Perspectives

Etats-Unis: les médias et les démocrates cachent la politique fascisante de Trump

Les médias contrôlés par le patronat et la campagne de Hillary Clinton ont choisi de minimiser l'importance politique de la nomination par Donald Trump, le candidat présidentiel républicain, d’un personnage ayant des liens étroits avec « le nationalisme blanc » et d'autres tendances d’extrême-droite, comme nouveau directeur de sa campagne. Ils cachent délibérément le fait que la campagne de Trump s’oriente vers la consolidation d'un mouvement de type fasciste aux Etats-Unis

Stephen K. Bannon, le nouveau PDG de la campagne de Trump, est président exécutif de Breitbart News, une publication en ligne qui célèbre la montée de la droite néo-fasciste en Europe, dont le Front national en France, l'Alternative pour l'Allemagne et UKIP (Parti pour l’Indépendance du Royaume-Uni) et cherche à créer un mouvement similaire aux États-Unis. Bannon a accueilli le chef d’UKIP Nigel Farage lors d'une récente visite à Washington, le présentant à des gros bonnets du Parti républicain.

Un des rares commentaires sérieux des médias américains, fait par le chroniqueur Rex Huppke du Chicago Tribune dans un article du 19 août, cite plusieurs gros titres récents, hystériques et fanatiques, de Breitbart.com, qu'il décrit comme un « site marginal-cinglé d’extrême droite. » Le site dénonce régulièrement les partisans des droits des homosexuels, les nommant « Gaystapo » -- une inversion particulière pour une publication dont les lecteurs postent fréquemment des commentaires antisémites, appelant par exemple « Jewlywood » l'industrie du cinéma.

Huppke cite d'autres commentaires publiés sur Breitbart News par des lecteurs qui menacent de violences les immigrés, les libéraux, les musulmans, les démocrates, Hillary Clinton, etc. Il note que Bannon a interviewé dans son émission de radio Joseph Schmitz, conseiller de Trump en politique étrangère (et antisémite, d’après les plaintes déposées par d' autres responsables du Pentagone durant son mandat sous le gouvernement Bush). Bannon a demandé à l'ancien inspecteur général du Pentagone si le gouvernement Obama utilisait les Frères musulmans pour définir la politique étrangère des États-Unis. Schmitz a répondu: « Non, je ne le pense pas. Je sais cela. »

L'influence de Bannon était visible dans la première publicité télévisée pour l'élection générale, diffusée par la campagne de Trump, le 19 août au soir. C’est une attaque raciste au vitriol contre les immigrants, suggérant qu’à moins que Trump ne soit élu, ils allaient « arriver en masse, » et les criminels immigrants « parviendront à rester, empochant l’aide sociale. »

Le ton de la réponse des médias à la nomination de Bannon a été donné, comme d' habitude, par le New York Times, dont l’éditorial de dimanche posait la question, « Comment l' Amérique peut-elle se remettre de Donald Trump? »

Celui-ci prend note de la nomination de Bannon, le qualifiant de « pourvoyeur en chef de théories du complot et de venin anti-musulman et anti-immigrés chez Breitbart. »

Loin de tirer des conclusions politiques ou de lancer un avertissement, le Times exprime simplement l'espoir qu’après la défaite attendue de Trump en novembre, « les dirigeants responsables » du Parti républicain « essayeront de séparer le mécontentement économique de la bigoterie et de la paranoïa qui sont la clé du phénomène Trump ».

Le Times présente le phénomène Trump comme l’effet d’une bombe, quelque chose de complètement inattendu et étranger à la politique américaine. C’est là une dissimulation délibérée et malhonnête.

Trump est une quantité bien connue, promu et encouragé qu’il fut pendant des années par les deux partis du patronat et les médias de la grande entreprise. Il a eu les relations les plus étroites tant avec les démocrates qu’avec les républicains, y compris les Clinton. On en a fait le PDG-célébrité par excellence et on lui accordé des émissions de télévision pour promouvoir la marque Trump. Il est issu des cercles corrompus et super-riches des spéculateurs immobiliers new-yorkais et incarne la réaction politique accumulée de décennies de guerre sans fin, d’inégalité sociale et de montée d'une nouvelle aristocratie financière parasitique.

Sa candidature et le caractère d’extrême-droite de sa campagne représentent un tournant de sections de la classe capitaliste américaine, face aux contradictions insolubles et à la montée de l'opposition sociale, vers des méthodes de gouvernement autoritaires et violentes.

Quant au Parti républicain, il a pendant des décennies exploité le mécontentement économique pour fomenter le fanatisme et la paranoïa bien avant que Trump n’arrive sur la scène politique. A chaque tournant, le Parti démocrate et ses défenseurs libéraux comme le Times ont capitulé devant la montée de l'extrême-droite tout en épousant les politiques d'austérité, de baisses des salaires et de guerre exigées par Wall Street.

Les quatre programmes d'entretiens télévisés du dimanche matin ont tous commenté le remaniement à la direction de la campagne Trump et ABC et CNN ont interviewé Kellyanne Conway, la nouvelle directrice de campagne. On ne l’a jamais interrogée sur les points de vue d’extrême-droite du nouveau PDG de la campagne (son patron).

Un intervenant de CBS a décrit Bannon comme une « embauche étonnante... plus conflictuelle, très liée aux vote anti-immigré, » mais le sujet n'a pas été poursuivi. Chez Fox News, bien sûr, il n'y avait que des éloges, un intervenant le décrivant comme « très compétent » et « puisé dans cette énergie populiste que possède Donald Trump. »

Le plus remarquable a été l'apparition dans l’émission « This Week » d’ABC, du directeur de campagne de Clinton Robby Mook. Il a fait remarquer que Trump avait nommé un nouveau PDG de campagne venu de Breitbart News, un organe médiatique qui a « défendu les suprématistes blancs » et qui est « sexiste, raciste, le pire de notre politique. »

Mais la vraie préoccupation de Mook était ailleurs. Il a changé de sujet pour parler des fausses allégations selon lesquelles Trump est un larbin du président russe Vladimir Poutine. « La main du Kremlin a été à l'œuvre dans cette campagne depuis un certain temps », a déclaré Mook. « Il est clair qu'il soutient Donald Trump ... il y a de vraies questions soulevées quant à savoir si Donald Trump lui-même est juste une marionnette du Kremlin dans cette élection. »

Les partisans de Clinton ont également publié une nouvelle publicité de campagne qui montre le choréographe Mikhail Baryshnikov associant Trump à la dictature stalinienne en Union soviétique.

Le directeur de campagne de Clinton préfère attaquer Trump depuis la droite, avec une diffamation du style McCarthy au sujet du « Kremlin » plutôt que de regarder les très réelles connexions de Trump avec des éléments néo-fascistes. L'intervention de Mook était une révélation dévastatrice de l'orientation de classe de la campagne de Clinton, qui cherche à s’attirer les faveurs de Wall Street et de l'appareil militaire et de renseignement en faisant valoir que Clinton, pas Trump, est le défenseur le plus fiable des intérêts de l'impérialisme américain.

Même si, comme le suggèrent les sondages actuels, Trump est battu par Clinton, le résultat sera le gouvernement le plus à droite de l'histoire américaine et fera une politique de guerre impérialiste à l'étranger et d’attaques contre les droits démocratiques et la position sociale de la classe ouvrière aux Etats-Unis. Clinton sera obligée de compter précisément sur ​​les forces politiques – chauvines et militaristes – cultivées par Trump pour soutenir ce cours réactionnaire.

Des dizaines de millions de travailleurs et de jeunes sont écœurés d’avoir à choisir entre Clinton, la personnification du statu quo patronal, et Trump, le milliardaire fascisant. Selon le plus récent sondage Pew, seuls 22 pour cent disent qu'ils vont voter pour Clinton parce qu'ils la soutiennent effectivement (et non par peur de Trump) et seulement 16 pour cent soutiennent Trump (plutôt que de haïr Clinton).

Le système bipartite officiel ferme tout débouché aux sentiments de masse des travailleurs et des jeunes qui vont à gauche et cherchent un moyen de lutter pour défendre leurs emplois et leur niveau de vie et de s’opposer à la marche de plus en plus rapide vers la guerre. Seule la campagne du Parti de l'égalité socialiste (SEP) et de nos candidats Jerry White à la présidence et Niles Niemuth à la vice-présidence, offre une véritable alternative politique.

(Article paru en anglais le 22 août 2016)

 

 

 

 

 

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