Alors que le COVID-19 se propage en Amérique du Nord

L’élite québécoise salue la réponse tardive et entièrement inadéquate du gouvernement Legault

Alors que la propagation du COVID-19 s’intensifie aux États-Unis et au Canada, le gouvernement du Québec a décrété l’état d’urgence sanitaire samedi dernier. Il y a présentement plus de 800 cas confirmés au Canada et 11 morts. Au Québec, le nombre de cas confirmés a grimpé à 121, avec un premier décès mercredi. Nombreux experts ont souligné que les cas de transmission communautaire commençant tout juste à émerger, la courbe de contamination risque d’augmenter de façon exponentielle. De plus, au sud de la frontière, les États-Unis pourraient devenir le nouvel épicentre du coronavirus.

Cette crise a forcé le gouvernement fédéral de Justin Trudeau et les gouvernements provinciaux à adopter, trop peu trop tard, une série de mesures limitées. Au cours des derniers jours, le gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ) a annoncé la fermeture pour une durée indéterminée des lieux d’éducation, des garderies et des lieux publics jugés non-essentiels. Mais il continue de faire la sourde oreille aux demandes croissantes, notamment des travailleurs de la construction, pour la fermeture des chantiers, usines et autres lieux de travail. Et aucune mesure pour combattre le coronavirus ne figure dans son budget déposé le 10 mars dernier!

L’élite dirigeante dans son ensemble s’est ralliée derrière Legault, y compris le parti supposément «de gauche» Québec Solidaire, qui a offert «sa pleine et entière collaboration au gouvernement». Legault est présenté par les médias comme un leader «fort» et pragmatique dans une crise d’une ampleur «imprévisible».

En réalité, la pandémie du coronavirus était prévisible. Autant Trudeau que Legault et les autres dirigeants provinciaux ont fait preuve de la même négligence criminelle face au danger du virus mortel. Alors que des mesures de prévention et de dépistage auraient dû être mises en place dès l’éclosion du virus au mois de janvier dernier en Chine, les gouvernements ont refusé d’agir parce que ces mesures étaient vues comme une entrave aux profits de la grande entreprise. Ils ont plutôt minimisé l’ampleur du danger, allant même jusqu’à dire que le virus s’apparentait à une grippe saisonnière.

La crise actuelle est exacerbée par les décennies de compressions sociales et de coupures d’emplois imposées par tous les paliers de gouvernement, y compris dans les soins de santé. Ce programme de réaction sociale a été appliqué au niveau provincial par les gouvernements libéraux et péquistes successifs, et accéléré depuis l’arrivée au pouvoir en octobre 2018 de la CAQ, un parti de droite qui a toujours exigé plus de coupes sociales, plus de privatisations et plus de baisses d’impôts pour les riches.

Les gouvernements partout dans le monde sont dès le début de la crise venus au secours des marchés financiers et des entreprises à coups de centaines de milliards de dollars alors que l’aide pour les travailleurs et la population générale demeure carrément insuffisante. Au Québec comme ailleurs, on fait déjà état d’une incapacité du réseau à répondre aux appels téléphoniques, alors qu’il y a toujours un manque de tests de dépistage et d’équipements indispensables tels que les respirateurs.

En présentant le premier ministre Legault comme une sorte de «héros national», l’establishment dirigeant cherche à canaliser la colère populaire légitime vers le nationalisme québécois et à protéger de toute critique un système capitaliste qui a totalement failli à la tâche. Son but est en particulier de dissimuler la culpabilité des gouvernements de tous acabits, y compris celui de Legault, pour la catastrophe humanitaire qui prend place.

Cette vaste opération de tromperie politique repose notamment sur la complicité des syndicats pro-capitalistes, qui appellent leurs membres à se rallier derrière les représentants politiques de la grande entreprise, ceux-là mêmes qui ont facilité la propagation fulgurante du coronavirus par leur négligence criminelle.

Les hauts dirigeants des centrales syndicales québécoises ont émis un communiqué conjoint dans lequel ils annoncent la suspension des négociations collectives pour les quelque 600.000 travailleurs du secteur public et offrent leur «pleine et entière collaboration » au gouvernement droitier de Legault dans la crise actuelle.

Autrement dit, les syndicats demandent aux travailleurs de faire la paix avec un gouvernement Legault qui, depuis son élection, mène la charge contre la classe ouvrière et les droits des minorités, multiplie les coupes budgétaires dans l’éducation et la santé, et mine les conditions de travail des employés fournissant ces services publics. Ce même gouvernement met aujourd’hui en danger de nombreuses vies humaines par sa réponse tardive et tout à fait inadéquate à la pandémie du coronavirus.

La presse indiquait hier que deux syndicats représentant 131.000 infirmières et professionnels de la santé (FIQ et APTS) s’étaient montrés ouverts à une proposition du gouvernement de signer une convention collective de trois ans. Cette mesure vise clairement à diviser les travailleurs du secteur public dont les conventions collectives arrivent à échéance à la fin du mois. Peu de détails sont connus, mais le contrat proposé comprendrait des hausses salariales liées à l’inflation et aucune amélioration des conditions de travail. Cette manœuvre, acceptée et même encouragée par les dirigeants des deux syndicats, aura pour effet de renforcer Legault et faciliter des reculs majeurs pour l’ensemble des employés du secteur public.

Les syndicats pro-capitalistes, qui travaillent depuis des décennies à imposer les concessions exigées par la grande entreprise, font tout aujourd’hui – dans un contexte de crise sociale sans précédent provoquée par la pandémie – pour empêcher que les travailleurs ne développent leur propre stratégie de classe.

Face au rôle traître de la bureaucratie syndicale, et à l’indifférence de l’élite dirigeante pour le bien-être de la classe ouvrière, les travailleurs doivent prendre leur sort entre leurs mains et faire valoir leurs propres intérêts de classe.

Le principe essentiel qui doit guider la réponse à la crise est que les besoins des travailleurs doivent avoir la priorité absolue et inconditionnelle sur toutes les considérations de profit des entreprises. Ce n’est pas une question de savoir ce que la classe dirigeante prétend pouvoir se permettre, mais ce dont des masses de gens ont besoin.

Il est primordial de mobiliser toutes les ressources, sur une échelle internationale, pour enrayer le virus et préserver la vie de tous. Au Canada et partout dans le monde, des centres de dépistage, des cliniques et des hôpitaux doivent être immédiatement bâtis pour répondre aux besoins de tous. Les usines et autres lieux de travail non-essentiels doivent être immédiatement fermés et les travailleurs doivent recevoir une pleine compensation. Pour ceux qui doivent continuer de travailler, les conditions doivent être totalement sécuritaires.

Comme l’a expliqué le Parti de l’égalité socialiste (États-Unis) dans une importante déclaration: « Pour faire avancer ce combat, les travailleurs ont besoin de leurs propres organisations. Les syndicats, redevables aux entreprises et à l’État, ne feront rien. Par conséquent, les travailleurs doivent former des comités de base dans les usines, sur les lieux de travail et dans les quartiers. Ces comités doivent garantir des conditions de travail sûres, exiger l’arrêt de la production non essentielle et assurer la sécurité et le bien-être de ceux qui sont malades ou contraints à la quarantaine. »

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