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Côte d'Ivoire : des pourparlers pour ouvrir la voie aux troupes d'Afrique occidentale

Par Trevor Johnson
Le 1er novembre 2002

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La Côte d'Ivoire est toujours sur le point d'entrer dans une guerre civile brutale alors que se tiennent des pourparlers au Togo voisin et que les deux partis sont très éloignés d'un quelconque accord.

La France et les Etats-Unis sont tous deux très inquiets quant à la possibilité d'un conflit en Côte d'Ivoire qui pourrait déstabiliser la région pétrolifère de première importance d'Afrique occidentale. La France maintient sa force de 1.000 soldats jusqu'à ce qu'elle puisse être relayée dans sa tâche de maintien de l'ordre par l'ECOWAS, le groupe régional des états d'Afrique occidentale. Il est prévu que la force d'Afrique occidentale sera constituée de trois bataillons, comprenant en tout plus de 2.000 soldats.

Les leaders rebelles du MPCI (Mouvement Patriotique de Côte d'Ivoire) sont arrivés au Togo pour des pourparlers avec le gouvernement. Le président togolais, Gnassinghe Eyadema doit servir de médiateur pour la première partie des pourparlers. On s'attend à ce que les rebelles exigent la résiliation du président Laurent Gbagbo, de nouvelles élections, la fin des discriminations contre les musulmans ainsi que la réintégration des militaires qui avaient été congédiés de l'armée.

Plusieurs milliers de maisons dans la capitale, Abidjan, ont été rasées tandis que le gouvernement incitait à des agressions contre des supposés étrangers. Le 6 octobre, la chaîne de télévision publique a fait porter la responsabilité de la rébellion sur les immigrés originaires du Burkina Faso, et a affirmé que la seule solution pour parvenir à une victoire serait l'expulsion du pays des 2,3 millions d'immigrants burkinabe.

Plus tard, les porte-parole du gouvernement ont pris leur distance par rapport à ces déclarations diffusées. La France et plusieurs pays d'Afrique occidentale ont conseillé vivement au gouvernement d'arrêter ses attaques contre les étrangers.

L'apparition de conflits ethniques dans un pays qui était, jusqu'à très récemment, considéré comme un des pays les plus stables de la région est un symptôme politique du déclin économique de la Côte d'Ivoire. Depuis 1993, le produit national brut a diminué de plus de 20%. Après la mort du président Houphoüet-Boigny, le président autocratique qui a pris le pouvoir après l'indépendance d'avec la France en 1960, les factions rivales sont entrées en conflit encore plus aigu pour contrôler le pays ainsi que pour se répartir ses richesses en déclin.

Le groupe du Sud dominant qui entoure Gbagbo a introduit le concept d' « Ivoirité » (c'est-à-dire une nationalité ivoirienne réelle) et ils ont classé en « allogènes » les nombreux immigrés des états voisins ou les personnes originaires d'autres régions du pays. De tels qualificatifs racistes ont été utilisés lors des élections de 2000 afin d'écarter les candidats originaires du Nord musulman, comme par exemple l'ancien premier ministre et principal leader de l'opposition, Allassane Dramane Ouattara.

Les pourparlers font suite à l'échec du gouvernement de venir à bout sur le plan militaire de la rébellion. Les 6 et 7 octobre, les troupes loyalistes ont mené une attaque contre la ville de Bouaké, qui était aux mains des rebelles, mais ils ont été repoussés. Le 15 octobre, les troupes gouvernementales ont chassé les rebelles de Daloa, la capitale de la région productrice de cacao. Il a été rapporté que des troupes angolaises et des véhicules blindés ont pris part à l'attaque, mais l'Angola a nié toute implication dans celle-ci.

La France a jusqu'alors refusé d'augmenter son soutien militaire au gouvernement Gbagbo. Suite à la demande de Gbagbo, la France a accepté d'instaurer une zone tampon entre les rebelles qui contrôlent la plus grande partie du nord du pays et les troupes gouvernementales qui contrôlent la partie la plus importante du pays. Mais le ministre français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, a prévenu Gbagbo que si les attaques contre les étrangers continuaient, même ces troupes pourraient être rappelées.

Même après la signature du cessez-le-feu, le 17 octobre, un groupe d'hommes en uniforme militaire ont saccagé une station de radio appartenant à Hamed Bakayoko, un proche du leader de l'opposition Alassane Ouattara. Bakayoko possède également le journal Le Patriote, dont les bureaux avaient saccagés la veille.

Ouattara a cherché refuge à l'ambassade de France. Le 22 octobre, des soldats français ont envoyé du gaz lacrymogène et ont lancé des canons à eau sur des milliers de supporters gouvernementaux qui essayaient de violer l'enceinte de l'ambassade afin de tuer Ouattara.

Bien que la France prétende apporter son soutien au gouvernement de Gbagbo, il est évident que les relations sont assez tendues. La BBC a rapporté que « l'ambassadeur de France a continué à lire son journal et a refusé de se lever quand le président Laurent Gbagbo a fait son entrée dans la pièce au cours du sommet de mercredi ».

Afin de déterminer la ligne de conduite de la France dans la crise actuelle, le premier élément à considérer sera de développer au maximum le commerce et les profits de la France. Des sociétés françaises comme TotalFinaElf ont été parmi les principaux bénéficiaires des privatisations menées par les gouvernements soutenus par la France. Les trois quarts du secteur économique public d'activité ont maintenant été privatisés.

Les conflits actuels ont causé des bouleversements importants dans le secteur commercial non seulement en Côte d'Ivoire même, mais également dans les pays enclavés comme le Burkina Faso et le Mali, dont les principales routes pour l'exportation et l'importation sont barrées depuis l'insurrection militaire du 19 septembre. Le 11 octobre dernier, le Financial Times a rapporté que le conflit « a secoué les investisseurs » et que les obligations Brady ivoiriennes « se négocient maintenant à 18% de leur valeur nominale ».

Tandis que les troupes loyalistes contrôlent actuellement le Sud du pays ­ région qui abrite les entreprises les plus importantes soutenues par l'occident ainsi que l'important secteur de production de cacao - le voisinage immédiat des forces rebelles avec la ville de Daloa, productrice de cacao, est considéré comme une menace capitale pour la stabilité du pays.

Suite aux récentes élections françaises qui ont amené le retour au pouvoir de Chirac et de son parti , la Côte d'Ivoire est considérée comme un test pour savoir si la France va retourner à sa politique antérieure en Afrique ­ un mélange de corruption et de force militaire. L'intention de la France de recourir à la force militaire a été signalée par l'annonce d'une augmentation de ses dépenses en équipement militaire, les portant à 14 milliards de dollars par an pour les six prochaines années. Cette augmentation peut s'expliquer en partie par la volonté de rattraper le Royaume-Uni qui s'est déjà établi en Afrique occidentale.

Les choix français en Côte d'Ivoire sont compliqués par la domination de plus en plus importante des Etats-Unis en Afrique occidentale. Une force de l'ECOMOG, si elle était envoyée, sera dominée par des troupes du Nigeria, entraînées et partiellement financées par Washington.

Pour l'instant les Etats-Unis ont laissé la France prendre l'initiative en Côte d'Ivoire parce qu'ils n'ont aucun intérêt stratégique direct dans ce pays, qui ne possède pas de ressource pétrolière. Tandis que la Côte d'Ivoire s'embourbe de plus en plus dans des conflits de faction et que son économie est en chute il sera de plus en plus difficile d'établir et de maintenir un régime stable. Pour cette raison, il est possible qu'un des principaux rivaux des Etats-Unis en Afrique soit embourbé dans une guerre perdue d'avance dans son ancienne colonie. Cependant, il est également possible que, si une guerre civile en Côte d'Ivoire venait à menacer les régions pétrolifères de la côte ouest, les deux puissances impérialistes entrent, au moins indirectement, en conflit.

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