Le rôle de la fraction de gauche de l’UCU dans la tentative d’écraser la grève dans l’enseignement supérieur britannique

Vendredi a été le dernier des 14 jours de grève des enseignants et autres personnels universitaires britanniques, luttant contre la destruction de leurs droits à la retraite.

Lors des réunions impromptues tenues ce mardi, de milliers des grévistes ont voté massivement contre une entente au rabais conclue lundi soir entre le Syndicat des Collèges et des Universités (UCU) et l’organisation patronale Universities UK (UUK). Ce vote est la seule raison que ce conflit amer, qui a duré quatre semaines déjà, a pu continuer.

Le syndicat et la direction avaient élaboré les étapes précises pour mettre fin à la grève. Mais alors que les délégués syndicaux de 65 établissements d’enseignement supérieur se réunissaient au siège de Londres pour voter sur l’accord, des centaines de lecturers (maîtres de conférence et assimilés) en colère entouraient le bâtiment. S’adressant aux grévistes en colère à l’extérieur du QG, la dirigeante de l’UCU, Sally Hunt, était constamment interpellée. Un ouvrier a pointé à elle en disant : « Vous êtes maintenant objectivement du côté des employeurs ! » Voir la vidéo ici.

Ayant été contrecarrée dans ses plans, l’UCU utilisera les prochaines semaines pour compléter sa trahison. Il a immédiatement fait appel à UUK pour des « négociations urgentes », « pour essayer de trouver un moyen de résoudre ce conflit ». Il n’y a plus de grèves planifiées avant 14 jours, voire en mai pendant la période des examens.

L’UCU n’est pas une organisation qui représente ses membres, mais – comme le gréviste à Londres l’a déclaré très justement – une organisation qui lutte dans l’intérêt des employeurs. L’UCU continuera à comploter dans les coulisses pour finaliser un « compromis » qui se rapproche le plus possible des exigences de la direction.

La seule action que l’UCU a sanctionnée au cours de la prochaine période est une grève de deux jours concernant la rémunération dans seulement 12 collèges d’enseignement supérieur sur 319 collèges à l’échelle nationale. Onze de ces collèges sont basés à Londres, avec un collège symbolique appelé à participer dans les Midlands et chaque établissement fera grève des jours différents.

En dehors des deux jours d’action de l’ensemble du personnel du collège au début du conflit, l’UCU a veillé à ce que les professeurs et les employés des établissements ne soient jamais en grève en même temps, dans des conditions où une offensive puissante des deux avec le soutien des étudiants serait en mesure de fermer l’ensemble des secteurs de l’enseignement supérieur (HE) et de l’enseignement aux adultes (FE).

L’UCU a organisé un nombre ininterrompu de trahisons au cours de la dernière décennie face à l’attaque du gouvernement et des employeurs contre les emplois, les salaires, les retraites et les conditions de travail.

La fraction de gauche de l’UCU, qui se décrit elle-même « comme un groupe divers de socialistes et de gauchistes au sein de l’UCU qui a joué un rôle essentiel dans ce processus. Nos partisans comprennent des membres du Socialist Workers Party (SWP), du parti travailliste, d’autres groupes de gauche… »

Lors des premières élections de l’UCU après la formation du syndicat en 2006, la gauche de l’UCU a remporté 30 des 68 sièges de son comité exécutif national (NEC). L’un de leurs candidats, Sasha Callaghan, a remporté la vice-présidence du syndicat, devenant plus tard son président. La fraction de gauche de l’UCU a remporté plus tard la majorité au NEC, bien que l’UCU soit toujours dirigée par Sally Hunt – qui est soutenue par la fraction Independent Broad Left organisée par les membres du Parti travailliste et les membres du Parti communiste stalinien.

Dès le début, la fraction de gauche de l’UCU s’est engagée à travailler avec la droite au sein de la direction de l’UCU. Mark Campbell, membre du SWP et membre de l’UCU NEC, a déclaré : « Nous sommes d’accord avec Sally Hunt pour dire que l’heure est à l’unité, mais nous devons nous battre pour défendre les acquis et conditions de travail de nos membres, une lutte qui doit partir du centre et aller vers les membres ».

Aucune lutte « depuis le centre » n’a jamais été montée.

En 2011, l’UCU comptait parmi les plus de 20 syndicats qui ont organisé une déroute de la lutte pour la défense des retraites du secteur public. Après que 2 millions de travailleurs ont soutenu une grève, dans la première grande lutte contre le nouveau gouvernement conservateur de Cameron, les syndicats ont veillé à ce que le mouvement soit arrêté.

La fraction de gauche de l’UCU a perdu sa majorité aux élections de l’UCU en 2012, tout en conservant 30 membres au NEC, tandis que la faction de Hunt en avait 39. Une déclaration de février 2012 a été publiée par la fraction de gauche de l’UCU à l’époque où Hunt organisait une chasse aux sorcières dont elle réclamait était une lutte contre « un syndicat au sein du syndicat ». La déclaration promettait : « Nous devrions souligner […] que l’appartenance à l’un ou l’autre groupement au NEC n’empêche pas les membres de NEC de travailler ensemble là où nous pouvons parvenir à un accord. Les membres de la fraction de gauche de l’UCU NEC et les membres de l’UCU « Independent Broad Left », et d’autres, ont travaillé ensemble dans de nombreux comités et groupes de travail du NEC ».

La droite n’a rien à craindre, dit-elle, car « dans la fraction de gauche de l’UCU, nous recherchons l’unité […] et privilégions cette unité sur l’exercice des votes de bloc ».

Liz Lawrence, membre du SWP, a occupé le poste de présidente nationale de l’UCU de 2014 à 2016. Lors des dernières élections au NEC au début du mois, la fraction de gauche de l’UCU a remporté 15 sièges dans les sections HE et FE, et sa candidate Nita Sanghera a remporté la position du vice-président.

Dans le conflit actuel, la fraction de gauche de l’UCU a joué un rôle traître avec Carlo Morelli, membre du SWP siégeant au « comité de négociation USS » de l’UCU, impliqué dans les pourparlers avec l’UUK. Après l’annonce de l’accord UCU/UUK, un site internet de la fraction de gauche de l’UCU a déclaré que ce n’était pas une entente au rabais : « Nos négociateurs avaient une arme pointée sur leur tête. Une arme de type : « accepte le contrat ou obtiens le DC [le système inférieur de retraite à cotisations définies]". Un compromis était né. Cela ne signifie pas nécessairement que les négociateurs se sont vendus. Ce compromis est ce qui arrive lorsque vous travaillez dans le cadre du déficit prévu, et faites face à la menace d’un DC à 100 pour cent ».

Les membres de l’UCU se sont rendus sur les réseaux sociaux pour dénoncer l’accord, un certain nombre s’engageant à quitter le syndicat si l’entente au rabais était appliquée. Beaucoup ont retweeté le hashtag #NoCapitulation.

Les commentaires suivants ont exprimé le sentiment parmi les enseignants :

« Je n’ai jamais adhéré à un syndicat jusqu’à présent, des soupçons sur la façon, dont les gens au sommet, organisent des transactions qui ne profitent pas aux travailleurs. Je me suis joint cette fois. Sentez-vous comme si j’avais eu raison. Comment annuler mon abonnement ? […] Si la grève est annulée aujourd’hui, je ne veux pas être associée à l’UCU. Je peux encore me battre et protester et je le ferai ! »

Un autre a écrit : « Nous avons été totalement vendus. Si cela va de l’avant, je vais retirer mon adhésion immédiatement ».

Un enseignant a décrit l’entente au rabais, comme le moment « Qu’ils mangent de la brioche ! » de Sally Hunt, et un autre ajoute : « Si vous [l’UCU] êtes d’accord, attendez-vous à ce qu’un grand nombre de personnes démissionnent du syndicat en signe de protestation ».

Opposée à cette rébellion naissante, et craignant que la lutte pour les retraites échappe à l’emprise de l’UCU, la fraction de gauche de l’UCU s’attache à maintenir le contrôle du syndicat à tout prix tout en se faisant passer pour des critiques de l’entente au rabais et des amis des membres de l’UCU.

Le SWP a déclaré que « la démocratie de base, la participation et le militantisme sont les bienvenus » parce que « c’est le moyen de renouveler nos syndicats ».

« Maintenant, les dirigeants syndicaux peuvent être poussés à vraiment se battre pour les retraites », a-t-il insisté.

En opposition à la fraction de gauche de l’UCU et à tous les partisans des syndicats, le Parti de l’égalité socialiste s’est battu pour la création de comités de base de travailleurs de l’éducation et d’étudiants, indépendants et opposés à l’UCU, au NUS (le Syndicat des étudiants), au TUC (le syndicat des syndicats), au Parti travailliste, et à leurs partisans politiques. Ces comités créeront le cadre pour mobiliser toute la classe ouvrière pour défendre les emplois, les salaires, les conditions de travail et le droit à une retraite décente, dans le cadre de la lutte pour une réorganisation socialiste de la vie économique.

Le Parti de l’égalité socialiste organise un forum en ligne pour les enseignants et les travailleurs de l’éducation le mardi 27 mars à 19 h 30 (GMT). Il discutera de la façon de sortir la lutte des mains de l’UCU en établissant des comités de base fondés sur un programme socialiste et en organisant un appel aux travailleurs du secteur de l’éducation en Grande-Bretagne et internationalement qui font face aux mêmes attaques.

Pour participer à la réunion, cliquez ici lorsque la réunion commence, ou appelez le +44 330 221 0088 et entrez le code d’accès 900-111-333. Si vous utilisez votre téléphone depuis le Royaume-Uni, le numéro sera facturé au tarif national.

(Article paru d’abord en anglais le 17 mars 2018)

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