Le ministre de l'Intérieur bloque l'enquête sur les attentats Hyper Cacher-Charlie Hebdo

En septembre, le site d'informations Médiapart a révéĺé que le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve avait eu recours au secret défense pour bloquer l'investigation de l'attentat contre l'Hyper Cacher qui s'est déroulé en parallèle avec l'attentant terroriste contre Charlie Hebdo le 7 janvier. 

Les médias et les partis politiques français et internationaux maintiennent un silence assourdissant sur cette affaire. Cependant, il est facile de confirmer le rapport de Médiapart, en consultant le texte de la décision de Cazeneuve, inscrit discrètement au Journal officiel de la République française le 18 juin 2015. 

Cette décision refuse une requête de déclassification de documents émise le 10 avril 2015 par des juges d'instruction au tribunal de grande instance de Lille, chargés de l'enquête sur la provenance des armes d'Amédy Coulibaly, responsable de l'attentat contre l'Hyper Cacher. 

Le recours au secret défense constitue une déclaration de la part de Cazeneuve et du PS que les intérêts stratégiques fondamentaux de l'État français nécessitent la dissimulation du réseau qui a préparé les attentats du 7 janvier. Ceci souligne l'importance des informations qui ont fuité en mai dans La Voix du Nord, selon lesquelles ce réseau est constitué de forces de l'Etat et d'extrême-droite au service des politiques du PS en Syrie comme en France. 

Les dernières informations de Médiapart confirment que des gendarmes et un indic lié au Front national (FN), Claude Hermant, auraient armé Coulibaly. 

Selon Médiapart, « Des gendarmes lillois et un de leurs informateurs ont été au centre d’un trafic d’armes ayant permis d’alimenter Amedy Coulibaly, auteur de l’attaque de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes. S’ils n’ont rien su de la destination des armes, ils semblent bien avoir laissé filer les acheteurs ou perdu leur trace. Leur position est suffisamment délicate pour qu’ils se retranchent, courant avril, derrière le secret défense », position confirmée en juin par Cazeneuve. 

Coulibaly et les frères Kouachi, qui s'étaient rencontrés en prison avant de mener les attentats contre l'Hyper Cacher et Charlie Hebdo respectivement, faisaient partie des réseaux islamistes dont se sert Paris pour former des combattants islamistes et les acheminer vers les zones de combat en Syrie. 

Il reste à éclaircir les motifs qui ont poussé ces réseaux à acheminer des armes le 7 janvier non pas vers les combattants islamistes en Syrie, mais vers des islamistes en France. Cependant, il est déjà possible d'évaluer les impératifs criminels qui dictent la politique de l'élite dirigeante française et en particulier du PS, haï par les travailleurs pour ses politiques d'austérité et de chômage. 

Le PS a exploité ces attentats pour accélérer la transformation de la France en État policier, au prétexte faux que ceci empêcherait les attentats islamistes. Les attentats du 7 janvier lui ont servi de justification pour légaliser rétroactivement l'espionnage illégal de la population par les agences de renseignements avec une loi draconienne sur le renseignement, et pour envoyer des milliers de soldats dans les rues de France. 

Ceci n'est pas une lutte contre le terrorisme islamiste, qui est en fait étroitement lié à la stratégie internationale de l'élite dirigeante française, mais une tentative politiquement criminelle de renforcer le pouvoir répressif de l'État en France même. 

Dès le début de l'investigation de l'attentat, les services français ont agi pour obscurcir l'identité du réseau qui avait alimenté Coulibaly en armes. 

Médiapart révèle que « Le 20 janvier, les responsables de la Brigade criminelle et de la Sous-Direction antiterroriste (SDAT) ont résumé, dans une synthèse au parquet de Paris, les vérifications opérées au sujet des armes utilisées par Coulibaly sans faire état de la réponse d’Europol, datée du 16 janvier. Europol mentionne pourtant un 'traçage positif pour trois armes', et un 'traçage approchant pour deux armes', en précisant que ces cinq armes ont été achetées par la société lilloise d'Hermant à l’entreprise slovaque AGF Security. ». 

Dès le 14 janvier, les services de renseignement slovaques et Europol auraient averti les autorités françaises que les armes de Coulibaly avaient transité par la société de Hermant, ancien barbouze et indic de la gendarmerie. D'après les enquêteurs, Hermant a acheté ces armes sur le site internet slovaque de vente d'armes en ligne AGF Security pour un volume de 200 armes, revendues ensuite. Les juges antiterroristes de Paris n'ont rien fait de ce renseignement et ont apparemment tenté d'empêcher leurs homologues lillois d'avoir accès à ces renseignements. 

Les enquêteurs pensent que Hermant aurait également acquis 90 autres armes auprès d’un contact belge à Charleroi. Alors que l'achat d'armes de guerre est interdit en France, Hermant a pu par l'intermédiaire de la société de sa femme et sans être inquiété par la police, acheter des armes de guerres démilitarisées. L'achat de ces armes ne pouvait être possible sans la complicité de sections du renseignement ou de la gendarmerie, ce que confirme Médiapart

Un échange de mails entre Hermant et la gendarmerie démontre qu'il a contacté une « cible » qui aurait posté une annonce en 2013 sur le site de vente d’armes Delcampe. La « cible » n’est autre qu’un détective belge, domicilié près de Charleroi, entendu dans le cadre de cette affaire. 

Ce dernier affirmerait que « Claude Hermant était son principal client », qui lui « achetait 95 pour cent de ses armes démilitarisées provenant du site slovaque AFG », soit « plusieurs dizaines, sans savoir ce que le prévenu en faisait ensuite ». Les proches de Claude Hermant réfutent toutefois cette version : « Les transactions ne tournent, au maximum, qu’entre 4 et 6 armes en deux livraisons couvertes par la gendarmerie »

Selon Médiapart, les armes vendues par Hermant auraient également servi le 7 janvier à tuer la policière assassinée à Montrouge et dans une attaque contre un joggeur. Ce dernier accuse Amar Ramdani d'être l'auteur de l'agression.

Amar Ramdani, ami intime de Coulibaly, était le compagnon d'une gendarme des services de renseignement, Emmanuelle C., formatrice en renseignement opérationnel, la spécialité de Claude Hermant. Bien qu'elle soit en couple avec Ramdani, les enquêteurs n'ont pas fait le lien entre elle et Hermant.

Médiapart écrit que c'est auprès d'un dénommé Metin K. que Coulibaly, parfois en compagnie de Ramdani, a cherché à vendre le véhicule de sa compagne dans les semaines avant les attentats.

"Metin K., un autre contact désigné par Hermant aux enquêteurs, s'était présenté spontanément le 12 janvier aux autorités belges pour clarifier les détails de l'achat du véhicule. L'homme n'est pas inconnu des services de police et de renseignement. Suspecté de trafic d'armes et de drogue, il est aussi présenté comme un sympathisant des rebelles kurdes du PKK," relève le site Greffier Noir.

La tentative du PS de couvrir l'identité de pareils réseaux pour faciliter la poursuite de ses politiques de guerre impérialiste à l'étranger et d'attaques contre les droits démocratiques en France souligne le caractère foncièrement réactionnaire des intérêts de classe qu'il représente.

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