L’attaque au couteau de Marseille traitée comme acte terroriste

Dimanche en début d’après midi deux femmes de 21 et 30 ans ont été tuées dans une attaque au couteau sur le parvis de la garde Saint-Charles à Marseille. L’attaque a été rapidement traitée comme un acte terroriste par les autorités. Le parquet anti-terroriste de Paris a ouvert une enquête pour « assassinats en relation avec une entreprise terroriste » et « tentative d’assassinat sur personne dépositaire de l’autorité publique ».

L’assaillant aurait égorgé une des victimes et poignardé l’autre. Des témoins ont indiqué l’avoir entendu crier «Allah Akbar» au moment des faits. L'homme qui ne portait pas de ceinture d’explosif et agissait seul a été abattu par des membres de la force Sentinelle accourus sur les lieux. Avant de mourir, il a été menotté par des policiers en civil ayant fini leur service.

Lionel, interne en médecine de 23 ans présent à la gare a déclaré au Figaro avoir entendu deux coups de feux, « tout le monde est sorti en courant et en hurlant. En moins de 5 minutes, des dizaines de policiers sont arrivés de tous les côtés, et ils ont bloqué tous les accès». La gare a été évacuée et le trafic ferroviaire a été interrompu à 16h. Il devait reprendre partiellement plus tard dans la journée. Un important dispositif policier a été mis en place.

L'agresseur d’environ 30 ans ne portait pas de pièce d'identité et reste non identifié à cette heure. Une source proche de l’enquête à dit à l’AFP, « l’identité de l’homme est encore en cours de vérification mais ses empreintes le rattachent à des faits de droit commun sous différentes identités ».

Il était connu des services de police sous sept identités différentes dans plusieurs pays du Maghreb, et en France pour une dizaine de faits de délinquance mineurs de droit commun commis entre Marseille, Toulon et Lyon. Il est surprenant que malgré qu’il ait été connu sous sept identités, il n’était pas connu des services de renseignement, ni fiché S.

Cette attaque intervenant quelques semaines après les attentats de Barcelone, qui avaient fait plusieurs dizaines de morts, fait partie d’un mode opératoire devenu classique, utilisé entre autre à Magnanville contre des fonctionnaires de police et à Orly sur des militaires. Le parquet antiterroriste a saisi la SDAT (Sous-direction anti-terroriste) et la DGSI (Direction générale de la Sécurité intérieure) et une enquête ouverte en flagrance pour assassinat terroriste.

Pour la mairie de Marseille, Caroline Pozmentier, adjointe à la sécurité a rendu hommage aux soldats de Sentinelle et implicitement approuvé d’avoir abattu l’homme « à l'heure où le nombre de victimes aurait pû être plus élevé ».

La classe politique s’est saisie de l’attaque soit pour souligner l’utilité de l’opération sentinelle, soit pour justifier l’état d’urgence ou un renforcement plus draconien encore des mesures anti-terroristes et des pouvoirs déjà donnés aux forces de sécurité.

« Je salue les militaires de Sentinelle et les policiers qui ont réagi avec sang froid et efficacité » a dit le président Emmanuel Macron. Son premier ministre, Edouard Philippe, souligne que « l’ensemble du gouvernement salue le courage et le professionnalisme des soldats qui ont neutralisé le criminel et stoppé sa folie meurtrière. Il rend également hommage à tous ceux qui nous protègent au quotidien… au travers du dispositif Sentinelle. Le gouvernement a réaffirmé le 14 septembre dernier son engagement dans la pérennisation de ce dispositif ». « Mobilisation totale de l'État » écrit le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner sur twitter.

« Nous apprenons le énième attentat qui une fois de plus nous horrifie et ensanglante nos rues, frappe nos compatriotes en plein coeur » a lancé la dirigeante du FN néofasciste Marine Le Pen en ouverture de son discours au Futuroscope, ajoutant qu’il fallait considérer « enfin le terrorisme [comme] un acte de guerre et non pas un crime de droit commun ou un acte de délinquance comme un autre ».

Dans un communiqué le PS « appelle à l’unité ... de tous les Etats de l’Union européenne afin de développer plus encore la coordination des moyens de la lutte contre le terrorisme »

Le ministre de l’intérieur Gérard Collomb qui s’est rendu sur place en fin d’après-midi a déclaré « Cet acte pourrait être de nature terroriste mais à cette heure, nous ne pouvons pas l'affirmer ». Il ajouta : « L'enquête est en cours. La personne qui a agressé les deux jeunes femmes a été abattue par des militaires. Nous avons des images qui permettent d'apprécier la situation. Ce qui est étrange c'est que la personne commence à commettre le crime sur une première personne, s'enfuit puis revient sur le lieu pour tuer la seconde »

La France a été frappée depuis 2015 par une série d'attentats qui ont fait 239 morts. La réaction de la classe politique française est à chaque fois d’utiliser ces meurtres pour attiser un climat du tout sécuritaire, justifiant des mesures policières de plus en plus drastiques et des lois antiterroristes de plus en plus liberticides. Cet attentat servira lui aussi à renforcer l’appareil répressif de l’État et accélérer l’instauration d’un régime autoritaire.

Il intervient alors que le gouvernement a renouvelé l'état d'urgence jusqu'au 1er novembre et qu’il prépare une loi pour inscrire les principales mesures de l’état d’urgence dans le droit commun afin de le rendre permanent. Cette nouvelle « loi antiterroriste » est actuellement examinée à l’Assemblée nationale et doit être votée le 3 octobre. Malgré qu’elle donnera des pouvoirs énormes sur la population aux forces de sécurité, une partie de la classe politique exige qu’elle soit encore aggravée.

L'enquête ne fait que commencer mais une des questions que pose ce crime horrible est comment cet assaillant, connu pour des délits sous différentes identités a pu échapper au renseignement et à la police ? Les indices déjà disponibles indiquent que ce crime est le résultat de la politique militariste des pays de l’OTAN et des guerres de changement de régime par procuration qu’ils ont menées en Libye et en Syrie, la France en tête, et dont est issu l’EI.

Comme dans les attaques terroristes précédentes en France et en Belgique, un facteur majeur dans la capacité de l'agresseur à préparer son attaque sous le nez de la police aura sans doute été le soutien tacite que les réseaux islamistes recrutant des combattants pour la guerre en Syrie reçoivent des services de renseignement européens.

Par leurs guerres en Syrie, au Pakistan, en Afghanistan et ailleurs, la France et les autres puissances de l'OTAN portent une immense responsabilité dans la création des conditions où de telles attaques se produisent, y compris cette dernière attaque à Marseille.

Les attentats de Paris et Bruxelles, de Magnanville et d’Orly – où des membres de l’EI ont utilisé les méthodes employées en Syrie depuis que l’OTAN y a lancé sa guerre en 2011 – sont eux-mêmes autant de rappels du caractère criminel de cette guerre.

 

 

 

 

 

 

 

 

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