Les CRS lancent des expulsions massives de réfugiés de Paris

Mercredi dernier, au petit matin, des centaines de policiers CRS ont attaqué et démoli l’un des plus grands campements de réfugiés de France, le long du canal Saint-Denis, dans le 19ᵉ arrondissement de Paris.

Plus de 1700 réfugiés, venus en grande partie de Somalie, du Soudan et d’Érythrée, vivaient à la dure depuis des mois dans des conditions sordides de ce campement. La plupart des réfugiés de ce campement fuyaient leurs pays déchirés par la guerre et ont effectué la traversée dangereuse de la Méditerranée depuis la Libye, où ils devaient échapper aux combats continus ainsi qu’aux camps d’emprisonnement de réfugiés mis en place après la guerre de l’OTAN en 2011 contre ce pays.

Les CRS ont expulsé de force les réfugiés, y compris les femmes, les mineurs non accompagnés et des enfants, et les ont escortés dans 20 centres de détention temporaire de la région parisienne. Les réfugiés ont seulement été autorisés à emmenés leurs affaires dans des sacs à provisions ou de petites valises. Plusieurs centaines de réfugiés se sont sauvés avant que les CRS n’entre dans le camp.

Après l’attaque initiale de la police, les bulldozers ont détruit des centaines de petites tentes à deux personnes que les volontaires avaient fournies aux réfugiés. Lorsque les bulldozers de la police ont démoli le campement, les CRS ont patrouillé le canal de Saint-Denis et surveillé toute la zone environnante, afin de mater toute résistance qui se présentait. C’était la 35ᵉ occasion depuis la mi-2015 que la police a expulsé les réfugiés des camps de fortune à Paris ; quelque 28 000 réfugiés ont été chassés de cette façon.

Les réfugiés seraient détenus dans des centres pénitentiaires temporaires pendant que la police vérifierait leurs papiers et leur situation administrative. Après un bref examen, les réfugiés risquent d’être expulsés de la France en raison de la nouvelle loi draconienne du président Emmanuel Macron, adoptée en avril pour réduire le nombre de demandes d’asile et créer les conditions d’une procédure d’expulsion sommaire de masse.

Selon certains articles de presse, 2132 migrants ont été déportés jeudi dernier de l’aéroport Charles de Gaulle à Paris.

En novembre dernier, le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, a ordonné aux préfets de police des 96 départements de la France métropole d’expulser les demandeurs d’asile déboutés et les sans-papiers. La circulaire, qui a été divulguée à la presse, a demandé aux préfets de fournir « d’ici à la fin du mois de février 2018, un bilan de la lutte contre l’immigration irrégulière dans votre département en 2017, et votre plan pour la mise en œuvre des présentes instructions au cours des prochains mois […] La lutte contre l’immigration irrégulière relève de chaque préfet de chaque département […] il est nécessaire d’agir rapidement, à droit constant ».

Le gouvernement Macron, soutenu par toute l’Union européenne (UE), intensifie son assaut contre les réfugiés et leurs droits démocratiques, en mettant en place et en déployant un corps de police massif qui peut aussi être tourné contre les travailleurs et les étudiants s’opposant à la guerre et conditions sociales actuelles en France.

Ces attaques ont également révélé la fausseté des arguments de ceux, qui suivent la bureaucratie de l’Union européenne (UE), qui insistaient pour que les travailleurs donnent leurs voix à Macron comme un moindre mal comparé au candidat néo-fasciste Marine Le Pen, afin d’aider les réfugiés. Seul le Parti de l’égalité socialiste en France a rejeté ces arguments, auxquels des forces pseudo-gauches comme la France insoumise ou le Nouveau parti anticapitaliste se sont adaptés, et a appelé à un boycott actif du second tour des élections de 2017. Cet argument a été tragiquement confirmé, maintes fois, par les attaques croissantes de Macron contre les réfugiés.

Aujourd’hui, Macron récupère des pans entiers du programme anti-réfugiés tel que formulé par le Front national (FN) de Le Pen.

Collomb a exigé que les autorités régionales françaises montent des « équipes mobiles » pour expulser les réfugiés et les immigrants sans papiers des camps de fortune. En janvier dernier, il a annoncé son intention de créer 400 centres de détention, où des « migrants économiques » pourraient être emprisonnés et puis déportés.

Les reporters du WSWS qui ont visité les campements des réfugiés du Canal de Saint-Denis le mois dernier ont constaté que la plupart de ces réfugiés avaient fui en France pour échapper aux guerres impérialistes et à la répression étatique. Il y a maintenant 60 millions de réfugiés dans le monde, le plus grand nombre depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. C’est le résultat de décennies de guerres de pillage menées par les États-Unis en Afghanistan, en Libye, en Syrie, en Irak, en Somalie et ailleurs, qui ont dévasté des sociétés entières et fait des millions de victimes.

Dans un entretien avec le WSWS sur le canal Saint Martin, un jeune Afghan de la région de Jalalabad a expliqué comment il avait fui son pays après l’arrivée des troupes américaines dans son village, alors qu’il était en déplacement ailleurs pour rendre visite à d’autres parents, massacrant toute sa famille – son père, sa mère, deux frères et une sœur.

Il y a ensuite les conditions horribles que les réfugiés subissent sur leur chemin vers la France. La chef de mission de Médecins Sans Frontières en France, Corinne Torre, a déclaré aux médias : « La plupart de ces personnes sont passées par la Libye. Beaucoup ont été confrontés à la violence, à la torture, à des traitements inhumains, à des trafiquants ou à des violences sexuelles. Nous ne parlons pas assez de cela, et il devrait y avoir de meilleures structures en place pour y faire face. »

Néanmoins, les réfugiés dans les camps en France doivent non seulement supporter les conditions sordides et humiliantes dans ces camps de fortune, mais aussi se battre avec les autorités pour établir leur statut de réfugié. C’est une tâche quasiment impossible pour grand nombre d’immigrés, qui n’ont ni l’argent, ni les documents officiels à fournir aux autorités françaises de l’immigration. Afin d’embaucher du personnel juridique pour traduire des documents en français et argumenter auprès des autorités de l’État, les réfugiés ont généralement besoin de plus de 2000 euros.

Les responsables du gouvernement Macron sont bien conscients que la grande majorité des réfugiés ne peuvent pas payer une telle somme et qu’ils sont désormais à la merci de la police, qui peut facilement rejeter leurs demandes et les renvoyer dans leurs pays déchirés par la guerre.

En même temps, la police française inflige des amendes aux organisations à but non lucratif qui tentent d’aider les réfugiés et de leur fournir des vêtements et de la nourriture, dans le cadre d’une stratégie impitoyable visant à empêcher quiconque d’aider les réfugiés à Paris.

Tout indique que Macron prépare encore plus de répression contre les immigrés à Paris et dans toute la France. Ces derniers jours, la police a déjà détruit les campements de réfugiés du canal Saint-Martin et de la porte de la Chapelle, où sont installés des milliers de réfugiés désespérés.

(Article paru en anglais le 4 juin 2018)

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