Après l’attentat contre Charlie Hebdo, Obama et Cameron préparent la guerre et la répression

Le premier ministre britannique David Cameron a rencontré hier le président américain Barack Obama à la Maison Blanche pour discuter de l’escalade militaire menée par les deux pays au Moyen-Orient, de nouvelles provocations de l’OTAN contre la Russie et, après l’attentat contre Charlie Hebdo en France, d’une répression policière accrue au nom de la « guerre contre le terrorisme. »

La veille de cette réunion, Obama et Cameron avaient fait publier une tribune commune dans le Times de Londres du groupe Murdoch. « En confrontant les terroristes qui nous menacent, en s’engageant ensemble contre les agissements agressifs de la Russie et en poursuivant nos efforts pour développer notre croissance économique, nous continuerons à améliorer la sécurité et la prospérité que nos peuples méritent », ont-ils déclaré.

Les deux chefs d’Etat – dont les pays ont commis des actes de torture en violation du droit national et international, lancé des guerres basées sur des mensonges, et mis en œuvre des mesures d’Etat-policier contre leurs propres populations – ont écrit : « Nous ne permettrons pas que la voix de la liberté soit muselée. » Ils ont ajouté que « notre capacité de défendre nos libertés est enracinée dans notre force économique et dans les valeurs qui nous sont chères : la liberté d’expression, le règne de la loi et de solides institutions démocratiques. »

La déclaration continue, « Que nous soyons confrontés à des fanatiques isolés ou à des organisations terroristes, telles qu’al Qaïda, l’Etat islamique (EI) ou Boko Haram, nous ne serons pas intimidés par les extrémistes. Nous vaincrons ces tueurs barbares et leur idéologie dévoyée. qui cherche à justifier le meurtre d’innocents, qu’il s’agisse d’écoliers à Peshawar ou des jeunes filles obligées de commettre des attentats suicides dans le Nord du Nigeria. »

Les deux hommes n’ont bien évidemment pas mentionné que les ravages causés au Moyen-Orient sont en grande partie l’œuvre de l’impérialisme américain et britannique qui, aux côtés de la Turquie et de leurs alliés au Golfe, ont financé et armé des extrémistes islamistes contre des régimes en Libye, en Syrie et ailleurs.

En Ukraine, Obama et Cameron ont soutenu les ultranationalistes et les néonazis qui ont dirigé en février dernier un coup d’Etat pour renverser Viktor Ianoukovitch, afin d'installer un régime pro-OTAN et antirusse. Cette expansion des forces de l’OTAN jusqu’aux frontières de la Russie menace d’entraîner la planète dans une guerre mondiale nucléaire.

Cameron recherche tout spécialement la coopération d’Obama pour forcer les sociétés américaines comme Facebook et Twitter à collaborer étroitement avec services de renseignement britanniques. Il a promis d’introduire une « charte des fouineurs » donnant aux agences britanniques de renseignement MI5, MI6 et au Quartier général des communications du gouvernement (GCHQ) le pouvoir d’accéder aux messages cryptés.

Obama et Cameron ont tous deux provoqué la haine populaire en lançant des attaques contre les salaires et les acquis sociaux des travailleurs, tout en poursuivant une politique qui a enrichi les criminels financiers responsables du krach de 2008.

En France, comme aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, le gouvernement se sert actuellement de la « guerre contre le terrorisme » pour justifier le militarisme et la répression à l’intérieur du pays. Le président François Hollande, dont le gouvernement PS est le plus impopulaire d’Europe depuis la Deuxième Guerre mondiale, a déployé 10.000 troupes en France, courtisé la dirigeante du Front national et étendu les frappes aériennes en Irak, ainsi que sa présence navale commune avec les Etats-Unis dans le Golfe persique.

Le secrétaire d’Etat américain John Kerry a aussi rencontré Hollande à Paris hier pour évoquer « la coopération contre les extrémistes radicaux », selon NBC.

Une répression sécuritaire à l'échelle européenne a fait suite aux attentats à Paris. Jeudi, des unités paramilitaires de la police fédérale ont tué deux personnes et arrêté une troisième personne à Verviers, dans l’Est de la Belgique, près de la frontière allemande. Le substitut du procureur, Eric Van der Sypt, a indiqué que la police ciblait des djihadistes présumés revenus de Syrie. Il a affirmé, sans en fournir la preuve, que l’assaut de la police avait empêché des attaques terroristes de grande envergure en Belgique. Les deux suspects identifiés auraient trouvé la mort après avoir ouvert le feu contre la police avec des fusils d’assaut.

A Washington, Cameron a dit que les événements en Belgique « semblent être une nouvelle indication des risques énormes posés par le terrorisme islamique extrémiste en Europe. Nous devons rester extrêmement vigilants, nous devons prendre toutes les mesures possibles pour vaincre ce mal ».

En France, le gouvernement Hollande a financé le tirage d’exemplaires supplémentaires du dernier numéro de Charlie Hebdo qui montre en couverture de nouvelles caricatures provocatrices antimusulmanes. La plupart des organes de presse du pays ont reproduit la page de couverture en avançant comme justificatif un engagement pour la liberté d’expression alors qu’une répression de la liberté d’expression était en cours.

Pour la première fois depuis sa promulgation, le 13 novembre 2014, la France a mis en application une loi criminalisant « le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l’apologie de ces actes », à présent passible de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende. Les peines pour apologie du terrorisme sur Internet, soit sur les réseaux sociaux, soit sur un blog ou une vidéo, sont portées à sept ans d’emprisonnement et à une amende de 100.000 euros.

Plus de 50 personnes font l’objet d’enquêtes relatives à l’apologie du terrorisme et de menaces terroristes, et le premier ministre Manuel Valls réclame des pouvoirs plus vastes contre les sites Internet.

En Grande-Bretagne, de nombreux journaux, du Times jusqu’au The Guardian, qui se dit libéral, se sont joints à la BBC pour reproduire la couverture de Charlie Hebdo. En Allemagne, Deutsche Welle, Der Spiegel, la Frankfurter Allgemeine Zeitung, la Süddeutsche Zeitung, le Frankfurter Rundschau et Die Tageszeitung, journal lié aux Verts, ont reproduit la couverture.

Commentant la publication de la caricature par le journal australien The Australian, le premier ministre Tony Abbott a précisé : « J’aime assez ce dessin. »

(Article original paru le 16 janvier 2015)

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