Une grève contre la privatisation bloque des sites énergétiques en France

Jeudi, 147 sites d’Enedis (ex-GDRF) et Engie (ex-EDF) se sont mis en grève dont une centaine de bloqués contre la casse des statuts, pour des augmentations de salaires et la défense d’un service public de l’énergie après l’annonce mardi par le gouvernement de la plus grande vague de privatisation depuis dix ans. Nombre de ces sites étaient encore bloqués hier, et la grève continuait même à s’étendre, alors que les médias faisaient largement le silence sur la grève.

Les travailleurs d’Engie et d’Enedis bloquaient leurs sites le lendemain de l‘annonce de la vague de privatisation par le gouvernement. Hier, le gouvernement a présenté au Conseil des ministres le projet de loi Pacte qui consacre un volet à la cession de participations de l’Etat dans ADP (ex-Aéroports de Paris), la Française des Jeux et Engie pour 2019. Dans une interview accordé aux Echos, Bruno le Maire, ministre de l’économie et des Finances affirme que l’ «Etat n’a pas vocation à diriger des entreprises concurrentielles».

L’occupation des sites énergétiques souligne la colère contre la politique d’austérité de Macron parmi les travailleurs, qui débordent les syndicats. Mais en même temps, elle démontre l’impossibilité de réaliser une convergence des luttes et l’unité des travailleurs contre Macron sous l’emprise politique de ces appareils. L’initiative pour la lutte vient de la base, et pour aller de l’avant il faut que les bases en lutte se fédèrent indépendamment des appareils syndicaux.

Hier, Paul-Hervé Rousseau de la CGT, a expliqué comment les salariés avaient débordé les syndicats au site Enedis à L’île d’Espagnac près d’Angoulême: «Le mouvement est parti des salariés, très vite. 80 pour cent des 40 salariés ont décidé de se mettre en grève et de bloquer le site.»

Il a ajouté, «On a 250 sites bloqués en France. C’est le plus gros mouvement de grève depuis dix ans à Enedis et GDRF, malheureusement peu médiatisé. C’est pourtant un mouvement fort, qui part de la base, qui monte de plus en plus.»

Le seul moyen de stopper la politique de régression sociale menée par Macron est d’unifier les luttes ouvrières en cours en un mouvement politique pour faire chuter son gouvernement. Mais pour cela, les travailleurs n’auront d’autre choix que de s’organiser en comités d’action indépendants des syndicats. Ceux-ci bloquent la convergence des luttes afin de continuer à négocier l’austérité avec Macron et le patronat et d’isoler les luttes, ce qui permet à Macron d’imposer sa politique. Pour réaliser la convergence des luttes, il faut les ôter du contrôle des syndicats.

Le blocage des sites d’Engie et d’Enedis ont lieu alors que les cheminots font des grèves perlées depuis plusieurs mois et que les syndicats chez Air France ont été poussés à appeler à une grève de 4 jours en raison de la volonté des travailleurs de la compagnie aérienne à poursuivre leur lutte.

Les syndicats d’Air France avaient mis fin à leur grève suite au rejet de l’accord pourri des syndicats et de la direction par les travailleurs.

Le parc énergétique en France est ancien, nécessitant des investissements importants pour moderniser les centrales. En privatisant le secteur de l’énergie, stratégique pour l’Etat, ce dernier entend casser les capacités des travailleurs à faire grève, tout en assurant une exploitation plus importante des travailleurs de l’énergie afin d’assurer la modernisation des sites énergétiques et de larges profits pour les actionnaires privées.

Les sites énergétiques ont déjà commencé à faire appel à des intérimaires externalisant les services et des licenciements de milliers de travailleurs. En plus de l’emploi d’une main d’œuvre à bas coût, l’arrivée des compteurs électroniques Linkie a servi de prétexte pour annoncer la suppression d’ici à 2021 de 2.100 emplois.

L’Etat compte récupérer de ces privatisations 10 milliards d’euros qui serviront pour un fonds d’innovation qui assurerait selon Les Echos un rendement d’entre 200 et 300 millions chaque année pour financer des projets de recherche considérés comme plus rentables. Le Maire a ajouté: «Nous voulons encourager l’innovation et la montée en gamme. C’est cela qui nous permettra d’être à nouveau en tête dans la compétition mondiale et de continuer à créer des emplois en France. Nous passons d’une logique de gestionnaire à une logique d’investissement dans l’avenir.»

Les syndicats ne luttent pas contre les différentes attaques du gouvernement Macron et de l’UE. Ils négocient la privatisation de la SNCF avec le gouvernement Philippe qui a assuré que la privatisation de la SNCF n’était pas négociable, et il faut lancer les avertissements les plus nets aux travailleurs de l’énergie: le rôle de leurs syndicats ne sera pas fondamentalement différent.

Alors que la vague de privatisation était annoncée depuis plusieurs mois et que les différentes sections de travailleurs en lutte cherchaient à rentrer en contact, le rôle des syndicats et de la CGT étaient d’isoler les travailleurs par secteur afin de bloquer la convergence des luttes contre Macron.

Fin mars les travailleurs de l’énergie sur Marseille cherchaient à se joindre aux cheminots en lutte contre la privatisation de la SNCF et la casse des statuts de cheminots. La CGT de l’énergie comme chez les syndicats d’Air France a été poussée à appeler à un blocage massif des sites de l’Energie à cause d’une large radicalisation des travailleurs.

Le blocage des sites énergétiques est un signe clair que les travailleurs de l’énergie et plus largement à travers la France et l’Europe sont prêts à rentrer dans une lutte politique. Mais les syndicats de l’énergie feront tout leur possible pour bloquer l’émergence d’un mouvement plus large des travailleurs, tout en essayant d’éviter d’être débordés par les travailleurs.

La lutte des travailleurs ne peut pas se limiter à la question des privatisations. Elle doit englober la lutte contre l’austérité mais aussi la guerre. Les attaques contre les travailleurs servent aussi à récupérer des centaines de milliards pour le compte de la modernisation de l’armée et de la création d’une armée européenne, sur lesquelles les syndicats restent silencieux.

La colère sociale et la combativité montrent très largement parmi les travailleurs en France et à l’international. Mais la seule façon de mobiliser et de lutter contre l’austérité sociale et salariale est de briser le carcan imposé aux luttes par les syndicats, avec le soutien de forces politiques petite-bourgeoises telles que Jean-Luc Mélenchon et le Nouveau parti anticapitaliste (NPA). La construction de comités d’action sur les lieux de travail doit servir à ôter le contrôle des luttes aux syndicats, et à

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