Pour une contre-offensive contre les patrons de l’automobile!

Pour une stratégie socialiste internationaliste pour les travailleurs canadiens des Trois grands de l’automobile

* Mettons fin aux emplois à deux paliers, aux reculs et aux suppressions d’emplois!

* Construisons des comités de travailleurs de la base!

* Forgeons dans la lutte l’union des travailleurs de l’automobile en Amérique du Nord!

Avec les conventions collectives arrivées à échéance le 19 septembre aux opérations canadiennes de GM, Ford et Fiat-Chrysler, les travailleurs canadiens de l’automobile font face à une bataille décisive dont l’issue sera cruciale pour toute la classe ouvrière.

Les travailleurs de l’automobile – comme l’ont démontré leurs votes de grèves massifs – sont déterminés à riposter après des années de suppressions d’emplois, de reculs et d’accélérations de cadences constantes. Mais pour mener une contre-offensive efficace, les travailleurs doivent prendre la direction de leur lutte des mains de l’appareil propatronal d’Unifor et combiner l’action industrielle militante avec une stratégie politique pour la mobilisation des travailleurs de partout au Canada avec les travailleurs de l’automobile des États-Unis, du Mexique et d’ailleurs dans le monde.

L’objectif manifeste des trois grands constructeurs de l’automobile et de leurs valets d’Unifor est d’utiliser la menace de fermetures d’usines à Oshawa, Brampton et Windsor pour extorquer de nouveaux reculs en opposant les travailleurs du Canada à leurs frères et sœurs de classe des États-Unis, du Mexique, d’Europe et d’Asie dans une course vers le bas.

Maintes et maintes fois la menace des pertes d’emplois a été utilisée comme méthode de chantage contre les travailleurs. Le syndicat des Travailleurs canadiens de l’automobile (maintenant rebaptisé Unifor) s’est joint aux patrons de l’automobile pour imposer des contrats de travail sabrant dans les salaires, réduisant en miettes les avantages et détruisant les règlements de travail, créant ainsi une force de travail à bas salaires à deux paliers, sinon même multiples, en constante expansion. En 2009, les TCA/Unifor ont collaboré avec les constructeurs de l’automobile, l’administration Obama et les gouvernements conservateur au fédéral et libéral de l’Ontario pour «renflouer» les constructeurs de l’automobile en réduisant leurs coûts de main-d’œuvre de 20 $ l’heure. Trois ans plus tard, les TCA/Unifor ont accepté des contrats qui ont prolongé le gel des salaires pendant 4 ans de plus, éliminé l’ajustement au coût de la vie pour les retraités et réduit encore plus le salaire des nouveaux employés de 4 $ l’heure, l’abaissant ainsi à seulement 20 $, tout en faisant passer de 6 à 10 ans le nombre d’années qu’ils doivent travailler avant de pouvoir gagner le salaire de base régulier.

Contrat après contrat, le syndicat a présenté ces reculs comme étant nécessaires pour «sauver des emplois», mais la liste des usines qui ont fermé ne cesse de s’allonger. Depuis 2000, les trois grands de l’automobile ont diminué de plus de moitié leurs effectifs de production au Canada, dévastant du coup des communautés entières basées sur l’industrie de l’automobile.

Cette ronde de négociations n’est pas différente. Le président d’Unifor Jerry Dias et ses lieutenants syndicaux sont déjà affairés à réduire les attentes de toute reprise des pertes subies lors des années de concessions, bien que les constructeurs automobiles ne cessent de faire de l’argent à pleines poignées. Les travailleurs ont été maintenus presque entièrement dans l’obscurité quant aux objectifs contractuels, sinon sur l’insistance que des investissements dans de nouveaux produits doivent être annoncés.

Autrement dit, le syndicat entend encore une fois embobiner et intimider les travailleurs pour qu’ils acceptent des concessions, affirmant qu’autrement ils mettront en péril les «garanties d’investissement» qu’ils ont «gagnées». Les responsables d’Unifor ont déjà signalé leur volonté de répéter à hauteur égale les compressions dans les retraites qu’ils ont acceptées l’an dernier à l’usine CAMI de GM qui appartient à Ingersoll. Et à Oshawa, ils ont donné le feu vert à GM (en vertu d’un accord conclu en 2013) d’employer 500 travailleurs, c’est-à-dire plus d’un cinquième de la force de travail totale, comme «main-d’œuvre supplémentaire», avec des salaires en permanence inférieurs et des avantages nettement inférieurs, même à ceux des travailleurs du deuxième palier.

Pour leur part, les Trois grands de l’automobile ont menacé avec arrogance d’éliminer 7000 emplois, soit près du tiers de leur main-d’œuvre au Canada, à moins que leurs activités canadiennes ne deviennent «globalement compétitives», c’est-à-dire ne fournissent aux investisseurs des profits encore plus grands que ceux auxquels ils peuvent extirper des travailleurs aux États-Unis et au Mexique.

Une prise de position déterminée des travailleurs de l’automobile contre les reculs et les suppressions d’emplois peut galvaniser le soutien des travailleurs de partout au Canada et à l’étranger. Mais une telle position doit être guidée par une stratégie différente et opposée à la stratégie nationaliste et corporatiste poursuivie par les TCA/Unifor depuis qu’ils se sont séparés en 1985 des Travailleurs unis de l’automobile américains, les United Auto Workers (UAW).

Forgeons dans la lutte l’union des travailleurs de l’automobile en Amérique du Nord et dans le monde!

 

Pour vaincre les constructeurs de l’automobile organisés à l’échelle mondiale et leur pression systématique pour extraire toujours plus de profits par surenchère, les travailleurs canadiens de l’automobile doivent consciemment s’allier et coordonner leur lutte avec leurs frères et sœurs de classe aux États-Unis, au Mexique et d’ailleurs dans le monde entier.

Pour cela il faut relancer et développer les traditions militantes qui ont conduit les travailleurs canadiens à soutenir en 1937 la grève et l’occupation insurrectionnelle d’usine de Flint au Michigan et à se joindre à l'UAW – des traditions qui ont ensuite été trahies et piétinées par les bureaucrates syndicaux bien nantis des deux côtés de la frontière.

En 1985, la direction des TCA a justifié sa scission de l'UAW en pointant du doigt les politiques réactionnaires, propatronales de la direction du syndicat. Mais loin de constituer une véritable opposition aux concessions, la scission était en fait une manœuvre réactionnaire qui a facilité les tentatives des entreprises de monter les travailleurs les uns contre les autres.

Pendant les trois dernières décennies, l'UAW et les TCA se sont concurrencés à savoir qui pouvait mieux «défendre les emplois américains» ou les «emplois canadiens» en offrant de plus grands rendements aux constructeurs. Cela est allé de pair avec leur intégration toujours plus profonde dans l’appareil de gestion – une collaboration illustrée dans le cas d’Unifor par sa participation au Conseil du partenariat pour le secteur canadien de l’automobile, une organisation réunissant industrie, gouvernement et syndicat dans le but d’accroître la rentabilité des sociétés.

Les besoins des travailleurs ne doivent pas être subordonnés aux profits des investisseurs

Unifor, l’UAW et les syndicats sont incapables de défendre les intérêts les plus élémentaires de la classe ouvrière parce que ce sont des organisations nationalistes, procapitalistes qui acceptent que les emplois et les salaires des travailleurs soient subordonnés aux profits des investisseurs.

Grâce à la technologie moderne, le travail est beaucoup plus productif qu’il y a trois décennies. Et pourtant les conditions de vie des travailleurs ne cessent d’être de plus en plus difficiles. Si les milliardaires capitalistes qui dirigent l’économie ne peuvent fournir aux travailleurs un salaire décent et des droits sociaux élémentaires – et non seulement ils ne le peuvent manifestement pas, mais de plus ils ne le feront pas – alors la classe ouvrière doit mettre de l’avant son propre programme pour réorganiser radicalement l’économie sur la base des besoins sociaux et non du profit privé.

Construisons des comités de travailleurs de la base

Unifor ne peut pas être poussé à agir dans l’intérêt de ses travailleurs. C’est un appareil bureaucratique qui fonctionne plus que jamais exactement comme une division de la direction dans la suppression de toute opposition des travailleurs. Voilà pourquoi, lorsque le chef du parti progressiste-conservateur de l’Ontario Tim Hudak a proposé d’introduire une loi réactionnaire du «droit au travail» inspirée des États-Unis, les constructeurs de l’automobile lui ont facilement fait abandonner sa proposition en disant qu’ils ne voulaient pas voir leur «partenariat» avec le syndicat perturbé.

Les paroles en l'air de Dias quant à une éventuelle grève sont de la fraude. Malgré les incessantes demandes de reculs des constructeurs de l’automobile, le syndicat TCA/Unifor n’a pas appelé à une seule journée d’action des travailleurs contre l’un des trois grands de l’automobile depuis 1996. Dans le cas peu probable où le syndicat sanctionnerait un débrayage, ce serait un coup visant à calmer la colère croissante des travailleurs de la base afin de mieux faire passer une entente de capitulation.

L’an dernier, les travailleurs de l’automobile des États-Unis se sont rebellés contre la bureaucratie de l’UAW, votant contre un accord de reculs chez Fiat-Chrysler, mais le syndicat a finalement été en mesure de faire adopter ses ententes de capitulation en utilisant une série de manœuvres manifestement antidémocratiques et anticonstitutionnelles.

Pour empêcher Unifor de saboter leur lutte, les travailleurs de l’automobile doivent construire de nouvelles organisations de lutte, dirigées démocratiquement par les travailleurs de la base et engagées dans la défense des droits sociaux des travailleurs, et non pas des bénéfices des sociétés. Ces comités de travailleurs de la base doivent prendre l’initiative d’organiser la grève dans toute l’industrie, et lutter pour rallier les travailleurs de l’automobile américains et mexicains ainsi que les travailleurs de partout au Canada dans une lutte commune contre les reculs, les suppressions d’emplois et le démantèlement des services publics.

La lutte contre les patrons de l’automobile est une lutte politique

L’ensemble de l’establishment politique, des conservateurs aux libéraux, en passant par le NPD, s’est uni en 2008-2009 en insistant sur le fait que tout «sauvetage» de l’industrie automobile devait se faire au détriment des travailleurs sous forme de reculs sans précédent dans les salaires et les avantages sociaux.

Par ailleurs, toute contestation par les travailleurs de l’automobile des décennies de reculs les amènera immédiatement dans une collision frontale avec toutes les institutions de la grande entreprise – ses partis politiques, son gouvernement, sa police et tout son appareil d’État qui soutiennent l’exploitation capitaliste et les inégalités sociales.

L’hostilité du syndicat TCA/Unifor envers les intérêts des travailleurs qu’il prétend représenter trouve son expression la plus achevée dans son étreinte, devenue toujours plus étroite au cours des deux dernières décennies, des libéraux, représentants de la grande entreprise. Le syndicat a été un bailleur de fonds clé du gouvernement libéral de l’Ontario qui a imposé des réductions sauvages dans les dépenses sociales, privatisé Hydro One et décrété illégales les grèves des enseignants, et il a des liens aussi étroits avec le gouvernement Trudeau, qui n’est pas moins déterminé à mener une politique d’austérité et de guerre que le gouvernement conservateur qui l’a précédé.

Pour vaincre la grande bourgeoisie, les travailleurs ont besoin de leur propre parti, et non pas d’une imposture de «parti ouvrier» comme le NPD procapitaliste, mais bien d’un parti socialiste qui a pour but la création d’un gouvernant ouvrier. Un tel gouvernement transformerait la grande industrie et les banques en propriété publique placée sous le contrôle démocratique de la classe ouvrière afin de garantir à tous des emplois sûrs et bien rémunérés, des soins de santé de qualité, l’éducation, une retraite confortable et un avenir pour la prochaine génération débarrassée du fléau de la pauvreté et de la guerre.

Les travailleurs de l’automobile font face à des ennemis puissants, mais ils ont des alliés encore plus puissants dans la classe ouvrière de partout au Canada et dans le monde.

Les travailleurs de l’automobile qui veulent construire des comités travailleurs de la base pour organiser la contre-offensive de la classe ouvrière qui est due depuis longtemps sont appelés à contacter le bulletin d’information des travailleurs de l’automobile qu’est le World Socialist Web Site Autoworker Newsletter et le Parti de l’égalité socialiste.

(Article paru d'abord en anglais le 15 septembre 2016)

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