Star Wars – Le Réveil de la force: Pas de véritable réveil

Réalisé par J. J. Abrams; scénario de Lawrence Kasdan, J. J. Abrams et Michael Arndt 

La suite au dernier film de la célèbre trilogie de science-fiction Le Retour du Jedi (1983), Star Wars: Le Réveil de la force est sorti au cinéma le 18 décembre. Le premier était sorti en 1977. La sortie de Le Réveil de la force a été accompagnée d'une campagne de relations publiques à grande échelle et un vaste théâtre médiatique. Le public a été informé, plus ou moins, de son devoir civique d'aller voir le film.

Le nouveau film – réalisé par J.J. Abrams (Star Trek, 2009; Star Trek Into Darkness, 2013) – paraît 10 ans après ce qui devait être le «dernier» épisode de Star WarsLa Revanche des Sith, la conclusion d'une trilogie qui thématisait la transformation d'Anakin Skywalker en Darth Vader et celle de la République galactique «démocratique» en Premier Empire galactique. Cette nouvelle contribution sert de première partie d'une trilogie qui raconte l'histoire de la prochaine génération et la façon dont ils confrontent les fantômes de leurs prédécesseurs.

L'histoire prend place 30 ans après les événements présentés dans Le Retour du Jedi. L'alliance «rebelle» a rempli sa mission et établi une «Nouvelle République». Toutefois, un restant de l'ancien Empire galactique, connu comme le Premier Ordre, a commencé à exercer son pouvoir. Des combattants menés par la générale Leia Organa (Carrie Fisher) s'opposent à la montée du Premier Ordre et se nomment la «Résistance».

Rey (Daisy Ridley) et Finn (John Boyega) sur Jakku

Le Premier Ordre et la Résistance sont tous deux à la recherche de Luke Skywalker (Mark Hamill), «le dernier Jedi», qui s'est exilé. Le dirigeant du Premier Ordre, Snoke (Andy Serkis), une figure sinistre qui apparaît en tant qu'hologramme géant, envoie l'un de ses serviteurs, Kylo Ren (Adam Drive), afin de découvrir où se trouve Skywalker.

La recherche de Ren l'amène sur la planète Jakku, où un pilote de la Résistance, Poe Dameron (Oscar Isaac), a obtenu une carte indiquant où se situe Skywalker. Avant d'être capturé, Dameron insère ses données dans un petit droïde nommé BB-8. Pendant ce temps, l'un des Stormtroopers en compagnie de Ren, FN-2187 (John Boyega), plus tard Finn, désobéit quand Ren lui donne l'ordre d'exécuter un groupe de villageois et abandonne le Premier Ordre. Il aide Dameron à s'échapper des forces de Ren, mais leur petit vaisseau est abattu dans l'orbite de Jakku.

Se retrouvant seul sur la planète déserte, Finn croise une jeune pilleuse d'épaves nommée Rey (Daisy Ridley), qui s'est lié d'amitié avec BB-8. Finn échappe à d'autres attaques en quittant la planète avec Rey et BB-8 à bord du Millenium Falcon, le vaisseau appartenant à Han Solo (Harrisson Ford) qui a été volé il y a plusieurs années. Rey et Finn décident d'aider BB-8 à retourner vers la Résistance avec la carte et y arrivent éventuellement avec l'aide de Solo et Chewbacca (Peter Mayhew) qui étaient à la recherche de leur vaisseau.

Le Premier Ordre a développé une super-arme qui absorbe des étoiles et utilise leur énergie pour désintégrer des planètes, de façon similaire aux Étoiles de la mort dans la trilogie initiale. Les dirigeants du Premier Ordre préparent une attaque contre la planète où se situe la Résistance, précipitant une tentative désespérée par ses dirigeants, ainsi que Rey et Finn, de détruire l'arme terrifiante...

Nous devons rapporter qu'en fin de compte, Le Réveil de la Force est un film d'action médiocre. Il n'est pas aussi insupportable que la plus récente trilogie, dont les films ont été réalisés par George Lucas, mais il est tout de même médiocre, même comme simple divertissement.

Si Le Réveil de la Force se veut un récit initiatique, comme les films précédents, il échoue parce qu'il n'offre aucun aperçu plausible de ce processus ni d'aucun autre. Les personnages sont largement unidimensionnels. Rey est invariablement «fougueuse» et «énergique». Poe est «courageux» et «héroïque» Finn a «bon coeur» et, une fois engagé, «loyal jusqu'au bout». D'un autre côté, les méchants ne font que ricaner sinistrement et s'emportent sans cesse. Dans cette «galaxie très lointaine», la complexité psychologique est apparemment inconnue.

Tous les films de Stars Wars sont basés sur cette dichotomie simpliste entre le «bien» et le «mal». Curieusement, le «destin de la galaxie» dépend des capacités de quelques individus de chaque catégorie à contrôler leurs états mentaux, en partie hérités et en partie générés mystiquement.

Le film original de 1977 était une sorte de parodie, ou du moins y ressemblait – seuls les plus dévoués l'ont pris au sérieux. Carrie Fisher s'est d'ailleurs moqué de ses performances dans les trois premiers films, ce qui est devenu une partie intégrante de son numéro humoristique dans les années récentes. Et pourtant la voici qui semble prendre l'affaire très au sérieux. L'argent et la célébrité ont toujours leur attrait. Les scènes entre Ford et Fisher sont plutôt embarrassantes et on se sent mal pour eux.

La sortie de ce film est traitée comme un événement culturel et social majeur. Sans aucunement idéaliser le passé de l'industrie du cinéma américain, il fut un temps où «le film dont on parle beaucoup» était une tentative de dire quelque chose, peut-être de façon un peu maladroite, peut-être mélodramatique, peut-être superficiellement, sur notre monde. Il y a cinquante ans, des films tels que Elmer Gantry, West Side Story, Judgement at Nuremberg, To Kill a Mockingbid, Dr. Strangelove, Doctor Zhivago, Bonnie and Clyde, et The Graduate faisaient du bruit. Encore une fois, ces films avaient tous leurs défauts, parfois très sérieux, mais il s'agissait néanmoins de films sur quelque chose. Les histoires d'aventure de super héros étaient considérées comme des bêtises ou étaient limitées à la télévision du samedi matin pour enfants.

Le Premier Ordre, qui rappelle le régime nazi;

Le Réveil de la Force témoigne certainement de la période dans laquelle il a été produit. Comment le contraire serait-il possible, que ce soit pour cette oeuvre ou n'importe quelle autre? Les 15 à 20 dernières années, surtout depuis le 11 septembre 2001, de guerre continue et de militarisme belliqueux ont eu un impact. Ce film est assez violent et la première scène où Ren et ses Stormtroopers brûlent un village et exécutent tous ses occupants de façon similaire aux escadrons de la mort Einsatztruppen a une certaine résonance.

Mais Avatar de James Cameron a également fait référence à la brutalité d'invasions néocoloniales, sans représenter d'aucune façon une critique de la guerre impérialiste. Il serait erroné de confondre l'influence inévitable dans Le Réveil de la Force de dures réalités objectives avec un sentiment conscient ou cohérent contre la guerre. Une grande partie du film est un panégyrique à la tuerie et la dévastation indolore et sans aucun sang, tant que c'est pour une bonne cause. Les critiques sociales ou politiques du film, sous leur forme actuelle, sont trop amorphes et timides pour avoir un impact sérieux. Le Premier Ordre est représenté comme un régime fasciste à l'image des nazis, mais à la racine de cette organisation se trouvent des dirigeants «méchants» qui sont inexplicablement voués à un «côté obscur» de croyances spirituelles.

La marque Star Wars est la plus populaire dans l'histoire. Du premier jour de vente des billets pour Le Réveil de la Force jusqu'à la nuit avant l'ouverture, le vendeur de billets en ligne Fandango rapportait que le film avait dépassé le record de vente de billets pour tout film durant son temps à l'affiche. On estime que les préventes pour Le Réveil ont atteint 100 millions $. À la fin de sa première fin de semaine en salles, les recettes totalisaient 517 millions $, faisant de ce film le deuxième plus payant à son premier week-end.

Comme nous l'avons déjà noté, le film d'Abrams est essentiellement imposé à la population par un bombardement de marketing gigantesque. Barack Obama et Hillary Clinton l'ont mentionné lors de manifestations publiques.

Variety a par exemple rapporté, «La Maison-Blanche dit que Star Wars – Le Réveil de la Force sera présenté aux membres des familles Gold Star vendredi, une organisation de familles qui ont perdu des membres au combat militaire... Le président a également indiqué qu'il visionnerait la présentation, disant aux médias à la fin d'une conférence de presse, “OK tout le monde, je dois aller voir Star Wars.”»

Dans ses remarques finales lors d'un débat du Parti démocrate en décembre, Clinton avait conclu en disant: «Merci, bonne soirée et que la force soit avec vous.»

Beaucoup de ceux impliqués dans la production du film ont déclaré lors d'entrevues que la raison pour laquelle les gens sont encore attirés par Star Wars après 40 ans est que la série a un message positif qui donne de «l'espoir». Le problème est que cet «espoir» n'est pas fondé sur des réponses à des problèmes réels ou sur leur exploration. La fixation sur des personnalités «bonnes» et «mauvaises» ne va pas beaucoup plus loin que l'approche envers la réalité sociale tabloïd-feuilleton – ou les bêtises des campagnes politiques américaines où les électeurs sont encouragés à choisir un homme ou une femme sur la base des images générées par les médias qui sont entièrement séparées de leur position ou programme sociaux («il a un visage honnête», «elle a des capacités de leader»).

On peut également parler de l'élément évident, dans un contexte d'instabilité sans précédent, où la classe dirigeante américaine est apparemment déterminée à provoquer une troisième guerre mondiale, d'un désir populaire d'échapper à une situation généralement alarmante.

La médiocrité du Réveil de la Force n'est pas la faute du public, mais le public doit demander plus. Ceci n'est simplement pas du cinéma sérieux ou stimulant, même en tant que film d'action. Ça devient lourd, répétitif. Les performances de Ridely et Boyega font des personnages attirants, et le film n'est pas malintentionné ou cynique, mais il ne sert finalement à pas grand-chose de plus que de tuer le temps.

Disney et Lucasfilm ont l'intention de sortir Star Wars épisodes VIII et IX en 2017 et 2019 respectivement, et ils vont également sortir des films en dehors de la série en épisodes. En décembre 2016, Rogue One paraîtra, montrant comment les rebelles ont obtenu les plans de l'Étoile noire immédiatement avant Episode IV: A New Hope. Il a été décrit comme étant plus «gris» quand il s'agit de moralité, et moins axé sur la force ou le «bien» et le «mal».

(Article paru d'abord en anglais le 22 décembre 2015)

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