Perspectives

Illusions et tromperie aux Nations Unies

Après avoir déclenché une autre guerre illégale, le président Barack Obama s'est présenté devant les Nations Unies mercredi dernier pour justifier les actes américains à travers le monde et exiger que tous les pays se rangent derrière la campagne pour l'hégémonie mondiale des États-Unis.

Son discours était un amalgame de déclamations, menaces et ultimatums où s'entremêlaient les formules creuses et les clichés. Il l'a prononcé de manière saccadée, ritualiste: une affirmation après l’autre, suivie d’une longue pause, sans le moindre effort pour développer une argumentation cohérente.

Mais le discours s'est surtout démarqué par la totale déconnexion entre son contenu et la réalité politique. Les mensonges d'Obama étaient si gros et éhontés qu'ils semblaient l'expression du délire. Quand la situation politique mondiale atteint un tel point que ceux qui sont au pouvoir ne peuvent admettre la moindre vérité, on peut constater combien la crise de tout l'ordre politique et économique est profonde.

Tous les mensonges et l'hypocrisie étaient concentrés dans les paroles d'Obama dénonçant «une vision du monde où la force fait loi – un monde dans lequel les frontières d'une nation peuvent être redessinées par une autre...» Il a déclaré que «les États-Unis représentent autre chose. Nous croyons que la loi fait la force et que les plus grandes nations ne devraient pas pouvoir intimider les plus petites; que les peuples devraient pouvoir choisir leur propre destinée.» [C'est nous qui soulignons.]

Cette déclaration a été faite par le représentant du pays le plus violent et le plus menaçant du monde, un pays qui, en violation directe de la charte des Nations Unies, a placé la guerre préventive au cœur de sa politique étrangère, s'arrogeant le droit illimité d'intervenir militairement partout où ses intérêts économiques, politiques ou géostratégiques sont en jeu.

Depuis leur arrivée sur la scène mondiale en tant que puissance impérialiste à la fin du 19e siècle, les États-Unis se sont arrogé le droit d'intimider les petits et les grands pays et de leur imposer leur volonté. Et surtout durant le dernier quart de siècle, l'impérialisme américain a mené une suite sans fin et de plus en plus intense de guerres, invasions, opérations spéciales et bombardements contre des pays aux quatre coins du globe. Durant ses interventions militaires de cette période, l'impérialisme américain a été responsable de la mort de centaines de milliers de personnes.

Rappelons-nous, entre autres, l'invasion du Panama en 1989, la première guerre du Golfe contre l'Irak en 1991, l'intervention en Somalie en 1992-93, l'invasion d'Haïti en 1994, le bombardement du Soudan et de l'Afghanistan en 1998, la guerre contre la Serbie en 1999 ainsi que l'invasion et l'occupation de l'Afghanistan en 2001 et de l'Irak en 2003. Sous Obama, les États-Unis ont mené une guerre contre la Libye, attisé une guerre civile en Syrie afin de renverser le gouvernement de Bashar al-Assad et perpétré des attaques de drones en Afghanistan, au Pakistan, au Yémen et en Somalie.

Dans sa campagne de domination du monde, l'impérialisme américain conduit l'humanité vers une autre et terrible guerre mondiale. Vers la fin de son discours, Obama a prononcé les paroles suivantes en parlant de l’OTAN: «Le spectre de la guerre mondiale qui planait à la fondation de cette institution s'est dissipé et le risque d'une guerre entre les grandes puissances a été réduit.» Ces mots étaient prononcés au moment où Washington et l'OTAN continuent de transformer l'Europe de l'Est en un camp militaire et d'utiliser la guerre civile en Ukraine – une crise qu'ils ont eux-mêmes créée – pour provoquer un conflit entre l'Occident et la Russie, tous deux possédant l'arme nucléaire.

Seulement quelques minutes plus tard, Obama a proféré des menaces flagrantes à l'endroit de Moscou, déclarant: «Nous allons renforcer nos alliés de l'OTAN et jurer de faire respecter le pacte collectif d'auto-défense».

En Asie, Washington mène une offensive diplomatique, économique et militaire agressive contre la Chine. Et la nouvelle guerre en Syrie risque de se propager à l'ensemble du Moyen-Orient et déclencher un affrontement entre les États-Unis et leurs alliés d’une part, et les partenaires du régime syrien, l'Iran et la Russie, d’autre part. En fait, contrairement à ce qu'avance Obama, le risque de guerre entre les grandes puissances n'a jamais été aussi élevé.

Arrivant au sujet principal de son discours, le déclenchement d’une guerre «décisive» supposément dirigée contre le terrorisme islamique, Obama a déclaré que «nous ne pouvons pas nous fier à des règlements écrits pour un siècle différent». En d'autres mots, la charte de l'ONU, qui interdit la guerre en tant qu'instrument de politique étrangère et empêche les pays d'intervenir dans les guerres civiles d'autres pays, ne s'applique plus.

Obama a continué en décrivant le désastre qui règne en Iraq et en Syrie, l'attribuant entièrement à ce qu'il appelle «le cancer de l'extrémisme violent» dans le monde musulman. Mais tout le monde dans l’auditoire était bien conscient que l’impérialisme américain est pleinement responsable de la catastrophe dans cette région.

Au même moment, Obama a déclaré, «Il est temps de reconnaître la destruction causée au Moyen-Orient par les guerres par procuration et les campagnes de terreur entre sunnites et chiites», pour ensuite se vanter du fait qu’ «avec nos partenaires, les États-Unis forment et équipent l'opposition syrienne [majoritairement sunnite] pour qu'elle fasse contrepoids aux terroristes de l'EI et à la brutalité du régime Assad [chiite]».

Il est impossible de cataloguer tous les énormes mensonges qu'Obama a réussi à insérer dans un discours de 45 minutes. Mais sa présentation de la crise en Ukraine illustre bien la collision entre ses paroles et la réalité.

«Voici les faits», a-t-il dit. «Après que le peuple d'Ukraine a organisé des manifestations populaires et lancé un appel à des réformes, leur président corrompu a fui. Contre la volonté du gouvernement à Kiev, la Crimée a été annexée, la Russie a approvisionné l'est de l'Ukraine en armes, appuyant des séparatistes violents et un conflit qui a coûté des milliers de vies.»

En fait, les «manifestations populaires» ont été financées et orchestrées par les États-Unis et l'Allemagne. Elles ont été menées par des fascistes armés qui glorifient les collaborateurs ukrainiens de l'occupation nazie et du massacre des juifs ukrainiens.

Le président élu, qui était pro-russe, a été renversé par un coup d'état, et le gouvernement illégal qui l'a remplacé, dans lequel siègent des néo-nazis et des ultra-nationalistes, a été rejeté par la majorité des citoyens de l'est du pays.

La vaste majorité des milliers de victimes ukrainiennes subséquentes ont été tuées par l’armée ukrainienne et des milices dominées par des fascistes appuyés par les États-Unis, qui ont assiégé des villes sous le contrôle de séparatistes pro-russes.

Le mois dernier, Israël, l'allié de Washington au Moyen-Orient, a sauvagement bombardé les Palestiniens sans défense de Gaza, causant la mort de plus de 2.200 personnes, la vaste majorité étant des civils.

Il est difficile de dire ce qui est le plus inquiétant : l'idée qu'Obama est pleinement conscient du fossé qui sépare ce qu'il dit de la réalité, ou qu'il est tellement détaché de la réalité qu'il croit en son discours. Il se peut très bien que les historiens du futur considèrent ce discours comme un point tournant dans la désorientation de la classe dirigeante alors qu'elle entraîne l'humanité vers une nouvelle guerre mondiale.

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