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Les atrocités perpétrées par l'armée des États-Unis et le choix moral qui se pose au peuple américain

Par David North et David Walsh
(Article original paru le 24 mai 2005)

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Le 23 mai, un éditorial du New York Times accusait le président des États-Unis, en même temps que d'autres membres de son administration, de graves crimes commis en Irak, en Afghanistan et à Guantanamo Bay.

L'éditorial «Patterns of Abuse» [Abus répétés] commence en rappelant un commentaire de Georges W. Bush selon qui la manière que pendra le gouvernement américain pour gérer la brutalité à la prison d'Abu Ghraib constituera un modèle de responsabilité et de transparence et que les responsables seraient punis. Ce fut une belle occasion pour une séance de photographies pour la presse, continue les éditeurs du Times, mais «Malheureusement, cette affirmation est entièrement fausse».

En d'autres mots, le président est un menteur.

L'éditorial publié conjointement avec une série en deux volets détaillant le meurtre horrifiant de deux Afghans à la prison de Bagram par des militaires américains, accuse l'administration d'avoir caché des rapports et d'avoir fait de l'obstruction lors d'enquêtes. De plus, «L'administration a empêché toute enquête sérieuse sur les dirigeants politiques à la Maison blanche, au département de la Justice et au Pentagone en orchestrant des enquêtes officielles pour qu'il soit impossible d'en arriver à la question centrale : comment les politiques pour les prisons ont-elles été formulées et comment ont-elles mené aux mauvais traitements.»

Le Times soutient que «ce qui s'est produit à Abu Ghraib n'était pas une aberration mais faisait plutôt partie d'un modèle largement répandu. On a pu ainsi voir l'impact tragique de la décision initiale de M. Bush et de ses plus importants conseillers de ne pas respecter la Convention de Genève, ou même le droit américain, pour les prisonniers capturés lors d'opérations antiterroristes.»

L'administration est alors coupable de crimes de guerre et contrevient au droit international.

Une politique qui rendait officiellement obligatoire de traiter les prisonniers humainement, mais seulement lorsque cela était en accord avec «la nécessité militaire», a conduit les interrogateurs à croire «qu'ils pouvaient s'écarter légèrement du règlement» et a créé une situation dans laquelle les «légers écarts de l'armée américaine incluaient les meurtres de prisonniers et la falsification des faits entourant leur mort».

Le Times, malgré le fait qu'il ne daigne pas l'affirmer, accuse le président, le vice-président, le secrétaire à la Défense et divers officiers militaires de donner leur sanction à la torture et au meurtre. Les faits sont clairs. En réalité, l'establishment politique et médiatique (incluant le Times lui-même) qui a endossé et supporté l'invasion de l'Irak est impliqué.

Tout le monde sait que les meurtres à Bagram et les mauvais traitements à Abu Ghraib ne sont que la partie visible de l'iceberg. On peut affirmer sans crainte d'être contredit que des crimes sont perpétrés quotidiennement en Irak, en Afghanistan et au camp d'internement américain à Cuba. S'il n'y a pas plus de ces atrocités qui sont révélées et si elles soulèvent si peu d'indignation, il n'y a pas d'autres explication pour cela que l'appui que trouvent de telles méthodes au sein de l'élite dirigeante américaine

La plus grande fiction, que les éditeurs du Times tentent de faire perdurer, est qu'il est possible de considérer le traitement véritablement sauvage réservé à des Afghans et Irakiens ordinaires indépendamment du caractère de la guerre dans son ensemble. Malgré la systématique cruauté meurtrière, faisant partie d'un «modèle largement répandu» selon les propres mots du journal, ces actions ne constituent que des imperfections dans une cause somme toute noble et démocratique.

Au contraire, les événements à Bagram nous fournissent le matériel le plus approprié pour évaluer le caractère de la politique américaine. Ils résument un des principaux objectifs du projet américain en Afghanistan et en Irak : terroriser les peuples coloniaux dont ils ont envahi le pays.

À partir du moment de leur conception, l'invasion et l'occupation de l'Asie centrale et du Moyen-Orient par les États-Unis ont dans tous les aspects constitués des entreprises criminelles. Les mensonges qui ont servi à justifier les conflits qui continuent encore à ce jour et les mensonges pour camoufler les crimes commis en leur nom ont la même source : la tentative par l'impérialisme américain d'amener le monde entier sous son emprise réactionnaire. La résistance, et même en certains cas la simple présence de la population conquise, sera opposée par la force brute.

Avant la guerre en Irak, toute enquête sérieuse aurait démontré que les affirmations de l'administration Bush sur le régime de Saddam Hussein étaient mensongères. Si un membre des medias américains ne le savait pas, c'est parce qu'il ou elle avait décidé de ne pas savoir. Ils ont tous participé au crime, de la «base» néo-fasciste du Parti républicain et de la presse d'extrême droite de Murdoch jusqu'à John Kerry, au Parti démocrate et aux «libéraux» Times et Washington Post.

Maintenant, les mensonges sont dévoilés au grand jour, comme il arrive toujours aux mensonges monstrueux, comme il arrive toujours particulièrement aux États-Unis. Les horreurs à Bagram et à Abu Ghraib confrontent le peuple américain à un choix moral difficile.

La première responsabilité, et le premier pas à faire pour s'attaquer au problème, est de dire la vérité sur l'état actuel des choses.

«L'honorable» armée américaine a été lâchée sur des gens sans défense au Moyen-Orient et en Asie, entraînant des conséquences horribles. Une bonne part de ce qui est ignoble et arriéré dans la société américaine a été cultivé et encouragé dans les forces armées, où furent invités ou produits un nombre considérable de sadiques, de psychopathes et, franchement, de pervers. Ceux-ci sont souvent les éléments les plus grossiers de la population, n'ayant rien reçu culturellement ou moralement, exposés aux influences les plus réactionnaires : le fondamentalisme religieux, le nationalisme, le culte du sang et des armes.

La description de la torture physique et psychologique des prisonniers à Bagram rend physiquement malade; et l'on retrouve encore et encore ce même genre de porno-sadisme dans les exploits de cette armée tout autour du monde!

Le personnel de l'administration est confiant qu'il n'aura jamais à rendre de comptes pour ses crimes. Cette confiance repose sur le fait qu'il y a un large consensus au sein de l'élite dirigeante pour appuyer ces actes. Les porte-parole du gouvernement et les experts libéraux comme Alan Dershowitz, Ted Koppel et Michael Ignatieff ont explicitement ou tacitement défendu la torture depuis les événements du 11 septembre 2001. L'authentique conscience démocratique s'est pratiquement désintégrée au sein des plus hauts échelons de la société américaine. Aujourd'hui, tout est permis.

L'argument que des méthodes barbares sont nécessaires pour combattre le «terrorisme» et soutirer des informations qui pourraient «sauver des vies», la revendication consacrée de tout régime autoritaire, est à la fois fallacieux et illégal, considérant particulièrement que le gouvernement des États-Unis détenait des renseignements considérables sur les détournements terroristes de 2001 et qu'il a refusé d'agir. En plus, cet argument ignore la réalité politique : la torture n'est jamais utilisée pour soutirer de l'information. Il s'agit plutôt d'un élément d'une politique globale qui vise à briser la volonté d'un mouvement de résistance ou d'une population. Ainsi était utilisée la torture par les autorités nazies et ainsi est elle utilisée aujourd'hui par l'armée américaine.

L'absence de dégoût généralisé et fortement exprimé face aux crimes en Afghanistan et en Irak est honteux. Cela démontre l'état d'avilissement de l'opinion publique américaine.

Il n'est pas difficile de trouver ce qui est responsable de cet état de fait. Les structures politiques complètement dominées et, en fait, muselées par la puissance des grandes entreprises ont pollué l'air. L'atmosphère souillée est le reflet au niveau politique et moral du fonctionnement du capitalisme américain dans les années 90 et 2000, alors que ce dernier a été gagné par le parasitisme, la corruption et la criminalité.

L'actuelle vague de politiciens est le produit inévitable de ces processus : des individus comme Rick Santorum, le sénateur catholique d'extrême droite de Pennsylvanie, considéré comme aspirant à la présidence républicaine de 2008. Un récent article paru dans l'édition dominicale du New York Times révélait que lorsque leur premier enfant, prématuré de plusieurs mois, mourut à la naissance, Santorum et sa femme, dans un acte que l'auteur commente timidement comme pouvant être considéré par certains comme «désagréable, étrange et même morbide», ont refusé de «laisser la morgue prendre le corps de leur nouveau-né; ils ont dormi cette nuit-là à l'hôpital avec leur enfant sans vie entre eux. Le jour suivant, ils l'ont ramené à la maison» pour que leurs autres enfants puissent le tenir dans leurs bras (« The Believer», 22 mai 2005). Cet individu a clairement besoin d'aide psychiatrique, pas d'un poste en politique.

Quant au dévouement aux intérêts de la grande entreprise, le Parti démocrate et ses sections dominantes ne le cèdent rien aux républicains. Le soi-disant mouvement ouvrier, les syndicats du AFL-CIO, constitue un des principaux coupables. Les bureaucraties syndicales ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour tuer toute conscience de classe, promouvoir le chauvinisme et créer un climat inhospitalier aux idées progressistes et humanistes. Nulle part ailleurs dans le monde capitaliste avancé la classe ouvrière ne fût laissée aussi désarmée face aux assauts de la grande entreprise et nulle part ailleurs le mouvement ouvrier officiel n'a laissé derrière lui un aussi grand désert culturel et politique.

Les médias d'extrême droite constituent une fosse de violence politique et de pornographie; la publication de photographies de Hussein en sous-vêtements dans le Sun et le New York Post, deux tabloïds appartenant à Murdoch, résume la mentalité de ces gens. La publication de ces photos, manifestement divulguées par l'armée américaine, constitue une violation de la Convention de Genève contre le traitement dégradant de prisonniers. Même les dirigeants nazis, coupables des plus grands crimes de l'histoire, bénéficiaient du respect de leurs droits fondamentaux par leurs ravisseurs.

Confronté à l'illégalité des photographies et à leur caractère incendiaire, Graham Dudman, directeur à la rédaction du Sun, a défendu avec vocifération leur publication. «Elles constituent une série de photos d'actualité fantastiques et emblématiques. Je mets au défi n'importe quel journal, magazine ou station de télévision auquel on présenterait celles-ci de ne pas les publier.» Personne n'a relevé le défi.

La conception que de telles images, qui ont dégoûté l'opinion publique arabe et mondiale, vont porter un dur coup à l'insurrection anti-américaine en Irak en dit long sur la perte de contact avec la réalité qui domine l'esprit politique et militaire américain.

Pendant ce temps, intimidés et hypocrites, les médias libéraux retraitent continuellement face aux provocations de la droite. On pourrait affirmer que le Times, ce qui reste du libéralisme sur les réseaux de télévision et l'opinion de diverses sections du Parti démocrate constituent l'expression figée d'une telle retraite. Convaincue que l'extrême droite est invincible, que la population est désespérément réactionnaire, la presse libérale donne un mètre pour chaque millimètre que prend la droite. Cette dernière a l'avantage présentement, surtout par défaut.

Il existe un grand dégoût, tel qu'en rende compte les conversations privées qu'on peut surprendre accidentellement dans la rue, mais les gens gardent généralement ceci pour eux-mêmes. Vers qui devraient-ils se tourner ? L'establishment politique, et toute section de celui-ci, est imperméable à tous sentiments et préoccupations populaires véritables.

Des politiciens noirs et hispaniques, encore comiquement surnommés «leaders des droits civiques» ainsi que d'autres sections de la classe moyenne «radicale» et libérale d'après les années 70, ont profité de l'argent facile de la bourse et autres, s'enrichissant pendant que les centres urbains se délabrent et ressemblant à ce que l'on trouve au Tiers-monde.

L'industrie culturelle a joué son rôle honteux. Les films, la musique populaire et les jeux vidéo font la promotion ou, plutôt, incarnent la brutalité et la désensibilisation. Embrouillés par les événements, inconscients des réalités sociales et historiques, trop de gens se permettent d'être apaisés par les produits abrutissants de l'industrie du divertissement américaine.

Dans le monde de l'après 11 septembre, Hollywood adopte de plus en plus la torture et la revanche sanglante comme thèmes ou motifs clés, apportant ainsi une légitimité aux folies furieuses de Bush, Cheney, Rumsfeld et les autres. Le film d'action à grand succès typique est tout aussi indifférent face au nombre de morts que l'est le Pentagone.

Dans les explications idéologiques qu'ils offrent pour la subjugation coloniale des peuples «non civilisés», les médias américains adorent déclarer que «la vie vaut peu» à Bagdad, en Cisjordanie ou dans les montagnes de l'Afghanistan. La vie peut-elle y avoir moins de valeur que celle qu'elle possède dans la culture populaire américaine ? Le meurtre, la torture et d'autres formes de mutilations ne sont tout simplement pas pris au sérieux. Et ceci a un impact.

C'est la culture produite par le capitalisme américain en crise. Derrière tout cela, on trouve le déclin industriel, l'énorme inégalité sociale, l'indécente accumulation de richesses qui a été produite à un pôle de la société aux dépends des vies et des conditions de vie de tous les autres.

Des crimes épouvantables sont présentement commis en Afghanistan, en Irak et à Guantanamo au nom du peuple américain. La classe ouvrière doit choisir une voie différente, une politique différente, basée sur la solidarité, la compassion et la compréhension du besoin de reconstruction de la société sur une base socialiste.

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