Jörg Baberowski, extrémiste de droite, attaque ses critiques à l'Université Humboldt de Berlin

Le professeur d'extrême droite allemand Jörg Baberowski cible ses détracteurs avec une agressivité croissante. Sur sa page Facebook, Baberowski a insulté et menacé d'autres professeurs de l'université Humboldt parce qu'ils ont critiqué une déclaration xénophobe qu'il avait faite.

Baberowski est l'un des principaux porte-parole de la nouvelle droite en Allemagne. Après avoir acquis une réputation nationale en 2015 avec une attaque contre les réfugiés publiée dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung, Baberowski a fondé un cercle de discussion dans le but de rendre socialement acceptables les positions extrémistes de droite, comme le rapporte un article de Die Zeit du 22 mars. Plus tôt cette année, la «Déclaration 2018» a émergé de ce réseau fascisant. Des universitaires de droite ont critiqué «l'immigration de masse illégale» et ont déclaré leur solidarité avec l'extrême droite xénophobe.

Plusieurs contre-déclarations signées par des milliers d'universitaires ont répondu à cette déclaration répugnante. Une lettre ouverte à Wilhelm Hopf, fondateur et directeur de la maison d'édition LIT, spécialisée dans les publications savantes, a suscité beaucoup d’intérêt. Hopf était l'un des signataires de la «Déclaration 2018». À la suite de la lettre ouverte, plus de 200 professeurs et universitaires d'Allemagne et d'Autriche ont menacé de mettre fin à leur collaboration avec l'éditeur de droite.

Dans la lettre ouverte, les universitaires ont noté «avec étonnement» que Hopf, qui dirige «une société internationalement active avec des bureaux à Berlin, Vienne, Hambourg, Londres, Zurich et New York», ait pu signer la «Déclaration 2018». La lettre ouverte a signalé que la déclaration anti-immigrée a été produite dans le contexte d'une «conjoncture politique où un discours dirigé contre les réfugiés est la pierre angulaire de l'institutionnalisation de l'extrême droite en Allemagne».

«Nos activités intellectuelles visent en fin de compte l'objectif pédagogique et démocratique de lutter contre les préjugés et l'exclusion», ont poursuivi les signataires. «Nous ne nous dissocions donc pas seulement des objectifs inhumains de la "Déclaration 2018", mais nous ne voulons pas non plus être associés à un éditeur qui s'exprime de cette manière. Nous ne pouvons donc plus collaborer à l'avenir avec les éditeurs de LIT et nous appelons à un rejet décisif de la xénophobie et du nationalisme.»

Hopf a ensuite retiré sa signature et a déclaré qu'en tant qu'éditeur de LIT, il avait fait une «erreur» en signant la «Déclaration 2018».

Parmi les signataires de la lettre ouverte figuraient quatre professeurs et trois membres du personnel universitaire de l'Université Humboldt, dont la spécialiste littéraire Eva Boesenberg, la chercheuse culturelle Susanne Gehrmann, l'ethnologue Wolfgang Kaschuba et la sociologue du sport Tina Nobis.

Baberowski a ensuite lancé une campagne de diffamation honteuse contre ces professeurs. Dans deux textes publiés sur sa page Facebook et ailleurs, Baberowski a insulté les universitaires comme des «dénonciateurs» qui sont des «professeurs suffisants qui n'ont jamais prononcé la moindre parole critique de leur vie.» Il a comparé leur déclaration à l'appel nazi au boycottage des entreprises juives. La déclaration était une «campagne de propagande» lui rappelant «les temps les plus sombres», a-t-il poursuivi. «N'achetez pas des parias!» a-t-il ajouté.

La démagogie dont fait preuve Baberowski est sans limites. Les collègues opposés à l'attaque contre les réfugiés et à la montée de l'extrême droite sont comparés à la terreur fasciste. Et ceci d'un professeur qui est connu pour minimiser les crimes des nazis et relativiser l'Holocauste.

Baberowski avait précédemment déclaré publiquement qu'Hitler n'était «pas violent» parce qu’«il ne voulait pas parler de l'extermination des Juifs à sa table» – une affirmation qui a été réfutée. Il a défendu l'apologiste des nazis Ernst Nolte et affirmé dans ses écrits que c’est l'Armée rouge qui avait imposé la guerre à l'Est aux Allemands.

Baberowski ne s'est pas contenté de dénoncer ses collègues. Il les a également menacés explicitement. À la fin de sa tirade contre les signataires de la lettre ouverte, il a déclaré: «Les humiliés et les exclus se souviendront de ceux qui les ont mis au pilori.» Venant du fondateur d'un cercle de discussion d'extrême droite, cela doit être considéré comme un grave avertissement.

Ce n'est pas la première fois que Baberowski insulte et menace ses critiques. En mars, il a accusé le Tagesspiegel de discréditer «des gens qui ont des opinions différentes d'une manière qui rappelle les dictatures», parce que le quotidien berlinois a critiqué la «Déclaration 2018».

En février de l'année dernière, il a insulté et menacé des étudiants de son propre institut parce qu'ils avaient distribué un tract critique à son égard. Baberowski a qualifié Sven Wurm, député de l'International Youth and Students for Social Equality (IYSSE – Étudiants et jeunes internationalistes pour l'égalité sociale) dans le parlement étudiant à l'université de Humboldt de Berlin, de «fasciste rouge» et de «dénonciateur ignoble», et l'a photographié contre sa volonté. Dans ses conférences, Baberowski a exhorté les étudiants à prendre des mesures contre ses détracteurs. «Vous pouvez aussi dire non. Tout le monde peut faire quelque chose...», a-t-il dit, avant de lire à haute voix le lieu et l'heure de la prochaine réunion de l'IYSSE.

Le professeur extrémiste de droite est capable d'agir de manière si agressive à l'université, en menaçant et insultant ses collègues, parce que l'administration le protège.

Lorsque la cour d'appel de Cologne a rejeté la poursuite de Baberowski l'année dernière contre l'association étudiante de Brême, cherchant à interdire à l'association étudiante de le qualifier d'extrémiste de droite, l'administration de l'université a pris sa défense. Elle a publié une déclaration décrivant Baberowski comme un «érudit de renom» et qualifiant d'«inacceptables» les «attaques dans les médias». Tandis que le professeur de droite diffamait honteusement ses collègues et ses étudiants, l'université cherchait à refuser aux étudiants le droit de se défendre dans les médias.

À l'époque, le comité de rédaction du World Socialist Web Site a rejeté cette atteinte à la liberté d'opinion et a expliqué la raison du partenariat étroit entre l'administration de l'université et Baberowski:

Le fait que la présidence de l'Université serre officiellement les rangs avec Baberowski vise à réprimer la critique des points de vue d’extrême droite et ne peut s'expliquer que dans le cadre du brutal virage à droite des milieux dirigeants. En politique intérieure, le SPD et des sections du parti La Gauche s'adaptent aux campagnes chauvines menées contre les réfugiés et même y participent. Dans cette orientation réactionnaire, Baberowski est considéré comme un allié.

Pour rétablir l'Allemagne comme puissance militaire active et majeure, il faut vaincre dans la population allemande une hostilité à la guerre nourrie par les expériences tragiques et sanglantes du 20e siècle. Il faut donc réécrire l'histoire et blanchir les crimes de l'impérialisme allemand. Baberowski joue un rôle important dans ce projet dissimulé et infâme.

Cette analyse a depuis été pleinement corroborée. Les politiques de droite des partis de l'establishment ont ouvert la voie à l'entrée de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) d'extrême droite au parlement, ce qui est maintenant utilisé pour réaliser un nouveau virage à droite par l'ensemble de l'establishment politique. La nouvelle grande coalition est le gouvernement allemand le plus à droite depuis la chute du régime nazi. Elle lance un vaste programme de réarmement, en accélérant la destruction des services sociaux et en adoptant la politique de l'AfD en matière de réfugiés.

Mais ces politiques sont largement détestées au sein de la population. La grande majorité des gens n’est pas prête à accepter le retour des abominations fascistes du passé. De nombreux parlements d'étudiants, syndicats d'étudiants, comités départementaux et autres associations étudiantes ont soutenu l'IYSSE et ont vivement critiqué Baberowski. Des centaines de personnes sont venues à des réunions sur le sujet. La critique généralisée de la «Déclaration 2018» est liée à cette opposition.

Voilà pourquoi Baberowski répond avec une agressivité croissante à ses critiques. Il se rend compte qu'en dernière analyse, il ne peut imposer son programme de droite qu'en recourant à la violence. La manière dont Baberowski, soutenu par l'université, assaille les collègues universitaires qui le critiquent doit donc être vue comme un avertissement sérieux. Il souligne l'importance de la lutte de l’IYSSE sur les campus contre la falsification historique et l'idéologie de droite.

(Article paru en anglais le 1er mai 2018)

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