Des séparatistes et des dissidents chinois soutenus par les Etats-Unis se réunissent à Dharamsala, en Inde

Pendant que Washington fait avancer son « pivot » anti-chine « vers l’Asie », des groupes d’exilés et de dissidents chinois, parrainés par les États-Unis, ont tenu une conférence sur le leadership inter-ethnique et inter-religieux, du 28 avril au 1er mai, à McLeod Ganj, une banlieue de Dharamsala, en Inde. L’objectif déclaré de la réunion était de discuter comment on pouvait provoquer une transition vers la « démocratie » en Chine.

La conférence était orchestrée par l’impérialisme américain et l’Inde, son allié régional, dans le cadre de l’offensive stratégique, diplomatique et militaire, de Washington contre Pékin. Tout en intensifiant leurs préparatifs pour une guerre avec la Chine, les États-Unis encouragent des divisions ethniques et régionales explosives dans ce pays qui compte 55 minorités ethniques officiellement reconnues. L’objectif est de diviser la Chine suivant des lignes ethniques et, finalement, de la réduire au statut de semi-colonie.

La conférence intitulée « Renforcement de notre alliance pour faire progresser le rêve des peuples: liberté, justice, égalité et paix », a été organisée conjointement par l’une des principales ONG basées en Inde, le Centre tibétain pour les droits de l’homme et la démocratie (TCHRD) et Initiatives pour la Chine (IFC), basé aux États-Unis et dirigé par l’activiste de la place Tienanmen et dissident chinois en exil, Yang Jianli.

L’événement a réuni des représentants de divers groupes séparatistes du Tibet, du Xinjiang, de Mongolie intérieure, de Taiwan et de Hong-Kong, des dissidents chinois « pro-démocratie » et des dirigeants des minorités religieuses chrétienne, musulmane et Falun Gong en Chine.

Des représentants du gouvernement américain ont assisté à la conférence, dont des représentants de la Commission des États-Unis sur la liberté religieuse internationale (USCIRF). Le 28 avril, les délégués étrangers ont rencontré le Dalaï-lama, le leader bouddhiste tibétain, dont le gouvernement est en exil à Dharamsala.

Le seul média autorisé à la conférence était Radio Free Asia, financé par une agence fédérale des États-Unis, le « Broadcasting Board of Governors. » Selon le site web Indien The Wire, « des informations, vidéos et articles émanant de l’événement ont été uniquement diffusés sur le service cantonais de Radio Free Asia, le site web anglais de la station ne faisant aucune référence à la conférence ou à la controverse sur le visa » (qui l’avait précédé.) The Wire a cité le président de l’Association Américaine Ouïghoure (basée aux États-Unis), Ilshat Hassan, qui assistait à la conférence. Celui-ci a clairement indiqué qu’un thème majeur de la conférence était la division de la Chine selon des lignes ethniques.

Hassan a dit: « Les jeunes venus de Chine faisaient valoir que la grande Chine devrait être maintenue intacte et déclaraient que la démocratie y serait installée bientôt. Nous n’avons pas dit que nous voulions l’indépendance, mais il nous faut l'autodétermination. Ce qu'ils veulent sera décidé par le peuple du Turkestan oriental et le peuple du Tibet après qu'ils sont autorisés à décider eux-mêmes. Je suppose qu'ils sont encore jeunes. »

Afin de fomenter le nationalisme ethnique et le séparatisme en Chine, l’impérialisme américain et ses alliés cherchent à exploiter de réels et acerbes conflits sociaux et des divisions nationales issus de la politique réactionnaire du régime chinois. Le régime a de plus en plus fomenté le nationalisme chinois « Han » depuis la restauration du capitalisme en Chine au cours des années 1980. Il a aussi eu recours à la discrimination et à la répression pure et simple de minorités ethniques comme les Ouïghours au Xinjiang, où le taux de chômage est élevé et les salaires bas, comme dans d’autres régions de l’intérieur de Chine.

Il y a eu une escalade des émeutes ethniques entre Hans et Ouïghours dans le Xinjiang et Pékin a commencé à interdire la barbe et le port du voile musulman, provoquant le mécontentement des Ouïghours, en particulier parmi les nombreux chômeurs diplômés. De nombreuses informations indiquent que des milliers d’Ouïghours sont allés au Moyen-Orient pour rejoindre les milices islamistes qui combattent par procuration pour l’OTAN dans la guerre syrienne de changement de régime.

La réponse de Washington et de ses alliés à cet état de choses est tout à fait réactionnaire. Ils cherchent à exploiter la discrimination et l’oppression à laquelle sont confrontés les Ouïghours pour stimuler le nationalisme ethnique et diviser la classe ouvrière selon des lignes ethniques, faisant la promotion de divers groupes nationalistes bourgeois de droite qu’ils contrôlent directement. Après avoir orchestré les guerres de changement de régime en Libye et en Syrie en s’appuyant sur les islamistes, l’impérialisme américain et ses alliés débattent de l’utilisation de méthodes similaires contre la Chine.

Un bon nombre d’organisations présentes à la conférence, comme le TCHRD, l’IFC et l’Association Américaine Ouïghoure, sont des actifs de l’impérialisme américain, financés directement par le « National Endowment for Democracy » (NED). La NED finance 22 organisations au Tibet, dont le TCHRD qui reçoit quelque 60.000 dollars par an de Washington. Sa mission déclarée est de surveiller, documenter et mettre en évidence la répression et les violations des droits politiques au Tibet.

Le NED est également impliqué dans le financement de groupes qui affirment représenter la minorité ethnique Ouïghoure principalement musulmane dans la région nord-ouest du Xinjiang. L’Association Américaine Ouïghoure basée aux États-Unis et le Congrès mondial ouïghour basé à Munich (WUC), sont des groupes financés par la NED à hauteur de 295.000 dollars et 260.000 dollars, respectivement. Le WUC est dirigé par une femme d’affaires multimillionnaire américaine, Rebiya Kadeer.

Initiatives pour la Chine (IFC) reçoit 86.500 dollars par an de la NED. Elle a été fondée par le dissident Yang Jianli, qui a terminé son doctorat en économie politique à l’Université de Harvard.

Jianli avait été arrêté par le régime de Pékin et condamné à cinq ans de prison sur des accusations d’espionnage. Avec le soutien d’une résolution de l’ONU et un vote unanime des deux chambres du Congrès américain, il avait été libéré en 2007. Il préconise une transition vers la « démocratie » en Chine et un leadership américain de la lutte pour la « réforme démocratique et pacifique. »

Sous prétexte de défendre le droit universel à la liberté de religion, la Commission des USA pour la liberté religieuse internationale (USCIRF) coordonne étroitement les groupes de dissidents chinois. USCIRF est une commission bipartite du gouvernement fédéral américain, chargée de formuler des recommandations politiques pour le président, le secrétaire d’État et le Congrès. La principale représentante d’USCIRF, Katrina Lantos Swett, qui a fondé la Fondation Lantos pour les droits de l’homme et la justice en 2008, a assisté à la conférence de Dharamsala.

Le financement direct par les États-Unis et leur soutien aux dissidents chinois contre Pékin appuient une stratégie irresponsable qui pousse à l’escalade des tensions diplomatiques et menace de provoquer une guerre entre puissances nucléaires.

Pékin a clairement fait savoir qu’il pourrait réagir violemment à un appui manifeste de la part des grandes puissances au séparatisme en Chine. Lors de l’Assemblée nationale populaire de 2005 (APN), le régime avait adopté une « loi anti-sécession » s’engageant à aller en guerre en réponse à une déclaration d’indépendance de Taïwan, dont il craignait qu’elle pourrait être le signal d’une promotion plus large du séparatisme en Chine.

En aval de la conférence, une querelle diplomatique avait éclaté entre la Chine et l’Inde sur la décision de New Delhi d’accorder un visa au chef Ouïghoure en exil, Dolkun Isa, du WUC. Bien que les autorités indiennes aient annulé le visa accordé à Isa après des protestations de Pékin, provoquant de sévères critiques dans les médias indiens, l’Inde a offert des visas touristiques à d’autres dissidents chinois, y compris Ilshat Hassan, pour assister à la conférence à Dharamsala.

Alors que le « pivot » des États-Unis « vers l’Asie » enflamme les tensions entre grandes puissances asiatiques, l’attitude de la bourgeoisie indienne envers la Chine est elle aussi de plus en plus hostile.

Le 1er mai, le Times of India a écrit: « On n’a qu’à observer les activités stratégiques soigneusement calibrées mais indubitablement hostiles de la Chine vis-à-vis de l’Inde — que ce soit le CPEC (le Corridor économique Chine-Pakistan qui traverse des territoires historiquement revendiqués par l’Inde), l’OBOR (Initiative une route, une région), ou le « String of Pearls » dans l’océan Indien — afin de comprendre que si l’Inde ne parvient pas à confronter les Chinois maintenant, alors qu’elle le peut encore, elle pourrait abandonner pour toujours la possibilité de résister à la coercition chinoise à l’avenir. »

(Article paru d’abord en anglais le 6 mai 2016)

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