Le syndicat canadien Unifor veut arrêter la grève à CAMI en offrant des concessions à GM

Au moment où la grève de quelque 2,800 travailleurs de GM à son usine CAMI à Ingersoll (Ontario) atteint sa première semaine, le syndicat Unifor travaille dans les coulisses pour y mettre fin. Malgré la détermination des travailleurs de l’automobile de combattre les décennies de concessions, leur lutte fait face à une menace imminente de la bureaucratie syndicale.

La London Free Press a rapporté jeudi qu’Unifor avait fait une offre plus tôt dans la journée visant à reprendre les pourparlers avec GM. En maintenant son refus de dire quoi que ce soit aux travailleurs à propos du contenu des négociations, le président du Local 88 d’Unifor, Mike Van Boekel, a simplement noté que le syndicat avait offert à GM des concessions sur les «enjeux monétaires».

Les grévistes devraient être sur leur garde. Unifor a imposé à maintes reprises des concessions sur les «enjeux monétaires» qui réduisaient les salaires, minaient les pensions des travailleurs et abandonnaient les allocations pour hausse du coût de la vie (COLA). Les commentaires de Van Boekel indiquent clairement que le syndicat se prépare à une nouvelle trahison afin de mettre fin à la grève aussi rapidement que possible. Après avoir précédemment déclaré qu’un accord de principe entre GM et Unifor serait suffisant pour arrêt le débrayage, Van Boekel a dit à la London Free Press: «Nous croyons que c’est une proposition qui peut nous permettre d’avancer rapidement».

Les travailleurs en grève ont indiqué clairement dans des discussions avec l’Infolettre des travailleurs de l’auto du WSWS qu’ils étaient en faveur d’une mobilisation des travailleurs de l’auto à travers le Canada, les États-Unis et le Mexique contre les géants de l’automobile pour obtenir la sécurité d’emploi, des augmentations salariales substantielles, et la fin des salaires et avantages à multi-échelons.

Mais au lieu de cela, Unifor répand le poison du nationalisme canadien, en se concentrant sur des appels à GM de s’engager envers les produits «fabriqués au Canada» et en décorant les lignes de piquetage avec d’énormes drapeaux à feuille d’érable.

Dans une manœuvre politique, Unifor a envoyé en bus plus d’une centaine de travailleurs de CAMI à Ottawa, vendredi, pour participer à un rassemblement explicitement nationaliste la veille de l’ouverture de la prochaine ronde des négociations de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA). Dans des remarques que Donald Trump aurait pu faire, Van Boekel a proclamé: «Nous somme la tête d’affiche pour l’ALÉNA. Ceci est exactement ce pourquoi nous nous battons. Nous devons continuer de produire dans ce pays.»

Les efforts de Van Boekel et de ses collègues bureaucrates syndicaux pour présenter de tels appels comme étant motivés par la défense des emplois sont une fraude. Pendant plus de trois décennies, Unifor et ses prédécesseurs, les Travailleurs canadiens de l’automobile (TCA), ont répété le refrain qu’il faut «continuer de produire dans ce pays» pour justifier et imposer une série de concessions, y compris des milliers de mises à pied, l’introduction d’un régime de salaire à deux et trois paliers dans les usines automobiles, l’élimination des droits de pension à prestations définies et la réduction des avantages sociaux dans les milieux de travail.

En réalité, la préoccupation principale du président d’Unifor Jerry Dias, de Van Boekel et de leurs collègues est d’exploiter la grève à CAMI pour renforcer leur partenariat avec les libéraux de Justin Trudeau. Dias a été à Washington pour l’ouverture des pourparlers de l’ALÉNA afin de pouvoir fonctionner comme conseiller de facto à la délégation du gouvernement canadien. Dans une tirade nationaliste dégoûtante à un rassemblement des travailleurs de Bombardier mercredi, il a exhorté «notre gouvernement fédéral» – le même gouvernement pro-patronal qui a augmenté les dépenses militaires de 70 pour cent et lancé un vaste programme de privatisation des infrastructures publiques – à «combattre les États-Unis» et de «défendre nos emplois».

Pour défendre son alliance confortable avec les libéraux de Trudeau, Unifor cherche à attiser l’animosité envers les travailleurs automobiles mexicains. L’appel d’Unifor pour que GM fasse de CAMI «l’usine principale» dans la production de l’Equinox est basé sur la fausse conception que les travailleurs canadiens peuvent sécuriser leurs emplois en demandant aux dirigeants de GM de licencier leurs collègues au Mexique.

Contrairement au nationalisme d’Unifor, la réalité est que les travailleurs de CAMI, comme leurs collègues travailleurs de l’automobile aux États-Unis, au Mexique et du monde entier, sont confrontés à une lutte quotidienne contre une grande entreprise internationale qui travaille de concert avec la bureaucratie syndicale pour les exploiter encore plus cruellement.

Un travailleur de CAMI a expliqué à l’Infolettre des travailleurs de l’auto du WSWS comment le syndicat a collaboré avec la direction de GM pour imposer des semaines de travail écrasantes de 60 heures, étalées sur six jours. «Avec l’Equinox 2018, notre force de travail sous la direction de Mike Van Boekel et du Comité a vu la création d’un milieu de travail misérable et dangereux», a dit le travailleur. «Le lancement a commencé avec une formation inadéquate dans un projet pilote raté qui était sensé nous préparer à de nouveaux procédés et composantes. Des procédures incomplètes, de la machinerie dangereuse et des stations de travail en désordre et mal disposées ont suivi. Une rotations du travail à chaque heure force les travailleurs à exécuter plus de 18 fonctions par équipe tout au long de la journée. C’est impossible d’améliorer les stations de travail ou les taches à cause de la rotation de plus de 30 personnes par jour.»

Les blessures ont rapidement augmenté en conséquence. «Regardez autour de l’usine n’importe quel jour et vous aller voir des travailleurs se présenter avec des douleurs au dos, aux épaules et aux mains. Et ce n’est pas uniquement au travail. Les vies personnelles des gens sont détruites à cause de toutes ces blessures récurrentes et de l’épuisement profond causé par des quarts de travail interminables et obligatoires de six jour semaine et des pratiques de travail non sécuritaires, et le syndicat ne fait rien», a ajouté le travailleur.

Le syndicat est resté les bras croisés pendant que les travailleurs se faisaient congédier le même jour que des employés à temps partiel temporaires (TPT) étaient engagés à un salaire moindre et à de pires conditions. «Lorsque le président du syndicat Van Boekel a été questionné à propos des heures excessives qui excédaient les normes du travail, il a répondu en disant que certains travailleurs se faisaient congédier et qu’il fallait laisser les autres faire du temps supplémentaire», a continué le travailleur. «Il s’est opposé à la plainte et a encouragé les travailleurs à ignorer la loi. Il est le pire employé anti-travailleurs de notre usine.»

Unifor a étouffé de nombreuses plaintes des employés, a ajouté le travailleur, en les référant au département des ressources humaines de la compagnie. Parlant de la perspective d’une nouvelle convention collective, le travailleur a remarqué: «Personne ne croit que le syndicat fera quelque chose. Pour le peu qu’ils ont dit, la proposition semble terrible. Le mieux qu’on peut espérer est le modèle pourri (entre Unifor et les trois grandes compagnies de Détroit).

C’est pourquoi il est urgent pour les travailleurs d’élire un comité d’action contrôlé par les membres et dirigé par les travailleurs les plus militants pour prendre les commandes de la grève des mains d’Unifor. Les travailleurs de CAMI font face à de puissants ennemis, mais ils ont des alliés encore plus forts. Les enjeux pour lesquels ils se battent sont les mêmes que pour les travailleurs de l’auto aux États-Unis, au Mexique et à l’international. Le comité d’action doit donc lancer un appel immédiat aux travailleurs de GM et de l’auto à travers l’Amérique du nord pour qu’ils appuient leur lutte en lançant leurs propres grèves et en refusant d’accomplir le travail additionnel exigé par GM pour compenser pour la grève. Les travailleurs dans les autres usines doivent être encouragés à se joindre à une contre-offensive contre les décennies de concessions et d’attaques imposées par les compagnies de l’auto avec la collaboration étroite de leur valets au sein d’Unifor et de l’UAW (syndicat américain de l’auto).

Ceci est avant tout un combat politique. Il faut adopter un programme socialiste et internationaliste capable de guider les travailleurs de l’automobile et la classe ouvrière en son ensemble dans le combat pour mettre fin au système d’exploitation capitaliste et le remplacer par un gouvernement ouvrier engagé à placer les besoins des travailleurs avant la course aux profits des compagnies.

Loading