Le NPA cherche à légitimer les guerres du gouvernement français pour le partage de l’Afrique

Le soi-disant de gauche Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) fait une propagande cynique pour les guerres sanglantes de l’impérialisme français en Afrique, de la Libye à la Côte d’Ivoire en passant par le Mali et la République centrafricaine (RCA). Voici le contenu d’un article « Redéploiement de l’impérialisme français et sidération humanitaire de la gauche », écrit par Jean Batou, membre de l’organisation suisse SolidaritéS, affiliée au NPA, et qui a été affiché dernièrement sur le site en langue anglaise du NPA, International Viewpoint.

Tout en reconnaissant cyniquement que Paris a de vastes intérêts économiques et militaires en Afrique, l’article affirme que ceux-ci ne jouent aucun rôle significatif dans la politique menée par le Parti socialiste (PS) au pouvoir. Tout en faisant siennes les affirmations frauduleuses du PS selon lesquelles ses guerres africaines sont dictées par le souci de protéger les Africains contre le terrorisme, Batou prétend que le président PS François Hollande a rompu avec la politique de son prédécesseur conservateur, le président Nicolas Sarkozy.

Batou écrit, « En Libye et en Côte d’Ivoire, on a pu soutenir sans difficulté que Nicolas Sarkozy nourrissait des arrières pensées d’ordre économique, mais cela semble moins évident de la part de François Hollande au Mali, et très contestable en RCA… En effet, si aucun observateur sérieux ne peut croire aux mobiles humanitaires invoqués par Paris, il paraît clair que l’envoi de troupes de choc visant à éviter le naufrage définitif d’‘Etats faillis’, comme la Centrafrique, obéit d’abord à la nécessité de maintenir la sécurité dans son ‘pré carré’, qui est une condition de la crédibilité de la France au seuil d’une nouvelle ‘mêlée pour l’Afrique’. »

Les arguments de Batou sont entièrement de mauvaise foi. Tout en disant que les rationalisations humanitaires invoquées par le gouvernement Hollande pour ses guerres ne sont pas crédibles, il les valide en même temps en présentant les guerres de la France comme une campagne pour la ‘sécurité’.

Son aveu que ce sont des motivations économiques qui ont poussé Sarkozy en 2011 à la guerre contre la Libye est en soi une accusation du NPA. Bien que Batou ne le rappelle pas, le NPA avait prôné avec enthousiasme cette guerre en tant qu’intervention humanitaire pour préserver la ville de Benghazi face à la répression du colonel libyen Mouammar Kadhafi. Mais Batou reconnaît à présent que la guerre soutenue par le NPA était motivée par les intérêts stratégiques et financiers du capital français.

Malgré la promotion de la politique du PS par le NPA, les guerres lancées par Hollande découlent directement de celles de Sarkozy. La guerre du Mali est issue de la dévastation causée par la guerre de 2011 en Libye, lors de laquelle l’OTAN a armé contre Kadhafi des milices islamistes liées à al Qaïda. Des combattants touaregs ayant combattu aux côtés des troupes de Kadhafi et qui furent persécutées par les forces soutenues par l’OTAN, retournèrent au Mali au début de 2012 et y rejoignirent des groupes rebelles du Nord Mali ainsi que diverses milices islamistes alliées qui attaquèrent l’armée malienne.

Paris a exploité ce chaos provoqué par son appui irresponsable de forces liées à al Qaïda en Libye pour intensifier la guerre au Mali en janvier 2013. Il a cyniquement prétendu y combattre le terrorisme tout en collaborant en même temps avec les milices islamiques liées à al Qaïda en Libye et dans la guerre par procuration menée par les Etats-Unis en Syrie en vue du renversement du président Bachar al Assad.

Le NPA a soutenu ces guerres avec agressivité, faisant l’éloge des forces islamistes réactionnaires au service de Paris comme étant des révolutionnaires et en demandant à l’OTAN de les armer dans la guerre par procuration menée en Syrie.

Après avoir cyniquement nié les intérêts impérialistes qui se cachent derrière les guerres de Hollande, Batou se met ouvertement à exposer les intérêts matériels qui se trouvent derrière la ruée impérialiste de la France pour établir son contrôle sur les marchés africains.

Il écrit, « Malgré l’explosion des inégalités, la pérennité de cette expansion favorise dès lors l’émergence d’une couche de plus en plus importante de micro-consommateurs, déjà plus forte, selon certaines études, que celle de l’Inde, qui pourrait générer des débouchés solvables prometteurs pour les investisseurs et les fournisseurs étrangers, en particulier ceux des pays émergents, mieux préparés à répondre à ce type de demande… le nombre des abonnés à la téléphonie mobile a plus que doublé, atteignant aujourd’hui 500 à 620 millions d’usagers. »

Il poursuit en disant, « La politique de Paris au Congo-Brazzaville, en Côte d’Ivoire, au Gabon, au Mali, au Niger, en RCA, au Sénégal, au Tchad, etc., n’est pas concevable sans les conseils avisés des groupes AREVA, Bolloré, Bouygues, Total et de quelques autres. Il serait fastidieux de revenir ici sur les liens triangulaires incestueux noués par l’exécutif français avec un certain nombre d’entreprises et de potentats du théâtre françafricain. »

C’est-à-dire que l’impérialisme français est en train de mener une guerre pour protéger la mainmise de Total sur les puits pétroliers africains, le contrôle d’Areva sur les mines d’uranium africaines, le contrôle de Bouygues sur l’infrastructure et les projets de télécommunication ainsi que la logistique et les projets de matières premières de l’empire industriel de Bolloré. Ceci sape les mensonges du NPA comme quoi Paris est en train de mener une guerre visant à assurer la sécurité des masses africaines.

Derrière l’adoption par le NPA des guerres néocoloniales en Afrique il y a les intérêts des couches réactionnaires de la classe moyenne aisée pour lesquelles parle ce parti. En s’orientant sur le PS, le NPA vise à améliorer la position stratégique de la France et les profits de ses groupes et de ses banques. C’est en même temps la source des moyens financiers que la bourgeoisie fait parvenir – via son financement de la bureaucratie syndicale, des programmes des médias et des aides accordées à des universitaires « de gauche » – aux groupes soi-disant de gauche tels que le NPA.

Avec le soutien du NPA, ces guerres sont en train de transformer l’Afrique en une poudrière de conflits entre grandes puissances. L’impérialisme français s’est allié à Washington pour tenter de s’emparer de nouveau des marchés africains perdus au profit des « pays émergents » comme la Chine, et pour rivaliser avec l’impérialisme allemand au sujet de marchés et de sphères d’influence sur tout le continent.

« Paris fait effectivement tout pour éviter de ressusciter l’image d’une France ‘gendarme de l’Afrique’, en particulier dans un contexte où les pays émergents peuvent tirer parti de leur passé non colonial, » explique Batou, en poursuivant, « Les nouveaux stratèges de l’impérialisme français lorgnent ainsi avec gourmandise les parts de marché gagnées par les entreprises allemandes au pays de Nelson Mandela en jouant sur les liens historiques de la Fondation Ebert avec les milieux proches de l’ANC. [le Congrès national africain d’Afrique du Sud, African National Congress]. »

Tout en défendant les intérêts de l’impérialisme français dans ce nouveau partage de l’Afrique, le NPA cherche à se donner un faux visage « de gauche » en se présentant comme un ami des protestations sociales et des bureaucraties syndicales en Afrique. Il finit toutefois par soutenir les syndicats ayant supervisé le massacre des mineurs grévistes de Marikana. En août 2012.

L’article vante ainsi la « Fédération nationale des métallurgistes d’Afrique du Sud (NUMSA), en pleine croissance, qui revendique aujourd’hui 340.000 membres (pour 50 millions d’habitants) », qui « vient de tenir un congrès extraordinaire pour appeler la confédération des syndicats (COSATU) à rompre avec l’ANC au pouvoir, à dénoncer sa politique néolibérale et la corruption de ses dirigeants, mais aussi à œuvrer à la formation d’un nouveau parti ouvrier de classe qui lutte pour l’abolition du capitalisme. »

La tentative du NPA de doter ces bureaucraties entachées de sang de références progressistes et anticapitalistes est la preuve de son hostilité farouche envers la classe ouvrière.

Le 16 août 2012, l’ANC sud-africaine, s’appuyant sur le syndicat des mineurs National Union of Mineworkers (NUM) affilié à la Fédération syndicale sud-africaine COSATU et sur le Parti communiste sud-africain (SACP), a envoyé la police massacrer des mineurs grévistes à Marikana; on tua 34 mineurs. Ce fut le pire massacre de travailleurs en Afrique du Sud depuis la fin de l’apartheid.

Après le massacre de Marikana, le NPA garda un silence assourdissant pendant trois semaines et publia plus tard un article (Voir: Massacre à Marikana : le NPA sème des illusions sur l’ANC et les syndicats sud-africains ) pour prendre ses distances par rapport au massacre tout en entretenant des illusions dans l’ANC et les syndicats. Le soutien qu’il apporte aujourd’hui à la COSATU est un avertissement pour la classe ouvrière des attaques contre elle qu’il va promouvoir en Afrique du Sud et internationalement.

(Article original paru le 22 septembre 2014)

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