Guerre commerciale et mesures anti-immigrants dans une vidéo de Trump

Lundi, le président élu Donald Trump a interrompu ses entrevues de toute une série de réactionnaires politiques et de faucons militaristes qui défilent dans son penthouse au sommet de la Trump Tower pour produire une vidéo de deux minutes et demie présentant les mesures qu’il envisage de prendre pendant ses 100 premiers jours à la Maison-Blanche.

Cette vidéo souligne le nationalisme et le militarisme féroces, combinés au racisme anti-immigrant et à la déréglementation propatronale qui va définir son administration comme un gouvernement de réaction extrême.

Poursuivant sur ses idées présentées lors de la campagne électorale, Trump a démagogiquement présenté ses mesures comme une aubaine pour les travailleurs américains. Il a commencé par déclarer que son administration serait basée sur les principes de favoriser «les États-Unis avant tout» et d’«enrichir et créer des emplois pour les travailleurs américains».

Trump affirme que son premier geste sera d’émettre un avis d’intention de se retirer du Partenariat transpacifique (PTP), un pacte commercial parrainé par les États-Unis visant à assurer la domination américaine en Asie de l’Est et à isoler davantage la Chine qui a été exclue exprès de cette entente. L’opposition de Trump au PTP ne reflète nullement une attitude moins agressive envers la Chine – pays qu’il a dénoncé et menacé à maintes reprises avec des mesures de guerre commerciales – mais plutôt une politique de nationalisme économique et de protectionnisme, qu’il prétend faussement bénéfique aux travailleurs américains.

Trump compte ensuite annuler toutes les réglementations «destructrices d’emploi» visant à limiter la production de pétrole de schiste et de charbon, un avantage pour l’industrie de l’énergie présentée comme une mesure de création d’emplois. Il a ajouté qu’il instituerait une règle exigeant l’élimination de deux règlements pour chaque nouveau règlement imposé.

Révélateur de ses plans pour accroitre la présence de l’armée et son influence sur la vie civile, Trump a déclaré qu’il demanderait au département de la Défense et au président du chef d’état-major interarmées d’élaborer un «plan intégral» pour protéger l’infrastructure du pays contre les cyberattaques et «toute autre forme d’attaques».

En ce qui concerne l’immigration, Trump a déclaré qu’il ordonnerait au département du Travail «d’enquêter sur tout abus des programmes de visas qui nuirait aux travailleurs américains». Ce serait la première étape d’une escalade d’offensives contre les immigrants, notamment les deux à trois millions d’immigrants que Trump s’est engagé à déporter à court terme lors de son entrevue postélectorale à l’émission 60 minutes.

Dans le cadre de son plan pour «assécher le marais» de Washington, Trump a annoncé une interdiction de cinq ans aux fonctionnaires de devenir lobbyistes après leur départ de l’appareil gouvernemental, et d’une interdiction à vie de faire du lobbying au nom d’un gouvernement étranger. Cet engagement supposé envers l’éthique gouvernementale est particulièrement risible étant donné le refus de Trump de placer son vaste empire d’affaires dans une fiducie sans droit de regard et son refus même de rendre publiques ses déclarations de revenus.

La vidéo met en évidence l’idéologie nationaliste des «États-Unis avant tout» et le protectionnisme économique qui vont de pair avec la promotion de l’Armée par Trump et son mépris autoritaire pour les droits démocratiques. Tout cela est déjà clairement établi par sa nomination de Stephen Bannon – l’ancien chef de Breitbart News, la plate-forme médiatique préférée du mouvement suprémaciste blanc alt-right – comme son principal stratège politique.

Les autres nominations à la sécurité nationale qu’il a annoncées jusqu’à maintenant vont dans le même sens, avec l’ancien officier de renseignement militaire et fanatique antimusulman Michael Flynn retenu comme conseiller en matière de sécurité nationale, le sénateur anti-immigrant de l’Alabama Jeff Sessions – dénoncé par les groupes défenseurs des droits et libertés civiques pour les liens qu’il entretient avec des défenseurs de la suprématie blanche – comme procureur général, et le congressiste défenseur de la torture Mike Pompeo à la tête de la CIA.

En plus de faire la promotion du général des Marines à la retraite James Mattis – connu pour avoir supervisé des massacres de civils ainsi que d’autres crimes de guerre à Falloujah lors de la destruction de cette ville – comme principal candidat au poste de secrétaire à la Défense, Trump a rencontré le général John Kelly – un défenseur de l’administration de mauvais traitements aux détenus militaires – pour occuper le poste de secrétaire au département de la Sécurité intérieure. Un autre candidat favori pour devenir chef de la sécurité intérieure qui doit rencontrer Trump est Kris Kobach – le secrétaire d’État du Kansas qui a élaboré des plans pour la création d’un registre de tous les visiteurs musulmans aux États-Unis et de tous les immigrants musulmans résidant déjà dans le pays.

En fin de semaine dernière, les partisans d’alt-right ont organisé un rassemblement à Washington DC pour célébrer la victoire de Trump. Richard Spencer était l’orateur principal. Il s’en est pris aux Juifs, cité de la propagande nazie et déclaré que les États-Unis appartenaient aux blancs qui sont «en train de s’éveiller à leur propre identité». La réunion s’est terminée avec quelqu’un criant «Heil Victory» de la tribune, cri repris par le public.

Face à tout cela, la direction du Parti démocrate s’efforce de dissimuler le caractère menaçant sans précédent du prochain gouvernement, et cherche à collaborer avec celui-ci sur la base de son accord avec ses politiques de nationalisme économique et de guerre commerciale.

Lors d’une conférence de presse au Pérou à la fin du sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique le week-end dernier, le président Barack Obama a répété la ligne qu’il prêche aux dirigeants étrangers et au public américain depuis les élections du 8 novembre selon laquelle il n’y a rien à craindre d’une administration Trump.

«Je ne peux pas garantir que le président élu ne poursuivra pas certaines des positions qu’il a prises, a déclaré Obama, mais ce que je peux garantir, c’est que la réalité l’obligera à ajuster la façon dont il aborde beaucoup de ces questions. C’est comme cela que ça fonctionne à la Maison-Blanche.»

Le sénateur de New York Charles Schumer, élevé la semaine dernière au poste de chef de la minorité démocrate pour le prochain Congrès, mène la politique de collaboration avec Trump sur la base de son programme de nationalisme économique, prétendant répondre aux besoins des travailleurs américains. Schumer, connu comme étant «le sénateur de Wall Street» en raison de ses liens étroits avec les banques et les fonds spéculatifs, est depuis longtemps un promoteur de la politique de guerre commerciale, en particulier contre la Chine.

Il a amené le sénateur du Vermont, Bernie Sanders, nominalement un «indépendant», dans la direction du Parti démocrate au Sénat et promu la sénatrice du Massachusetts Elizabeth Warren. Ces prétendus politiciens «de gauche» se sont alignés derrière les efforts de Schumer pour travailler avec Trump selon les motifs mensongers que les plans de Trump pour développer l’infrastructure des États-Unis et sa politique de guerre commerciale favoriseront les intérêts des travailleurs américains.

(Article paru d'abord en anglais le 22 novembre 2016)

Loading