Les travailleurs et les jeunes manifestant à Jaffna dénoncent le régime sri-lankais soutenu par les États-Unis

Samedi, des milliers de travailleurs et de jeunes ont défilé à Jaffna pour protester contre les politiques du régime sri-lankais du Président Maithripala Sirisena soutenu par les États-Unis, et contre le soutien que Sirisena a reçu de l’Alliance nationaliste tamoule (Tamil National Alliance – TNA) de R. Sampanthan. 

Des membres du Parti de l’égalité socialiste (Socialist Equality Party – SEP) ont distribués le tract « Mobiliser les travailleurs contre le régime sri-lankais Sirisena-Wickremesinghe-Sampanthan ! » et ont interviewé des manifestants lors du rassemblement. Ils ont parlé à beaucoup de travailleurs et de jeunes. Les marcheurs ont tous exprimé leur colère contre le régime Sirisena et contre la TNA, ainsi que leur méfiance envers les factions nationalistes tamoules représentées au sein du Conseil du peuple tamoul (Tamil People's Council – TPC), qui avait appelé à la manifestation.

Sept ans après que le gouvernement sri-lankais a commis une tuerie de masse sanglante de combattants des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE) à la fin de la guerre civile au Sri Lanka, aucun des désastres de la guerre n’a été résolu. Les manifestants ont parlé de leur inquiétude et de leur tristesse quant au sort des parents qui sont toujours portés disparus, ont appelé à la restitution des terres encore occupées par l’armée sri-lankaise, et ont exigé la libération des prisonniers politiques. 

Une pancarte disant : « Retirez l’armée d’occupation ». 

Sayanthan, étudiant à l’université de Jaffna, a déclaré : « Comme les autres, je suis venu ici pour signaler mon opposition au gouvernement Sirisena-Ranil Wickramasingha. Quand il est arrivé au pouvoir, il a promis de résoudre les problèmes du peuple tamoul avec un programme de 100 jours. Mais rien n’a été fait au cours des 21 derniers mois. Les électeurs tamouls ont élu la TNA pour les représenter, mais elle n’a rien fait pour libérer les prisonniers politiques ou pour résoudre les autres questions concernant le peuple tamoul. Elle s’est avérée être l’opposition la plus amicale possible pour le gouvernement ». 

Sayanthan a également indiqué sa méfiance à l’égard du TPC. « Pour ce que j’ai vu, je n’ai pas trouvé de différences entre les organisateurs de ce rassemblement et la TNA », a-t-il dit, ajoutant : « Les organisateurs de cette manifestation ont l’intention de manipuler la question tamoule pour leurs propres besoins politiques. Nous devons nous emparer de cette lutte ». 

« Libérez les prisonniers politiques » 

Une professeur de comptabilité a dit au WSWS : « Je suis venue de la région de Kurunagar pour participer à ce rassemblement. Le monde sait que nous nous sommes battus pendant des décennies pour nos droits, mais il n’est rien resté sauf les massacres et la destruction. Le nouveau gouvernement a fait de nombreuses promesses. On nous a dit que le gouvernement est pour la bonne gouvernance et le changement, mais rien n’a changé. Le gouvernement précédent était pro-Chinois, le gouvernement actuel est pro-Américain ». 

Elle a critiqué la relation de la TNA avec la politique étrangère des États-Unis : « L’Amérique et d’autres pays qui ont été silencieux pendant le massacre de notre peuple dans la guerre envahissent Jaffna maintenant pour leurs propres intérêts. Le mois dernier, les marines sri-lankaise et américaine ont mené un exercice conjoint dans nos eaux avec le soutien de Sampanthan. Il ne s’intéresse pas à la libération des prisonniers politiques, son but est de servir le gouvernement et l’Amérique. La TNA a fait de nous des orphelins politiques. Je pense que nous sommes tous venus ici pour protester contre cette politique ». 

Les manifestants lisent la déclaration du Socialist Equality Party 

La manifestation a été marquée par l’opposition des manifestants non seulement à la politique pro-Washington et pro-Colombo de la TNA, mais aussi à celle des organisateurs du TPC. Le TPC a essayé de focaliser le rassemblement sur l’opposition à la construction de temples bouddhistes par les membres de l’ethnie cinghalaise majoritaire sur les terres appartenant anciennement à des Tamouls et saisies par l’armée – cherchant par là un moyen de diviser le sentiment croissant d’unité entre les travailleurs cinghalais et tamouls. 

Parlant de la TNA et du TPC, Rajamanoharan a dit : « Il n’y a pas de différence entre les deux factions. Les deux sont avec le gouvernement, alors pourquoi est-ce qu’ils ne pourraient pas libérer les prisonniers politiques ? Pourquoi ne pourraient-ils pas établir la vérité sur les disparus ? C’est tout simplement parce qu’ils ne le veulent pas ». 

« Aucun parti politique, y compris la TNA, ne parle de la politique destructrice de l’Amérique dans d’autres pays », a-t-il ajouté. « Son intervention au Sri Lanka est pour ses propres intérêts et créerait une destruction semblable. Les gens sont peu conscients de ces développements ». 

Un chauffeur de bus qui a discuté du rôle historique du nationalisme tamoul avec les membres du SEP a admis après une discussion que ni la politique parlementaire ni la politique de lutte armée des LTTE ne pouvaient répondre aux aspirations démocratiques du peuple tamoul. Parlant du TPC, il a dit, « Je me suis joint à cette protestation avec un espoir que ce rassemblement allait faire gagner nos revendications. Il me semble que ce que vous dites à leur sujet est correcte. Ils nous trompent également ». 

Des membres du SEP parlant avec des travailleurs lors de la manifestation 

L’intervention des membres du SEP dans le rassemblement a reçu une opposition violente de la part des organisateurs du TPC. Ils ont exigé que les manifestants rejettent les tract du SEP en disant que le TPC ne le distribuait pas. Ensuite, cependant, les travailleurs et les jeunes se sont assemblés autour des membres du SEP pour en obtenir plus d’exemplaires.

Dans son discours devant le rassemblement, le coprésident du TPC, Wigneswara, a caché le soutien servile que lui et la TNA accordent à l’impérialisme américain, qui vise à transformer le Sri Lanka en un tremplin pour la guerre avec la Chine. Il s' est cyniquement plaint du fait que « notre gouvernement de bonne gouvernance » ne respecte pas ses promesses et a évité toute référence aux relations étroites entre le gouvernement et la TNA, qui porte une responsabilité égale pour l’oppression continue des masses tamoules. 

Pendant que Wigneswaran faisait appel à la « communauté internationale » à Jaffna, Sirisena participait à l’Assemblée générale de l’ONU à New York. Il a reçu l’éloge du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon et du Haut Commissaire aux droits de l’homme, le Prince Zeid Ra'ad Al-Hussein pour le « changement positif » au Sri Lanka. Après avoir rencontré Obama, Sirisena a déclaré aux médias : « Le président Obama a déclaré que Sri Lanka était un exemple pour les autres et que les États-Unis seront avec nous chaque fois que nous aurons besoin d’aide ».

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