Le gouvernement français fait pression sur la Grèce pour intensifier l'austérité

Avant le sommet d'urgence du 22 juin sur la dette grecque, la France a pressé Syriza d'accepter les mesures d'austérité draconiennes voulues par les institutions –l'Union européenne (UE), la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI) – pour obtenir le versement de €7,2 milliards de nouveaux prêts. 

Avant la date limite du 30 juin pour le paiement de €1,6 milliards par la Grèce au FMI, le PS s'aligne sur Berlin et l'UE à Bruxelles pour pousser Syriza à imposer des coupes sociales brutales. 

Avant le sommet, François Hollande a indiqué que la Grèce devait capituler au diktat de l'UE pour rester dans la zone euro: « Si nous pouvons conclure ce soir, c'est mieux, sinon il faudra que les bases d'un accord soient posées ce soir pour qu'il puisse, cet accord, être obtenu dans les jours suivants ». 

Si Paris est plus lâche et insiste moins ouvertement sur l'austérité que Berlin, la bourgeoisie française n'est pas moins déterminée que son homologue allemande d'attaquer la classe ouvrière. Elle craint non seulement une défaillance grecque sur les créances détenues par la France, dont la valeur s'élève à €70 milliards, mais tout événement qui risquerait de bloquer la poursuite d'une politique d'austérité en Grèce ou ailleurs en Europe, notamment en France. 

Dimanche, lors d'une conférence de presse conjointe avec Hollande à Milan, le premier ministre italien Matteo Renzi a abondé dans ce sens: « Nous sommes tous convaincus du besoin d'offrir une solution permettant à la Grèce de rester dans la zone euro ». 

Au sommet de Bratislava, la capitale slovaque, vendredi, Hollande a insisté pour dire que tout accord devrait être conforme aux « règles européennes », c'est-à-dire attaquer les dépenses sociales et augmenter les impôts. 

La pression exercée par le PS sur Athènes pour imposer des coupes draconiennes expose la banqueroute de la politique de Syriza. En tant que représentant des classes moyennes aisées et de sections de la classe capitaliste, Syriza ne voulait même pas considérer une large mobilisation de la classe ouvrière contre l'austérité. Ayant gagné l'élection en promettant de mettre fin à l'austérité, Syriza voulait exploiter les divisions entre les principales puissances européennes pour forcer une modification des politiques d'austérité voulues par l'Allemagne. 

Syriza espérait que des pays de la zone euro, dont la France et l'Italie, impulseraient une politique monétaire inflationniste « d'assouplissement quantitatif » comme celle de la banque centrale américaine. Une telle politique de la part de la BCE aurait servi à renflouer les banques et fourni davantage d'argent à Syriza pour ses manœuvres politiques, comme l'avait fait le plan de sauvetage adopté par l'administration Obama. En l'occurence, les gouvernements français et italien n'ont offert aucun soutien public à Syriza, qui a bientôt capitulé aux mesures d'austérité voulues par Berlin. 

A présent que Paris et Rome s'alignent sur Berlin et insistent pour que Syriza attaque plus fermement la classe ouvrière, la faillite de la perspective d'une alliance grecque avec les bourgeoisies française et italiennes est patente. 

Hollande et Renzi n'ont avancé aucune critique des politiques d'austérité imposées à la Grèce. Ils n'ont même pas affiché la posture de solidarité adoptée par le chancellier autrichien, Werner Faymann, qui a déclaré cyniquement qu'il « se tenait du côté du peuple grec », tout en insistant pour qu'Athènes respecte ses engagements auprès de l'UE dans le cadre du programme d'austérité actuel. 

En visite à Athènes mercredi dernier, Faymann a dit: « Je sais qu’il y avait plusieurs propositions, y compris des institutions, que je trouve incompréhensibles. ... Le chômage est elevé, 30 à 40 pour cent n'ont pas de couverture médicale, et puis on augmente la TVA sur les médicaments. Les gens dans une situation difficile ne peuvent pas le comprendre ». 

Derrière le silence relatif du gouvernemet PS sur la crise grecque, c'est-à-dire sa réticence à afficher même une posture d'opposition à l'austérité dictée par Berlin et à ouvertement déclarer son soutien à l'austérité, il y a sa crainte d'une explosion sociale dans la classe ouvrière. 

Hollande s'est fait élire en 2012 avec des promesses électorales frauduleuses dont la renégociation du pacte fiscal européen auquel il allait rajouter un volet pour la croissance, malgré les critiques de Berlin. En même temps, Hollande avait signalé aux milieux dirigeants qu'il comptait attaquer rapidement les travailleurs et rétablir la compétitivité des entreprises françaises sur les marchés mondiaux. Peu après son élection, il a abandonné la renégociation du pacte fiscal pour imposer des mesures d'austérité et libéraliser l'économie afin d’aider les grandes sociétés. 

L'explosion du chômage qui a en résulté a fait de Hollande le président français le plus impopulaire depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale et le régime de Vichy. Un sondage l'année dernière a trouvé que sa politique économique avait un taux d'approbation de 3 pour cent. Cependant, alors qu'il pousse la Grèce à intensifier l'austérité, Hollande prépare la prochaine série d'attaques contre la classe ouvrière française, avec les mesures de libéralisation de la Loi Macron. 

(article publié en anglais le 23 juin 2015)

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