Le dirigeant fasciste Yarosh nommé conseiller de l’armée ukrainienne

Dmitro Yarosh, le fondateur et dirigeant de l’organisation fasciste Secteur droit a été nommé conseiller officiel du chef d’état-major de l’armée ukrainienne. La nomination a été annoncée par le ministère ukrainien de la Défense. En outre, les milices paramilitaires de Secteur droit doivent être intégrées aux forces armées.

Sur le site internet du ministère de la Défense on pouvait lire dimanche la déclaration suivante: « Le lieutenant-général Viktor Mouzhenko, chef d’état-major, et Dmitri Yarosh se sont accordés sur la forme de collaboration à adopter entre Secteur droit et les forces armées de l’Ukraine. » L’armée ukrainienne y exprimait sa grande « appréciation » des « contributions » apportées par les bataillons de volontaires qui « rendent des services remarquables à la défense de l’Ukraine. »

On y cite Mouzhenko qui dit: « Nous comprenons le besoin de changement et d’accroissement de l’efficacité à tous les niveaux de l’armée. Nous envisageons aussi différents modèles de formation de l’armée de réserve. Nous sommes en train d’élaborer des réformes que nous appliquerons. Nous avons rassemblé tous les patriotes et tous les défenseurs de l’Ukraine sous une direction unique. L’ennemi comprend notre unité et le fait que ses attaques échoueront. Nous avons un objectif commun qui est l’Ukraine unie. L’armée deviendra plus forte de semaine en semaine. »

Quant à Yarosh, il a déclaré que « l’unité est la condition préalable clé pour tous nouveaux combats victorieux. » En vue de « protéger l’Etat contre des ennemis externes, » les bataillons de volontaires de Secteur droit étaient prêts à s’intégrer à l’armée ukrainienne officielle.

Ces annonces indiquent clairement que les milices fascistes qui ont joué un rôle de premier plan dans le renversement du président Viktor Ianoukovitch le 22 février 2014 donnent de plus en plus le ton dans le régime pro-occidental dirigé par l’oligarque Petro Porochenko. Ils sont indispensables à la poursuite des combats contre les séparatistes pro-russes dans l’est de l’Ukraine et à la répression des manifestations populaires d’opposition à la politique de guerre et d’austérité du régime en Ukraine de l’Ouest.

Le programme de Secteur droit, qui se considère le successeur de l’Organisation des nationalistes ukrainiens (OUN), est bien connu. Il est droitier et nationaliste et rappelle à bien des égards l’idéologie fasciste des nazis avec lesquels l’OUN a collaboré dans la Seconde Guerre mondiale. Tout comme les nazis, Yarosh et Secteur droit regardent les communistes, les libéraux, les homosexuels, les Juifs, les Russes et la classe ouvrière comme leurs ennemis.

Quelques semaines après le coup d’Etat du Maïdan en février 2014, Yarosh avait donné une interview à Spiegel Online dans laquelle il avait dit: « Je suis un nationaliste ukrainien. Mon but est un Etat fort. » Il avait décrit le libéralisme comme « une variante du totalitarisme, » dit qu’il était « contre le mariage homosexuel, » et critiqué le caractère « anti-chrétien » de l’Union européenne. Il a expressément soutenu l’accord d’association avec l’Union européenne qui prévoit des attaques massives contre le niveau de vie de la classe ouvrière.

Dans une brochure intitulée Nation et Révolution, Yarosh énonce son programme plus clairement encore. Il s’y prononce contre la démocratie parlementaire et y préconise un nationalisme ethnique. Il cherche à répandre « l’idéologie nationaliste sur tout le territoire de notre Etat, » à débarrasser l’Ukraine de toute influence russe et à imposer le « rôle dirigeant du peuple-souche dans le pays. »

D’autres points du programme de Secteur droit préconisent l’armement nucléaire de l’Ukraine et l’interdiction du Parti des régions et du Parti communiste.

L’intégration de Secteur droit au régime Porochenko démasque la propagande officielle d’une « révolution démocratique » qui se serait produite en Ukraine. Dans le contexte de nouvelles attaques sociales et de préparatifs d’une nouvelle offensive militaire en Ukraine de l’Est, le programme de Secteur droit, qui est responsable de crimes horribles tels que le massacre commis l’année dernière à Odessa, a reçu de fait l’approbation officielle du gouvernement.

L’intégration officielle de Secteur droit au régime va de pair avec l’annonce faite par le parlement ukrainien (la Rada) d’interdire l’idéologie « communiste ». Le ministre ukrainien de la Justice, Pavel Petrenko, a ainsi annoncé à la télévision: « Dans un avenir proche, à savoir le 9 mai, le parlement devrait adopter un paquet législatif interdisant le communisme. Nous aurions dû faire cela il y a vingt ans. »

Petrenko a ajouté que l’actuel parlement avait la volonté politique et la majorité requise pour « tirer un trait définitif sur la traîne communiste que l’Ukraine tire derrière elle depuis 20 ans. »

En juillet dernier, le régime avait réclamé l’interdiction du Parti communiste d’Ukraine et dissout le groupe communiste à la Rada. Le Parti communiste, qui collaborait étroitement avec le régime d’Ianoukovitch, avait critiqué l’offensive gouvernementale en Ukraine et l’avait qualifiée de « guerre contre son propre peuple. »

Sur la base de cette lutte contre le « communisme », le régime mis en place et financé par l’Occident est de plus en plus en train de se transformer en véritable dictature d’extrême-droite. Du point de vue de l’élite dirigeante ukrainienne et de ses soutiens à Washington et à Berlin, la création d’un tel régime est indispensable à la mise en œuvre d’un programme d’austérité et de guerre en dépit d’une résistance populaire croissante.

Lors d’une interview accordée ce weekend au journal allemand Süddeutsche Zeitung, le premier ministre ukrainien Arseniy Iatseniouk a brossé un tableau sombre du pays. « Notre temps est déjà écoulé, » a-t-il dit. « Il est parfois très difficile d’expliquer aux gens pourquoi nous faisons passer simultanément tant de réformes douloureuses. »

Néanmoins, a-t-il ajouté, les réformes étaient « inévitables » et « le seul moyen de sauver notre économie. » Il a poursuivi en disant, « Et oui, beaucoup de gens sont déçus, fatigués, las de la guerre. »

Le journal Die Zeit a ainsi décrit récemment la catastrophe sociale en Ukraine: « L’Ukraine qui regorge en fait d’importantes matières premières telles le minerai de fer et le gaz naturel, et qui fut jadis le grenier et le centre de la fabrication de machines-outils de l’Union soviétique, n’est même plus en mesure de verser à sa population un salaire minimum supérieur à celui du Ghana et de la Zambie, les pays les plus pauvres d’Afrique. »

L’article dit encore: « Ceux qui autrefois pensaient que la pauvreté s’étendrait à des couches de plus en plus larges de la société avaient à l’esprit la Grèce ou le Portugal où des personnes âgées pauvres se sont suicidées parce qu’elles ne pouvaient plus payer l’électricité et la nourriture. L’Ukraine a maintenant rejoint cette liste. Ceci ne vaut pas seulement pour les régions où il y a la guerre. Même à l’Ouest du pays le manque d’argent et de perspective affligent de plus en plus de familles. Un récent sondage a constaté que 40 pour cent de gens se sentaient pauvres. »

Au début de la semaine dernière, le ministre ukrainien de l’Intérieur, Arsen Abakov, a annoncé qu’à partir du 20 avril, des soldats américains débuteraient l’entraînement d’unités de la Garde nationale en Ukraine de l’Ouest, près de la frontière polonaise. Les Etats-Unis ont aussi livré des armes aux unités de la Garde nationale.

Les forces fascistes de Secteur droit collaboreront désormais directement avec l’armée américaine, qui leur fournira aussi des armes, pour qu’elles puissent servir de troupes de choc contre la classe ouvrière ukrainienne et de composante dans les préparatifs de guerre de l’OTAN contre la Russie.

(Article original paru le 7 avril 2015)

 

 

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