Le tir de missile nord-coréen accentue le risque de guerre

Le tir d’essai de la Corée du Nord d’un missile à longue portée hier a considérablement accentué le risque d’une guerre en Asie du Nord-Est qui aurait des conséquences catastrophiques pour la région et le monde.

Le lancement a été suivi de tests de missiles menaçants par les militaires sud-coréens et américains, ainsi que des condamnations des États-Unis et de leurs alliés et un appel à une session d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU pour imposer des sanctions plus sévères.

Pyongyang s’est vanté d’être une « puissance nucléaire fière qui possède non seulement des armes nucléaires, mais aussi le plus puissant ICBM [missile balistique intercontinental] qui peut cibler n’importe quelle partie du monde. » Le missile aurait volé sur une trajectoire très raide à une hauteur de plus de 2500 km avant d’atterrir à quelque 900 km plus loin dans la mer du Japon.

Un tel missile ne peut pas toucher toutes les parties du monde. Cependant, diverses estimations indiquent que, sur une trajectoire normale, il pourrait atteindre des cibles à 6500 voir 8000 km, ce qui place l’Alaska et Hawaï à sa portée. Les médias américains se sont emparés du lancement pour faire tout un battage sur le danger d’une attaque nucléaire nord-coréenne contre le peuple américain, alimentant un climat de peur pour créer les conditions de l’action militaire américaine.

Le test nord-coréen, avec toutes les vantardises de ce régime qui sonnent creux, est tout à fait réactionnaire. Cela laisse à Washington un prétexte à un renforcement massif des forces militaires américaines en Asie et ne fait rien pour défendre le peuple nord-coréen contre une attaque dévastatrice américaine et sème des divisions entre les travailleurs en Corée du Nord et ceux en Corée du Sud, au Japon, aux États-Unis et autour du monde.

Le Pentagone a d’abord signalé que la Corée du Nord avait testé un missile de gamme intermédiaire. Dans ce contexte, Trump a lancé dans un tweet : « Difficile à croire que la Corée du Sud et le Japon le supporteront beaucoup plus longtemps. Peut-être la Chine va-t-elle intervenir lourdement contre la Corée du Nord et finir ces absurdités une fois pour toutes ! »

Au cours de la semaine passée, l’Administration Trump a adopté une attitude de confrontation envers la Chine, faisant une série d’initiatives provocatrices : une importante vente d’armes à Taïwan, une autre incursion d’un destroyer américain dans les eaux revendiquées par la Chine dans la mer de Chine méridionale et l’imposition des sanctions américaines sur les entreprises chinoises et les particuliers qui participent aux échanges avec la Corée du Nord.

Dans un appel téléphonique cette semaine, Trump a déclaré au président chinois Xi Jinping que les États-Unis agiraient seuls si Pékin ne parvenait pas à obliger Pyongyang à abandonner ses armes nucléaires et ses missiles. Ayant déjà imposé des sanctions sévères à la Corée du Nord, cependant, le gouvernement chinois hésitait à aller plus loin, craignant que cela ne puisse provoquer un effondrement politique à Pyongyang que Washington exploiterait.

Le président Xi et son homologue russe, Vladimir Poutine, se sont réunis à Moscou hier avant le sommet du G20 plus tard cette semaine. Une déclaration conjointe des ministères des Affaires étrangères russes et chinois a condamné le lancement du missile nord-coréen et réitéré l’appel de la Chine pour que la Corée du Nord gèle des essais nucléaires et antimissiles en échange d’un arrêt par les États-Unis et la Corée du Sud à des exercices militaires conjoints à grande échelle – une proposition que les États-Unis ont déjà rejetée.

La déclaration conjointe s’est également opposée à l’installation d’une batterie antimissile de haute altitude (THAAD) en Corée du Sud, déclarant qu’il « endommage sérieusement les intérêts stratégiques de sécurité des puissances régionales, y compris la Russie et la Chine ». Moscou et Pékin sont conscients que le renforcement militaire des États-Unis en Asie-Pacifique n’est pas principalement dirigé contre le petit pays appauvri qu’est la Corée du Nord, mais constitue la préparation à la guerre contre leurs propres pays.

Ayant reconnu que la Corée du Nord a testé un ICBM, les États-Unis ont adopté une attitude plus menaçante. Dans un communiqué de presse hier, le secrétaire d’État américain, Rex Tillerson, a marqué le lancement de missiles comme « une nouvelle escalade » de la menace pour les États-Unis et leurs alliés et a exigé une « action globale », y compris l’adoption de « mesures plus solides » par le Conseil de la sécurité de l’ONU.

Dans une menace implicite de l’action des États-Unis contre les pays qui ont échoué à la mise en œuvre de ses diktats, Tillerson a déclaré : « Tout pays qui accueille des travailleurs invités nord-coréens fournit des avantages économiques ou militaires, ou omet d’appliquer pleinement les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, aide et encourage un régime dangereux ». Les remarques visaient clairement la Chine et la Russie, qui ont des liens importants avec la Corée du Nord.

Tillerson a conclu avec un avertissement. Les États-Unis « n’accepteraient jamais une Corée du Nord avec des armes nucléaires ». Les responsables du gouvernement Trump, y compris Tillerson, ont répété à plusieurs reprises que « toutes les options », y compris les attaques militaires préventives sur la Corée du Nord, sont « sur la table ».

La semaine dernière, le conseiller de Trump à la sécurité nationale, le général HR McMaster a déclaré que la « menace nord-coréenne est beaucoup plus immédiate maintenant ». Il a déclaré qu’il avait été chargé par le président « de préparer une gamme d’options, y compris une option militaire, que personne ne veut prendre ».

En réalité, c’est la menace d’une attaque américaine contre la Corée du Nord qui est beaucoup plus imminente. L’armée américaine et l’armée sud-coréenne ont répondu aujourd’hui par un barrage de tests de missiles dans les eaux sud-coréennes. Le commandement du Pacifique des États-Unis a déclaré que les missiles impliqués fournissaient une « capacité de précision profonde ». Un communiqué de l’armée américaine a affirmé que les armements pouvaient « engager l’ensemble des objectifs critiques dans toutes les conditions météorologiques ».

Déjà, les États-Unis ont rassemblé ce que Trump se vantait d’être « une armada » près de la péninsule coréenne, y compris deux groupes aéronavals opérationnels et un nombre non divulgué de sous-marins nucléaires. Ces forces aéronavales sont soutenues par des bases américaines en Corée du Sud, au Japon et à Guam et plus loin dans le nord de l’Australie et à Hawaï. Le secrétaire américain à la Défense, James Mattis, a prévenu que toute tentative de la Corée du Nord d’utiliser son petit arsenal nucléaire recevrait une réponse « efficace et écrasante », c’est-à-dire l’anéantissement nucléaire.

Les médias américains et internationaux continuent de battre le tambour pour la guerre avec un déluge de propagande diabolisant la Corée du Nord et gonflant grossièrement la menace qu’il pose. La menace réelle pour le monde, cependant, est l’impérialisme américain, qui, dans sa tentative de plus en plus téméraire de retarder son déclin historique, a lancé une guerre d’agression après l’autre au Moyen-Orient, en Asie centrale, en Afrique du Nord et dans les Balkans.

C’est Washington, et une succession d’Administrations américaines, et non de Pyongyang, qui est principalement responsable de la création de la situation explosive dans la péninsule coréenne. Depuis l’effondrement de l’Union soviétique en 1991, les États-Unis ont intensifié l’isolement imposé à la Corée du Nord après la fin de la guerre de Corée en 1953, dans une tentative faiblement déguisée de précipiter un effondrement politique à Pyongyang.

En accusant sans cesse à la Corée du Nord de mauvaise foi, les États-Unis ont sabordé efficacement les accords conclus en 1994 et 2007 pour que Pyongyang se défasse de ses armes nucléaires. Les États-Unis ont délibérément mis la Corée du Nord au pied du mur en imposant l’un des régimes de sanctions les plus sévères au monde et en la menaçant de frappes militaires.

En mai, le secrétaire à la Défense, Mattis, a qualifié la Corée du Nord de « menace directe pour les États-Unis », déclarant que les États-Unis n’avaient pas à attendre que Pyongyang ait un ICBM avec une ogive nucléaire. Il a prévenu que toute guerre avec la Corée du Nord serait « catastrophique » et impliquerait « probablement le pire type de combats dans la vie de la plupart des gens ».

Pourtant, c’est exactement ce que l’Administration Trump projette, ce pour quoi elle organise ses préparatifs et ce qu’elle envisage activement. Malheureusement, Trump a déclaré qu’il n’avait pas l’intention de signaler à l’avance une action militaire américaine contre la Corée du Nord ou tout autre pays. En conséquence, le monde est précairement perché au bord du gouffre d’une guerre qui dévasterait la péninsule coréenne et entraînerait d’autres puissances majeures telles que la Chine et la Russie dans un conflit plus large.

(Article paru d’abord en anglais le 5 juillet 2017)

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