Pompeo rencontre le gouvernement mexicain alors que sa police attaque des migrants honduriens

La police fédérale mexicaine a attaqué et tiré des gaz lacrymogènes sur une foule de plus de 4000 immigrants honduriens cherchant à entrer au Mexique à travers sa frontière sud avec le Guatemala. La caravane de migrants a quitté San Pedro de Sula au Honduras vendredi dernier pour se rendre aux États-Unis.

La décision de la police de repousser une foule rassemblée sur le pont international étroit sur la rivière Suchiate a presque provoqué une ruée avec des conséquences potentiellement mortelles.

Des centaines de femmes et d’enfants ont été blessés et de nombreux jeunes ont sauté du pont pour tenter désespérément de nager du côté mexicain. La foule nombreuse venait de franchir une barrière mise en place par le gouvernement guatémaltèque juste au sud de la rivière.

Pendant ce temps, Trump a intensifié sa menace de fermer la frontière et de déployer l’armée à la frontière américano-mexicaine si le Mexique n’arrête pas la caravane avec force.

« Nous faisons appel à l’Armée, et non à la Garde nationale, nous appelons l’armée et nous allons avoir l’armée stationnée sur place », a-t-il déclaré vendredi après-midi. « Ils ne viendront pas dans ce pays. Ils devraient faire demi-tour ».

Vendredi soir, Trump, s’est exprimé devant une base aérienne avant un rassemblement à Phoenix, en Arizona, il a traité les membres de la caravane de « criminels », martelant un discours xénophobe dans le but d’augmenter le taux de participation aux prochaines élections de mi-mandat au sein de sa base.

« Ils ont mis toutes les femmes et tous les enfants au premier plan », a-t-il déclaré. « Pensez-vous qu’ils nous donnent leurs meilleurs ? Ces pays ne sont pas stupides, ils nous donnent des gens qu’ils ne veulent pas et nous avons besoin d’un mur. »

En réponse à une question sur le point de savoir si les immigrants étaient des criminels, Trump a répondu : « S’il vous plaît, ne soyez pas un bébé, jetez un coup d’œil. Regardez ce qui se passe […] Ce sont des criminels endurcis. Ce sont des gens très durs et je ne les veux pas dans notre pays. »

Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue en pleine répression de vendredi, le secrétaire d’État, Mike Pompeo, a lancé une menace à peine voilée :

« Le président Trump a été clair sur le plus gros problème auquel nous faisons face aujourd’hui. Nous arrivons rapidement à un point qui semble être un moment de crise : un nombre record de migrants. [Le ministre des Affaires étrangères du Mexique] [Luis] Videgaray et moi avons parlé de l’importance d’arrêter ce flux avant qu’il n’atteigne la frontière américaine… Si nous pouvons le faire correctement, nous améliorerons également les relations entre nos deux pays. »

Lors de la conférence de presse de vendredi, Videgaray a rendu hommage à Pompeo et à l’administration Trump, estimant que le Mexique « devra appliquer la loi » contre la caravane de migrants.

Le secrétaire mexicain de l’intérieur, Alfonso Navarette, a dénoncé la caravane hier pour avoir tenté d’entrer dans le pays « de force » et « de manière violente », qualifiant la demande de la caravane de traverser le Mexique d’« acte atroce ». Le gouvernement mexicain s’est engagé à expulser les personnes sans papiers, bien qu’il ait commencé à laisser un petit nombre d’immigrants traverser la frontière guatémaltèque après l’affrontement de vendredi au pont.

La caravane de migrants, composée principalement de travailleurs et de paysans, a suscité un large soutien populaire en Amérique centrale et au Mexique. Les habitants des villes frontalières mexicaines et guatémaltèques ont apporté de l’eau et de la nourriture aux Honduriens après l’attaque de la police hier. La répression exercée par le gouvernement mexicain sur la caravane hondurienne a suscité l’indignation du peuple mexicain, dont la plupart ont des membres de leur famille ou des amis qui ont immigré aux États-Unis et qui font face à une répression similaire de la part des autorités américaines de l’immigration.

Les participants à la caravane échappent aux conditions brutales de pauvreté et de violence étatique imposées par l’impérialisme américain. En 2009, l’Administration Obama et la secrétaire d’État Hillary Clinton ont organisé un coup d’État contre le président élu du pays, Manuel Zelaya, instaurant un règne de terreur qui se poursuit de ce jour.

De nombreux immigrants ont exprimé l’opinion qu’ils préféreraient être tués en se rendant aux États-Unis plutôt que d’être forcés de retourner au Honduras, une société en pleine effondrement. Les deux tiers du pays vivent dans la pauvreté, la police collabore régulièrement avec des cartels de drogue et le gouvernement met en place des escadrons de la mort pour assassiner des dissidents. Malgré cela, l’administration Trump a mis fin au statut de protection temporaire accordé à 57 000 immigrants honduriens aux États-Unis, les exposant ainsi à un risque d’expulsion.

Le gouvernement entretient des relations étroites avec Washington, qui a triplé les fonds alloués à la police et à l’armée honduriennes au cours de l’administration Obama, pour atteindre plus de 350 millions de dollars par an. Les États-Unis stationnent actuellement entre 500 et 600 soldats sur la base de l’armée de l’air Soto Cano, dans le département de Comayagua. Dans les années 1980, les États-Unis ont mis en place des escadrons de la mort employés dans le nettoyage ethnique pendant la guerre civile nicaraguayenne au Honduras.

« Nous sommes nerveux, mais nous sommes toujours joyeux », a déclaré un jeune immigrant à Telemundo hier alors qu’un hélicoptère de la police mexicaine volait au-dessus de sa tête. « Nous sommes de bonnes personnes, nous sommes pacifiques, mais nous avons besoin d’emplois. Il n’y a pas d’emplois au Honduras. »

« Nous sommes des hommes, nous sommes tous égaux », a déclaré un autre participant. La foule a scandé : « Nous ne sommes pas des trafiquants, nous sommes des immigrants ! [no somos traficantes, somos inmigrantes] »

Mario David Castellanos Murillo, âgé de 12 ans, a été arrêté hier par la police mexicaine sur le pont international après avoir effectué seul le voyage depuis le Honduras.

Il est devenu une sensation sur l’Internet au Honduras grâce à son courage et à son aptitude à parler. Il avait précédemment déclaré aux journalistes qu’il se rendait aux États-Unis pour gagner de l’argent pour sa mère épileptique ainsi qu’« à cause des gangs, de toutes les violences, parce que nous n’avions pas d’argent et si vous travaillez vous êtes volé de l’argent que vous avez gagné. Je veux étudier et travailler ». Une image prise de son arrestation est devenue virale sur les médias sociaux vendredi.

Les travailleurs américains doivent reconnaître ces immigrants comme leurs frères et alliés dans la lutte contre l’exploitation des entreprises et la guerre impérialiste. Ensemble, ils affrontent les mêmes ennemis : Wall Street, les agences de renseignement militaires américaines qui dominent le monde et leurs marionnettes corrompues qui dirigent les gouvernements d’Amérique latine.

La lutte pour l’égalité sociale signifie l’ouverture des frontières pour permettre aux plus exploités et aux opprimés de parcourir la planète à leur guise, sans craindre d’être expulsés ou harcelés.

(Article paru d’abord en anglais le 20 octobre 2018)

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