Le bombardement de la Syrie par Israël accentue les risques d’une guerre plus importante

Le bombardement mercredi d’un site militaire syrien par des avions de combat israéliens a accentué les risques que la guerre civile soutenue par les occidentaux en Syrie déborde et provoque une conflagration plus large dans toute la région.

Des représentants des Etats-Unis sous le couvert de l’anonymat ont déclaré au New York Times que la cible de la frappe aérienne, faite mercredi à l’aube, était un convoi militaire emmenant des armes supposées être destinées au Hezbollah, le mouvement politique et armé Chiite au Liban.

Le gouvernement Syrien a cependant déclaré que ces frappes visaient un centre de recherche militaire à Jamraya, dans la chaîne de montagnes Qasioun, à cinq kilomètres à l’ouest de Damas. Il affirme que deux travailleurs du centre ont été tués au cours du bombardement et cinq autres blessés. 

« Les avions de combat israéliens ont violé notre espace aérien à l’aube aujourd’hui et ont frappé directement l’un des centres de recherche affectés à l’amélioration des capacités de résistance et d’auto-défense dans la zone de Jamraya dans la campagne environnant Damas, » a déclaré l’armée syrienne dans un communiqué publié par l’agence d’information officielle Sana. 

Le régime syrien a accusé les « rebelles » soutenus par les Etats-Unis et tout l’occident d’avoir facilité l’attaque en lançant des attaques coordonnées contre le réseau de radars et de défense anti-aérienne du pays.

« Mercredi en fin de journée, un représentant des Etats-Unis a affirmé que les mentions de deux cibles – un convoi d’armes et un site militaire – n’étaient pas « exclusives l’une de l’autre, » a indiqué le Wall Street Journal. Ce représentant suggérait que le convoi a été attaqué à l’intérieur du site militaire. Comment Israël serait parvenu à déterminer qu’il transportait des armes à destination du Hezbollah de l’autre côté de la frontière libanaise n’a pas été expliqué. 

Quant à lui, le régime Israélien a maintenu un silence complet sur ses actes d’agression contre la Syrie. Jeudi en fin de journée, le New York Times a décrit ce silence comme « faisant partie d’une stratégie à long terme pour donner aux pays visés des occasions de sauver la face en évitant une escalade du conflit. » 

D’après ce raisonnement pervers, c’est la déclaration officielle de la Syrie sur cette attaque qui serait responsable de « l’augmentation de la probabilité d’un cycle de représailles » - et non l’attaque en elle-même.

Cette frappe aérienne aurait été menée par quatre avions israéliens survolant à basse altitude le territoire Syrien avant de tirer une douzaine de missiles sur les installations. 

Le Daily Star libanais a cité des résidents de la zone de Jamraya qui ont déclaré avoir été réveillés par des explosions sur le site militaire. « Nous dormions. Puis nous avons entendu des roquettes toucher les installations et le sol a commencé à trembler et nous nous sommes réfugiés à la cave, » a déclaré au journal libanais une femme vivant à côté du site.

Un autre Syrien, dont un membre de la famille travaille sur le site militaire, a déclaré à Reuters : « il semble qu’il y ait eu une douzaine de roquettes qui auraient touché un des bâtiments des installations. Le site est fermé aujourd’hui. »

Le gouvernement d’extrême-droite du président israélien Benyamin Netanyahu a affirmé qu’il craint que la guerre civile qui dure depuis près de deux ans en Syrie ne fasse tomber des armes de pointe entre les mains du Hezbollah ou des milices islamistes soutenues par l’occident. En réalité, alors qu’il entame son troisième mandat, le gouvernement Netanyahu exploite la crise en Syrie pour mener des frappes militaires visant à affaiblir ses adversaires potentiels et à ouvrir la voie à une nouvelle éruption de guerre ouverte.

D’après des représentants américains, le convoi prétendument dirigé vers le Liban ne transportait ni armes chimiques ni tout autre type d’arme offensive, mais des missiles anti-aériens russes SA-17, qui seraient capables de frapper les chasseurs-bombardiers, les hélicoptères et les drones israéliens.

Comme le dit NBC News, « ils feraient perdre à Israël la liberté essentielle de survoler le Liban. » Le régime israélien a exercé cette « liberté » à plusieurs reprises au cours des derniers jours. Mercredi, l’armée libanaise a rapporté que les avions de combat israéliens avaient mené deux sorties contre le territoire libanais, décrivant des cercles pendant des heures jeudi et revenant avant l’aube mercredi.

Plus important encore, ce contrôle sans contestation sur l’espace aérien libanais est essentiel pour Israël s’il se prépare à une nouvelle guerre contre ce pays situé à sa frontière nord, qu’il a envahi pour la dernière fois en 2006, détruisant l’essentiel de son infrastructure par des bombardements aériens et navals qui avaient fait plus de 1100 morts.

Cette possibilité a été fortement suggérée par un responsable militaire israélien de haut niveau. A la veille de la frappe contre la Syrie, Le Major-Général Amir Eshel, chef des forces aériennes, a déclaré qu’Israël est maintenant engagé dans « une guerre entre des guerres » et que « cette campagne est menée 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, 365 jours par an. Nous menons des actions pour réduire les menaces immédiates, pour créer des conditions meilleures dans lesquelles nous serons en mesure de remporter les guerres, quand elles se produiront. »

Eshel a dit que Tel Aviv essayait de « maintenir [nos] efforts en dessous du niveau auquel la guerre éclate, » mais il a ajouté, « ... s’il n’y a pas d’autre alternative – peut-être qu’elle éclatera. »

L’attaque Israélienne a été menée après des consultations avec le gouvernement d’Obama à Washington, qui, comme Tel Aviv, a maintenu un silence coupable au sujet des raids aériens. En fait, l'unique réponse officielle des Etats-Unis a été une déclaration de l’adjoint à la sécurité intérieure de la Maison blanche, Ben Rhodes, qui a publié un avertissement adressé à la Syrie disant qu’elle ne devrait pas « déstabiliser encore plus la région en transférant de l’armement au Hezbollah. »

Le fait qu’Israël mène une action militaire prétendument « préventive », c'est -à-dire une attaque sans avoir été provoqué, contre un territoire souverain n’a clairement pas été considéré par le gouvernement américain comme « déstabilisant. » Ce n’était que la dernière d’une longue liste d’actions criminelles de ce type, menée par un allié de Washington, dans la lignée notamment de l’attaque d’octobre dernier contre une prétendue usine d’armement au Soudan et des violences interminables contre la population Palestinienne des territoires occupés de la Bande de Gaza et de Cisjordanie. 

Les raids aériens d’Israël ont été condamnés par le gouvernement Russe, qui les a qualifiés d’« attaques non provoquées contre des cibles sur le territoire d’un Etat souverain, qui violent clairement la Charte de l’ONU et sont inacceptables, quels que soient les motifs pour les justifier. » 

L’Iran, le plus proche allié de la Syrie dans la région, a prévenu que « l’attaque du régime sioniste à proximité de Damas aura de graves conséquences pour Tel Aviv. » Précédemment, Téhéran avait prévenu qu’elle considérerait une attaque contre la Syrie comme un acte d’agression contre son propre territoire. » 

Au Liban, le président Michel Suleiman a dénoncé l’attaque Israélienne comme « une agression flagrante » et a accusé Israël d’« exploiter les événements en Syrie pour mener sa politique agressive, au mépris de tous les traités humanitaires et internationaux. » 

Debka.com, un site Web sur les renseignements militaires israéliens ayant des liens étroits avec les services secrets du pays, a rapporté que la frappe contre la Syrie avait « déclenché des alertes militaires de haut niveau dans toute la région, » y compris de la part d’une flotte russe de 18 navires de guerre en Méditerranée orientale, dans les armées Libanaise et Jordanienne, ainsi que pour les forces américaines stationnées sur la base aérienne d’Incerlik en Turquie, et les forces spéciales déployées en Jordanie. 

L’attaque israélienne, menée avec le soutien des Etats-Unis, contre la Syrie n’est que le début de ce qui risque d’exploser en une guerre bien plus vaste, y compris contre l’Iran, et d’entraîner toute la région dans un bain de sang mettant en danger la vie de millions de personnes.

(Article original paru le 1er février 2013)

Loading