Des centaines de milliers de personnes manifestent contre la persécution des immigrants par Trump

Plusieurs centaines de milliers de personnes ont participé samedi à des rassemblements partout aux États-Unis pour dénoncer la politique de persécution menée par l’administration Trump contre les immigrants et les demandeurs d’asile. Des manifestations ont eu lieu à plus de 700 endroits, les plus grandes foules s’étant mobilisées à Los Angeles, Chicago, Washington et New York.

Les protestations visaient en particulier à dénoncer la séparation de milliers d’enfants immigrés de leurs parents, conséquence de la directive de «tolérance zéro» de Trump, qui exige l’arrestation de toute personne soupçonnée d’entrer illégalement aux États-Unis.

La plus grande manifestation s’est déroulée à Los Angeles, où vit la plus grande population immigrée des États-Unis. Plus de 75.000 personnes y encerclaient l’hôtel de ville. La foule était si dense qu’il était difficile de la traverser. En revanche, à peine 20 personnes se sont présentées à une misérable contre-manifestation pro-Trump qui a tout de même été couverte par les médias locaux.

Les manifestants, outrés par les vidéos montrant de jeunes enfants pleurant après avoir été séparés de force de leurs parents, ont continué de grossir les rangs de la manifestation dans un flot continu tout au long de la journée. L’idée de traduire en justice Trump, Stephen Miller, Jeff Sessions et d’autres membres de l’administration pour crimes contre l’humanité a reçu un large soutien. D’autres manifestants appelaient à l’abolition de l’Immigrant and Customs Enforcement (ICE), qui est l’organisme chargé de l’application de la loi sur les immigrants et les douanes, ainsi que d’autres instruments répressifs responsables de l’application du projet de loi anti-immigré. Un slogan commun sur les pancartes vues tout au long du rassemblement était «Les droits de l’homme ne doivent pas avoir de frontières».

Plusieurs célébrités et politiciens du Parti démocrate ont dominé la plate-forme et cherché à diriger l’indignation à propos des mauvais traitements infligés aux immigrants et de la séparation des parents de leurs enfants en soutien au Parti démocrate lors des élections législatives de novembre. Le maire de Los Angeles, Eric Garcetti, a parlé de la nécessité que l’organisme ICE et les responsables de l’immigration «respectent la loi» tout simplement. Le candidat démocrate au poste de gouverneur Gavin Newsom a pour sa part parlé de la riche histoire de la diversité en Californie, mais ne s’est aucunement engagé à faire quoi que ce soit pour protester contre les politiques anti-immigrés de Trump.

Selon les estimations de la police municipale de Chicago, plus de 50.000 personnes se sont rassemblées dans cette ville qui a abrité l’une des plus importantes manifestations. Bravant la dangereuse vague de chaleur intense, de vastes couches de la population – formées d’élèves et d’étudiants, d’immigrants et de leurs familles, d’enseignants, d’infirmières et de fonctionnaires de l’État, de sections de la classe moyenne et même de la classe moyenne supérieure – sont venues exprimer leur opposition aux politiques anti-immigrées barbares de l’administration Trump.

Il y a eu une participation similaire à New York, avec des marches à Manhattan et à Brooklyn. La foule de manifestants a rempli le pont de Brooklyn d’un bout à l’autre pendant plus de deux heures alors qu’elle traversait l’East River.

À Boston, quelque 15.000 personnes se sont rassemblées au Government Center, où la plate-forme des orateurs était là aussi dominée par des politiciens démocrates, notamment les sénateurs Elizabeth Warren et Ed Markey, de même que le représentant Joe Kennedy, qui ont tous appelé à un vote pour les démocrates en novembre. Le bureau du secrétaire d’État du Massachusetts avait mis en place une table pour inscrire les gens sur les listes électorales.

Il y a également eu d’importantes manifestations dans de nombreux centres régionaux tels Atlanta, Denver et Dallas, ville où cinq personnes ont été arrêtées devant un bureau de l’ICE, ainsi que dans des villes de taille moyenne comme Pittsburgh, New Orleans, Albuquerque et Salt Lake City, et même dans de petites villes intérieures comme Redding, en Californie, et Huntington, en Virginie-Occidentale.

À El Paso, au Texas, une immense foule a bloqué le pont enjambant le Rio Grande jusqu’à Cuidad Juárez, au Mexique. Des manifestations ont en fait été organisées dans les 50 États des États-Unis.

Dans ce qui a été annoncé comme le principal rassemblement national, à Washington DC, les organisateurs de la marche, de MoveOn.org, de l’American Civil Liberties Union et de la National Domestic Workers Alliance soutenue par l’AFL-CIO, ont pris la décision de faire présenter leur position de «faire sortir le vote en novembre» exclusivement par des célébrités, ministres du Culte et activistes représentant diverses «identités» – noirs, hispaniques, asiatiques, femmes, etc. – plutôt que de laisser des démocrates de premier plan parler.

Cette décision a été prise en partie par crainte que la foule ne réagisse défavorablement à de tels orateurs, et en partie parce que les démocrates de haut niveau ne tiennent pas à s’associer de façon aussi publique à la défense des immigrés. Mais l’absence de politiciens démocrates sur la plate-forme de Washington n’a pas changé pour autant le message, car tous les orateurs ont galvanisé la foule à maintes reprises à coups de chants demandant de voter contre les républicains. Aucun orateur n’a d’ailleurs critiqué le rôle de l’administration Obama qui, plus que n’importe quel gouvernement précédent, a procédé à des déportations de masse et du coup pavé la voie à l’escalade brutale des attaques de Trump.

La composition de la liste des orateurs à Washington visait à renforcer les efforts du Parti démocrate et de ses partisans de la pseudo-gauche à diviser la classe ouvrière en fonction de la race, de la religion, de l’ethnicité et du sexe. Pas un seul orateur n’a en effet prétendu représenter la classe ouvrière ou parler au nom de la grande majorité des Américains qui sont unis au sein de cette classe.

L’idéologie réactionnaire à l’origine de ce programme a été exprimée par une oratrice en particulier, la révérende Traci Blackmon de l’Église unie du Christ, une pasteure afro-américaine de Saint-Louis. Elle a présenté toute l’histoire des États-Unis comme une histoire d’oppresseurs blancs arrachant les enfants des bras des parents non blancs: des femmes noires réduites en esclavage aux familles amérindiennes, en passant par les Japonais-Américains au cours de la Deuxième Guerre mondiale et les parents détenus dans le système carcéral actuel, qu’elle a qualifiés de «principalement noirs et bruns», malgré le fait que des travailleurs blancs constituent une grande partie des détenus en prison.

Sa présentation était explicitement raciale, la prédicatrice parlant de briser les «rideaux de fer du nationalisme blanc» et affirmant que la motivation des attaques contre les immigrés découlait du fait que «le faux dieu de la blancheur est menacé». Pas la moindre protestation ne s’est élevée de la plate-forme contre ce type de langage, pas plus qu’il n’y a eu la moindre tentative d’affirmer l’unité des travailleurs blancs, noirs et des autres minorités dans une lutte commune.

Alors que les orateurs à Washington et dans d’autres grandes villes couvrent le rôle de l’administration Obama et cherchent à récupérer la défense des immigrés pour en faire une campagne électorale pour les démocrates, les participants aux rassemblements se sont montrés quant à eux extrêmement réceptifs à une politique socialiste.

Des partisans et des membres du Socialist Equality Party (SEP, le Parti de l’égalité socialiste américain) sont intervenus dans de nombreux rassemblements au pays et ont recueilli un énorme soutien pour l’appel du SEP à unir la classe ouvrière contre tous les politiciens de la classe capitaliste, qu’il s’agisse de Trump et des républicains, ou encore des démocrates qui servent de deuxième ligne d’attaque contre les immigrés.

Les partisans du SEP ont distribué des milliers d’exemplaires d’une déclaration adressée par le Parti aux rassemblements, intitulée «Mobilize the working class against the bipartisan attack on immigrants!» (Mobilisons la classe ouvrière contre l’attaque bipartite sur les immigrés».

Dans certains petits rassemblements, où la plate-forme était moins strictement contrôlée par des groupes affiliés au Parti démocrate, des membres du SEP ont pu s’exprimer et déclarer le soutien du Parti pour l’ouverture des frontières, la liberté de tous les travailleurs de vivre et de travailler là où ils le souhaitent, et contre la subordination de la classe ouvrière aux politiciens et aux partis des grandes entreprises.

Une réponse chaleureuse aux politiques préconisées par le SEP apparait là où il a pu prendre la parole et il est clair que les travailleurs sont de plus en plus intéressés par une perspective socialiste et désireux d’en discuter.

(Article paru en anglais le 2 juillet 2018)

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