Le SEP sri lankais dénonce le soutien des partis politiques aux mesures d’État policier du président Sirisena

La semaine dernière, le président sri-lankais Maithripala Sirisena a invité les partis politiques à une «conférence multipartite», qui a approuvé les mesures répressives mises en vigueur par sa déclaration d'état d'urgence.

Le Parti de l'égalité socialiste (SEP) lance l’avertissement que la cible principale de ces dispositions d'État policier n'est pas les extrémistes islamistes, mais les travailleurs qui entrent en lutte dans le cadre d'une montée internationale de la classe ouvrière.

Le président a profité de l’occasion offerte par les attentats terroristes contre les églises et hôtels de luxe qui ont tué des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants innocents, le 21 avril, pour s’en servir comme prétexte pour des mesures antidémocratiques de grande envergure.

De nombreux aspects des attentats terroristes à la bombe restent flous. Cependant, les chefs de gouvernement et les services de sécurité ont fermé les yeux sur des avertissements spécifiques selon lesquels un groupe islamiste avait l'intention d’attaquer des églises.

Les États-Unis exploitent également cette atrocité en envoyant des experts du FBI et de l'armée pour «aider» les enquêteurs sri-lankais dans le cadre de leurs efforts pour renforcer les liens militaires et politiques avec Colombo. Washington considère le Sri Lanka comme un acteur clé dans ses préparatifs de guerre contre la Chine.

Les partis qui ont assisté à la conférence multipartite sont empêtrés dans des luttes politiques internes qui ont éclaté au grand jour en octobre. Sirisena a limogé Ranil Wickremesinghe en tant que premier ministre et l'a remplacé par l'ancien président Mahinda Rajapakse. Mais il a été contraint de réintégrer Wickremesinghe sous la pression de Washington après que la Cour suprême eut déclaré les actions de Sirisena inconstitutionnelles. Les États-Unis considèrent Rajapakse comme étant trop proche de la Chine.

Malgré les divisions intenses parmi les élites dirigeantes, les partis n'hésitent pas à s'unir pour renforcer l'appareil militaire et policier sous prétexte de lutter contre le terrorisme et de «renforcer la sécurité nationale». La classe dirigeante dans son ensemble craint profondément la mobilisation croissante des manifestations et grèves d'ouvriers, de paysans, d'étudiants et de jeunes.

En décembre, plus de 100.000 travailleurs de plantations ont mené une grève de neuf jours pour réclamer le doublement de leur salaire de base de misère. Le mois dernier, plus de 200.000 enseignants ont débrayé toute une journée. Les syndicats ont cherché à réprimer et à saboter ces luttes, mais la classe dirigeante est profondément préoccupée par l’incapacité de ces appareils à empêcher une rébellion des travailleurs.

Les lois et règlements de l’état d’urgence prévoient l’interdiction des réunions, défilés et publications susceptibles de causer des troubles. Un arrêté sur les services essentiels peut être invoqué pour interdire les grèves et les mouvements sociaux.

Pour la première fois depuis la fin des trente années de guerre communautariste dans le pays contre les séparatistes des Tigres de libération de l'Elam tamoul (LTTE), l'armée et la police procèdent à un contrôle de toutes les maisons et de leurs résidents à travers l'île.

Les soldats et la police peuvent arrêter des personnes sans mandat. Une fois devant un magistrat, elles peuvent être détenues pendant un an sur ordre du secrétaire à la Défense. Comme par le passé, ces lois draconiennes entraîneront des arrestations arbitraires, une longue détention sans procès et le recours à la torture pour obtenir des aveux pouvant être utilisés devant un tribunal.

Dans ce climat de répression policière, les forces de sécurité redonneront vie aux méthodes brutales utilisées pendant la guerre, à savoir les escadrons de la mort et le meurtre extrajudiciaire d’opposants politiques et de critiques.

Le président Sirisena a levé à contrecoeur cette semaine l'interdiction sans précédent imposée à tous les médias sociaux, en vigueur depuis plus d'une semaine, mais a affirmé qu'il pourrait la réinstaurer.

Divers représentants de partis à la conférence multipartite ont exprimé hypocritement leurs préoccupations concernant le communautarisme antimusulman, et ont appelé au calme et se sont opposés à l'incitation aux troubles communautaires.

Quelle hypocrisie! L’ensemble de l’establishment de Colombo nage dans le chauvinisme dirigé contre les tamouls et les musulmans et a toujours attisé les troubles communautaires pour diviser la classe ouvrière. En 1983, le gouvernement du Parti national uni (UNP) fut directement impliqué dans le pogrom anti-tamoul qui a marqué le début de la longue guerre communautaire.

Quelques jours à peine après la conférence multipartite, le gouvernement a délibérément incité les préjugés antimusulmans en interdisant, en vertu de l'état d'urgence, le port de la burqa par les femmes musulmanes. Il s’agit de l’un des cris de ralliement antimusulmans des groupes et partis d’extrême droite en Europe et dans le monde.

Tous les principaux partis parlementaires et leurs alliés étaient présents à la conférence: le Parti de la liberté sri-lankais de Sirisena (SLFP), l’UNP de Wickremesinghe, le Podujana Peramuna du Sri Lanka de Rajapakse, l'Alliance nationale tamoule bourgeoise et la Janatha Vimukthi Peramuna.

Tous les groupes de pseudo-gauche se sont ralliés, directement ou indirectement, à l'état d'urgence de Sirisena.

Le dirigeant du parti Nava Sama Samaja, Wickremabahu Karunaratne, a assisté à la conférence et a déclaré sans vergogne: «Nous devons féliciter les responsables des services de renseignements, la police et les forces armées d'avoir accompli leur devoir, contrairement aux dirigeants sri-lankais».

Le Parti socialiste unifié et le Parti socialiste de première ligne ont formulé des critiques superficielles à l'encontre du gouvernement, mais n'ont pas condamné l'état d'urgence et ne se sont pas opposés à ses mesures répressives.

Indépendamment de divers différends tactiques, l’ensemble de l’establishment politique, y compris les partis de la pseudo-gauche, s’unit derrière la déclaration de l’état d’urgence.

Le SEP (Parti de l’égalité socialiste) est le seul parti qui s'oppose ouvertement à cette formation politique réactionnaire et exige la levée immédiate de l'état d'urgence.

Les conférences multipartites sont toujours convoquées, en période de crise politique aiguë, afin de consolider le pouvoir bourgeois. En 2000, la présidente Chandrika Kumaratunga convoqua une telle réunion après que l'armée eut subi une série de défaites militaires dévastatrices aux mains des LTTE.

Le SEP fut invité à participer, mais rejeta catégoriquement l'offre. Le secrétaire général Wije Dias publia une déclaration qui notait que: «Dans des conditions où le gouvernement a promulgué des règles d'urgence très strictes pour étouffer toute manifestation d'opposition à sa politique, la réunion sera un simulacre.»

Cette fois-ci, malgré le fait que la conférence devait inclure tous les partis officiels, le SEP n'était pas invité. Si cela avait été le cas, il aurait donné la même réponse.

Le SEP se bat pour l'indépendance politique de la classe ouvrière de tous les partis et agences du capitalisme, sur la base d'un programme socialiste et internationaliste. En 50 ans d'existence, le SEP a défendu de manière intransigeante les droits démocratiques des travailleurs et des opprimés et s'est opposé à toute forme de nationalisme et de chauvinisme.

La classe ouvrière au Sri Lanka doit s'opposer à la marche vers la guerre de l'impérialisme américain et à ses tentatives de transformer l'île en une base pour ses opérations militaires. Le SEP et ses partis frères du Comité international de la Quatrième Internationale se battent pour construire un mouvement unifié de la classe ouvrière internationale contre la guerre impérialiste.

Le SEP lance l’avertissement que la classe dirigeante, en imposant l'état d'urgence, se prépare à la guerre de classe contre la classe ouvrière et les pauvres des zones urbaines et rurales et se dirige vers la mise en place de formes de gouvernement dictatoriales.

Le SEP appelle à la mise en place de comités d'action ouvriers dans les lieux de travail, les grands domaines de plantations et les quartiers pour rassembler la classe ouvrière, ainsi que les pauvres et jeunes de la campagne, au-delà des clivages ethniques et religieux, afin de défendre les droits démocratiques et sociaux des travailleurs.

La défense des droits démocratiques est liée à la lutte politique pour le socialisme. Le SEP se bat pour un gouvernement de travailleurs et de paysans fondé sur des politiques socialistes dans le cadre de la lutte pour le socialisme dans toute l'Asie du Sud et au niveau international.

(Article paru en anglais le 2 mai 2019)

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