France: La « Révolution fiscale » du Front de Gauche vise à bloquer le mouvement anti-austérité

Dans un contexte d'opposition montante à la politique militariste et d'austérité du gouvernement du Parti socialiste (PS) français, le Front de Gauche a organisé la « Marche pour une Révolution Fiscale » le 1er décembre à Paris. L'initiative était une escroquerie politique par laquelle le Front de Gauche essayait de faire passer les toutes dernières manoeuvres du PS profondément impopulaire.

Afin d'empêcher que ne se propagent les mobilisations anti-impôts en Bretagne, qui persistent depuis octobre, et d'inverser l'effondrement de son taux de popularité dans les sondages qui a atteint 15 pour cent, le gouvernement avait lancé des discussions le 27 novembre sur la mise à plat du système d'impôts. Les organisations patronales et les confédérations syndicales y participent, y compris la Confédération générale du travail (CGT), dominée par le Parti communiste français (PCF).

Le Front de Gauche, coalition du Parti de Gauche (PG) et du PCF stalinien, partis qui ont des liens de longue date avec le PS et qui ont soutenu l'élection du président PS François Hollande, ont cherché à mobiliser dans toute la France, dans le contexte de ces discussions. La manifestation avait été appelée pour soi-disant encourager des changements « révolutionnaires » dans la fiscalité française.

En fait, quelques milliers de personnes seulement ont participé le 1er décembre à la manifestation parisienne, soit bien moins que le chiffre de 100 000 revendiqué par le dirigeant du Front de Gauche Jean-Luc Mélenchon.

Le mot d'ordre sur la banderole de tête à Paris était: "Contre l'injustice fiscale, taxer le capital, non à l'augmentation de la TVA"

Dans son discours lors du rassemblement, Mélenchon a déclaré: « Proposons un principe simple, que tout le monde peut connaître par cœur. Le voici : tout le monde paie et chacun paie progressivement davantage selon ses moyens. C’est simple : tout le monde comprend ! Pour ma part, s’ils m’invitent, je suis prêt à aller exposer cette idée et les moyens de la réaliser devant les commissions des deux Assemblées, devant le chef de l’Etat et le Premier ministre. »

Pierre Laurent, secrétaire national du PCF lui a emboîté le pas en disant qu'il voulait envoyer « un message fort au gouvernement »

Bien qu'ils aient qualifié la marche parisienne de pro-PS, les partis de pseudo-gauche Lutte Ouvrière (LO) et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) y ont pris part avec des délégations. Mélenchon a été interviewé entouré par leurs drapeaux.

L'évènement en soi témoigne de la nature politique réactionnaire, fausse et dégénérée du stalinisme français et de ses satellites, les forces socio-démocrates du PG de Mélenchon et les partis de la pseudo-gauche. Ils proposent de façon démagogique diverses tactiques et revendications réformistes, en insistant sur le fait qu'ils réaliseront ces revendications par une politique d'alliance avec le PS et de pression exercée sur lui.

Mélenchon a souvent affirmé que « ce n'est pas mon intention » de « faire partir François Hollande avant la fin de son mandat.» Dans le contexte de la manifestation du 5 mai du Front de Gauche, Mélenchon avait même proposé ses services comme premier ministre de Hollande.

Pourtant, des couches importantes de travailleurs sentent que le PS n'effectuera pas de changement significatif de sa politique de guerre et d'austérité, ce qui exprime le gouffre énorme de classe qui sépare la classe ouvrière des partis de la « gauche » bourgeoise. Cette réalité, qui indique la profonde crise de direction de la classe ouvrière et le vide béant à gauche, est démontrée par la participation minable au rassemblement du Front de Gauche.

Le caractère frauduleux de cette tentative de présenter la manifestation comme participant d'une « révolution » contre le gouvernement a été démasqué encore plus par la décision du PCF de participer à des listes communes avec le PS pour les élections municipales de mars 2014.

Le Front de Gauche est profondément hostile à toute mobilisation de la classe ouvrière contre l'administration réactionnaire de Hollande et est terrifié par la colère sociale qui gronde dans la classe ouvrière contre le PS et la bureaucratie syndicale.

François Delapierre du PG a exprimé son désarroi face à l'impopularité du PS dans les sondages: « Ce pouvoir est encalminé dans son impasse, comme Sarkozy avant lui. Mais Sarko avait conservé sa base sociale. »

Un autre dirigeant du PG, Alexis Corbière, se préoccupait du fait qu' « On est dans une période où il y a un risque de cassure entre les salariés du privé et les organisations traditionnelles du mouvement ouvrier. »

Il a affirmé de façon absurde que le Front de Gauche « a bousculé l'agenda de Hollande, et l'idée selon laquelle l'opposition au gouvernement ne serait qu'à l'extrême droite. »

Un sondage publié le 9 octobre fait état de 24 pour cent de voix pour le Front national néo-fasciste aux élections européennes de mai 2014, en tête devant l'Union pour un mouvement populaire (UMP) de Sarkozy avec 22 pour cent des voix, et 19 pour cent pour le PS.

En fait, ce sont précisément des évènements comme « la Marche pour une Révolution Fiscale », qui sont largement perçus comme des mascarades politiques montées par des gens vendus à l'aristocratie financière, qui permettent au FN de se présenter comme l'unique opposition à Hollande.

Le Front de gauche, le NPA et LO ont soutenu inconditionnellement le PS aux élections qui lui ont permis d'accéder au pouvoir l'année dernière. Dans une situation où un grand nombre de travailleurs ne considèrent pas ces partis comme des partis d'opposition, puisqu'ils fonctionnent depuis des décennies dans l'orbite politique du PS, le FN est en mesure de se présenter comme l'unique force qui s'oppose à la politique de guerre et d'austérité du gouvernement PS.

Interviewé sur la chaîne TF1, Mélenchon a fait remarquer que Hollande continuait la politique du précédent président Nicolas Sarkozy, à savoir des cadeaux fiscaux pour les patrons, plus d'impôts pour les masses et la réduction des droits à la retraite.

Il a insisté sur le fait que, malgré les alliances électorales du PCF et du PS, sa politique envers Hollande était « Maintenant il faut sortir le suivant ! » Il a dit de façon peu crédible qu'il appelait à « battre les listes gouvernementales » aux élections municipales et européennes de 2014. Bon nombre de ces listes comporteront des candidats de sa propre organisation.

(Article original paru le 9 décembre 2013)

Loading