Un haut général de l'armée américaine se rend au Moyen-Orient pour des pourparlers sur la guerre

Le président du Conseil des chefs d’état-major interarmées américain, le général Martin Dempsey, s’est rendu cette semaine au Moyen-Orient. Il est arrivé lundi en Israël.

Dempsey a rencontré lundi le plus haut gradé israélien, le général Benny Gantz, et le premier ministre Benjamin Netanyahu pour discuter « de menaces susceptibles de provenir de la région – sur le plan mondial et intérieur – et de quelle façon nous pouvons continuer d'agir ensemble pour rendre plus sûrs nos deux pays. »

Après Israël, Dempsey se rendra en Jordanie où plus de 1.000 soldats américains sont déjà stationnés, y compris des chasseurs F-16 avec leurs équipes ainsi que des batteries de missiles Patriot. Les Etats-Unis ont aussi promis d’aider la Jordanie dans l’application des « techniques de contrôle aux frontières » dans le but de gérer l’afflux massif de réfugiés en provenance de la Syrie.

Le chef d’état-major de l’armée de l’air des Etats-Unis, le général Mark Welsh, s’est envolé pour Israël afin d’assister, en prévision de la visite de Dempsey, à des réunions secrètes tenues du 4 au 8 août.

Alors que sa tâche officielle est de discuter du renforcement des liens militaires avec les régimes israélien et jordanien, la visite du général Dempsey survient dans le contexte de sérieux revers essuyés par l’opposition soutenue par les Etats-Unis en Syrie. Cette visite est liée à des projets d’escalade militaire dans le pays et le recours à des alliés régionaux dont la Turquie, la Jordanie et Israël.

Dans une interview accordée vendredi au Wall Street Journal, l’ancien directeur adjoint de la CIA, Michael Morrell, a dit que la situation en Syrie constituait la menace numéro un de la « sécurité nationale » américaine et que le pays pourrait devenir le nouveau lieu de refuge préféré d’al Qaïda.

Le but du voyage de Dempsey au Proche-Orient est de promouvoir et de coordonner le soutien pour les projets de guerres américains visant la Syrie. Dans son rapport sur la visite de Dempsey, DEBKAfile (DEBKAfile claimed) a affirmé que le but de la visite était de « préparer le terrain pour la décision finale de Barack Obama de s’embarquer dans la voie d’une intervention militaire américaine limitée dans la guerre civile en Syrie. »

Le rapport du site DEBKAfile indique que les Etats-Unis ont l’intention d’imposer une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Syrie, d'imposer des « zones tampons » à l’intérieur de la Syrie en bordure des frontières israéliennes et jordaniennes, de proclamer la ville de Deraa, située au sud de la Syrie près de la frontière jordanienne, la nouvelle capitale de la « Syrie libre », et d’installer sur le territoire syrien des commando syriens, formés et dirigés par des officiers jordaniens et américains, pour mener la guerre contre Assad.

Alors que Dempsey n’a pas explicitement réclamé de telles mesures agressives, il est tout à fait convaincu que la seule solution en Syrie est de faire partir Assad et d'installer au pouvoir des éléments de l’opposition soutenue par les Etats-Unis.

Pendant son séjour en Israël, Dempsey a prévenu que la guerre en Syrie « ne sera pas résolue à court terme, » et qualifia la cause de la guerre de « déchaînement d’animosités ethniques historiques, religieuses et tribales qui nécessitera un immense travail et beaucoup de temps pour être résolu. »

La véritable cause de la guerre en Syrie est la détermination des Etats-Unis et de l’impérialisme européen à réimposer un statut colonial aux nations du Moyen-Orient. Les divisions ethniques et sectaires sont intentionnellement attisées et manipulées par les puissances impérialistes comme partie intégrante de ce projet.

Dempsey affirme que la tâche principale pour les Etats-Unis est de renforcer les forces modérées au sein de l’opposition tout en marginalisant les éléments radicaux.

Il a dit, « Je suis très préoccupé par l’élément radical au sein de l’opposition et je suis préoccupé par le risque que des idéologies extrémistes ne viennent pirater ce qui se voulait au départ comme un mouvement populaire pour le renversement d’un régime oppressif. »

Le commentaire de Dempsey correspond à marcher sur la tête. En réalité, les Etats-Unis acheminent depuis 2011 du matériel et de l’aide financière aux militants à l’intérieur de la Syrie, dont le Front al Nusra. Ces « extrémistes » forment les troupes de choc les plus meurtrières de l’Amérique en Syrie.

Dempsey lui-même admet que les éléments modérés et radicaux se trouvant au sein de l’opposition travaillent souvent ensemble. « Cela ne me surprend pas que de temps en temps ils collaborent les uns avec les autres. »

L’inconvénient pour l'exercice de relations publiques du Pentagone est que les unités plus radicales ou extrémistes sont, selon toutes les informations, les combattants les plus efficaces se trouvant au sein de la coalition anti-Assad. Les groupes islamistes radicaux, soutenus par les alliés des Etats-Unis, sont en fait l’« avant-garde » de la « révolution » syrienne.

Réagissant à la prise d’une base cruciale à Minegh par les forces anti-Assad, Charles Lister, analyste à Jane’s Defence Weekly, a dit, « La victoire souligne une fois de plus le rôle stratégique marqué joué par les militants islamistes, notamment dans le nord de la Syrie. »

Selon Lister, « cette année, chaque offensive majeure dans le nord de la Syrie a été annoncé, menée et coordonnée par des islamistes. »

S’exprimant au micro de The Voice of Russia, le rédacteur de Long War Journal, Bill Roggio, a dit, « La réalité est que ces groupes rebelles, le groupe que les Etats-Unis veulent soutenir, le Conseil militaire syrien et la Coalition nationale syrienne et par extension l’Armée syrienne libre, combattent le régime Assad aux côtés du Front al-Nusra… L’Armée syrienne libre est présentée comme séculaire mais, quand vous regardez ce qui se passe en Syrie, on pourrait dire que d’importantes fractions ne le sont absolument pas. »

Dans une rubrique de Russia Today Online, le journaliste Patrik Henningsten a aussi écrit : « L’armée syrienne libre est cruellement faible et dominée par une dizaine, sinon par des centaines de groupes de combattant radicaux islamistes menés par des étrangers dont le Front al Nusra est le plus important et le mieux financé.

La chaîne de télévision iranienne Press TV a rapporté dimanche que des militants du Front al Nusra avaient massacré le 5 août dans la ville de Tal Abyad dans le nord de la Syrie, 450 kurdes, pour la plupart des femmes et des enfants.

Le journal Al-Alam a relaté que « Les massacres à grande échelle commis par des terroristes ont augmenté le mois dernier en Syrie… Alors que l’insurrection soutenue par l’étranger se poursuit en Syrie sans qu’une fin soit envisageable, le gouvernement américain a accru le soutien politique et militaire apporté aux extrémistes takfiri. »

Le journaliste kurde Barzan Iso a signalé les attaques lancées contre la population kurde depuis la mi-juillet : « Al Qaïda a commencé par attaquer les villages kurdes le 19 juillet. Après ces attaques ils ont enlevé de nombreux kurdes. »

Le gouvernement américain et les médias ont gardé un étrange silence au sujet de ces affirmations qui, si elles sont véridiques, susciteront un examen plus minutieux de ces militants islamistes et de leurs liens avec la CIA.

(Article original paru le 14 août 2013)

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