Jean-Luc Mélenchon propose d'instaurer le service militaire obligatoire

Vendredi, Jean-Luc Mélenchon, l'ex-dirigeant du Front de gauche à présent candidat présidentiel de la France insoumise, a dévoilé son programme «géopolitique et défense». Alors qu’il mène une campagne démagogique en tant que populiste radical, Mélenchon veut rétablir le service militaire universel afin de préparer l’armée à mener des guerres majeures à l’étranger et renforcer son intervention en France dans le cadre de l'état d'urgence.

L'annonce de Mélenchon suit de peu celle d'Emmanuel Macron, le candidat d’En Marche qui est actuellement le favori des sondages, qui a annoncé qu’il rétablirait le service militaire en France afin de préparer l'armée française aux guerres à venir. Mélenchon souhaite rendre le service militaire de 9 à 12 mois "obligatoire” pour les hommes et les femmes entre 18 et 25 ans. Ceux-ci seraient rémunérés au Smic.

Il propose d’enrôler les jeunes dans une « garde nationale », une unité proposée aussi par le Front National (FN) néo-fasciste : «Nous proposons donc l'instauration d'un service national obligatoire, socle d'une Garde nationale citoyenne. ... Face à l'érosion du lien armée-nation provoquée par la suspension de la conscription en 1997, il est essentiel de redonner à la nation la souveraineté sur son outil de Défense».

Mélenchon a signalé qu'il accepterait d'augmenter massivement les dépenses militaires : « C'est la stratégie qui commande, pas le budget ». Ceci signifierait piller les budgets sociaux.

Mélenchon a également critiqué la proposition de Macron pour un service militaire d’un mois depuis la droite : « Je n'arrive pas à prendre au sérieux l'idée que la conscription occupe pendant un mois toute la jeunesse de France, ça, ce n'est pas la conscription, c'est la colonie de vacances ».

Ceci doit servir d'avertissement aux travailleurs. Dans un contexte de crise capitaliste mondiale sans précédent depuis la Deuxième Guerre mondiale, alors que l'OTAN menace la Russie d'une guerre majeure, Mélenchon veut donner des pouvoirs énormes à l'armée.

Un gouffre de classe sépare les travailleurs de Mélenchon, qui participe, à sa façon, au violent virage à droite de toute la pseudo gauche, notamment de son allié grec, le gouvernement pro-austérité de Syriza (la « Coalition de la gauche radicale »). Dans son livre L’ère du peuple, sorti en 2014, Mélenchon a annoncé la fin du socialisme, de la classe ouvrière, et de la gauche, et a avancé un nationalisme populiste. Il représente des couches aisées et conservatrices des classes moyennes, hostiles envers le socialisme et la lutte des classes.

En 2002, elles étaient horrifiés par l'éruption de manifestations de masse contre la perspective d'un second tour aux présidentielles opposant le frontiste Jean-Marie Le Pen au gaulliste Jacques Chirac, et encore plus par les manifestations internationales contre l'invasion américaine de l'Irak. Depuis, elles ont abandonné toute vélléité d'opposition à la guerre ou au populisme droitier du FN. A présent, elles) s'accommodent à l'hystérie sécuritaire du PS et du FN, et plus largement aux politiques d'austérité, de guerre, et d'attaques contre les droits démocratiques.

Quinze ans plus tard, le PS a imposé un an et demi d'état d'urgence, et le FN est en mesure à nouveau d'arriver au second tour. Dans ce contexte réactionnaire, la candidature populiste de Mélenchon est un mécanisme par lequel la classe dirigeante canalise et détourne les revendications de gauche parmi les travailleurs, et prépare une guerre majeure en Europe.

Mélenchon progresse dans les sondages : il est crédité d'environ 15 pour cent des intentions de vote au premier tour, comparé à 17 pour cent pour le candidat de droite, François Fillon, en troisième place derrière Macron et le candidat frontiste, Marine Le Pen. Mélenchon devance désormais de 4,5 pour cent le candidat du PS, Benoît Hamon. Selon les sondages, les électeurs de Mélenchon espèrent qu'il incarnera le mieux « les idées et les valeurs de la gauche ».

En fait, Mélenchon prépare une politique militariste, nationaliste et anti-ouvrière. Il applaudit son confrère, le premier ministre grec Alexis Tsipras de Syriza (« Coalition de la gauche radicale »), qui a foulé aux pieds ses promesses électorales et imposé l'austérité exigée par l'Union européenne au peuple grec. Syriza s'est alliée au parti de l'extrême-droite xénophobe, Les Grecs indépendants.

Avant tout, Mélenchon insiste que malgré la banqueroute du capitalisme et la faillite manifeste du PS, il ne peut y avoir aucune alternative à gauche pour les travailleurs. Après avoir été candidat du Front de gauche en 2012 puis appuyé Hollande, Mélenchon s'est présenté en 2017 « hors parti », « en solo », en insistant que les Français ne veulent plus entendre parler de partis politiques.

C'est-à-dire que pour Mélenchon, malgré la montée du FN, à laquelle il s'accommode facilement, il n'y a plus aucun projet politique capable de répondre aux intérêts objectifs des travailleurs : l'égalité sociale, l’opposition à la guerre, et la défense des libertés démocratiques.

Selon L'ère du peuple, la gauche serait totalement morte : « Aucune des réalités du monde qui s’avance n’a de place dans ses raisonnements ni dans ses projets, en supposant qu’elle en ait. » Il ne s’en prend pas au point de vue discrédité selon lequel le PS représenterait le socialisme. Pour lui, toute politique de gauche, quelle que soit sa nature, est à l’agonie : « Le mal est bien avancé. Il ne sera pas réparé avec de savantes explications pour discerner la vraie gauche de la fausse ».

En fait, l'appel de Mélenchon au rétablissement du service militaire, sur fond de menace de guerre contre la Russie, témoigne de la faillite totale de la pseudo gauche pro-guerre et anti-ouvrière représentée par Mélenchon. Mélenchon n'a rien à proposer aux travailleurs. Il cherche à les empêcher de se donner des organisations politiques qui dirigeraient une opposition indépendante des travailleurs contre le bellicisme de la bourgeoisie, en France et dans toutes les puissances impérialistes.

Mélenchon veut donner une couverture « radicale » à sa politique avec quelques slogans nationalistes démagogiques. A présent, il prétend vouloir préserver l'indépendance militaire de la France par une sortie de l’OTAN : « Il n'y a personne en Europe à part votre serviteur qui dit que l'avenir de la défense, de sa patrie (...) est de sortir de l'Otan et de sortir de cet engrenage militaire ».

Ceci ne fait qu'attiser un nationalisme français réactionnaire ; la France n'a ni les ressources économiques ni la force militaire nécessaire pour mener une politique autonome vis-à-vis les Etats Unis, la Grande Bretagne, l'Allemagne et la Russie. Tout comme sa proposition précédente d'une alliance indépendante franco-russe, la revendication de Mélenchon vise surtout à entretenir une démagogie nationaliste. Elle ne l'engage à rien de concret.

Après le putsch de février 2014 à Kiev, dirigé par des fascistes ukrainiens et soutenu par l'OTAN, il avait émis quelques critiques et pris quelques positions prorusses. En février 2016, sur France2, il a félicité Poutine pour l'intervention russe en Syrie pour soutenir le régime syrien. « Je pense qu'il va régler le problème », a dit Mélenchon, qui a appelé à une « coalition militaire internationale pour battre Daech ».

A présent qu'il monte dans les sondages, Mélenchon s’aligne sur ceux comme Macron qui soutiennent les menaces de l'OTAN contre Moscou. Il a attaqué la récente rencontre de Marine Le Pen avec Poutine : « Je n'ai pas d'amitié avec cet homme, ni de points communs avec cet homme, au point d'aller chercher une poignée de main qui discrédite celui qui la touche ».

 

 

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