wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

Escalade de la guerre civile au Burundi

Par John Farmer et Chris Talbot
17 avril 2001

Des combats intenses se déroulent autour de la capitale Bujumbura entre l'armée dominée par les Tutsis et les rebelles hutus du FNL (Forces nationales de libération). Fin février, le FNL a effectué sa plus grande incursion au Burundi depuis le début de la guerre civile qui en est à sa huitième année. Les rebelles sont parvenus à défendre Kinama, une banlieue nord de Bujumbura, pendant plus de trois semaines et poursuivent leurs attaques contre l'armée à la périphérie de la capitale. Plus de 200 habitants ont été tués pendant l'offensive et des milliers D'autres ont dû fuir.

Des combats ont également éclaté dans les provinces centrales de Gitega et Mwaro avec l'autre grand groupe rebelle hutu, les Forces pour la Défense de la Démocratie (FDD). On estime à 15 000 le nombre de réfugiés qui ont fui les combats dans cette région.

Un rapport du 13 avril du réseau de nouvelles IRIN des Nations unies affirme que selon «des sources informées» à Bujumbura, une «vaste offensive rebelle» serait en voie de préparation contre la capitale. Le rapport laisse entendre que les combats au Gitega avaient pour but d'ouvrir une route vers l'ouest pour faciliter l'arrivée de 10 000 rebelles de plus en provenance de la République démocratique du Congo (RDC) qui viendraient s'ajouter aux 8 000 qui sont déjà dans le pays. Les forces rebelles comprennent non seulement le FDD mais aussi l'Interahamwe, la milice rwandaise hutu dont nombre de combattant ont perpétré le génocide au Rwanda en 1994 et qui opèrent depuis en RDC.

D'autres rebelles ont fait leur jonction avec le FNL au nord de la capitale. Le rapport de l'IRIN décrit les rebelles comme bien armés. Un autre rapport datant du 12 avril décrivait l'« infiltration massive du FDD depuis la Tanzanie dans la province orientale Ruyigi ». Des milliers de réfugiés hutus se trouvent en Tanzanie, et le gouvernement de ce pays hostile au régime du président Buyoya au Burundi ferme les yeux sur le recrutement de rebelles dans les camps de réfugiés.

La guerre civile au Burundi a commencé en 1993 suite à l'assassinat du premier président hutu depuis l'indépendance, Melchior Ndadaye. Contrairement au Rwanda voisin, où les Hutus ont pris le pouvoir après l'indépendance, le Burundi, où les Tutsis sont minoritaires, a été gouverné par un régime de cette ethnie depuis son indépendance acquise de la Belgique en 1962, hormis pendant une courte période de quatre mois. Tout comme au Rwanda voisin, les divisions ethniques de ce petit pays ont été encouragées par l'autorité coloniale en donnant tous les postes privilégiés aux Tutsis. Depuis 1993, 200 000 civils sont morts suite aux assauts rebelles qui font rage dans les campagnes. Majoritairement hutue, la population subit également des représailles de l'armée de Buyoya qui la tient pour responsable de cacher des rebelles. Des centaines de milliers de personnes sont devenues réfugiés et beaucoup ont été entassées dans des camps gouvernementaux où elles sont confrontées à un manque de nourriture du fait que les organisations d'aide humanitaire ne peuvent les atteindre.

Bien qu'il y ait des conflits ethniques au Burundi depuis des années dans lesquels des milliers de personnes ont trouvé la mort, ces conflits n'ont pas encore atteint un degré semblable à ce qui s'est passé au Rwanda. Cependant, avec l'aggravation de la guerre, la possibilité d'assister à un nouveau bain de sang ethnique augmente de plus en plus.

Depuis 1998, les tentatives pour arriver à un accord de paix ont continué à Arusha en Tanzanie sous les auspices de l'ancien président de l'Afrique du Sud, Nelson Mandela. Suite à des pressions considérables exercées par l'Occident, un accord a été signé en août dernier. En présence du président américain d'alors, Bill Clinton, sept partis hutus et dix partis tutsis, ainsi que le gouvernement, ont accepté de former un régime de transition en attendant la tenue d'élections démocratiques. Mais les accords d'Arusha ne reposaient sur rien de solide. Le FDD et le FNL ont refusé d'y participer, et comme l'Africa Confidential a commenté : « Aucune des questions clés ­ nouvelle constitution, structure du partage des pouvoirs et réforme de l'armée et des services de sécurité ­ n'a été acceptée par l'ensemble ou même par une simple majorité des factions militaires et politiques qui s'opposent au Burundi.

L'escalade de la guerre au Burundi est le résultat direct de la récente initiative soutenue par les puissances occidentales pour obtenir un accord mettant fin à la guerre du Congo. Les rebelles du Burundi et l'Interahamwe rwandaise, deux forces comptant plusieurs dizaines de milliers de combattants, forment la plus grande partie de l'armée de la RDC. Avec un moral nettement supérieur à celui de la majorité des troupes congolaises, ces forces se sont regroupées et ont repris l'entraînement, liant ainsi inextricablement la guerre du Congo au conflit de son minuscule voisin, le Burundi. Il est probable qu'elles aient reçu le soutien de partisans en France et en Belgique qui n'ont jamais accepté le régime actuel pro-américain au Rwanda.

Après l'assassinat du président de la RDC, Laurent-Désiré Kabila, en janvier dernier et l'installation de son fils Joseph, les grandes puissances occidentales ont insisté pour que l'accord de paix de Lusaka signé en 1999 et chapeauté par l'ONU soit renouvelé pour ainsi mettre fin la guerre du Congo. Joseph Kabila s'est rendu dans diverses capitales occidentales pour exprimer sa volonté de participer à l'initiative soutenue par les États-Unis et il s'est entretenu avec les sociétés minières à propos de l'accès aux énormes richesses en minerai du pays.

Au cours des dernières semaines, les pays engagés dans la guerre ­ l'Angola et le Zimbabwe soutenant le régime de la RDC d'un côté, et le Rwanda et l'Ouganda soutenant les forces rebelles de l'autre ­ ont accepté de retraiter de leurs positions sur le front. En mai, l'ONU devrait envoyer une délégation de huit personnes (menée par l'ambassadeur de France et comprenant notamment les ambassadeurs des États-Unis et du Royaume-Uni) en RDC et dans les autres pays qui participent au conflit pour évaluer dans quelle mesure le cessez-le-feu est respecté. Jusqu'à 500 observateurs militaires et 2 500 militaires seront envoyés par les Nations Unies pour surveiller le retrait.

L'une des questions essentielles à négocier dans ces accords au Congo est celle des milices hutues. Selon les accords de Lusaka, les milices sont considérées comme des « forces négatives » devant être désarmées, ne prenant aucune part dans les négociations de paix et ne jouant aucun rôle dans le dialogue politique proposé sur la façon dont le Congo doit être gouverné. Mais au Burundi, les milices sont considérées comme partie intégrante des négociations de paix malgré leur refus de participer aux pourparlers d'Arusha. Début avril, le vice-président sud-africain, Jacob Zuma, qui remplace Mandela dans les négociations, a rencontré à Kinshasa le dirigeant du FDD, Jean-Bosco Ndayikengurukiye. Aucun d'eux n'a voulu révéler le contenu de leur discussion. Il est aussi probable qu'il ait été question lors de la visite en mars du président du Zimbabwe, Robert Mugabe, en France et en Belgique du rôle de l'Interahamwe. Il semble que leur quartier général serait près de Lubumbashi, dans le Katanga, une région dans le sud du Congo riche en ressources minières. L'Interahamwe recevrait le soutien et un entraînement militaire du régime zimbabwéen.

Le président Buyoya redoute assurément la pénétration en masse des forces hutues au Burundi. Malgré les critiques faites par les partis tutsi, il a tenté de forger une alliance avec le FDD, indépendamment du processus d'Arusha. Lors d'un récent discours, il a annoncé qu'en dépit de l'accord de Lusaka soutenant que les « forces négatives » sont responsables de crimes de guerre, « nous sommes conscients du fait que ni les Zimbabwéens ni les Congolais ne désarmeront leurs alliés d'hier dans l'ancienne guerre civile zaïroise. Nous devons donc défaire militairement nos propres rebelles ou nous assurer d'arriver à un accord de paix au moyen d'un dialogue national ».

  •  


 

Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés