wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

De nouveaux témoignages montrent comment les conservateurs sont liés à la tragédie de Walkerton

par Lee Parsons
30 juin 2001

La seconde phase de l'enquête publique sur la contamination de l'eau de Walkerton, une petite ville du centre de l'Ontario, a mis en lumière des faits qui prouvent clairement la culpabilité du gouvernement provincial conservateur. À la mai-juin 2000, la contamination de l'eau potable de Walkerton par le E.Coli entraîna la mort d'au moins sept personnes. Plus de la moitié de la ville fut gravement malade en conséquence de la contamination par la bactérie, et plusieurs résidents de Walkerton en subissent encore des séquelles aujourd'hui, certains pour le reste de leur vie.

Dès le début de la tragédie, plusieurs ont allégué que les conservateurs auraient dû s'apercevoir que les compressions budgétaires dans le secteur de l'environnement et de la santé mettraient la sécurité du public en danger. Mais ce n'est qu'au cours des dernières semaines que la preuve a émergé que les conservateurs avaient été avertis à plusieurs reprises par des hauts fonctionnaires des conséquences potentiellement tragiques de leur programme de compressions des dépenses, de déréglementation et de privatisation de l'analyse de l'eau potable et de transfert de responsabilité au niveau municipal - des avertissements que les conservateurs ont choisi d'ignorer.

Ces révélations ont profondément ébranlé la confiance que la population pouvait encore avoir en Mike Harris, le premier ministre ontarien, et de plus, est une condamnation par les faits de la doctrine des conservateurs selon laquelle le marché capitaliste est le meilleur mécanisme pour offrir l'infrastructure et les services sociaux de base.

En réponse aux appels du National Post et des sections les plus rapaces de la grande entreprise, les conservateurs ont essayé de reprendre l'initiative en annonçant une nouvelle ronde de «révolution du bon sens», qui voudrait entre autres développer l'école privée, augmenter l'implication du secteur privé dans le système de santé, punir les bénéficiaires de l'aide sociale et éliminer la réglementation sur la santé et la sécurité au travail. Mais la classe dirigeante doute véritablement qu'il reste suffisamment de crédibilité aux conservateurs pour qu'ils puissent continuer à imposer leur programme radical de droite étant donné l'opposition importante de la classe ouvrière.

Dans un éditorial cette semaine, le Globe and Mail, le porte-parole traditionnel des financiers de Bay Street à Toronto, écrivait qu'étant donné les témoignages selon lesquels les conservateurs ont ignoré « des avertissements urgents de certains des hauts fonctionnaires les plus importants et les plus respectés ... M.Harris doit expliquer » pourquoi il ne porte pas « une part de responsabilité » pour les morts de Walkerton.

John Ibbitson, du Globe and Mail, un idéologue de la droite, a même été plus direct, déclarant que les avertissements du Dr Richard Schabas, alors responsable de la santé publique au ministère de la Santé de l'Ontario, constituant « l'arme du crime » qui établissait de façon concluante le « lien de cause à effet » entre les gestes du gouvernement et « l'échec d'imposer une réglementation qui a mené à Walkerton » : « La personne la plus importante du ministère de la Santé ... a dû écrire ses avertissements en lettres de feu dans le ciel pour alerter le ministre de l'Environnement du danger ... Les conservateurs ont été avertis. Ils ont ignoré les avertissements. Et il y a eu Walkerton.»

Avertissements ignorés

En 1997, le Dr Schabas a envoyé une note de service à son patron, le ministre de la Santé, dans lequel il faisait état de son inquiétude face aux plans des conservateurs de faire effectuer les tests sur la qualité de l'eau dans des laboratoires privés sans exiger que ces derniers informent les représentants locaux de la santé publique si les tests montraient une contamination, comme il était alors d'usage. La note de service de Schabas et un appel pour amender la nouvelle réglementation ont été envoyés par le ministre de la Santé, Jim Wilson, au ministre de l'Environnement, Norm Sterling. Mais Sterling a ignoré l'avertissement et déléguait le dossier à un comité technique. À la même époque, Sterling travaillait en collaboration étroite avec la Commission de réduction des formalités administratives (mieux connu sous le nom de « Red Tape Commission ») que les conservateurs avaient mise sur pied pour éliminer de façon draconienne les réglementations provinciales.

Dans son témoignage lors de l'enquête publique sur la tragédie de Walkerton, le Dr Schabas a déclaré cette semaine que le gouvernement conservateur a ignoré ses appels très clairs pour des règles plus strictes en de nombreuses occasions. « Selon moi, c'était un gouvernement qui avait un mépris réel pour les institutions publiques, et qui méprisait des gens qui travaillait dans les institutions publiques » a-t-il dit.

Schabas a décrit comment il avait été empêché de participer à une réunion du cabinet ministériel en 1997 à laquelle il avait été délégué par Wilson pour s'opposer au plan du gouvernement de mettre les municipalités en charge de tout le financement des conseils de la santé publique (traditionnellement, la province était responsable de 75 pour cent des coûts). À son arrivée, un adjoint du premier ministre a demandé à Schabas de quitter la réunion. « Le premier ministre ne veut pas de vous ici pour cette discussion », l'adjoint lui aurait-il dit. Schabas a témoigné qu'il s'était alors tourné vers le premier ministre pour vérifier si vraiment on lui ordonnait de partir. « Le premier ministre m'a regardé ... et s'est retourné. En ce qui me concerne, le premier ministre venait de tourner le dos à la santé publique. » Schabas fut tellement outré par l'attitude des conservateurs quant à la santé publique qu'il a démissionné en 1998.

Brenda Elliot, qui était ministre de l'Environnement en 1996 lorsque les conservateurs ont sabré le budget de ce ministère de près de moitié et privatisé les tests sur l'eau potable, a aussi témoigné devant la commission d'enquête cette semaine. Elliott, qui est aujourd'hui ministre des Affaires intergouvernementales, a déclaré qu'elle n'avait pas connaissance qu'au moins dix documents provenant de son ministère l'avertissait que ses importantes coupes représentaient un danger sérieux pour l'environnement et la santé public. Dans un de ceux-ci, qui fut envoyé aux plus importants membres du cabinet, y compris le premier ministre Harris, il était écrit que « le risque pour la santé humaine et l'environnement pourrait devenir plus important en conséquence de gestes inappropriés ou illégaux qui ne seront ni détectés, ni contrôlés ».

Lorsqu'on lui demanda pourquoi le gouvernement avait décidé de privatiser les tests de l'eau potable en deux mois plutôt qu'en deux ou trois ans comme le lui suggéraient les représentants du ministère, Elliot n'a pu offrir d'explication. « Je ne peux me rappeler spécifiquement pourquoi il aurait fallu que ça se passe ainsi. »

Le témoignage de l'ancien ministre de l'Environnement, Norm Sterling, a montré à plusieurs reprises combien le gouvernement était indifférent aux questions de sécurité publique. Sterling a admis qu'il n'avait en fait jamais lu la lettre d'avertissement que lui avait fait parvenir son collègue, le ministre de la Santé Wilson, qu'il n'avait pas lu la nouvelle réglementation ontarienne sur l'eau potable et qu'il n'avait même pas connaissance que la transmission des résultats inquiétants était volontaire et non obligatoire en vertu d'une loi. Il a insisté, néanmoins, qu'il avait été assuré par des fonctionnaires de haut niveau, qu'il n'a pas identifiés, que la privatisation et l'élimination de la moitié du personnel de son ministère ne représenteraient aucun risque pour la sécurité publique.

Plusieurs des récents témoignages ont révélé combien la Commission de réduction des formalités administratives, une agence gouvernementale établie avec le but plus ou moins avoué de s'assurer que les réglementations provinciales seraient réécrites à la satisfaction de la grande entreprise, a tout fait pour empêcher toute tentative de garder des règlements cruciaux en environnement et en santé.

Conservateurs sans remords.

Ce n'est qu'après un tollé général de la population que les conservateurs ont mis en place la commission d'enquête sur la tragédie de Walkerton l'été passé. Son mandat exclut de trouver qui est responsable pour cette tragédie, encore bien moins de faire un bilan objectif du programme conservateur de privatisations, de déréglementation et de démantèlement des services et des programmes sociaux publics. Les commissions royales sont la façon habituelle par laquelle les gouvernements au Canada résolvent leurs difficultés. L'enquête actuelle ne fait pas exception et, en fait, on s'attend à ce qu'elle prenne au moins deux ans avant qu'elle rende ses recommandations publiques.

Néanmoins, il filtre des informations laissant croire que les conservateurs n'ont pas fourni tous les documents de gaieté de coeur à la Commission. Plus tôt au cours du mois, la Gendarmerie royale du Canada a effectué sa deuxième perquisition aux bureaux du premier ministre Harris cette année au nom de la Commission d'enquête sur Walkerton.

Comme aux premiers jours de la tragédie, Harris continue à nier que lui-même ou son gouvernement aient la moindre responsabilité dans la crise de Walkerton, disant que son cabinet n'avait jamais eu aucune raison de croire que ses gestes pouvaient mettre la population en danger.

D'autres conservateurs importants ont adopté la même ligne. Brenda Elliot a été particulièrement évasive lorsqu'on lui a demandé si elle devait être considérée responsable si jamais il devait être trouvé que son gouvernement ait contribué aux morts de Walkerton. Elle a d'abord commencé à suggérer que le cabinet devait prendre collectivement la responsabilité, pour ensuite dire que tous les membres de la législature étaient responsables, même ceux qui avaient voté contre le programme de compressions budgétaires massives et de réductions d'impôts pour les biens nantis du gouvernement conservateurs.

En réponse aux demandes de la population pour une plus grande protection de l'eau potable de la province, une nouvelle loi a été écrite par le ministre de l'Agriculture, Brian Coburn, qui établira les règles sur la façon de disposer du fumier dans les fermes industrielles. Alors que les partis d'opposition ont appuyé le gouvernement sur cette question, ils ont souligné que le financement était insuffisant pour s'assurer que les règles étaient bien suivies.

Où est l'opposition ?

Lorsque l'on tire les conclusions politiques de l'expérience amère des événements de Walkerton, plusieurs questions sont soulevées. Pourquoi le gouvernement Harris n'a pas rendu publiques toutes les informations sur l'impact de leurs politiques sur l'eau potable l'été dernier, alors qu'il était clair que les décisions du gouvernement avaient contribué aux événements de Walkerton ? À quelle sorte de justice pouvons-nous nous attendre même si l'enquête publique trouvait que le gouvernement a joué un rôle dans la tragédie de Walkerton ? Combien d'autres sacrifices humains les conservateurs sont-ils prêts à demander pour aller de l'avant avec leur politique du libre marché ?

Il est indéniable que la crise de Walkerton représente la plus grande condamnation à ce jour du programme des conservateurs de se décharger de ses responsabilités sociales pour les laisser entre les mains du profit. Néanmoins, les conservateurs sont toujours au pouvoir et au cours des derniers mois ont augmenté leur poussée pour privatiser des secteurs comme la santé et l'éducation.

Malgré les condamnations indignées des conservateurs sur la question de Walkerton, ni le NPD social-démocrate, ni le Congrès du travail d'Ontario, n'ont fait quoique ce soit pour faire tomber ce gouvernement. Comment, à la lumière des preuves qui montrent les immenses dangers du programme des conservateurs et de leur grande impopularité, est-il possible qu'ils aient pu continuer et en fait approfondir leurs attaques ? La réponse se trouve chez ce qu'on appelle la direction de la classe ouvrière.

Voir aussi:


 

Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés