La Corée du Nord répond aux sanctions par un essai de missile

Le régime nord-coréen a tiré ce qui serait un missile balistique intercontinental (ICBM) au-dessus de l’île de Hokkaido au Nord du Japon, tôt le vendredi matin. Selon les estimations publiées par le gouvernement japonais, le missile a été lancé à proximité de la capitale nord-coréenne de Pyongyang et a parcouru quelque 3400 km avant de tomber dans l’océan Pacifique.

Le missile a été tiré semble-t-il en représailles contre la Chine et la Russie qui se sont jointes aux États-Unis et d’autres membres du Conseil de sécurité des Nations Unies pour ratifier une série de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord.

Les sanctions, imposées en réponse à l’essai par la Corée du Nord d’un dispositif nucléaire la semaine dernière, sont les plus sévères à ce jour. Bien qu’elles ne soient pas aussi sévères que le voulait le gouvernement Trump, elles aggraveront toutefois l’isolement déjà dramatique du pays. La capacité de la Corée du Nord à acheter du pétrole a été restreinte et les achats de gaz bloqués totalement. Ses exportations de textiles et son envoi de main-d’œuvre détachée à l’étranger ont été interdites, en plus des sanctions antérieures contre les exportations de minerai de fer, de charbon, de plomb et de fruits de mer.

L’intensification de la pression économique va de pair avec les menaces militaires flagrantes. Le gouvernement sud-coréen a discuté ouvertement cette semaine de la formation d’une brigade militaire spécialisée dont la seule tâche serait d’infiltrer la Corée du Nord et d’assassiner son chef Kim Jong-un et d’autres personnalités politiques et militaires. La Corée du Sud a également testé un missile de croisière de précision conçu pour des missions d’assassinat.

De manière encore plus provocante, une délégation de haut niveau des politiciens du parti d’opposition sud-coréens est arrivée à Washington jeudi pour demander au gouvernement Trump de faire pression sur le président sud-coréen Moon Jae-in pour qu’il fasse « la demande » du redéploiement des armes nucléaires américaines en Corée du Sud.

L’armée américaine a retiré ses armes nucléaires de la péninsule coréenne en 1991. Le Pentagone est plus que capable d’incinérer la Corée du Nord, ou tout autre pays, depuis le continent américain, de l’air ou de la mer. Dans les jours précédant l’essai de missile, le secrétaire américain à la Défense, James Mad Dog Mattis a visité des silos de lancement de missiles nucléaires dans le Midwest américain. Le général de l’armée de l’Air John Hyten qui commande les bombardiers de longue portée qui peuvent larguer de l’air des armes nucléaires, s’est vanté devant des journalistes que la réaction des États-Unis à toute agression de la Corée du Nord serait « la destruction de leur nation entière ».

Les principaux alliés des Américains en Asie, le Japon et l’Australie, ont émis des dénonciations prévisibles du dernier essai de missiles nord-coréen. Le gouvernement japonais l’a qualifié de « provocation extrême ». Le Premier ministre australien Malcolm Turnbull a accusé la Corée du Nord d’un « acte criminel dangereux et imprudent ». Plus tard, Turnbull a menacé : « Si Kim Jong-un devait commencer une guerre, attaquer les États-Unis ou l’un de ses alliés, il signerait une lettre de suicide. Ce serait la fin de son gouvernement et des milliers et des milliers de personnes mourraient. »

Le président américain Donald Trump aurait été « informé » des derniers développements. Dans sa réponse initiale au test de missile, le secrétaire d’État Rex Tillerson a ciblé directement la Chine et la Russie, insistant sur le fait que les deux prennent des « mesures directes ». Il a déclaré que la Chine fournissait l’essentiel du pétrole à la Corée du Nord tandis que la Russie était le plus grand utilisateur de la main-d’œuvre contractuelle nord-coréenne.

Une autre séance d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU a été programmée à New York pour vendredi. La déclaration de Tillerson suggère que les États-Unis pourraient renouveler leur demande que la Chine et la Russie acceptent à un embargo économique complet de la Corée du Nord, imposée par un blocus naval.

Washington et ses alliés font tout leur possible pour acculer le régime déjà assiégé en Corée du Nord, pour lequel la seule issue serait une capitulation complète aux demandes américaines. Au bout du compte, le lancement de missiles et des essais de dispositifs nucléaires sont un plaidoyer désespéré de la clique réactionnaire et nationaliste autour de Kim Jong-un pour de meilleurs termes, y compris sa propre survie.

Les forces militaires de tous les belligérants sont en état d’alerte le plus élevé. Il y a la possibilité indéniable d’une guerre à grande échelle déclenchée par un incident sur la frontière entre la Corée du Nord et la Corée du Sud.

Les déclarations sans cesse renouvelées sur une « attaque » nord-coréenne ne servent qu’à obscurcir la perspective beaucoup plus probable d’une première attaque massive par les États-Unis et de la Corée du Sud, soutenue par des pays comme le Japon et l’Australie. La doctrine illégale de la « guerre préventive » a été entérinée comme outil de la politique étrangère des États-Unis depuis 2002.

Une logique horrible a été mise en mouvement par la rhétorique constante de Washington selon laquelle la Corée du Nord ne sera pas autorisée à posséder des armes nucléaires capables d’atteindre les États-Unis, et que « toutes les options sont sur la table ».

Comme le World Socialist Web Site a commenté le 6 septembre : « A chaque fois qu’on fait monter d’un cran les menaces de déclencher une conflagration nucléaire, la question se pose avec plus de force : est-ce que Washington va entrer en guerre pour honorer sa rhétorique belliciste ? Les menaces – et la détermination à prouver qu’elles ne sont pas simplement du bluff – sont-elles devenues la force motrice d’une marche à la guerre nucléaire potentielle ? »

L’invasion de l’Irak en 2003 a été précédée d’un déluge de mensonges selon lequel le régime de Saddam Hussein menaçait directement les États-Unis et leurs alliés avec des « armes de destruction massive ». Quatorze ans plus tard, un scénario comparable est en train de se jouer, avec des appels belliqueux à annihiler la Corée du Nord avant qu’elle n’attaque le continent américain et ne détruise des villes telles que Los Angeles. La réalité, que la Corée du Nord n’a pas la capacité ni de raison de mener une attaque qui entraînerait la destruction des États-Unis, est simplement balayée.

La montée en puissance vers une attaque contre la Corée du Nord est la suite de 25 ans d’interventions et de guerres des États-Unis pour maintenir leur domination mondiale. L’objectif ultime n’est pas seulement le régime de Pyongyang, mais la Chine, qui est considérée comme la plus grande menace par les sections les plus impitoyables de la classe dirigeante américaine. Toute guerre sur la péninsule coréenne déstabiliserait économiquement et politiquement le régime de Pékin, et affaiblirait fondamentalement sa position stratégique et militaire.

C’est précisément la collision de ces intérêts sous-jacents qui pose le danger qu’une telle guerre se transforme en une confrontation directe entre les États-Unis et la Chine, deux puissances nucléaires.

(Article paru en anglais le 15 septembre 2017)

 

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