Déclaration du Parti de l’égalité socialiste (PES) pour l’élection présidentielle sri-lankaise

Le Parti de l’égalité socialiste (PES), la section sri-lankaise du Comité international de la Quatrième internationale (CIQI), appelle les travailleurs, les jeunes, les intellectuels et les femmes au foyer à soutenir sa campagne pour l’élection présidentielle du 8 janvier et à y participer.

Notre candidat, Pani Wijesiriwardena, est le seul à se battre pour un programme socialiste contre la menace grandissante d’une guerre mondiale et l’assaut incessant mené contre le niveau de vie et les droits démocratiques des travailleurs. Nous nous opposons à tous les candidats capitalistes et à leurs soutiens de la pseudo-gauche dont le Parti Nava Sama Samaja (NSSP) et le Parti socialiste unifié (USP).

Wijesiriwardena qui est membre du comité politique du PES, a une longue histoire de lutte, s’étendant sur plus de quatre décennies, pour les intérêts de la classe ouvrière. Il est enseignant retraité et bien connu pour sa défense ardente de l’éducation publique contre les attaques de gouvernements successifs et contre la traitrise des syndicats. Wijesiriwardena est aussi au Comité de rédaction du WSWS à Colombo.

L’ensemble de l’establishment médiatique et politique de Colombo maintient les travailleurs et la jeunesse dans l’ignorance quant au danger croissant de guerre. A l’opposé de tous les autres partis, le PES met la lutte contre la guerre impérialiste au centre de sa campagne électorale. Nous voulons briser la conspiration du silence et, en collaboration avec nos partis frères du CIQI, construire un mouvement international anti-guerre de la classe ouvrière pour mettre fin au capitalisme.

La crise mondiale financière de 2008 a marqué le début d’un effondrement du capitalisme qui va en s’aggravant et qui a fortement exacerbé tensions et rivalités géopolitiques. Une fois de plus les puissances impérialistes, Etats-Unis en tête, luttent pour le contrôle mondial des ressources, des marchés et des positions stratégiques par tous les moyens, y compris militaires. Cent ans après la Première Guerre mondiale et 75 ans après la Deuxième Guerre mondiale, l’ordre capitaliste pourrissant menace l’humanité d’un désastre plus énorme encore.

L’année 2014 a marqué une accélération dramatique de la marche vers la guerre. En février, les Etats-Unis ont, avec l’Allemagne, provoqué une confrontation avec la Russie – une puissance nucléaire – en orchestrant en Ukraine un coup d’état porté par des fascistes. En août, Obama a autorisé une guerre illimitée en Iraq et en Syrie au prétexte de combattre les militants islamistes; une guerre qui a le potentiel d’embraser le Moyen Orient, entrainant une participation des principales puissances.

En Asie, les Etats-Unis accélèrent l’accroissement de leurs capacités militaires contre une Chine dotée de l’arme nucléaire, la principale cible de leur « pivot vers l’Asie ». Washington développe partout dans la région les alliances militaires, les partenariats stratégiques et les arrangements pour l’établissement de bases militaires. N’importe laquelle des nombreuses poudrières de la région – Péninsule coréenne, disputes maritimes en mer de Chine méridionale ou orientale ou encore disputes frontalières entre l’Inde et la Chine – a la capacité de déclencher une guerre.

Dans un discours prononcé au sommet du G20 le mois dernier, Obama a réaffirmé avec emphase son engagement vis-à-vis du « pivot », affirmant que les Etats-Unis avaient investi « sang et argent » dans la région pendant la dernière guerre mondiale – et, par implication, qu’ils le referaient de nouveau.

Tous les pays d’Asie-Pacifique s’enfoncent dans le tourbillon des rivalités et des préparatifs de guerre. Les Etats-Unis renforcent leur partenariat stratégique avec l’Inde, leurs alliances avec le Japon, la Corée du Sud, l’Australie, les Philippines et la Thaïlande et recherchent des accords militaires partout dans la région. Le Sri Lanka n’y fait pas exception.

Le Sri Lanka et la marche des Etats-Unis vers la guerre

La crise politique qui entoure l’élection présidentielle sri-lankaise est l’expression directe de ces tensions géopolitiques.

Au cours des cinq dernières années, le président Mahinda Rajapakse a suivi la voie d’un équilibre instable entre la Chine et les Etats-Unis. Tout en restant fortement dépendant de l’aide et de l’investissement chinois, le gouvernement Rajapakse s’est vu confronté à une offensive cynique de la part des Etats-Unis à propos des « droits de l’homme ». Ayant soutenu la guerre contre les LTTE (Tigres de libération de l’Eelam tamoul) et fermé les yeux sur les atrocités commises par l’armée sri-lankaise, les Etats-Unis ont ensuite exploité cyniquement ces mêmes crimes de guerre pour faire pression sur Rajapakse pour qu’il s’écarte de Beijing.

Confronté à une opposition croissante à l’intérieur comme à l’étranger, Rajapakse a annoncé une élection avancée de deux ans afin de devancer ses opposants et de s’assurer le renouvellement de son mandat. Cependant, dans une opération de toute évidence préparée longtemps à l’avance, le ministre de la Santé, Maithripa Sirisena a immédiatement quitté le gouvernement et annoncé qu’il se présentait comme candidat commun de l’opposition, soutenu par le Parti national unifié (UNP).

Washington a manifestement donné le feu vert à cette tentative pour diviser le Sri Lanka Freedom Party au pouvoir (SLFP) et sa coalition et jeter les bases d’une défaite de Rajapakse lors de l’élection. Le rôle clé dans ce complot est revenu à l’ancien présidente Chandrika Kumaratunga qui a utilisé son influence au sein du SLFP pour orchestrer une alliance entre Sirisena et l’UNP. Kumaratunga est liée, à travers son engagement dans la Fondation Clinton, à Hillary Clinton, l’ancienne ministre américaine des Affaires étrangères, l’un des principaux architectes du « pivot » d’Obama vers l’Asie.

Le mot d’ordre de Sirisena et du camp de l’opposition – « lutter pour la démocratie contre le gouvernement Rajapakse » - est aussi frauduleux que la posture de champion des « droits de l’homme » prise par Washington qui mène des guerres d’agression illégales, emploie la torture et les assassinats par drones.

Rajapakse est à la tête d’un régime autocratique qui est responsable de dizaines de milliers de morts civiles durant la guerre contre les LTTE et de mesures d’Etat policier contre l’opposition à son programme d’austérité. Toutefois, le PES avertit que Sirisena, s’il devait être élu, n’aurait, de même que Rajapakse, aucun scrupule à imposer les intérêts de la classe dirigeante. Tous les partis de l’opposition réunis autour du « candidat commun » ont du sang sur les mains.

* Sirisena en tant que ministre de premier plan est pleinement responsable de tous les crimes du gouvernement Rajapakse et de ses abus. Il n’en a répudié aucun.

* L’UNP a lancé la guerre communautariste avec les pogromes sanguinaires anti-tamouls de 1983 et dans les années 1980 il a déchainé des escadrons de la mort qui ont massacré 60,000 jeunes afin d’écraser la révolte rurale.

* Kumaratunga, l’instrument de Washington, a été élue présidente en 1994 avec la promesse de mettre fin à la guerre, mais elle l’a, au contraire, intensifiée. En 2004, elle a utilisé ses larges pouvoirs exécutifs pour destituer le gouvernement élu de l’UNP.

* Le Parti démocratique est dirigé par l’ancien chef de l’Armée, le général Sarath Fonseka, qui fut responsable des offensives finales contre les LTTE en 2009, qui ont tué des dizaines de milliers de civils.

* Les extrémistes cingalais-bouddhistes du Jathika Hela Urumaya (JHU), qui avaient quitté l’alliance de Rajapakse, ont été des promoteurs enragés de la guerre communautariste et continuent de promouvoir la discrimination anti-tamoule.

* Il en va de même du parti Janatha Vimukthi Peramuna (JVP), qui accorde un soutien indirect à Sirisena en appelant à la défaite de Rajapakse et en ne présentant pas de candidat propre.

Ce n’est pas la « démocratie » qui rassemble toute cette bande réactionnaire mais la profonde frustration de sections de la classe dirigeante et de la classe moyenne devant le fait que le népotisme du gouvernement ainsi que son échec à s’aligner complètement sur Washington contre Beijing, va porter atteinte à leurs affaires et aux opportunités de faire avancer leur carrière.

Si le parti de l’Alliance nationale tamoule (TNA) ne donne pas ouvertement son soutien à Sirisena, il lui donne pourtant un soutien tacite, estimant que ses intérêts mercenaires seront mieux servis par un gouvernement aligné sur les Etats-Unis. Le TNA répand le mensonge qu’une autonomie plus importante dans le nord et l’est de l’île aura des effets bénéfiques pour les travailleurs et paysans tamouls. En réalité, cela ne servira qu’à enrichir les élites tamoules.

Le rôle politique le plus insidieux est celui joué par les divers libéraux, responsables d’ONG, activistes des droits de l’homme, universitaires et, en particulier, par les organisations de la pseudo-gauche. Ils fournissent un camouflage « démocratique » fortement nécessaire à Sirisena et à son alliance sordide.

Le principal parmi ces meneurs de claque est le soi-disant de gauche NSSP dont le dirigeant Wickremabahu Karunaratne se présente maintenant sur des tribunes de campagne en faveur de Sirisena, appelant à voter pour ce transfuge du gouvernement et le présentant comme le moyen de « faire tomber le règne dictatorial de Rajapakse. »

Le parti USP et le Frontline Socialist Party soit disant de gauche ne sont pas si éhontés. Mais leurs dénonciations de Rajapakse et leur silence sur le bilan anti-classe ouvrière de Sirisena et de ses alliés en disent long. C’est un soutien honteux de cette alliance droitière pro Etats-Unis.

Le PES s’oppose sans équivoque à Sirisena, de même qu’à tous ses alliés, apologistes et sympathisants. Nous avertissons les travailleurs et la jeunesse que s’il est élu, le Sri Lanka sera davantage impliqué dans les plans de guerres de Washington, avec des conséquences désastreuses pour les travailleurs.

En même temps, le PES n’accorde aucun soutien à Rajapakse et rejette sa posture de « victime d’un complot international. » Rajapakse n’est pas un opposant de l’impérialisme américain. Au contraire, au cours de ses manœuvres diplomatiques, son gouvernement a fait en sorte qu’il y ait des relations de travail rapprochées entre les militaires des Etats-Unis et du Sri Lanka et a signé un accord d’entretien militaire avec le Pentagone.

L’agenda de contre-révolution sociale

La marche vers la guerre s’accompagne de la contre-révolution sociale contre la classe ouvrière. Peu importe que ce soit Rajapakse ou Sirisena qui remporte l’élection du 8 janvier, tous deux vont intensifier la politique d’austérité dictée par le capital financier international, obligeant les travailleurs à supporter les effets de la crise économique. Les deux camps se sont engagés à continuer « la politique économique d’ouverture » pro marché qui a déjà dévasté les conditions de vie des travailleurs.

Rajapakse se vante du fait que son gouvernement a accru le revenu annuel par habitant et l’a porté à 3.280 dollars, mais en réalité le gouffre social entre riches et pauvres n’a fait que s’accroitre. Les 20 pourcent les plus riches touchent 53.5 pour cent du revenu du pays, alors que les 20 pourcent les plus pauvres n’en obtiennent que 4.4 pourcent. Le niveau de vie des travailleurs ne fera qu’empirer lorsque le prochain gouvernement imposera ce qu’exige le Fonds monétaire international: la réduction drastique du déficit budgétaire à 3.8 pourcent du PIB d’ici 2016. Tandis qu’on réduira le subventionnement du prix des biens de première nécessité et de services essentiels tels que l’éducation et la santé, on prodiguera des exonérations d’impôts et des incitations économiques supplémentaires à la grande entreprise et une riche élite.

Rajapakse a déjà montré clairement comment il répondra à une opposition de la classe ouvrière. Après la défaite des LTTE en 2009, il a continué à développer et à renforcer son appareil d’Etat policier et militaire. La police et les militaires ont lancé des attaques violentes contre des manifestations et des grèves, tuant un jeune travailleur de la zone franche de Katunayake en 2011, un marin pêcheur de Chilaw en 2012, et trois jeunes pendant une manifestation à Weliwerya contre la pollution industrielle en 2013. Si Sirisena l’emporte, il sera tout aussi impitoyable que Rajapakse pour ce qui sera de réprimer la résistance des travailleurs.

Le gouvernement Rajapakse a délibérément fomenté le communautarisme comme moyen de diviser la population travailleuse. Il prétend frauduleusement que les « terroristes des LTTE se raniment » afin d’inciter la peur et de justifier son occupation militaire massive du Nord et de l’Est du pays, en même temps qu’il encourage les groupes cingalais-bouddhistes fascistes tels le Bodu Bala Sena et le Ravana Balakaya à s’en prendre aux musulmans. L’adoption politique des extrémistes communautaristes de JHU par Sirisena démontre que celui-ci emploiera des méthodes semblables.

Le PES s’oppose à toute forme de nationalisme, chauvinisme et racisme, et se bat pour unir les travailleurs sans tenir compte de l’ethnicité, de la langue, ou de la religion, dans une lutte pour leurs intérêts communs de classe.

La lutte contre la guerre et l’austérité

La lutte contre la guerre impérialiste et l’austérité est, de par sa portée, forcément internationale. Il est littéralement impossible de s’opposer aux actions prédatrices de l’impérialisme ou des conglomérats mondiaux et de la haute finance sur la base d’une seule nation, quelle que soit sa taille.

Depuis l’indépendance officielle de 1948, la bourgeoisie sri-lankaise a fait maintes fois la preuve de son incapacité organique de s’opposer à l’impérialisme. Seule la classe ouvrière, sous la direction du PES, peut lutter contre l’impérialisme et sa marche vers la guerre en se joignant à ses frères et sœurs de classe d’Asie et du reste du monde pour construire un mouvement anti-guerre international.

De la même manière, c’est seulement la classe ouvrière qui peut organiser une vraie lutte pour les droits démocratiques. Le PES appelle à une assemblée constituante démocratiquement élue qui rédige une nouvelle constitution abolissant toutes les lois discriminatoires et répressives. La revendication d’une telle assemblée constituante ne peut assurer des droits démocratiques que dans la mesure où elle fait partie de la lutte politique pour mobiliser la classe ouvrière et la masse des opprimés pour l’abolition du capitalisme.

Le PES préconise la politique suivante pour répondre à la crise sociale à laquelle font face les travailleurs et les pauvres :

* Pour assurer des emplois aux jeunes chômeurs nous proposons l’extension de l’emploi au moyen d’une réduction de la semaine de travail à 30 heures par semaine, sans perte de salaire. Un programme de travaux publics à hauteur de milliards de rupees doit être lancé pour créer des emplois bien rémunérés et répondre aux besoins sociaux urgents en fait de logements, d’écoles, d’hôpitaux et de réseau routier.

* Nous exigeons l’abolition du système du travail intérimaire, utilisé pour saper les salaires et les conditions de travail de toute la classe ouvrière. Plus de la moitié de la main-d’œuvre dépend du travail intérimaire et temporaire. Tous les travailleurs doivent avoir le droit aux emplois sécurisés et bien rémunérés. Les salaires doivent être immédiatement augmentés, portés à un niveau permettant de vivre et indexés sur l’inflation.

* Le PES appelle à la dépense de milliards de rupees pour développer l’éducation et la santé publiques et pour permettre à tous l’accès à des services gratuits et de haute qualité. Le logement public doit être fortement développé afin de fournir des logements décents à des loyers abordables.

* Nous préconisons de mettre les terres de l’Etat à la disposition de tous les fermiers sans terre, sans tenir compte de leur ethnicité. Les dettes de tous les fermiers et pêcheurs pauvres doivent être immédiatement annulées et des crédits à taux faible, des conseils techniques et d’autres aides doivent être mis à la disposition de ces derniers. Les prix de leurs produits doivent être garantis afin de leur assurer un niveau de vie décent.

La politique décrite ci-dessus n’est pas compatible avec la propriété privée des grandes entreprises et des banques, celles-ci doivent être nationalisées et placées sous le contrôle démocratique des travailleurs. La société entière doit être réorganisée de haut en bas sur une base socialiste afin de répondre aux besoins pressants de la majorité et non pour satisfaire aux profits d’une minorité de super-riches.

La lutte pour le socialisme n’est possible qu’à travers un combat pour l’indépendance politique de la classe ouvrière par rapport à toutes les factions de la bourgeoisie. La classe ouvrière doit mobiliser les masses rurales dans la lutte pour un gouvernement ouvrier et paysan qui mettra en œuvre une politique socialiste. Le PES lutte pour une République socialiste du Sri Lanka et d’Eelam comme partie intégrante d’une union des républiques socialistes d’Asie méridionale, et d’une union internationale.

Bâtir le PES

Le Ligue révolutionnaire communiste (RCL), le précurseur du PES, fut fondé en 1968, dans une lutte politique contre la trahison éhontée du Lanka Sama Samaja Party des principes du socialisme internationaliste quand celui-ci avait rejoint le gouvernement capitaliste de Sirima Bandaranaike. Le RCL/PES fut le seul parti qui s’est battu systématiquement pour l’unité de la classe ouvrière tout au long de la guerre civile et avait exigé sur cette base le retrait de l’armée du Nord et de l’Est du pays.

Notre parti est basé sur l’héritage politique et théorique de Léon Trotski, qui a dirigé avec Lénine, la Révolution russe de 1917. En 1938, Trotski a fondé la Quatrième internationale, basée sur le programme du socialisme internationaliste, afin de résoudre la crise de direction de la classe ouvrière. Le PES se fonde sur la théorie de la Révolution permanente de Trotski, qui a démontré que dans les pays d’un développement capitaliste tardif tel le Sri Lanka, seule la classe ouvrière est capable de résoudre les tâches démocratiques comme partie intégrale de sa lutte pour le socialisme.

Nous appelons les travailleurs, les pauvres ruraux, les jeunes et intellectuels à soutenir notre campagne politique. Rejoignez nos campagnes, assistez à nos réunions et aidez financièrement notre fonds électoral. Votez pour notre candidat. Surtout, nous vous encourageons à étudier attentivement notre perspective et notre programme politique, et à faire la demande d’adhérer au PES et le construire comme un parti révolutionnaire de masse de la classe ouvrière.

(Article original publié le 15 décembre 2014)

Loading