wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

L'ex-secrétaire d'État américain, James Baker, insiste sur un règlement du conflit au Sahara occidental

Par Brian Smith et Chris Talbot
14 mars 2001

L'ancien secrétaire d'État des États-Unis, James Baker, a rejoint les négociations sur l'avenir du Sahara occidental. Ce territoire subit un conflit qui traîne depuis 25 ans entre le Maroc et le Front Polisario (Front populaire pour la libération de la Saguia El-Hamra et du Rio de Oro).

Baker fut envoyé personnel du secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, pour le Sahara occidental au cours des dernières quatre années. Il a quitté les négociations en cours pour rejoindre la campagne de George W. Bush en Floride. Les rapports que Baker entretient avec l'administration américaine soulignent l'importance que les gouvernements de l'Ouest attachent au règlement du conflit existant entre les parties belligérantes.

Baker défend la position que le Maroc renonce en partie au contrôle du Sahara occidental et, qu'en contrepartie, le Polisario abandonne sa demande d'indépendance et accepte une certaine autonomie. Dans une récente déclaration, Annan indiquait que la proposition avait reçu l'aval de l'ONU, un revirement de sa politique précédente (et qui n'avait jamais été sérieusement appliquée) à savoir la tenue d'un référendum sur l'avenir de la région. Les Nations unies avaient envoyé des troupes de maintien de la paix au Sahara occidental depuis que la fin du conflit militaire avait été négociée en 1991.

Le Front Polisario, la branche militaire de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), fut fondé en 1973 pour lutter contre les colonisateurs espagnols du Sahara occidental. Il est basé dans le pays voisin, l'Algérie, où quelque 165.000 Sahraouis sont hébergés dans des campements de terre cuite et de toile. Nombre d'entre eux ont habité ces campements durant ces vingt cinq dernières années, depuis que le Maroc est entré au Sahara occidental et a proclamé sa souveraineté en déclenchant 16 années de lutte. Les conditions dans ces camps passent pour être les pires de la planète. Les températures y atteignent 50 degrés en été et l'eau doit être amenée par camions-citernes.

Le Sahara occidental, un territoire plus vaste que la Grande-Bretagne, est surtout en grande partie couvert un désert et sa population, d'environ 245.000 habitants, est concentrée dans quelques villes. Il est protégé du Polisario par des dizaines de milliers de troupes marocaines qui campent derrière un mur de défense de sable, long de plus de 2 500 km, et bordé de fil de fer, de mines anti-personnels et de forts. Il est généralement admis que l'effort militaire coûte 1 million de dollars par jour au Maroc. La région est riche en minerai, particulièrement en phosphate, une source importante de revenu pour le Maroc, et renferme aussi des réserves de pétrole.

Le souci de James Baker est d'empêcher toute possibilité d'une résurgence des combats vu que des dirigeants du Polisario avaient récemment annoncé leur intention de ne plus respecter le cessez-le-feu. La stabilité du Maroc est d'une importance capitale pour les États-Unis, non seulement en raison de ses richesses en minerai mais aussi parce qu'il est un des principaux défenseurs des intérêts américains au Moyen-Orient.

Un conflit militaire au Sahara occidental pourrait facilement provoquer des soulèvements populaires dans l'ensemble du Maroc. Suite à la mort de son père Hassan en 1999, le roi Mohammed avait été sommé de libéraliser le règne despotique exercé sur le Maroc - le pays le plus pauvre d'Afrique de Nord où 20 pour cent de la population ne dispose que d'un dollar par jour pour vivre.

Les États-Unis considèrent qu'il est essentiel de renforcer le Maroc en tant que base d'appui dans le monde arabe à un moment où leurs efforts en vue d'isoler l'Iraq connaissent des difficultés. Le Maroc met à la disposition de la marine américaine ses installations portuaires et accorde à l'aviation américaine la permission d'atterrir et de se ravitailler en kérosène. Le Maroc reçoit plus d'aide américaine que n'importe quel autre pays arabe ou africain, l'Égypte mis à part.

La France ainsi que d'autres gouvernement de l'Union européenne (UE) désirent également un règlement de la question du Sahara occidental, compte tenu de leurs intérêts économiques dans la région. Il y eut des appels en faveur de la résurrection du bloc de libre-échange de l'Union du Maghreb - comprenant le Maroc, la Mauritanie, l'Algérie, la Tunisie et la Libye - et du développement de l'association euro-méditerranéenne. Des appels furent lancés pour qu'un accord d'association à l'UE soit accordée à la fois au Maroc et à l'Algérie.

Historiquement, l'Algérie fut le principal défenseur du Polisario dans le cadre de ses propres conflits frontaliers avec le Maroc. Le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, subit la pression de l'Occident pour mettre fin à la guerre civile qui sévit dans le pays avec des groupes de l'opposition islamiste et pour restaurer la stabilité nécessaire à l'investissement étranger en Algérie et à l'exploitation de ses ressources, y compris les énormes réserves de pétrole. Il a également été pressé de résoudre ses différends avec le Maroc.

La décision du Polisario de rompre le cessez-le-feu survint en janvier de cette année quand le tracé du rallye du Paris-Dakar à travers le Sahara occidental fut décidé sans consultation préalable avec le Polisario ou des représentants de la RASD. Lorsqu'il eut connaissance de l'itinéraire prévu pour le rallye et de la présence des gardes armés l'accompagnant, le Polisario déclara qu'il considérait cette décision comme un acte d'agression et qu'il reprendrait les hostilités.

Les troupes du Polisario furent mises en alerte, les hôpitaux et les baraquements furent évacués et les hostilités étaient imminentes. À la dernière minute cependant, les représentants renoncèrent à leur menace de guerre en se référant à un appel de l'Organisation de l'unité africaine, des États-Unis et de l'Algérie. Le Polisario affirma qu'il continuait toutefois à considérer le cessez-le-feu comme "nul et non avenu".

Il est probable que la réponse des dirigeants du Polisario soit destinée à détourner la pression des réfugiés qui savent que le processus de référendum, qui depuis dix ans est présenté comme une mesure progressiste, mène en fait à une impasse. Des commentateurs signalent qu'un retour à la guerre semble improbable car elle n'a l'appui ni de l'Algérie ni des ONG européennes de l'aide desquelles dépendent les camps de réfugiés.

La question du référendum qui, à l'origine, avait été proposé par les Espagnols en 1973, a été la cause d'un conflit qui s'éternise en raison de divergences quant à ceux qui y auront droit de vote. En 1991, la Mission des Nations unies au Sahara occidental (MINURSO) avait été lancée comme une mission de courte durée. Elle a connu depuis d'innombrable prorogations dont la plus récente fut celle annoncée le mois dernier par Annan. La MINURSO avait pour dessein de donner l'impression que l'Occident se souciait de la souveraineté du Sahara occidental et ce tout spécialement à l'époque où la supposée défense de la souveraineté nationale du Koweït servait de prétexte à la guerre contre l'Iraq. En vérité, il n'a jamais vraiment été question de défier la domination du Maroc. L'ONU était supposée contrôler l'établissement des listes électorales lors du référendum (c'est-à-dire vérifier que ceux qui s'y trouvait étaient en mesure de prouver leur origine sahraouie), mais au lieu de cela, l'ONU de connivence avec le Maroc repoussa la date du référendum une fois après l'autre et ferma les yeux sur l'intimidation du peuple sahraoui.

Tout au long de la guerre froide, les gouvernements des États-Unis et de l'Occident avaient rituellement condamné l'occupation de la région par le Maroc tout en continuant à soutenir le brutal régime du roi Hassan. Ils étaient surtout inquiets que le Polisario, qui était directement soutenu par l'Algérie et la Libye et qui était reconnu par quelque 70 nations de par le monde, puisse devenir la base d'une intervention soviétique. En formulant ces préoccupations, le secrétaire d'État américain, Henry Kissinger, déclara que "Les États-Unis n'admettront pas un autre Angola sur la côte Est de l'Océan Atlantique".

Dans les années 1970 et 1980, des milliers de Sahraouis avaient été incarcérés dans les geôles et les chambres de torture du régime de Hassan. La question des «disparus», des centaines de prisonniers tués, demeure litigieuse. En dépit d'une levée partielle des restrictions à l'opposition qu'impose le roi Mohammed, Amnesty International signale de cas d'arrestation et de harcèlement incessants de défenseurs des droits de l'homme par les multiples forces de sécurité du régime.

La Grande-Bretagne nous offre un exemple typique du soutien continu que l'Occident offre au régime marocain. L'on a appris récemment, suite à un lapsus du ministre des Affaires étrangères britannique, Robin Cook, lors d'une réunion d'une commission parlementaire que la Grande-Bretagne avait remis en état trente canons de 105 mm pour le compte du régime marocain. En juin 1999, après avoir reçu l'aval de l'ONU, la Grande-Bretagne a secrètement accepté le contrat de 3,5 millions de livres sterling pour la fourniture de pièces destinées aux canons positionnés le long du «mur de défense» au Sahara occidental. Cette action représentait une violation flagrante des directives de l'Union européenne et de la soi-disant «politique étrangère éthique» du gouvernement travailliste.

La Grande-Bretagne ne reconnaît pas officiellement la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental et, l'année dernière, le ministère des Affaires étrangères avait affirmé ne pas être au courant que des armes britanniques étaient utilisées dans la région. Le cynisme du Parti travailliste est également manifeste en ce que, à l'époque où il honorait le contrat d'armes, le gouvernement finançait la construction d'entrepôts pour la nourriture des réfugiés sahraouis campant dans le pays voisin, l'Algérie.

Les dirigeants de la RASD et du Polisario ont fait publiquement connaître leur opposition aux propositions de décentralisation développées par Baker. Il y aura assurément une énorme opposition de la part du peuple sahraoui à accepter le règne oppressif du Maroc, même en le déguisant en «autonomie». Néanmoins, la stratégie du Polisario ne peut mener à rien d'autre qu'à un recul de ce type. Il a accepté en 1991 le processus de référendum de l'ONU comme un moyen de sauver la face après avoir suivi la voie de l'OLP, de l'ANC et d'autres mouvements pour l'indépendance nationale en abandonnant la lutte armée au profit d'un rapprochement avec les puissances impérialistes.

Non seulement la possibilité de l'établissement d'un État-nation viable au Sahara s'est révélée être une illusion tragique, mais l'Algérie, la Libye et d'autres pays avaient fait savoir qu'ils ne soutiendraient plus d'action militaire avec la fin de la guerre froide et la perte probable du soutien soviétique. La Libye est revenue sur ses engagements de soutenir le Polisario suite à la signature d'un marché entre le Maroc et le colonel Kadhafi au milieu des années 1980.


 

Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés