Au moins 10 personnes tuées dans une attaque à la voiture-bélier contre des piétons à Toronto

Dix personnes ont été tuées mardi et au moins 15 autres blessées lorsqu’une fourgonnette louée est montée sur le trottoir pour foncer en direction sud sur une distance de deux kilomètres dans un secteur commercial achalandé du nord de Toronto. De nombreux témoins ont déclaré que le conducteur semblait enragé et tentait délibérément de frapper les piétons.

Les rues du «centre-ville de North York», un quartier où vivent un grand nombre d’immigrants chinois, coréens et iraniens, étaient alors pleines de gens profitant d’une chaude journée ensoleillée après le long hiver.

Les premières victimes ont été signalées juste après 13 h 30, heure locale.

Lorsque le conducteur s’est finalement arrêté, il a été interpellé par un policier au moment de descendre du véhicule et celui-ci lui a ordonné de s’étendre au sol.

Au début, le conducteur n’a pas obtempéré, criant «Tuez-moi» à plusieurs reprises, en plus de répéter plusieurs fois qu’il avait une arme à feu. Le policier, pistolet au poing, a réagi en répétant son ordre pour que le suspect s’étende sur le sol, ce que ce dernier a finalement fait.

La police de Toronto a identifié le conducteur de la fourgonnette comme étant Alek Minassian, 25 ans, de Richmond Hill, une banlieue de Toronto. La police dit que Minassian n’était pas connu d’elle. Au moment d’écrire ces lignes, aucune accusation n’avait encore été déposée contre lui.

À 23 h, heure de Toronto, la police n’avait toujours rien mentionné comme motif possible, se limitant à déclarer que rien n’était exclu définitivement.

Plus tôt dans la soirée, le ministre fédéral de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a déclaré: «Les événements qui se sont produits dans la rue derrière nous sont horribles. Mais ils ne semblent aucunement liés à la sécurité nationale, sur la base des informations disponibles actuellement.»

Goodale et la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland étaient au centre-ville de Toronto au moment de l’attaque contre les piétons, pour rencontrer leurs homologues du G-7 en prévision du sommet annuel de cette organisation qui se tiendra dans Charlevoix, au Québec, en juin prochain.

Comme tous les gouvernements impérialistes ailleurs dans le monde, le Canada invoque systématiquement la prétendue menace du terrorisme islamiste depuis 2001 afin de justifier une augmentation massive des pouvoirs et de la portée de son appareil de sécurité nationale et sa participation à une série de guerres prédatrices désastreuses au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie centrale.

Stephen Harper et son gouvernement conservateur ont profité de deux attaques de «loups solitaires» perpétrés par des sympathisants terroristes islamistes en octobre 2014 pour déclarer le Canada «assiégé» et faire adopter une loi, le Projet de loi C-51, qui confère de nouveaux pouvoirs aux agences du renseignement. Ceux-ci comprennent un accès virtuellement illimité aux renseignements personnels détenus par le gouvernement canadien et le droit pour le principal organisme de renseignement du pays, le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), d’enfreindre pratiquement toute loi afin de «perturber» les menaces à la sécurité publique.

Tout en prétendant que le Projet de loi C-51 allait «trop loin», Justin Trudeau et les libéraux ont néanmoins voté pour. Comme on pouvait s’y attendre, leur promesse de «régler le problème» à leur arrivée au pouvoir n’a entraîné que quelques changements superficiels. En fait, certains d’entre eux ont même donné au Centre de la sécurité des télécommunications (l’agence canadienne de renseignement sur les transmissions partenaire du Groupe des Cinq – les «Five Eyes»), de nouveaux pouvoirs pour espionner encore plus les Canadiens et mener des activités de guerre cybernétique.

Les commentateurs des réseaux américains ont exprimé leur surprise du fait que la police n’ait pas ouvert le feu sur Minassian lorsque celui-ci ne s’est pas immédiatement rendu. Il n’empêche que la police canadienne a l’habitude depuis longtemps de tirer, d’électrocuter au Taser ou de tuer autrement nombre de personnes en proie à une détresse mentale évidente.

Selon une enquête récente de la CBC, le réseau anglais de Radio-Canada, plus de 70 % des 460 personnes qui sont mortes dans des affrontements avec des policiers au Canada depuis 2000 souffraient de problèmes de santé mentale, de toxicomanie, ou des deux.

Parmi ces gens figure Sammy Yatim, un immigrant syrien de 17 ans, abattu en 2013 par un policier de Toronto dans un tramway immobilisé, après qu’il ait demandé à tous les passagers de débarquer en brandissant un couteau et s’être exposé à la vue des policiers. À la suite d’un tollé général, le policier qui a abattu Yatim de neuf balles a été reconnu coupable, mais de «tentative de meurtre» seulement, son avocat ayant plaidé avec succès que la première volée de balles qui avait tué Yatim était justifiée.

Depuis près de deux décennies, le public canadien est inondé de propagande gouvernementale et médiatique à propos de la menace du terrorisme islamiste. Cette propagande exclut presque invariablement toute discussion sur les rapports que ces forces telles qu’Al-Qaïda et ISIS ont dans les machinations de l’impérialisme américain et de ses alliés, y compris le Canada, dans la grande région du Moyen-Orient. Le quotidien Ottawa Citizen a toutefois révélé que le personnel des Forces armées canadiennes impliqué dans la guerre de changement de régime en Libye en 2011 se qualifiait de «force aérienne d’Al-Qaïda».

L’attaque terroriste la plus meurtrière survenue au Canada depuis 2001 a été l’attaque de janvier 2017 contre une mosquée à Québec, où six fidèles ont perdu la vie. Le tireur, Alexandre Bissonnette, est un admirateur de Donald Trump et de Marine Le Pen en France, fortement influencé par les nationalistes québécois de droite qui dépeignent les immigrants, en particulier les musulmans, comme une menace pour les «valeurs du Québec».

(Article paru en anglais le 24 avril 2018)

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