis en 2003 et qui fut ensuite dévasté durant l’occupation américaine qui dure depuis près de dix ans et qui a coûté la vie à un million d’Irakiens, des milliers de manifestants sunnites et chiites ont défilé ensemble à Bagdad et à Basra.

En Libye, où une attaque coordonnée contre le consulat américain à Benghazi a tué quatre responsables américains, Washington est en train de récolter ce qu’ils ont semé durant la guerre de l’année dernière.

Le gouvernement Obama avait orchestré la chute du colonel Mouammar Kadhafi au moyen d’une campagne de bombardement en soutenant diverses milices islamistes et tribales qui, guidées par les forces spéciales américaines et européennes, avaient agi par procuration sur le terrain. Le gouvernement américain n’avait toutefois pas l’intention de donner à ces forces le plein contrôle sur la Libye et sur ses recettes du pétrole ou un chèque en blanc pour des opérations internationales non supervisées par les États-Unis. Les divergences entre les États-Unis et des sections de leurs forces locales mandataires étaient inévitables.

Au milieu du chaos social créé par l’intervention des États-Unis – qui a laissé derrière un assemblage hétéroclite de milices droitières luttant pour obtenir le contrôle du pays – le groupe qui a attaqué le consulat à Benghazi a été en mesure de planifier et de lancer son opération.

Washington est en train de poursuivre de manière irresponsable la même politique de guerre par procuration en Syrie. Dans leur guerre par procuration contre le régime du président Bachar al-Assad, ils sont en train de déchaîner, avec un cynisme consommé, des forces tels les mercenaires libyens et l’ancien détenu de Guantánamo, Abdelhakim Belhadj.

Ceci souligne l’hypocrisie orwellienne de la « guerre contre le terrorisme » que les États-Unis prétendent mener contre al-Qaïda. C’est une opération de marquage, afin de commercialiser un produit répugnant parmi la population américaine : la défense sanglante des intérêts impérialistes américains au Moyen-Orient. En fonction de l’objectif que les États-Unis se fixent, al-Qaïda apparaît tantôt comme la cible tantôt comme un instrument de l’intervention militaire américaine.

La promotion de la « démocratie » par les États-Unis est, ni plus ni moins que la « guerre contre le terrorisme », un moyen purement rhétorique. Ce qui est réel c’est la mort, la destruction et la pauvreté qui sont laissées derrière par les guerres américaines et par le pillage de la région qu’ils organisent avec leurs régimes fantoches.

La réaction de Washington à la dernière vague de protestations populaires dans la région a été de mobiliser sa puissance militaire pour intimider l’opposition populaire et pour préparer le terrain pour de nouveaux bains de sang. Ils ont envoyé des navires de guerre pour patrouiller aux abords de la côte libyenne et ils ont tiré des missiles de croisière à l’intérieur du pays sur des cibles qu’ils soupçonnent d’être responsables de l’attaque.

Sur fond de guerre américaine par procuration avec la Syrie et des menaces américaines proférées contre d’autres forces alliées de l’Iran, telle l’organisation du Hezbollah au Liban, la nouvelle intensification des opérations américaines prépare aussi le terrain pour une guerre contre l’Iran qu’exigent le régime israélien et de vastes sections de la classe dirigeante américaine.

Un article publié dernièrement par l’Iran Project – un groupe d’universitaires américains, d’officiers de l’armée et de responsables de la politique étrangère – a mis en garde sur les possibles conséquences d’une telle guerre. Celles-ci comprenaient une perturbation du commerce pétrolier mondial en raison de combats dans le détroit stratégique d’Ormuz, de combats entre les forces soutenues par les États-Unis et les forces soutenues par l’Iran qui embrasent tout le Proche-Orient, ainsi que la fourniture accrue d’armes à l’Iran par d’autres grandes puissances, telles la Russie et la Chine.

La violente réaction de l’impérialisme américain à l’opposition croissante de la classe ouvrière à l’égard de sa politique au Moyen-Orient, sur le plan nationale et international, a ouvert la voie à des catastrophes sanglantes. Comme dans les années 1930, avant l’éclatement de la Deuxième Guerre mondiale, la poursuite des guerres locales est en train de préparer un conflit général aux conséquences désastreuses.

(Article original paru le 14 septembre 2012)

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