Les grèves et les manifestations montent en France contre la loi travail

Des sections de plus en plus larges de la classe ouvrière se mobilisent aux côtés de dizaines de milliers de jeunes qui manifestent contre la loi travail imposée par le Parti socialiste (PS) sans vote à l’Assemblée nationale, en utilisant l’article 49-3 de la constitution. Selon la police et les syndicats, entre 125 000 et 450 000 personnes auraient pris part aux manifestations hier. 

Les réformes régressives et les procédés antidémocratiques du gouvernement Hollande poussent plusieurs couches des travailleurs à se mobiliser. Hier, les routiers étaient en lutte dans de nombreuses villes de France, bloquant de nombreux lieux de travail avec l’aide des salariés ainsi que des autoroutes et des aéroports. Ils rejoignaient des groupes de cheminots et de contrôleurs aériens en grève, ainsi que de gros cortèges de jeunes et de travailleurs qui manifestaient à travers la France. 

Les routiers ont bloqué la raffinerie Total de Donges, ce qui commence à provoquer des fortes pénuries dans les stations-service dans la région de Nantes. Ils bloquaient également des routes autour de Rennes, alors que des opposants à la loi travail installaient de nombreux blocages et barrages filtrants à travers le pays, y compris autour de l’aéroport de Blagnac de Toulouse et autour de Lille. 

Une autre série de blocages était signalée autour des installations portuaires à Fos-sur-Mer, près de Marseille. 

Les forces de l’ordre s’en sont violemment pris à nouveau aux manifestations, le jour suivant l’organisation d’une manifestation « contre la haine anti-flics » liée au Front national (FN). À Lyon, les policiers ont utilisé un canon à eau pour tenter de faire reculer des manifestants. 

À Rennes, la police a interpellé 19 personnes dans le métro qu’ils ont placées en garde-à-vue pour « dégradation » de biens publics. 

À Paris, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté, partant de la Place de la Nation pour arriver à la Place d’Italie. 

Des journalistes du WSWS ont parlé à Romain et à Pierric, deux jeunes travailleurs, place de la Nation. Ils ont dénoncé l’imposition de la loi travail sans vote par le PS en ayant recours au 49-3 : « C’est ridicule […] c’est une honte. Ils n’ont pas de recours, ils font tout pour les patrons. Ils n’ont pas les moyens de faire valoir leur loi pourrie, alors du coup ils en profitent pour enfoncer le clou ». 

Ils ont dit ne pas être surpris par le fait que le PS et le Front de gauche se seraient associés à une manifestation menée par le syndicat Alliance et liée au FN : « En ce moment, ils sortent l’arme répressive absolue, leur but c’est de décourager les manifestations, de décourager les manifestants de se mobiliser […] Ils sont prêts à tout, quoi, au FN – ce n’est pas comme s’ils avaient de la déontologie ou de l’éthique ». 

« Le seul objectif est de garder le système qui est en place pour qu’ils continuent à se gaver », a ajouté Pierric. 

Ils ont fait part de leurs craintes que l’action du PS allait miner les droits démocratiques en France. « Ça se fait progressivement, leur but c’est d’y aller pour que toutes les libertés soient réduites de petit à petit », a fait observer Romain. 

Ils ont également exprimé leur déception vis-à-vis de la couverture médiatique des manifestations et des réactions de la classe politique. 

« Leur discours politique, ils ne parlent absolument jamais du fond. Ils parlent de la violence, ils focalisent toute l’attention sur cela […] C’est un outil de plus pour marquer le conflit entre la police et les manifestants, pour éviter de débattre sur le fond. C’est un écran de fumée », ont-ils dit. « Les médias martèlent toujours, oui, on n’a pas le choix, la situation veut cela et on est obligé, et il y a un sentiment d’incrédulité, les gens disent, non, c’est trop dégueulasse, ils ne vont pas faire ça ». 

Le WSWS a aussi interviewé deux lycéennes du lycée Maurice Ravel. Elles ont critiqué l’imposition de l’état d’urgence par le PS : « L’état d’urgence a prévu ça pour les terroristes, mais à présent ils l’utilisent pour les militants ». 

« Le fait d’utiliser le 49-3 deux fois, pour la loi Macron et maintenant pour la loi travail, c’est quelque chose de très antidémocratique. Hollande avait dit qu’il était contre le 49-3 avant de devenir président, c’est assez paradoxal qu’il soit pour le dégainer deux fois. […] C’est bizarre d’aller contre son peuple, entre guillemets, c’est un déni de démocratie », ont-elles dit. 

« Je crains qu’on n’écoute plus le peuple. À partir du moment où l’on vote pour des gens qui sont censés nous représenter mais qui sont tous corrompus au final et qui prennent des décisions qui vont à l’encontre, on n’est pas en démocratie », ont-elles ajouté. 

Elles ont également critiqué la participation de la CGT à la manifestation policière : « Évidemment c’est vrai que je ne suis pas pour la haine des policiers, mais le fait que la CGT s’allie à cette cause, c’est très étrange ».

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