Le réchauffement de la planète s'accélère à un rythme sans précédent

Les températures provenant d’analyses de carottes glaciaires de la NASA indiquent que le réchauffement planétaire s'accélère, et ce, au rythme le plus rapide du dernier millénaire. Cette tendance fait qu’il est «très probable» que la température moyenne de la planète dépasse de plus de 2 degrés Celsius la moyenne du 19e siècle.

L’une des raisons principales de l’accélération du réchauffement climatique est la rétroaction positive dont souffre tout le système – par exemple, avec le réchauffement, les glaciers de l’arctique fondent, causant l’absorption croissante de lumière et chaleur du soleil par l’océan atlantique, puisque l’eau réfléchit moins que la glace, ce qui veut dire encore plus de réchauffement, à l'infini.

Source : Goddard Insititue for Space Studies

Un autre mécanisme potentiel de rétroaction positive est la fonte du pergélisol (un sol gelé tout au long de l’année) tel qu’en Sibérie, où l’on estime qu’une augmentation de la température planétaire de 1,5 degré pourrait provoquer l’échappement d’un billion de tonnes de dioxyde de carbone et de méthane dans l’atmosphère sur une période de plusieurs années, ce qui prend plusieurs décennies à se produire avec l’activité industrielle.

Gavin Schmidt, le directeur de l’Institut Goddard de la NASA pour les études spatiales et parmi les climatologues les plus réputés, a commenté, «Lors des 30 dernières années, nous sommes entrés en territoires exceptionnels. C’est sans précédent en 1.000 ans. Il n’y a pas de période où l'on peut voir la tendance [des températures] que nous avons observée au 20e siècle».

On peut également comparer les dernières décennies de réchauffement climatique aux années les plus récentes. Lorsque les premières indications du réchauffement climatique furent détectées en 1977, l’on prédisait que les températures moyennes de la planète augmenteraient de 2 degrés Celsius par siècle. Dans les cinq dernières années, le rythme du réchauffement climatique représente environ cinq fois ce montant.

Ce réchauffement est beaucoup plus rapide que ce qui a eu lieu dans le passé de la Terre, quand la planète sortait de la période glaciaire. Durant ces périodes, les températures moyennes augmentaient typiquement de 4-7 degrés Celsius sur une période de 5.000 ans. L’augmentation du siècle dernier a été 10 fois plus rapide qu’à la sortie de la dernière période glaciaire. Les données actuelles suggèrent que le réchauffement pour le siècle à venir sera au moins 20 fois plus rapide que présentement.

Une comparaison des données mesurées de température au cours des 136 dernières années et des estimations des 1500 dernières années. Source : NASA Earth Observatory

De telles estimations s’accordent avec les données de température mensuelles provenant de la NASA et de la National Oceanic and Atmospheric Administration. Les milliers de stations météorologiques à travers le monde, les instruments sur des navires et bouées et les stations antarctiques indiquent toutes que le mois de juillet 2016 était le mois le plus chaud des 136 années d’enregistrement des températures. C’est également le dixième mois consécutif à atteindre des niveaux records de température mensuelle (c'est-à-dire, le mois de janvier le plus chaud, suivi du mois de février le plus chaud, etc.), dont le premier était le mois d’octobre 2015. Si cette tendance continue, ce qui est probable, 2016 sera l’année mesurée la plus chaude de l’histoire.

Certaines de ces températures sont l’effet d’un «El Niño» anormalement long, un réchauffement périodique de l’océan Pacifique qui prend place depuis au moins 100.000 ans. Par contre, les modèles climatiques de l' El Niño le plus récent, qui a pris fin au mois de mai, démontrent que même en l’absence de l’augmentation des températures par El Niño, 2015 et 2016 seraient parmi les années les plus chaudes jamais mesurées.

D’autres mesures sont disponibles pour offrir un aperçu de la Terre si la tendance des températures se maintient. En 2012, des chercheurs de la National Science Foundation se sont penchés sur la période pliocène tardive, il y a 2,7-3,2 millions d’années, la dernière fois que les niveaux de dioxyde de carbone et les températures planétaires étaient aussi élevés qu’ils le seront bientôt. Il s’agissait de comprendre la sensibilité des glaciers à des changements même minimes des températures planétaires.

L’étude a conclu qu’au cours de cette période, le niveau des océans a augmenté de 12 à 21 mètres en raison de la fonte des glaces de régions comme l’Antarctique. Ceci veut dire que l’état naturel de la Terre avec les niveaux de dioxyde de carbone modernes correspond à des niveaux océaniques possiblement 21 mètres plus élevés qu’ils le sont actuellement, et que nous sommes témoins du processus à travers lequel l’écosystème se rapproche de cet état.

Une carte du monde indiquant les régions (en rouge) qui seront submergées si le niveau des mers augmente de seulement 6 mètres. Source : NASA

Une différence importante par contre, est le rythme du changement des températures entre les deux périodes. L’époque pliocène a duré un demi-million d’années. La période présente d’augmentation des températures planétaires et des niveaux de dioxyde de carbone dure depuis un demi-siècle, ce qui augmente la probabilité d’un changement beaucoup plus rapide et intense dans l’écosystème mondial.

La plupart de ces changements potentiels seraient catastrophiques: l'acidification de l’océan entraînant l'extinction de masse des coraux et du plancton, la base de la chaîne alimentaire sur Terre; l'effondrement total des forêts tropicales; une calotte glaciaire de la taille du Groenland ou de l’Antarctique qui glisse dans l’océan, causant une augmentation presque instantanée du niveau des mers d’au moins cinq mètres, submergeant un tiers de la population mondiale.

Les récifs de corail souffrent déjà de la plus longue extinction enregistrée, qui dure maintenant depuis 28 mois et dont on attend la fin qu’en 2017. On estime qu’au moins 16 pour cent des récifs du monde vont disparaître en conséquence.

Les effets du changement climatique à court terme sont déjà ressentis. Les marées en 1982 et en 1997 étaient plus intenses qu’elles ne l’auraient été sans réchauffement. Un climat chaud et sec a presque contribué à mettre feu aux forêts amazoniennes sur une échelle de masse en 1998, 2005, et 2007. Cette année, le réchauffement climatique a contribué aux inondations record en Amérique du Sud, aux inondations et glissements en Éthiopie, aux feux de forêt au Canada, aux sécheresses en Afrique, en Thaïlande et au Venezuela, et à une augmentation générale dans l’intensité et la violence des cyclones pacifiques tropicaux et des ouragans atlantiques de cette année. Il ne s’agit là que d’un échantillon des défis des dernières années posés au bien-être et même à la survie de l'humanité que l’on peut attribuer au réchauffement climatique.

(Article paru d'abord en anglais le 3 septembre 2016)

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