Hier, comme lors des élections de 2017, Emmanuel Macron et la candidate néofasciste Marine Le Pen ont avancé au second tour des élections présidentielles, le 24 avril. Selon des estimations initiales hier soir, ils auraient reçu 27,4 et 24,0 pour cent des voix, respectivement. Jean-Luc Mélenchon, candidat de La France insoumise (LFI) aurait reçu 21,6 pour cent.
Ces estimations ne sont pas confirmées : le nombre de votes Mélenchon a continué à monter hier soir, alors que des bulletins de votes non comptés émergeaient à Paris.
Si les estimations initiales sont confirmées, toutefois, ce serait la troisième fois, avec les élections de 2002 et 2017, qu’un néofasciste arrive au second tour des présidentielles. Le fait que les électeurs sont à nouveau face au choix empoisonné entre Le Pen et le «président des riches» témoigne de la faillite des organisations que les médias font passer pour la «gauche». Elles se sont révélées incapable de battre ni un président sortant impopulaire, ni une néofasciste.
L’élection a confirmé l’effondrement des partis électoraux dominants dans l’époque après la grève générale de Mai 68. Valérie Pécresse des Républicains (LR) et Anne Hidalgo du PS, les deux partis de gouvernement de l’après-68, ont reçu 4,7 et 1,8 pour cent, respectivement. Le candidat Vert Yannick Jadot a reçu 4,5 pour cent et le candidat PCF Fabien Roussel 2,4 pour cent. Ces candidats sont ainsi éliminés.
Le polémiste d’extrême-droite Eric Zemmour, condamné pour incitation à la haine raciale et proche de sections du corps des officiers qui ont agité pour un coup d’État lors de la pandémie de Covid-19, a reçu 7 pour cent des voix.
La campagne pour le second tour commence sur fond d’incertitude et d’une vaste désillusion populaire avec les partis établis. Le taux d’abstention s’est élevé à 26,2 pour cent des électeurs, plus que le nombre de votes reçus par chacun des candidats. Les sondages ont donné Le Pen en train de recevoir 48 ou 49 pour cent des voix contre Macron, et une possibilité réelle existe que Le Pen pourrait battre Macron.
Si Macron a fait campagne en 2017 en tant que jeune banquier prétendument dynamique, la France s’enfonce à présent dans la crise. Presque 1 million de personnes ont attrapé le Covid la semaine passée, et 786 sont mortes, mais l’État a encouragé les électeurs à se rendre sans masque dans les bureaux de vote même s’ils étaient positifs au virus. Le rationnement du gaz et les pénuries de certains produits tels que l’huile de tournesol commencent, sur fond de sanctions imposées par l’OTAN à la Russie.
Dans une brève allocution hier soir, Macron a prétendu qu’il construirait «un grand mouvement politique d’unité», ralliant les Français «pour faire barrage à extrême droite». Il a ajouté, «Je suis prêt à inventer quelque chose de nouveau pour rassembler les convictions et sensibilités diverses pour bâtir avec eux une action commune, au service de notre nation, pour les années qui viennent. C'est notre pouvoir ».
Mme Le Pen s'est présentée comme dirigeant un gouvernement populaire et démocratique. Elle a appelé les électeurs 'de droite, de gauche, d'ailleurs, de tous horizons à rejoindre ce grand rassemblement national et populaire.' Des responsables du Rassemblement national (RN) de Le Pen ont déclaré au quotidien Libération : « C’est la gauche qui détient presque les clés de l’élection ».
Le discours de Le Pen maniait des menaces de reprendre contrôle de l’immigration, des promesses de renforcer la police, et des appels démagogiques à l’opposition aux politiques anti-ouvrières de Macron. Macron a menacé d’augmenter l’âge de la retraite à 65 ans et à forcer les gens à travailler pour recevoir le RSA. Le Pen a donc voulu défendre «la solidarité que nous accordons envers les plus vulnérables, la possibilité de jouir de droits garantis ou encore d’accéder à la retraite en bonne santé ».
Les néofascistes peuvent se présenter si démagogiquement parce que la présidence de Macron n'a rencontré aucune opposition de gauche au sein de l'establishment politique. Macron a activement légitimé les politiques fascistes, notamment sa politique meurtrière consistant à « vivre avec le virus ». Il a salué le dictateur français Philippe Pétain tout en envoyant les forces de l’ordre attaquer les manifestations des 'gilets jaunes' réclamant l'égalité sociale. Les responsables du gouvernement Macron ont même publiquement attaqué Le Pen, qu’ils traitaient de « molle » sur l’Islam.
Dans cette atmosphère toxique, les partis que les médias et l'élite dirigeante ont érigés en 'gauche' ont constamment cédé le terrain de l'opposition politique à l'extrême-droite. Mélenchon, le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) pabliste ou Lutte ouvrière (LO) ont isolé ou dénoncé les 'gilets jaunes'. Ils se sont rangés derrière les manifestations antivaccins d'extrême droite, alors même que 142 000 personnes en France et près de 2 millions en Europe sont mortes du COVID-19.
Enfin, Mélenchon, le NPA, des organisations staliniennes comme le syndicat de la Confédération générale du travail (CGT) et LO se sont tous alignés sur Macron et l'OTAN dans la guerre contre la Russie en Ukraine, où l'OTAN arme les milices néonazies ukrainiennes comme le bataillon Azov.
Que Macron ou Le Pen sorte victorieux, le nouveau président dirigera un gouvernement réactionnaire qui entrera en conflit violent avec la classe ouvrière. L'élection d'un président néo-fasciste en France présente d'énormes dangers. Cependant, les candidats qui appellent maintenant les électeurs à soutenir Macron comme le moindre mal contre Le Pen commettent une fraude politique : Macron n'est pas une alternative à une présidence néo-fasciste.
Alors que Zemmour et le candidat mineur d'extrême-droite Nicolas Dupont-Aignan ont tous deux appelé à voter Le Pen au second tour, la plupart des candidats se sont rangés derrière le « président des riches ».
Pécresse a dit : « Ce soir, je suis profondément inquiète pour l’avenir de notre pays alors que l’extrême droite n’a jamais été aussi près de l’emporter ». Ajoutant que l’élection de Le Pen mènerait «à la discorde, à l’impuissance et à la faillite» et « l’effacement de la France sur la scène européenne et internationale», elle a dit: «Ainsi, malgré les profondes divergences que j’ai martelées tout au long de la campagne, je voterai Emmanuel Macron pour empêcher l’arrivée au pouvoir de Marine Le Pen et le chaos qui en résulterait ».
Les Verts, le PS et le PCF ont aussi appelé à voter Macron, et Mélenchon a clairement indiqué que LFI émettra un appel cynique et à peine voilé à voter Macron. Les responsables de LFI craignent l'opposition généralisée qui a émergé en 2017 parmi les électeurs de LFI à voter pour Macron ou Le Pen. Adrien Quatennens, dirigeant de LFI, a déclaré à la télévision France2 que LFI organisera un scrutin parmi ses membres pour leur permettre de choisir ce qu'ils doivent faire, mais qu'un vote Le Pen ne figurerait pas sur la liste des choix.
Mélenchon, qui a 70 ans et a déclaré qu'il ne se représenterait pas à l'élection présidentielle de 2027, a présenté son échec au second tour comme une victoire qui renforcerait son parti. « Une nouvelle page de notre combat s'ouvre. Vous la tournerez, nous la tournerons avec le sentiment de fierté du travail bien fait », a-t-il clamé, ajoutant que la France est face à « un état d'urgence politique.»
Il est évident que Mélenchon compte jouer le même rôle réactionnaire qu'en 2017 : rassembler des millions de ses électeurs derrière la présidence violemment réactionnaire de Macron. En effet, Mélenchon a scandé à plusieurs reprises : « Vous ne devez pas donner une seule voix à Le Pen ».
En réalité, tout le parcours militariste et fascisant de la présidence de Macron montre que la perspective de Mélenchon de voter le moindre mal contre Le Pen est fausse et une impasse pour les travailleurs et les jeunes qui en France. Mélenchon a fait savoir qu'il préférait un vote Macron en 2017 pour s'opposer à Le Pen. Pourtant, le résultat a été que LFI a aidé Macron à être élu et à tourner la politique française vers l’extrême-droite.
Arrêter ce virage vers l'extrême droite nécessite de mobiliser la classe ouvrière, contre l'ensemble de l'establishment politique, sur un programme socialiste et internationaliste, et en refusant d’accorder un soutien à Macron ou à Le Pen.
Quelqu’un du Parti de l’égalité socialiste sera en contact avec vous