Air France-KLM prépare la suppression de milliers d’emplois

La pandémie mondiale de Covid-19 est vue par les classes dirigeantes comme une opportunité de restructurer le capitalisme en détruisant des centaines de millions d’emplois ainsi que les acquis sociaux des travailleurs. Après l’annonce par Macron d’une aide de 15 milliards d’euros pour l’aéronautique, France-KLM se prépare à supprimer des milliers de postes, bien que l’État français lui ait accordé 7 milliards d’euros.

Les grandes entreprises stratégiques en Europe se restructurent sur la base des 1.350 milliards d’euros publics du plan de relance de la Banque centrale européenne et les 500 milliards d’euros en France pour réaliser des profits par les licenciements et les destructions d’emplois. Après la casse de dizaines de milliers d’emplois dans l’automobile, c’est au tour des compagnies aériennes. British Airways a annoncé la suppression de 12.000 postes et Ryanair s’apprête à réduire ses effectifs de 3.000 postes. Lufthansa a déclaré vouloir supprimer 22.000 emplois à temps plein et 4.000 à temps partiel. Le constructeur Airbus va supprimer 10.000 emplois, soit 10 pour cent de ses effectifs.

Mercredi matin, le conseil d’administration d’Air France-KLM s’est tenu autour de la présidente du groupe Anne-Marie Couderc et du directeur générale exécutif Benjamin Smith. Ce conseil d’administration a annoncé la perte record de 1,8 milliards d’euros au premier trimestre alors que seul le mois de mars a été particulièrement affecté par les effets du COVID-19.

Selon le journal Libération, Air France-KLM «paie non seulement la chute vertigineuse de ses recettes, puisque la plupart des avions sont cloués au sol, mais aussi le faible prix du pétrole.» En effet l’achat à l’avance du kérosène à un prix défini largement au-dessus du marché qui ne génère pas de recettes puisqu’il n’est pas consommé pèse près de 500 millions d’euros dans les mauvais résultats de l’entreprise.

La reprise très progressive du trafic aérien n’arrange pas Air France-KLM, car les lignes vers le continent américain, l’Asie et l’Afrique, les plus rentables pour la compagnie, ne génèrent aucune activité puisque l’espace Schengen est fermé. La compagnie prépare donc ses employés à des pertes pour les trimestres suivants.

Le groupe a annoncé la réduction de ses investissements qui passeront de 3,6 milliards à 2,4 milliards avec l’annulation dans la flotte d’Air France de trois Airbus long courrier cette année. Cependant c’est sur l’emploi que les mesures de réduction des coûts seront les plus violentes. Selon Libération, durant le conseil d’administration, «les deux représentants de l’Etat actionnaire n’ont pas fait le moindre commentaire» lorsque la perspective des suppressions de postes a été annoncée.

Aucun chiffre n’a été annoncé par le DG Benjamin Smith mais il compterait supprimer des emplois dans les services administratifs et les escales d’Air France en région. La filiale de transport régional Hop devrait voir sa flotte et son réseau réduits de près de la moitié. Selon un dirigeant de la compagnie qui s’exprimait sous couvert de l’anonymat, sur un effectif total de 80.000 salariés, entre 6.000 et 10.000 emplois seront supprimés.

Toujours d’après ce dirigeant cela serait dans un premier temps un plan de départs volontaires, mais le recours à des licenciements secs se profile dans un plan d’économies qui devrait être annoncé en juillet.

Les travailleurs de l’aéronautique, tout comme ceux de l’automobile ne sont pas responsables des pertes dans ces secteurs industriels ni de la pandémie mondiale. Les centaines de milliards donnés aux banques et aux grandes entreprises doivent servir à sécuriser les emplois et les acquis sociaux par les mesures de nationalisation à l’échelle européenne et internationale. Ceci n’est possible que par une lutte politique des travailleurs pour prendre le pouvoir, exproprier l’aristocratie financière internationale et construire les États Unis Socialistes d’Europe.

Pour cela les travailleurs doivent créer leur propre comité d’action indépendamment des syndicats et de leurs alliés politiques afin d’organiser la lutte politique contre Macron et l’UE.

Les travailleurs d’Air France-KLM doivent être avertis du complot de l’État, d’Air France et des appareils syndicaux contre les salariés. Tous s’accordent pour la suppression des emplois. Les syndicats n’ont pas cherché à mobiliser les travailleurs de la compagnie contre les négociations sur les suppressions de postes, tout simplement parce qu’ils sont en train de les négocier avec Benjamin Smith. Les travailleurs de la compagnie ont déjà des expériences récentes de trahison des syndicats d’Air France.

Dès 2014, les travailleurs d’Air France ont subi plusieurs plans d’économie représentant plusieurs milliers d’emplois supprimés et des baisse de salaire avec la complicité du syndicat des pilotes le SNPL et la CGT. Cette année-là, les pilotes d’Air France s’étaient mis en grève durant 14 jours contre le projet de filiale low-cost Transavia. La grève fragilisa non seulement la compagnie, qui a subi la perte de centaines de millions d’euros mais aussi le gouvernement impopulaire de Hollande.

Comme le gouvernement PS, les syndicats craignaient que cette grève populaire dans l’opinion n’entraîne d’autres sections de la classe ouvrière en lutte.

Manuel Valls, alors premier ministre était intervenu pour demande la fin de la grève ce que le SNPL s’empressa de faire prétextant qu’il «est de notre devoir de préserver l’avenir de notre compagnie et de panser ses plaies avant que des dommages irréversibles n’apparaissent».

En 2018 alors que les cheminots étaient en lutte contre la réforme ferroviaire de Macron, les travailleurs d’Air France étaient aussi entrés en grève tout comme les jeunes mobilisés contre la réforme universitaire. Les syndicats d’Air France ont mis fin à la grève après la nomination de Benjamin Smith en DG pour éviter qu’un large mouvement politique contre Macron ne déborde les syndicats. Ceci avait permis aux syndicats d’isoler les cheminots des autres sections de travailleurs et ainsi faire passer la réforme ferroviaire et préparer la réforme des retraites de Macron.

A présent, face à la pandémie, les syndicats se préparent à une nouvelle trahison. Ils vont tenter d’isoler les différents services afin de diviser les travailleurs de l’entreprise comme l’indique le rapport d’un commandant de bord au long passé syndical à Libération: «Benjamin Smith n’a cessé de nous dire, en français, comme en anglais que nous étions les leaders de l’entreprise. Les pilotes sont séduits par son discours d’autant qu’il connaît bien mieux le transport aérien que ses prédécesseurs à la tête de la compagnie.»

Contrairement à ce qu’affirme ce syndicaliste, les pilotes seront aussi touchés par les licenciements et seront opposés à ce plan d’économies du groupe. La défense de leurs emplois et de leurs conditions de travail nécessite l’unification des luttes des pilotes avec celles des autres travailleurs du groupe. En fait cette déclaration signifie finalement que le syndicat des pilotes n’essaiera pas de mobiliser les pilotes afin d’affaiblir la lutte des travailleurs d’Air France.

Ces deux dernières années ont vu de nombreuses luttes menées indépendamment des syndicats, comme celle des «gilets jaunes» ou des infirmières portugaises. A présent il est essentiel d’organiser les luttes indépendamment des syndicats, dans des comités d’action, pour défendre les emplois et les salaires à l’international, mobilisant les travailleurs d’Air France comme de la société néerlandaise KLM et des sociétés menacées par les restructurations liées à la pandémie.

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