Le gouvernement Macron prépare sa loi Travail II avec les syndicats

Intervenant le mardi 30 mai au soir au journal télévisé de France 2, le premier ministre de Macron, Edouard Philippe, a confirmé qu‘il voulait imposer au plus vite sa nouvelle version renforcée de l‘impopulaire loi Travail. C‘était un des projets « prioritaires » annoncés par le nouveau président dans sa campagne électorale. 

Philippe a insisté qu‘il voulait obtenir dès juillet la loi d‘habilitation qui permettra de légiférer par ordonnances, et qu‘il visait à publier ces ordonnances « avant la fin de l‘été ». Il a souligné la « détermination sans faille du président » et le « sentiment d’urgence » du gouvernement. Celui-ci veut s‘assurer que sa nouvelle loi Travail sera mise en place et appliquée le plus vite possible. 

Alors que des grèves ont lieu dans de nombreux secteurs, il essaie de prendre de vitesse un éventuel mouvement d‘opposition. 

Philippe a souligné sa détermination a réintroduire dans la nouvelle loi toutes les mesures qui en avait été retirées sous Hollande. « Sur la réforme du code du travail, le premier ministre se dit déterminé à la faire adopter intégralement, alors qu'il vient d'achever ce mardi ses premières discussions avec les représentants des organisations syndicales et patronales », écrit Le Monde

Le gouvernement devrait cette semaine définir les thèmes à discuter avec les syndicats et leur envoyer la semaine prochaine une « lettre d‘orientation » où il fixera, selon un des représentants patronaux, les « thèmes prioritaires pour le gouvernment ». Dans les discussions en cours avec le gouvernement, les syndicats souligent tous leur espoir de voir les ordonnances publiées et la nouvelle loi Travail aboutir. A la suite de ses discussions avec le premier ministre lundi 29 mai, Philippe Martinez, le dirigeant de la CGT a insisté sur la nécessité de « négocier ». 

« Je n’ai pas de date, mais en tout cas, j’ai cru comprendre que l’agenda rapide qui était prévu n’est pas aussi rapide que j’avais cru comprendre. L’échéance de fin août ou du 1er septembre a l’air plus floue », a déclaré Martinez sur un ton rassurant après son rendez-vous avec Philippe. En fait, le gouvernement n'a donné aucune indication que le calendrier de ses attaques sociales a changé, et leur contenu encore moins. 

Dans leurs pourparlers cordiaux avec Philippe, les syndicats acceptent tous le principe d‘imposer la réforme de la loi Travail par ordonnances. Ils acceptent, y compris la CGT, le passage des mesures retirées par le gouvernement Hollande lors des manifestations de mai et juin 2016 contre la loi El-Khomri, y compris celui de mesures opposées alors par la CGT. 

En 2016, la CGT avait beaucoup critiqué « l‘inversion de la hiérarchie des normes », c‘est-à-dire le fait que les droits des travailleurs inscrits dans la Constitution, le Code du travail et les accords de branche pouvaient être annulés par les accords d‘entreprise. A présent, elle discute du moment le plus opportun pour appliquer la loi Travail II! Ce qui montre que l‘opposition de la CGT durant les manifestations n‘existait que dans la mesure où elle lui servait à maintenir un contrôle politique de la situation que le PS risquait de perdre. 

Les syndicats savent exactement ce que Macron prépare et quelles seront les conséquences de ses mesures pour la classe ouvrière. La loi Travail a pour but d‘assurer une déréglementation complète des salaires, des conditions de travail, des prestations sociales et de la protection des emplois des travailleurs. Son objectif est de les soumettre entièrement aux impératifs de compétitivité du patronat et au diktat des investisseurs. 

Le programme de compétitvité économique du capitalisme français contre ses rivaux en Europe et dans le monde correspond fondamentalement aux programmes nationalistes des syndicats, comme la campagne menée par la CGT depuis 2016 « pour la reconquête de l’industrie française ». 

Même si certains syndicats minoritaires « contestataires » disent vouloir protester contre les projets de Macron sans attendre juillet, ils voudront inévitablement, comme la CGT et les autres syndicats, subordonner toute action à l‘agenda politique réactionnaire du gouvernement Macron. 

Les appareils syndicaux défendent des intérêts tout à fait différents de ceux des travailleurs. Ces organisations représentent une couche de bureaucrates qui ont intériorisé les intérêts du patronat et surtout de l‘appareil d‘Etat. Ce n'est pas un hasard qu'une des principales mesures de la loi Travail est celle qui donne aux syndicats des pouvoirs plus étendus sur la gestion quotidienne des entreprises, dont celui de négocier des accords d’entreprise violant le Code du Travail. 

Il faut une mobilisation politique contre le gouvernement Macron et ses alliés internationaux au sein de l'Union européenne, y compris les syndicats et leurs soutiens de pseudo gauche, tels que le Nouveau parti anticapitaliste, qui ont tacitement accordé leur soutien à Macron. Une mobilisation politique et international des travailleurs est nécessaire. Le capitalisme français est dans une énorme crise ; comme ses alliés européens, il essaie de s'en sortir par des attaques sociales à l‘intérieur et une défense agressive, militaire, de ses intérêts impérialistes dans le monde. 

L‘affrontement social qui se prépare avec Macron sera dur. Sans une lutte déterminée sur une base politique, pour mobiliser l'énorme opposition sociale qui existe parmi des masses de travailleurs et de jeunes, les travailleurs en lutte iront une fois de plus à l‘échec. Ils se trouveront face à une dure répression que Macron utilisera encore plus que Hollande, sous un état d'urgence que Macron et Philippe comptent inscrire par une loi dans le droit commun.

L‘utilisation massive par le gouvernement Hollande des interdictions de manifester dans le cadre de l‘etat d‘urgence est un avertissement. Selon Amnesty International, cité par Le Monde du 31 mai, elles l‘ont été « pour servir des objectifs plus larges, notamment pour maintenir l’ordre public ». Selon l‘ONG, qui s‘appuie sur un examen le 30 mai par le Conseil Constitutionnel de ce volet de l‘état d‘urgence, 90 pour cent de ces arrêtés ont été pris lors de la mobilisation contre la loi Travail.

 

Les luttes explosives qui s‘annoncent entre la classe dirigeante et la classe ouvrière, en France comme en Europe, ne peuvent être gagnées que si elles sont organisées indépendamment des appareils syndicaux et sur la base d‘une perspective révolutionnaire d‘unité internationale socialiste.

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