Une étude révèle un déclin alarmant de la biodiversité dans le monde

Une étude récemment publiée et soutenue par les Nations Unies présente un portrait sombre du déclin accéléré de la biodiversité (c’est-à-dire la variété des espèces végétales et animales) à travers le globe ainsi que des implications graves pour l’avenir proche de la vie sur Terre, incluant celui des humains.

Inondations en Nouvelle-Orléans après l’Ouragan Katrina causées par un développement incontrôlé dans les zones humides.

 

L'étude, composée de plusieurs rapports de plus de 550 chercheurs, a été réalisée par la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES). Elle soutient que la perte de plus en plus rapide d'espèces végétales et animales due à la dégradation de l'habitat, aux espèces envahissantes et à la pollution se produit parallèlement au changement climatique. Ensemble, ces processus, s'ils ne sont pas arrêtés, auront bientôt des conséquences environnementales catastrophiques, équivalant à une sixième extinction mondiale de masse, qui menacera la survie même de l'humanité.

Les écosystèmes biologiques sont le résultat d’une interaction complexe et dialectique des formes de vie végétale, animale et microbienne entre elles et avec leur environnement physique, évoluant au cours des millénaires. Ces systèmes ne sont pas statiques. Ils changent au fil du temps selon la dynamique de l'unité et du conflit des contraires de leurs innombrables constituants biologiques et physiques. En général, plus la diversité des espèces (nombre d'espèces différentes) est grande dans un écosystème, plus elle est stable, à l'exception des perturbations externes (p. ex., l'impact qui a causé une extinction massive, y compris des dinosaures, il y a environ 66 millions d’années), et plus lentement les changements surviennent.

En revanche, plus la diversité des espèces est faible, plus la tendance à l'instabilité est grande et plus l'écosystème est vulnérable à un effondrement catastrophique. Une grande diversité atténuera généralement le degré auquel les changements dans un élément particulier du système affecteront le système dans son ensemble. Le rôle d'une espèce, connue sous le nom de niche écologique, peut être progressivement rempli par une ou plusieurs autres espèces, conduisant à un changement progressif.

Cependant, avec une diversité moindre, les écosystèmes tendent à être plus fragiles. La perte d'une espèce aura probablement un impact beaucoup plus grand sur le système dans son ensemble, ce qui créera une instabilité et un effondrement dramatique potentiel. Il est moins probable qu'une autre espèce évolue ou s'adapte avec une rapidité suffisante pour combler le «vide» au sein du système, ce qui pourrait entraîner une série de perturbations en cascade. Si les tendances documentées dans les rapports de l'IPBES se poursuivent, les systèmes biologiques du monde risquent d'entrer dans ce genre de grave crise dans les prochaines décennies.

Les humains ont eu un impact significatif sur les écosystèmes naturels, en particulier depuis la révolution industrielle. Cependant, nous ne sommes en aucun cas «découplés» de l'environnement naturel. De tels systèmes demeurent un aspect vital à notre survie – affectant le climat et la température, les ressources alimentaires, l'eau potable ainsi que l'air respirable.

Les auteurs de l'étude de l’IPBES fournissent une série d'exemples pour illustrer à la fois la variété et la rapidité de la perte d'espèces et de la dégradation de l'environnement, qui se produisent dans le monde entier.

Parmi les impacts directs et substantiels du déclin et de l'extinction des espèces, l'étude a révélé que les pêcheries exploitables de la région Asie-Pacifique devraient être épuisées d'ici 2048. Cela entraînera de graves pertes économiques et des privations alimentaires pour des millions de personnes.

La destruction de l’habitat par le déboisement au Mexique

En Afrique, où plus de 60% de la population humaine dépend directement des ressources naturelles, l'étude prévoit que la moitié de certaines espèces d'oiseaux et de mammifères pourraient disparaître d'ici 2100. Parmi les espèces historiquement recensées sur ce continent, plus de 20% sont menacées, en danger d’extinction ou déjà éteintes. L'extinction effective récente du rhinocéros blanc du nord, qui a reçu beaucoup d'attention des médias, n'est qu'un exemple emblématique.

En Europe, 42% des espèces terrestres ont subi des déclins notables au cours de la dernière décennie. La moitié des zones humides existantes ont disparu depuis 1970.

La destruction des zones humides et de leurs communautés végétales et animales associées dans le monde, à l'intérieur des terres et le long des côtes, accélère l'érosion, la pollution et la perte de protection contre les inondations, par exemple lors de la saison des ouragans de l'Atlantique.

Au cours des 500 dernières années, depuis que les Européens ont commencé à coloniser les Amériques, 30% de la biodiversité de l'hémisphère a été perdue. L'étude prévoit qu'au cours de la prochaine décennie, si les tendances actuelles se poursuivent, ce chiffre atteindra 40%, ce qui indique une accélération rapide. Près d'un quart des espèces existantes étudiées sont menacées.

Les arbres sont la clé de la production d'oxygène atmosphérique, essentiel à la survie des humains et des autres animaux. Cependant, depuis 1990, plus de 130 millions d'hectares de forêt tropicale ont été perdus. Dans le nord-est du Brésil, qui fait partie de la forêt amazonienne, souvent appelée «poumon de la Terre», entre 2003 et 2013 seulement, la superficie cultivée a plus que doublé pour atteindre 2,5 millions d'hectares.

Les auteurs des rapports soulignent les effets combinés de la modification directe de l’environnement causée par l'homme et des changements climatiques sur le déclin de la biodiversité. D'ici 2050, les changements climatiques pourraient égaler ou dépasser la modification de l’environnement en tant que principale cause du déclin des espèces. Dans les deux cas, la planète est en voie de devenir un désert sans vie. Ces constatations ne sont pas nouvelles, elles ne font que confirmer et réaffirmer l'urgence de la situation. Des études antérieures ont brossé un tableau similaire (voir: L’extinction de masse sur Terre accélère, des scientifiques parlent d’« anéantissement biologique »).

Alors que l'étude de l'IPBES documente le danger croissant posé par le déclin rapide et accéléré de la biodiversité, elle ne présente que des notions générales sur ce qui pourrait être fait pour stopper le processus et éviter la catastrophe, sans aucun mécanisme de mise en œuvre autre que le bon vouloir des dirigeants d’entreprise et les politiciens. Comme avec d'autres études de ce genre, les chercheurs ne peuvent jusqu'à présent que déplorer l'indigence totale de la réponse face à leurs terribles avertissements. Robert Watson, président de l'IPBES, a déclaré: «Il était temps d'agir hier ou avant-hier. Les gouvernements reconnaissent que nous avons un problème. Maintenant, nous avons besoin d'action, mais malheureusement, les mesures que nous avons maintenant ne sont pas au niveau dont nous avons besoin.»

Des extinctions de masse ont eu lieu cinq fois auparavant pendant l'existence de la vie sur terre (voir: La Sixième Extinction par Elizabeth Kolbert, en anglais seulement). Dans chacun de ces cas, les causes étaient naturelles. La sixième extinction de masse en cours de développement diffère en ce qu'elle est directement liée à l'activité humaine. Cependant, contrairement aux affirmations contenues dans le rapport et dans de nombreuses autres déclarations dans les médias et ailleurs, la cause n'est pas l'échec moral humain, la surpopulation, ou la nécessité de manger moins de viande rouge.

Le pauvre agriculteur brésilien qui est obligé de défricher plus de terres pour survivre, ou le travailleur d'usine en Chine ou aux États-Unis dont l'usine crache des produits chimiques toxiques, etc., ne sont pas responsables de la dégradation de l'environnement qui en résulte.

La responsabilité incombe au système capitaliste anarchique et animé par la recherche du profit qui néglige avec dédain les conséquences de ses actions et empêche le développement et la mise en œuvre de solutions rationnelles et scientifiquement fondées aux problèmes du changement climatique et de la dégradation de l'environnement. Alors que la crise capitaliste mondiale s'intensifie et que les rivalités interimpérialistes s'enveniment, les préoccupations environnementales seront de plus en plus balayées, comme c'est déjà le cas sous l'administration Trump aux États-Unis.

Si, au contraire, les vastes ressources maintenant accaparées par les élites du monde ou gaspillées dans les guerres étaient utilisées pour éradiquer la pauvreté, mettre fin à la pollution, développer et généraliser l'énergie propre, et de manière générale organiser la société au bénéfice du plus grand nombre, la crise en cours pourrait être stoppée et inversée. Cela ne peut se produire que sous le contrôle démocratique de la classe ouvrière mettant en œuvre la réorganisation socialiste de la société.

(Article paru en anglais le 14 mai 2018)

L’auteur recommande également:

Le changement climatique et la lutte contre le capitalisme

[15 juillet 2017]

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