La pandémie de COVID-19 démasque le Nouveau parti anticapitaliste

La pandémie de COVID-19, en révélant l'incompétence et l'indifférence stupéfiantes des gouvernements capitalistes du monde entier vis à vis de la vie humaine, a considérablement intensifié les conflits de classe. Ce printemps, des travailleurs en Italie, aux États-Unis et au Brésil ont déclenché grèves sauvages et débrayages pour exiger des équipements de protection et exercer leur droit de rester chez eux. Alors que gouvernements, banques et syndicats organisent à l’international une campagne politiquement criminelle de retour au travail, sans tests ou protection suffisants, la pandémie démasque les groupes petit-bourgeois pro-impérialistes longtemps et faussement promus comme la «gauche» par la classe dirigeante.

Les travailleurs ne peuvent lutter contre la pandémie qu’en rompant sur le plan politique et organisationnel avec ces partis et les syndicats leur étant affiliés, qui sont complices de politiques entraînant la mort en masse. C’est ce que montre la déclaration réactionnaire, intitulée «Construisons la transition vers l'écosocialisme maintenant !», publiée le mois dernier par une coalition de partis petit-bourgeois comprenant le Nouveau parti anticapitaliste pabliste (NPA), les Anticapitalistas dans le gouvernement espagnol de Podemos, l’Alliance rouge-verte (RGA) danoise, le Parti socialisme et liberté (PSOL) du Brésil, le Nava Sama Samaja Party du Sri Lanka et Socialist Action aux États-Unis.

Bien que se présentant comme «Bureau exécutif de la Quatrième Internationale» (BEQI), leur hostilité à la classe ouvrière et au trotskysme – à l'internationalisme marxiste – parle quasiment d’elle même. Leur déclaration maintient un silence assourdissant sur la politique réactionnaire de retour au travail; sur la propagande de guerre contre la Chine et les plans obscènes de sauvetage des banques convenus dans les pays impérialistes; ou sur des plans de licenciements massifs et d'austérité au milieu de l'effondrement économique déclenché par la pandémie. Au lieu de cela, ils lancent une attaque nationaliste et rétrograde contre les chaînes d'approvisionnement mondiales employant des centaines de millions de travailleurs et acheminent nourriture et médicaments à des milliards de gens dans le monde:

« Le Covid-19 est une pandémie du néolibéralisme, un produit de cette phase néolibérale mondialisée du capitalisme. Le capitalisme a étendu son influence à toute la planète. Les chaînes de production mondiales, qui permettent aux entreprises d’augmenter leurs profits, rendent chaque pays vulnérable à la moindre crise, et l’hypermobilité qui les soutient a éliminé tout mécanisme de sécurité sanitaire et écologique. Une relation prédatrice avec la nature, basée sur l’utilisation de combustibles fossiles et la agriculture extensive capitaliste, avec ses déserts verts, détruit à la fois l’équilibre des cycles fondamentaux du système terrestre (carbone, eau, azote) et la relation des êtres humains avec la biosphère, avec la chaîne de la vie dont nous ne sommes qu’une partie. »

L'affirmation que la pandémie de COVID-19 est une punition pour la mondialisation et pour la relation immorale de l'industrie à la nature est un mensonge. Le coronavirus SARS-CoV-2 a provoqué la pandémie, mais ce sont les gouvernements capitalistes, dans les centres impérialistes d'Amérique et d'Europe surtout, qui portent la responsabilité de son ampleur et de son impact. Ils n'ont pas financé rapidement des politiques de confinement, mais ont renfloué les banques à hauteur de milliers de milliards de dollars et d'euros, entraînant ainsi des centaines de milliers de morts et une propagation accrue du virus. Le retour prématuré au travail fera des milliers de morts de plus.

L'industrie et la science internationales ne sont pas des causes de la pandémie, mais des outils que la classe ouvrière peut utiliser pour la combattre. Les transports internationaux ont considérablement augmenté depuis les années 1970 et l'émergence d'une production industrielle transnationale a été rendue possible grâce aux progrès de l'informatique, des conteneurs et des technologies de transport. Cela accélère une propagation initiale des maladies. Mais en déduire que la mondialisation provoque des pandémies est absurde. Un virus très contagieux comme le SRAS-CoV-2 se propagerait internationalement avec ou sans transport et commerce modernes. Il suffit de rappeler la pandémie de grippe de 1918 et les époques du Moyen Âge et même de l'Empire romain où des pandémies de variole, de grippe, de choléra ou de peste se sont propagées à l'échelle internationale, tuant des millions de gens.

Comparée à ces époques antérieures, la technologie du 21e siècle donne à l'humanité des capacités scientifiques et productives étonnantes pour faire front à une pandémie. En quelques semaines, des équipes internationales de scientifiques ont identifié le virus, publié son génome et fourni des tests pour diagnostiquer le COVID-19. Les modes de transmission ont été identifiés. La mondialisation de l'industrie signifie aussi que des dizaines de pays peuvent fabriquer équipements de protection, respirateurs et médicaments qui aurait auparavant été difficiles à produire en masse en dehors des centres impérialistes. Des milliards de travailleurs attendent et exigent légitimement que ces ressources soient mobilisées pour lutter contre la pandémie.

En imposant directement et de toute urgence la tâche d'utiliser les ressources économiques pour répondre aux besoins sociaux, la pandémie a mis à l'épreuve l'ordre social existant. Le capitalisme, qui organise l'économie en fonction du profit privé et non des besoins sociaux, a lamentablement échoué. Il était bien connu dans les milieux dirigeants, pendant près de deux décennies depuis l'épidémie de SRAS de 2002, qu'une telle pandémie représentait un danger. Mais les travaux sur les vaccins et les traitements contre les coronavirus furent sous-financés et largement abandonnés. Cette année, même dans les pays riches, les tests, les respirateurs et les équipements de protection n'étaient pas disponibles pour la population, et même souvent les masques, y compris pour le personnel soignant qui luttait en première ligne.

Un autre échec majeur du capitalisme est sans aucun doute que la façon dont il développe les forces productives nuit à l'environnement. L'agro-industrie a été l'objet de révélations dévastatrices et la combustion de carburants fossiles pour produire de l'énergie a déclenché un réchauffement climatique sans précédent. Mais ce sont là des problèmes mondiaux nécessitant la mobilisation internationale de ressources scientifiques et industrielles pour produire des aliments sains, éliminer la pollution et stopper le réchauffement climatique. De tels problèmes ne peuvent être résolus par des appels à revenir en arrière à l'époque d'avant la mondialisation, à mettre fin à l'agriculture à grande échelle ou à limiter les échanges économiques aux frontières de l'État-nation.

La force qui peut être mobilisée pour utiliser l'industrie mondiale d'une manière planifiée et scientifique est la classe ouvrière internationale. En s'organisant en comités d'action, indépendants des syndicats, sur leur lieu de travail et via les réseaux sociaux, elle peut non seulement garantir la sécurité au travail, mais prendre le contrôle de l'industrie et l'utiliser pour lancer une lutte mondiale contre le virus basée non sur le profit, mais sur la science médicale. Cela signifie cependant une lutte internationale pour exproprier l'aristocratie financière, prendre le pouvoir d'État et construire le socialisme. Cela nécessite, en particulier, une rupture politique consciente avec les couches réactionnaires des universitaires de la classe moyenne, des responsables syndicaux et des professionnels des médias représentés par le BEQI.

L '«écosocialisme» du BEQI n'est qu'un vernis vert conçu pour masquer son soutien aux renflouements bancaires et aux autres politiques droitières de la classe dirigeante. Il déclare: «Dans cette situation, la grande majorité des gouvernements ont été contraints de prendre des mesures extrêmes. Nous devons défendre des mesures qui attaquent la forme et la substance du néolibéralisme et du système capitaliste ». Alors même que des licenciements de masse sont en cours de préparation, il attaque l'industrie ainsi: « La crise actuelle montre clairement qu’une partie importante de la production capitaliste est purement prédatrice, totalement superflue et inutile ». Il ajoute « qu’une réadaptation industrielle massive peut être effectuée dans un délai relativement court en fonction de la volonté politique ».

Ces charlatans laissent entendre que les renflouements des États capitalistes et les allocations de chômage sapent la substance du capitalisme. Ils affirment que la pandémie « montre également qu’une réduction significative du temps de travail permet de produire des biens essentiels, que la garantie des salaires et des revenus et l’accès universel aux systèmes de santé et d’éducation sont totalement viables dans un régime transitoire dans lequel l’énergie et les systèmes de production sont complètement remaniés, d’énormes contingents de travailleurEs affectés à différents secteurs économiques compatibles avec une transition écosocialiste… »

Quelle fraude ! La pandémie a démontré non pas que l'ordre existant est capable de changement progressiste, mais sa faillite, son inhumanité et la nécessité de son renversement.

Loin d'assurer un accès universel à la santé et à l’aide sociale, les gouvernements capitalistes ont laissé des millions de personnes chez elles sans soins, ont refusé aux personnes âgées un traitement salvateur basé sur des critères d'âge barbare et obligent désormais les travailleurs à retourner au travail pendant la pandémie. Dans les pays européens riches, alors que des milliards d'euros sont dépensés pour renflouer les banques, les travailleurs survivent avec des allocations misérables et des millions souffrent de la faim ou dépendent de la charité dans les quartiers populaires des grandes villes. Au plan international, un quart de milliard d'êtres humains risquent de mourir de faim du à la perturbation de l'agriculture et du commerce mondiaux et des centaines de millions de travailleurs risquent de perdre leur emploi.

La pandémie démasque l'écosocialisme du BEQI et de toute une série de groupes pseudo-de gauche similaires. Il exploite les questions écologiques pour répudier la politique de classe, le socialisme et le marxisme. Si cela est encore présenté frauduleusement comme une stratégie «anticapitaliste» par certains groupes anti-marxistes petit-bourgeois, cela n'a rien à voir avec une politique de gauche et encore moins avec une politique socialiste ou ouvrière.

Cela fait trois quart de siècle que les ancêtres politiques du BEQI ont rompu avec le trotskysme et se sont séparés, en 1953, du Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI). Dirigés par Michel Pablo et Ernest Mandel, ils ont exigé que la Quatrième Internationale soit politiquement dissoute dans les partis bourgeois nationalistes et staliniens qui avaient dominé les mouvements révolutionnaires de masse des années 40 contre le fascisme ou le colonialisme. C’est par le biais de ces partis – qui avaient empêché la classe ouvrière de prendre le pouvoir et préservé ainsi le pouvoir capitaliste dans des parties décisives de l'Europe, de l'Afrique et de l'Asie après la Seconde Guerre mondiale – que les pablistes se sont adaptés à l’ordre capitaliste établi d'après-guerre.

Le rejet par les pablistes d'une lutte de la classe ouvrière pour le pouvoir leur a valu le soutien de couches petite-bourgeoises du mouvement de jeunesse des années 1960, apparu lors du mouvement contre la guerre au Vietnam et à l'approche de la grève générale de 1968 en France. Les figures de proue des partis du BEQI sont en grande partie des membres de cette génération, recrutés dans le mouvement pabliste sur la base de la politique d'identité, raciale, ethnique et de genre. Ces conceptions les ont également amenés à s'aligner sur des intellectuels petit-bourgeois anti-marxistes développant diverses formes de politique écologique.

Ces conceptions furent énoncées dans un ouvrage de 1964, Stratégie ouvrière et néo-capitalisme, d'André Gorz. Postmoderniste franco-autrichien ayant publié en 1980 une attaque contre le marxisme intitulée Adieu au prolétariat, Gorz était partisan de la politique écologique. Il a écrit que «de l'intérieur du capitalisme», la gauche devrait faire des propositions «pour transformer radicalement la société […] avec des réformes de structures», comme dans la politique environnementale. Tout en prônant explicitement des réformes dans le capitalisme, Gorz affirmait qu'il s'agissait de mesures révolutionnaires, voire socialistes: «Il n'est pas nécessairement réformiste [de revendiquer] une réforme [...] non pas en fonction de ce qui est possible dans le cadre d’un système et d’une gestion donnée, mais ce qui doit être rendu possible en fonction des besoins et exigences humains. »

Gorz exposait une forme de cynisme politique théoriquement conscient: tout en soutenant le régime capitaliste, il avançait des revendications qu’il admettait être irréalisables dans cet ordre social. Il appela sa théorie de façon ambiguë «une stratégie progressive de la conquête du pouvoir par les travailleurs qui n’exclut pas d’ailleurs la possibilité où même la nécessité d’une prise du pouvoir révolutionnaire pour une étape ultérieure ». C'était la manière de Gorz de signaler qu'il avait l'intention de reléguer la prise de pouvoir révolutionnaire par la classe ouvrière dans un avenir lointain et indéfini. Dans la pratique, cela donnait le feu vert à divers partis bourgeois ou petit-bourgeois pour couvrir leur politique réactionnaire en avançant des revendications à l’air radical sans intention de lutter pour leur réalisation.

Après 1968, de tels écrits corrompus ont fourni une justification théorique aux alliances entre les organisations pablistes et un ensemble de partis bourgeois nouvellement fondés, comme le Parti socialiste français, fondé en 1971, le Mouvement socialiste panhellénique grec (PASOK) fondé en 1974 et le Parti des travailleurs du Brésil fondé en 1980. Ces partis bourgeois ont promis des politiques radicales, «socialistes» ou écologiques pour gagner du soutien et des élections, puis ont rompu invariablement ces promesses une fois au pouvoir. Soutenus par les partis staliniens et pablistes, ils ont cependant joué un rôle de premier plan dans la politique bourgeoise pendant des décennies.

Au cours des trois décennies qui ont suivi la dissolution stalinienne de l'Union soviétique en 1991 cependant, l'antagonisme entre la classe ouvrière et cet ordre politique corrompu est devenu impossible à réprimer. La restauration du capitalisme par le stalinisme en Union soviétique a pleinement confirmé les avertissements de Léon Trotsky sur son rôle contre-révolutionnaire. Sur fond de colère sociale croissante et de désillusion politique parmi les travailleurs à l'international, les événements ont également pleinement justifié l'opposition de principe du CIQI à la politique pseudo-de gauche des organisations pablistes.

A son congrès fondateur en 2009, le NPA renonça officiellement jusqu’au lien symbolique avec le trotskysme et acclama ses liens déjà étroits et de longue date avec le PS. Cela élimina le dernier obstacle idéologique à l’adoption enthousiaste par le NPA de politiques de droite. François Sabado, membre de premier plan du NPA, répondit aux renflouements obscènes des banques européennes en 2009 suite au krach de Wall Street, en appelant à les augmenter: «Selon Paul Krugman, le plan de relance [d’Obama] ne peut, alors, combler que la moitié du potentiel de croissance perdu. […] Mais plus substantiellement, ce qui doit être souligné, c’est que tous les plans de relance sont considérés comme sous-dimensionnés: 1,3% du PIB en Grande-Bretagne, 1% en France, 0,8% en Allemagne, 0,1% en Italie. »

Sabado salua les renflouements de 2009 comme « incontestablement, un nouvel interventionnisme de l’État dans l’économie, dans le sauvetage des banques, dans des politiques de concentrations et de restructurations industrielles et financières. C’est un changement par rapport à tout le discours ultra-libéral – de moins en moins d’État – de Reagan et Thatcher ».

En fait, les milliards de milliards de dollars et d'euros remis aux super-riches étaient le signal d’un assaut international contre la classe ouvrière d'une férocité sans précédent. Sur le plan international, les partis sociaux-démocrates ou nationalistes avec lesquels les partis du BEQI s'étaient alliés se sont effondrés au milieu de l'indignation grandissante des travailleurs face à leurs politiques d'austérité. Le PASOK subit une désintégration électorale et fut réduit à un croupion en 2015, tout comme le PS français en 2017 et le Parti des travailleurs fut éjecté du pouvoir au Brésil en 2016 après une opération droitière de changement de régime, suite à l’effondrement de sa popularité.

Depuis, la classe dirigeante a de plus en plus intégré les partis de la pseudo-gauche comme ceux du BEQI pabliste dans la machine d'État pour mener la guerre et l'austérité contre les travailleurs. Ces derniers ont soutenu la guerre de l'OTAN contre la Libye en 2011, l'armement de groupes «rebelles» en Syrie, puis l'opération de changement de régime dirigée par l'OTAN en Ukraine et la guerre civile qui s’ensuivit, en 2014. En 2015, le BEQI a salué l'élection de son allié grec Syriza («Coalition de la gauche radicale») qui a imposé des coupes sociales draconiennes et mis en place des camps de détention de masse pour les réfugiés. Les partis du BEQI font partie de deux gouvernements d'austérité en Europe: les Anticapitalistas espagnols ont rejoint le gouvernement Podemos-Parti socialiste espagnol, tandis que le RGA fait partie de la coalition gouvernementale danoise.

Le rôle du BEQI dans l’encensement et la mise en œuvre de politiques de droite le rend de plus en plus conscient de son hostilité virulente au marxisme. L'un des étudiants gagnés au pablisme en France après la grève générale de 1968 était le membre franco-brésilien du NPA et co-auteur d'un «manifeste écosocialiste» en 2001, le professeur Michael Löwy. Interrogé sur l'écosocialisme dans une interview au magazine ex-stalinien Mouvements en 2012, Löwy répondait: «Bien sûr, l'écosocialisme n'est pas en solidarité avec les soi-disant socialismes du XXe siècle, la social-démocratie et le stalinisme. Il appelle également à remettre en question et à critiquer les limites du marxisme. »

Parmi ce qu'il voyait comme «limites» au marxisme, Löwy soulignait que c'était sa conception d'une crise révolutionnaire et la nécessité d'une révolution socialiste issue de la croissance des forces productives de l'humanité: «La limite la plus importante est le concept de ‘développement des forces productives’ et l'idée que le socialisme doit supprimer les relations de production capitalistes parce qu'elles sont devenues des ‘obstacles’ ou des ‘chaînes’ qui bloquent leur développement. L'écosocialisme rompt définitivement avec cette conception. »

Löwy ajoutait que son écosocialisme était étroitement lié à son soutien à l '«anticapitalisme romantique». Il définissait cela comme «une protestation culturelle contre la civilisation capitaliste et industrielle moderne au nom de certaines valeurs du passé. Le romantisme proteste contre la mécanisation, la rationalisation instrumentale, la réification, la dissolution des liens communautaires et la quantification des relations sociales ».

La pandémie a dévoilé la faillite historique de ces politiques rétrogrades et pessimistes de la petite bourgeoisie pro-impérialiste. Pendant des décennies, le risque de pandémie, la menace du réchauffement climatique et d'autres problèmes environnementaux urgents étaient bien connus, mais pratiquement rien n'a été fait; le coût en vies humaines de la pandémie de COVID-19 à lui seul pourrait facilement atteindre des millions. En fait, les problèmes environnementaux ne peuvent être résolus sans que la classe ouvrière internationale ne prenne d’abord le pouvoir dans une lutte pour le socialisme contre le système de l'État-nation capitaliste. Pour mener une telle lutte cependant, le mouvement qui se développe dans la classe ouvrière internationale doit être armé d'une compréhension claire du fossé de classe qui sépare le marxisme révolutionnaire de la politique «écosocialiste» des organisations petites-bourgeoises de la pseudo-gauche.

Avant la pandémie déjà, se déroulait une vague mondiale sans précédent de manifestations et de grèves contre les inégalités sociales. L'année 2018 a vu des grèves massives des enseignants dans une rébellion contre la bureaucratie syndicale américaine et les manifestations des Gilets jaunes en France organisées via les réseaux sociaux. L'année dernière a vu la première grève nationale des enseignants en Pologne depuis que le régime stalinien a restauré le capitalisme en 1989, des grèves organisées via les réseaux sociaux par des infirmières portugaises et des manifestations de masse au Soudan, en Algérie, au Liban, en Irak, en Équateur, en Bolivie, au Chili et au-delà. L'ère où l'impact de la restauration du capitalisme par le régime stalinien en Union soviétique suffisait à supprimer la lutte de classe internationale et la lutte pour le socialisme, est terminée.

A présent, la politique de la reprise du travail au milieu de la pandémie crée les conditions d'une nouvelle lutte puissante mobilisant la classe ouvrière à l'international. En 2017, il y avait dans la seule industrie près d'un milliard de travailleurs. Alors que des masses de paysans dans toute l'Asie et l'Afrique allaient dans les villes pour y trouver du travail, les rangs de la classe ouvrière ont grossi de 1,2 milliard entre 1980 et 2010. La lutte pour imposer un plan rationnel et scientifique contre la pandémie unit la classe ouvrière au-delà des ethnicités, des nationalités et des genres, dans une opposition irréconciliable à l'aristocratie financière.

Cela met la classe ouvrière en conflit de plus en plus direct avec les partis du BEQI. Ceux-ci ne soutiennent pas, mais craignent les luttes des travailleurs – ce qui se reflète dans le fait que le NPA français a initialement dénoncé les «gilets jaunes» comme une «foire poujadiste». Ainsi, lorsque la déclaration du BEQI propose un mouvement, celui-ci exclut la classe ouvrière, toute action de grève quelle qu’elle soit, ou toute lutte pour prendre le pouvoir politique. Au lieu de quoi, elle salue les initiatives des «mouvements de femmes, de jeunes et d’écologistes» et déclare:

« Il existe des exemples de ces initiatives de la population ou de secteurs organisés, tels les paysanEs, les peuples autochtones, les chômeurEs, les peuples et les communautés à la périphérie des grandes villes, les réseaux de solidarité féministes, entre autres. Ces initiatives forgent des alternatives très intéressantes, comme la fabrication collective de masques en tissu à donner à la population afin d’assurer la prévention de la contagion, le don et la production alternative de nourriture, la défense du système de santé publique et la revendication d’un accès universel, l’exigence de garantie des droits du travail et du paiement des salaires, la dénonciation de l’intensification de la violence à l’égard des femmes et le travail exténuant de soins qu’elles effectuent lors de leur isolement à domicile, entre autres. »

De telles politiques – mobilisant les confédérations d'agriculteurs, les organisations fondées sur l'identité raciale ou ethnique et les groupes féministes, en tant que substituts de la classe ouvrière – sont de toute évidence insuffisantes pour faire face à la pandémie. Pourquoi les travailleurs devraient-ils mendier des dons caritatifs de nourriture «alternative», alors que c'est la classe ouvrière qui transporte, conditionne et distribue les aliments dans la chaîne alimentaire industrielle prédominante? Comment mettre fin à la campagne d'austérité de la bourgeoisie et à son impact dévastateur sur les systèmes publics de santé dans le monde uniquement par des mouvements locaux de groupes paysans, autochtones et de femmes? Et pourquoi la population devrait-elle se satisfaire de masques en tissu faits à la main, alors que des masques plus sûrs et plus efficaces et d'autres équipements de protection peuvent être fabriqués plus efficacement dans les usines?

Si les opérateurs politiques qui dirigent le BEQI parlaient honnêtement, ils répondraient: la population devrait accepter les masques faits à la main afin que les usines puissent être laissées sous le contrôle des banques et de la classe dirigeante, et que les dividendes puissent continuer à affluer dans nos portefeuilles. Si cela coûte des millions de vies, ajouteraient-ils, qu'il en soit ainsi.

La menace de la pandémie pour des milliards de vies révèle le conflit irréconciliable entre les intérêts des travailleurs et ceux représentés par la pseudo-gauche petite-bourgeoise. C’est ce conflit qui sous-tend la défense principielle, depuis des décennies par le Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI), des traditions de la révolution d'Octobre et du trotskysme contre les organisations comme le BEQI. La question décisive à laquelle est confrontée la classe ouvrière internationale, alors qu'elle entre en lutte, est de garantir son indépendance politique vis-à-vis de ces couches de la classe moyenne. En voyant les travailleurs construire des comités d’action de sécurité et d'autres organisations de lutte en dehors de l'emprise des bureaucraties syndicales, elles chercheront à intervenir. Mais ce sera avec l’objectif de diviser le mouvement et de l’attacher au système capitaliste de l'État-nation. L'alternative révolutionnaire pour les travailleurs cherchant à défendre leurs vies, leurs conditions de vie et leurs organisations de lutte est la défense par le CIQI de l'internationalisme marxiste contre la pseudo-gauche.

(Article paru d’abord en anglais le 21 mai 2020)

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