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Le premier ministre du Canada accuse l'opposition d'aider les terroristes


Par Keith Jones
11 février 2002

Le premier ministre canadien Jean Chrétien a taxé ses opposants parlementaires de « défenseurs » de terroristes parce qu'ils ont critiqué la complicité de son gouvernement avec le gouvernement américain dans le traitement illégal des prisonniers Talibans et combattants d'Al-Qaïda. Les troupes canadiennes en Afghanistan livrent tous les Talibans ou les membres d'Al-Qaïda qu'ils capturent aux mains de l'armée américaine même si les États-Unis refusent de les traiter en tant que prisonniers de guerre. La remise des prisonniers aux Américains est en contradiction directe avec les engagements du Canada pris sous la convention de Genève qui assurent aux prisonniers capturés par les Forces Armées Canadiennes (FAC) le statut de prisonnier de guerre. Ceci viole également la loi canadienne. Mais le gouvernement libéral Chrétien a choisi de rejeter ces lois et, ainsi, ils s'assurent du fait que les États-Unis continueront de permettre aux Forces Armées Canadiennes de jouer un rôle actif dans les opérations militaires en Afghanistan.

Mercredi dernier, en réponse à la suggestion du chef du Bloc Québécois Gilles Duceppe que le gouvernement a été « imprudent » en permettant le transfert des prisonniers sans avoir obtenu « l'assurance que les Américains respecteraient la convention de Genève », Chrétien rétorqua : « Ce n'était pas imprudent pour le gouvernement, dans le cadre de la guerre au terrorisme, de se mettre du côté des personnes attaquées, et ne pas devenir des défenseurs de terroristes, comme le Bloc Québécois. »

Les quatre partis à l'opposition ont tous protesté contre les déclarations de Chrétien, mais le premier ministre a refusé de se rétracter. En effet, la journée suivante, il a fait des commentaires non moins provocants, allant jusqu'à dire que les questionnements de l'opposition sur les actes du gouvernement canadien envers les prisonniers de guerre minaient la morale militaire. Chrétien a dit : « Pendant que je vois des soldats qui, dans la semaine à venir, feront face à des ennemis dans une situation de guerre, leurs familles voient au Canada un Parlement qui est seulement intéressé par l'autre côté de la médaille [et non] par la lutte au terrorisme. » Chrétien a traité ses opposants parlementaires de « défenseurs de terroristes » pour les intimider et les faire taire. Il a également utilisé ceci pour rappeler à l'ordre les membres de son propre parti.

Durant le dernier mois, le problème des prisonniers de guerre a été une source majeure de controverses à l'intérieur du parti libéral et dans les hautes sphères de la fonction publique. À la mi-janvier, un officiel du Département de la Défense a déclarer au Globe and Mail qu'il serait possible que le Canada soit contraint à appliquer ses obligations de la Convention de Genève et, ainsi, à reprendre ses prisonniers de guerre livrés aux Américains jusqu'à ce que ceux-ci acceptent de les traiter en tant que prisonniers de guerre. En moins de 24 heures, le ministre de la défense Art Eggleton a catégoriquement contredit son officiel, en affirmant qu'il n'y a aucune installation pour garder des prisonniers de guerre en Afghanistan et en soutenant ­malgré l'insistance des États-Unis qu'ils ne traiteront pas les détenus en tant que prisonniers de guerre- que « les États-Unis ont dit qu'ils appliquent présentement la Convention de Genève. »

Conséquemment, des députés ont défié le point de vue d'Eggleton que les États-Unis remplissaient ses obligations de la Convention de Genève en accordant aux prisonniers le statut de prisonnier de guerre. Les députés ont averti que le gouvernement établissait un dangereux précédent en soutenant le crime que les États-Unis commettent en se moquant des lois internationales.

Ensuite, le 28 Janvier, lorsque des journalistes ont demandé à Chrétien si le Canada remettrait les combattants capturés aux Américains, il a écarté la question en disant qu'elle était « hypothétique », en ajoutant que tous les prisonniers pris en charge par le Canada seraient traités selon les lois internationales. Suite à cela, il est apparu que les Forces Armées Canadiennes avaient déjà livré au moins un groupe de prisonniers à l'armée américaine, mais Chrétien ­selon lui et Eggleton- n'avait pas été informé de cela, parce que le Ministère de la Défense n'avait pas réalisé les conséquences de la remise de leurs prisonniers aux américains. Aussi tard que le début de la semaine passée, le vice-premier ministre John Manley tentait encore de maintenir une certaine distance entre le Canada et les États-Unis sur le traitement des détenus. Manley a dit que le Canada cherchait encore à clarifier le statut et le traitement des prisonniers détenus par les Américains en Afghanistan et à la base de Guantanamo à Cuba.

Cependant, les déclarations de Chrétien ont démasqué de telles prétentions. Ceux qui ont le courage de critiquer la justesse et la légitimité du transfert des prisonniers de guerre aux Américains quand ceux-ci refusent de leur donner le statut de prisonniers de guerre ont été considérés comme des « défenseurs de terroristes » par le Premier Ministre.

Dans la mesure où le gouvernement canadien a continué à préconiser le respect du droit international tout en appuyant le refus des Américains d'accorder le statut de prisonniers de guerre à leurs détenus, c'est pour soutenir que des parties de la Convention de Genève sont désuettes. Mais le fondement de tout système de lois internationales n'est-il pas que les États n'ignorent pas et ne violent pas les clauses qu'elles considèrent dépassées, mais respectent les procédures établies pour une demande de modification?

Quant à l'opposition, ses critiques sont complètement hypocrites. Tous les partis d'opposition ont exprimé leur support pour la « guerre au terrorisme ». De plus, dans leur grande majorité, les représentants de l'opposition et les médias de la grande entreprise ont à peine contenu leur enthousiasme lorsqu'il a été annoncé que le gouvernement déploierait 750 soldats en Afghanistan qui iraient rejoindre les 50 membres des forces d'élite Canadiennes déjà sur place pour aider l'armée américaine à déterrer les derniers Talibans et combattants d'Al Qaïda. Avec ce déploiement, il est inévitable que les troupes canadiennes qui capturent des prisonniers les remettront aux mains de l'armé américaine.

Ce qui est à la source des inquiétudes de l'opposition sur les prisonniers de guerre est sa peur que, suite aux évènements du 11 septembre, le Canada soit entraîné dans un nouveau partenariat militaire avec les États-Unis qui finirait par limiter les capacités de l'élite canadienne à agir selon ses propres intérêts.

L'évolution de la politique gouvernementale de Chrétien sur la question des prisonniers de guerre est conforme avec ce qui s'est passé dans les derniers mois. Plusieurs fois, les Libéraux ont été attaqués par la droite et la grande entreprise pour ne pas avoir réussi à être sur la « ligne de front » de la lutte anti-terroriste et invariablement, après une période de confusion et d'ambiguïté, les Libéraux ont viré brusquement vers la droite et ont implanté ce que les critiques leur demandaient. Conséquemment, en octobre, les Libéraux ont annoncé que le Canada enverrait son plus large corps expéditionnaire depuis la Guerre de Corée pour supporter l'intervention américaine en Afghanistan. Ensuite, ils ont mis en place une série de lois anti-terroristes qui menacent les libertés civiques et annoncé qu'ils étaient prêts à travailler avec Washington pour harmoniser la politique d'immigration et de réfugiés. La dernière chose mais non la moindre est que le gouvernement Chrétien a rejeté une demande du gouvernement britannique de participer à ses opérations à Kaboul pour « préserver la paix », préférant utiliser ses troupes pour aider les États-Unis dans leur sanglante « pacification » du sud de l'Afghanistan.

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