Les aiguilleurs du ciel français font grève face à la restructuration du secteur aérien

Les syndicats des aiguilleurs du ciel et d’Air France appellent à des journées de grève, alors que le mécontentement des travailleurs monte contre les accords signés par les syndicats.

Les aiguilleurs du ciel protestent contre la nouvelle organisation du temps de travail signé en juin 2016 avec le SNCTA (syndicat national des contrôleurs du trafic aérien) et l'Unsa. Le syndicat Unsa, qui rassemble environ 20 pour cent des 4 000 aiguilleurs du ciel en France, a déposé un préavis de grève de lundi 6 à vendredi 10 mars pour les centres de Brest et Bordeaux, et un autre de mardi 7 à jeudi 9 mars pour celui d'Aix-en-Provence.

Les syndicats critiquent le « dogmatisme » de la Direction générale de l'aviation civile, qui veut passer d'un système de 6 jours travaillés sur 12 à 7 jours sur 12. La DGAC argumente que puisque les aéroports de Reims et Paris-Charles de Gaulle ont déjà adopté le rythme plus épuisant, et que celui de Nice compte bientôt le faire, les travailleurs à Brest, Bordeaux, et Aix devraient le faire aussi.

Une mise en garde sévère est nécessaire sur le rôle des appareils syndicaux. En appelant à des grèves cette semaine, le SNTCA et l’Unsa tentent de contenir l’opposition des aiguilleurs du ciel à un accord qu’ils ont signé eux-mêmes. Comme dans tellement d'autres grèves du secteur aérien en France et à travers l'Europe, ils tenteront de démoraliser les travailleurs pour les forcer à accepter la mise en place de nouvelles attaques. Il faut impérativement ôter le contrôle de la lutte des aiguilleurs et d'autres sections des travailleurs du secteur aérien aux appareils syndicaux.

Face une grève pour l'heure moyennement suivie, la DGAC a recommandé aux compagnies de réduire dès lundi 6 mars de 25 à 33 pour cent leurs vols survolant ou desservant le sud et l'ouest de la France.

Air France ne s’attend pas à ce que cette grève paralyse le trafic et annonce qu'elle assurerait 100 pour cent de ses vols long-courrier, 99 pour cent sur le moyen-courrier et plus de 80 pour cent des liaisons intérieures. La compagnie n'exclut pas des retards. EasyJet a annulé 38 vols prévus lundi.

Cette grève des aiguilleurs du ciel est lancée isolément des travailleurs du secteur aérien européen, alors que les hôtesses et stewards de la compagnie British Airways sont en grève du 3 au 7 mars pour des hausses de salaires. Les pilotes de la Lufthansa sont en grève par intermittence depuis deux ans pour exiger des hausses de salaires.

Après avoir cédé une hausse de salaires pour les pilotes, la compagnie allemande prévoit de compenser la réduction de leur marge par l’externalisation de certaines opérations avec l’affrètement de 40 avions en dehors de la convention collective. Cela doit permettre à la direction de Lufthansa de reculer pour mieux sauter, en ouvrant le chemin à l’élargissement d’affrètement en dehors des conventions, donc avec des pilotes et un équipage moins bien rémunérés.

Chez Air France une grève quelques jours après celle des aiguilleurs du ciel aura lieu du 18 au 20 mars à l'initiative de deux de leurs principaux syndicats, le SNPNC et l'Unsa-PNC. Les hôtesses et stewards protestent contre les efforts qui leur sont demandés et la création d'une nouvelle compagnie long-courrier à coûts réduits alors que la compagnie a augmenté la rémunération de ses dirigeants de17,6 pour cent.

Ceci fait partie d’une énième attaques contre les travailleurs d’Air France depuis 2014 rendus possibles par la capitulation du syndicat des pilotes SNPL. Alors que les pilotes s'opposaient à la création de la filiale low cost Transavia et la baisse des salaires pour les travailleurs de cette filiale, le syndicat imposa la reprise du travail après deux semaines de grève.

Ils ont justifié une reddition totale, alors qu'une victoire des travailleurs était à portée de main, en arguant que leur rôle était de défendre la compagnie. Ils disaient vouloir éviter des pertes financières trop importantes pour Air France.

Ils agissaient également pour sauver le duo Hollande-Valls, car cette grève, qui a fait perdre des centaines de millions d’euros à Air France, fragilisa aussi le gouvernement PS. Il craignait que cette grève des pilotes d’Air France ne se développe en mouvement plus large, faisant entrer d’autres sections de travailleurs en lutte contre le gouvernement PS, hautement impopulaire ainsi que l'Union européenne.

Le WSWS écrivait suite à l’imposition de la fin de la grève des pilotes par le SNPL : « Si Air France est confronté à des dommages financiers 'irréversibles' dus à la grève, cela signifie que les grévistes sont dans une position de force. C’est à ce moment précis toutefois que le syndicat déclare sa volonté d’arrêter la grève et de collaborer avec la direction pour mener des attaques contre des travailleurs qu’il affirme abusivement représenter. Les pilotes se trouvent à un carrefour. S’ils mettent fin à la grève maintenant, la direction lancera des attaques brutales dans le but de récupérer les centaines de millions d’euros perdus, faire un exemple des pilotes et décourager d’autres catégories de travailleurs à faire grève. ».

Le résultat de cette manœuvre réactionnaire n'a pas tardé à se faire sentir. Quelques semaines après la fin de la grève, Air France et les syndicats ont signé la baisse des salaires pour la filiale low cost. En 2015, les syndicats et la direction d’Air France ont signé un accord pour éliminer 2.900 emplois. En tout, les restructurations ont éliminé 15.000 emplois, soit le quart des 63.000 travailleurs à Air France en 2012.

Les travailleurs du secteur aérien ne peuvent rien attendre des syndicats qui ont capitulé pour imposer les attaques contre les acquis sociaux et les emplois des travailleurs aéroportuaires. La seule façon d'aller de l'avant est par une large mobilisation en lutte de la classe ouvrière, avec notamment la création d'organisations indépendantes pour coordonner la lutte des travailleurs à l'échelle internationale, sur une perspective socialiste hostile au PS et à l'UE.

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