La Suède abandonne son enquête sur les fausses allégations d’inconduite sexuelle contre Julian Assange

Une procureure suédoise a annoncé mardi matin que son bureau abandonnait son enquête préliminaire sur les allégations contre Julian Assange, fondateur de WikiLeaks. C’est la troisième fois que la Suède est contrainte de clore l’enquête faute de preuves à l’appui, et cela confirme que les allégations de «viol» ou d’«agression sexuelle» par Assange constituent une fraude à motivation politique.

L’enquête suédoise a toujours été un cheval de bataille pour le gouvernement américain, qui a cherché à extrader Assange, soit de Suède, soit de Grande-Bretagne, où il est actuellement emprisonné, afin de l’enfermer à jamais ou de l’exécuter sur la base de la loi américaine de 1917 contre l’espionnage, le Espionage Act, parce que WikiLeaks a publié des preuves des crimes de guerre américains en Irak et en Afghanistan.

Assange a été illégalement traîné hors de l’ambassade de l’Équateur à Londres en avril dernier où il a vécu pendant sept ans après avoir obtenu l’asile politique. À l’époque, la directrice adjointe du service des poursuites publiques de Suède, Eva-Marie Persson, avait rouvert l’enquête sur la base de plaintes – initiées par la police plutôt que par les femmes impliquées – selon lesquelles Assange avait été coupable d’agression sexuelle en 2010.

Persson a annoncé la fin de l’enquête dès qu’il a été clair que les autorités britanniques garderont Assange enfermé indéfiniment à la prison de Belmarsh, en attendant une décision sur la demande d’extradition des États-Unis. Une audience est actuellement prévue pour février prochain.

En 2013, lorsque les autorités suédoises ont indiqué qu’elles abandonneraient l’enquête, le gouvernement britannique est intervenu et leur a demandé de ne pas le faire, puisque le mandat d’arrêt européen pour Assange – délivré uniquement pour interrogatoire et sans inculpation – avait été le motif de sa détention.

Mais maintenant, autant l’administration Trump aux États-Unis que le gouvernement Johnson en Grande-Bretagne n’ont plus besoin de l’enquête suédoise. Celle-ci a été bien utile pour diffamer Assange en tant que violeur et miner le large soutien de l’opinion publique en faveur de sa liberté, mais elle peut maintenant faire déraper son transfert de Londres à Washington, où il risque jusqu’à 175 ans de prison pour 18 chefs d’accusation, la plupart impliquant une violation de l’Espionage Act.

Certaines personnalités politiques britanniques, dont le chef du Parti travailliste Jeremy Corbyn, ont suggéré qu’Assange soit envoyé en Suède plutôt qu’aux États-Unis. Ces politiciens cherchent de cette façon à éviter de s’opposer directement à l’impérialisme américain, tout en s’associant aux tactiques de diffamation contre Assange et en faisant appel aux partisans de la campagne réactionnaire #MeToo.

L’administration Obama a relancé l’utilisation de l’Espionage Act, en portant de nombreuses accusations contre les lanceurs d’alerte en vertu de la loi de 1917, et en poursuivant et envoyant Chelsea Manning en prison pour avoir fourni à WikiLeaks des documents sur les atrocités américaines en Irak et en Afghanistan, des câbles diplomatiques secrets au département d’État et des rapports sur la torture et les mauvais traitements des prisonniers à Guantanamo Bay.

L’administration Trump a intensifié son assaut contre les droits protégés par le Premier Amendement. Assange est le premier éditeur jamais inculpé en vertu de l’Espionage Act, et cette affaire constitue un précédent inquiétant pour tout journal, réseau de télévision ou site Web qui oserait rendre publique toute preuve d’atrocités ou de complots antidémocratiques menés par les États-Unis à l’étranger. Manning a d’ailleurs été renvoyée en prison pour outrage au tribunal parce qu’elle refuse justement de faire un faux témoignage contre Assange devant un grand jury secret.

Kristinn Hrafnsson, éditeur de WikiLeaks, a publié une déclaration appelant les partisans d’Assange à redoubler d’efforts sans leur lutte afin qu’il recouvre sa liberté à la suite des événements de mardi: «La Suède a abandonné pour la troisième fois son enquête préliminaire sur M. Assange, après l’avoir rouverte sans nouvelles preuves ou informations. Concentrons-nous maintenant sur la menace dont M. Assange nous informe depuis des années: la poursuite belliqueuse des États-Unis contre lui et la menace qu’elle fait peser sur le Premier Amendement.»

Hrafnsson a cité la conclusion du rapporteur de l’ONU contre la torture, Nils Melzer, selon laquelle l’enquête suédoise avait été «rapidement politisée» et privait Assange de toute chance d’un procès équitable. WikiLeaks quant à elle appelle à une enquête plus approfondie en Suède pour savoir «comment le système judiciaire n’a pas résisté à la pression politique et médiatique».

(Article paru en anglais le 19 novembre 2019)

Loading